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{{Infobox Écrivain
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| image = Thomas Stearns Eliot by Lady Ottoline Morrell (1934).jpg
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'''T. S. Eliot''', de son nom complet '''Thomas Stearns Eliot''' ({{date|26|septembre|1888}} - {{date|4|janvier|1965}}), est un [[poète]], [[dramaturge]] et [[critique littéraire]] [[États-Unis|américain]] naturalisé [[Royaume-Uni|britannique]]. Il a reçu le [[prix Nobel de littérature]] en [[1948]].
'''T. S. Eliot''', de son nom complet '''Thomas Stearns Eliot''', né le {{date de naissance|26|septembre|1888}} à [[Saint-Louis (Missouri)]] et mort le {{date de décès|4|janvier|1965}} à [[Londres]] est un [[poète]], [[dramaturge]] et [[critique littéraire]] [[États-Unis|américain]] naturalisé [[Royaume-Uni|britannique]]. Il a reçu le [[prix Nobel de littérature]] en [[1948]].


Il est d'abord proche de la [[modernité en poésie|modernité poétique américaine]] et du groupe formé autour d'[[Ezra Pound]], qui publie dans sa revue le poème d'Eliot ''[[La Chanson d'amour de J. Alfred Prufrock]]'' (1917), et à qui est dédié ''[[La Terre vaine]]'' (1922). Après sa conversion à l'[[anglicanisme]] et sa naturalisation britannique, il se tourne vers une écriture centrée sur la spiritualité, représentée notamment par ''[[Quatre Quatuors]]'' (1939-1942), qui lui vaudront le [[prix Nobel de littérature]] en 1948. Il écrit également sept pièces de théâtre et un grand nombre d'essais sur la poésie et sur des auteurs comme [[William Shakespeare]] et [[Ezra Pound]].
Il est d'abord proche de la [[modernité en poésie|modernité poétique]] américaine et du groupe formé autour d'[[Ezra Pound]], qui publie dans sa revue le poème d'Eliot ''[[La Chanson d'amour de J. Alfred Prufrock]]'' (1917), et à qui est dédié ''[[La Terre vaine]]'' (1922). Après sa conversion à l'[[anglicanisme]] et sa naturalisation britannique, il se tourne vers une écriture centrée sur la spiritualité, représentée notamment par ''[[Quatre Quatuors]]'' (1939-1942), recueil qui lui vaudra le [[prix Nobel de littérature]] en 1948. Il écrit également sept pièces de théâtre et un grand nombre d'essais sur la poésie et sur des auteurs comme [[William Shakespeare]], [[Dante Alighieri]] et [[Ezra Pound]].


== Biographie ==
== Biographie ==
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T. S. Eliot est né dans une famille aisée de [[Saint-Louis (Missouri)|Saint-Louis]] dans le [[Missouri (État)|Missouri]]. Son père, Henry Ware Eliot, était un homme d'affaires influent et sa mère, Charlotte Champe Stearns, fut enseignante avant d'écrire de la poésie. Thomas était leur dernier enfant ; ses parents avaient 44 ans quand il est venu au monde, ses sœurs avaient de 11 à 18 ans de plus que lui, son frère 8 de plus.
T. S. Eliot est né dans une famille aisée de [[Saint-Louis (Missouri)|Saint-Louis]] dans le [[Missouri (État)|Missouri]]. Son père, Henry Ware Eliot, était un homme d'affaires influent et sa mère, Charlotte Champe Stearns, fut enseignante avant d'écrire de la poésie. Thomas était leur dernier enfant ; ses parents avaient 44 ans quand il est venu au monde, ses sœurs avaient de 11 à 18 ans de plus que lui, son frère 8 de plus.


Son grand-père, William Greenleaf Eliot, était un pasteur [[Unitarisme (théologie)|unitarien]] qui s'installa à Saint-Louis quand elle n'était encore qu'une ville-frontière et qui participa à l'établissement de plusieurs des institutions municipales, dont l'[[université Washington à Saint-Louis]]. L'un de ses lointains cousins était Charles William Eliot, Président de l'[[université Harvard]] de [[1869]] à [[1909]], alors qu'un autre, Tom Eliot, était chancelier de l'[[université de Washington]].
Son grand-père, [[William Greenleaf Eliot]], était un pasteur [[Unitarisme (théologie)|unitarien]] qui s'installa à Saint-Louis quand elle n'était encore qu'une ville-frontière et qui participa à l'établissement de plusieurs des institutions municipales, dont l'[[université Washington de Saint-Louis]]. L'un de ses lointains cousins était Charles William Eliot, Président de l'[[université Harvard]] de [[1869]] à [[1909]], alors qu'un autre, Tom Eliot, était chancelier de l'[[université de Washington]].


=== Éducation ===
=== Éducation ===
De [[1898]] à [[1905]], Eliot est externe à la Smith Academy de St Louis, une classe préparatoire à l'[[Université Washington à Saint-Louis|Université Washington]], il y étudie les lettres, le latin, le grec, le français et l'allemand. Il fait un an à la {{Lien|langue=en|fr=Milton Academy}} dans le [[Massachusetts]], près de [[Boston]], où il fait la connaissance de [[Scofield Thayer]] qui publie plus tard son poème ''[[La Terre vaine]]'' (''{{Langue|en|texte = The Waste Land}}''). Il étudie à [[Harvard]] de [[1906]] à [[1909]], où il publie ses premiers poèmes dans la revue ''{{Langue|en|texte = The Harvard Advocate}}'' et où il se lie d'amitié avec [[Conrad Aiken]]. En [[1910]], il obtient son [[maîtrise (système universitaire anglo-saxon)|Master]], puis continue ses études à la [[Sorbonne]] à [[Paris]] ([[1910]]-[[1911]]), où il suit notamment les cours de [[Henri Bergson]] et d'[[Alain-Fournier]]{{Référence insuffisante}}. Il se lie alors d'amitié avec un jeune Français étudiant en médecine, féru comme lui de littérature et de poésie, [[Jean-Jules Verdenal]] (né en 1890 à Pau, mort en 1915 dans les Dardanelles) avec lequel il correspond lors de son retour aux États-Unis. Il part en effet pour Harvard et il y poursuit des études de [[philosophie]]. Il achève brillamment une thèse sur le philosophe hégélien [[Francis Herbert Bradley|Bradley]]. Il se passionne pour la [[Langues indo-aryennes|philologie indo-aryenne]] et le [[bouddhisme]].
De [[1898]] à [[1905]], Eliot est externe à la Smith Academy de St Louis, une classe préparatoire à l'[[Université Washington de Saint-Louis|Université Washington]], il y étudie les lettres, le latin, le grec, le français et l'allemand. Il fait un an à la {{Lien|langue=en|fr=Milton Academy}} dans le [[Massachusetts]], près de [[Boston]], où il fait la connaissance de [[Scofield Thayer]] qui publie plus tard son poème ''[[La Terre vaine]]'' (''{{Langue|en|texte = The Waste Land}}''). Il étudie à [[Université Harvard|Harvard]] de [[1906]] à [[1909]], où il publie ses premiers poèmes dans la revue ''{{Langue|en|texte = The Harvard Advocate}}'' et où il se lie d'amitié avec [[Conrad Aiken]]. En [[1910]], il obtient son [[Deuxième cycle universitaire|Master]], puis continue ses études à la [[Sorbonne]] à [[Paris]] ([[1910]]-[[1911]]), où il suit notamment les cours de [[Henri Bergson]] et d'[[Alain-Fournier]]{{Référence insuffisante}}. Il se lie alors d'amitié avec un jeune Français étudiant en médecine, féru comme lui de littérature et de poésie, [[Jean-Jules Verdenal]] (né en 1890 à Pau, mort en 1915 dans les Dardanelles) avec lequel il correspond lors de son retour aux États-Unis. Il part en effet pour Harvard et il y poursuit des études de [[philosophie]]. Il achève brillamment une thèse sur le philosophe hégélien [[Francis Herbert Bradley|Bradley]]. Il se passionne pour la [[Langues indo-aryennes|philologie indo-aryenne]] et le [[bouddhisme]].


En [[1914]], il obtient une bourse pour étudier au [[Merton College (Oxford)|Merton College]] d'[[Oxford]]. Il visite l'[[Allemagne]] et prévoit de faire un trimestre de philosophie à l'université de [[Marbourg]] pendant l'été, mais la [[Première Guerre mondiale]] éclate et il se rend au [[Royaume-Uni]]. Il n'est pas heureux au Merton College et décline une bourse de seconde année.
En [[1914]], il obtient une bourse pour étudier au [[Merton College (Oxford)|Merton College]] d'[[Oxford]]. Il visite l'[[Allemagne]] et prévoit de faire un trimestre de philosophie à l'université de [[Marbourg]] pendant l'été, mais la [[Première Guerre mondiale]] éclate et il se rend au [[Royaume-Uni]]. Il n'est pas heureux au Merton College et décline une bourse de seconde année.
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=== Période britannique ===
=== Période britannique ===
[[Fichier:T S Eliot Simon Fieldhouse.jpg|vignette|Dessin de Simon Fieldhouse.]]
[[Fichier:T S Eliot Simon Fieldhouse.jpg|vignette|Dessin de Simon Fieldhouse.]]
Dans une lettre à Conrad Aiken écrite en décembre [[1914]], Eliot se plaint d'être toujours vierge, ajoutant : {{citation|Je suis dépendant des femmes. Je veux dire de la compagnie des femmes.}} Quatre mois plus tard, il est présenté à Vivienne Haigh-Wood et ils se marient le {{date|26|juin|1915}}. En [[1960]], Eliot écrivit : {{citation|Je me suis convaincu d'être amoureux de Vivienne simplement parce que je voulais rester en Angleterre et me forcer à rester en Angleterre. Et elle s'est convaincue (sous l'influence de [[Ezra Pound|Pound]]) qu'elle pourrait sauver un poète en le forçant à rester en Angleterre. Le mariage ne lui a apporté aucun bonheur… À moi, il m'a mis dans un état d'esprit qui aboutira à ''The Waste Land''.}}
Dans une lettre à Conrad Aiken écrite en décembre 1914, Eliot se plaint d'être toujours vierge, ajoutant : {{citation|Je suis dépendant des femmes. Je veux dire de la compagnie des femmes.}} Quatre mois plus tard, il est présenté à Vivienne Haigh-Wood et ils se marient le {{date-|26|juin|1915}}. En 1960, Eliot écrivit : {{citation|Je me suis convaincu d'être amoureux de Vivienne simplement parce que je voulais rester en Angleterre et me forcer à rester en Angleterre. Et elle s'est convaincue (sous l'influence de [[Ezra Pound|Pound]]) qu'elle pourrait sauver un poète en le forçant à rester en Angleterre. Le mariage ne lui a apporté aucun bonheur… À moi, il m'a mis dans un état d'esprit qui aboutira à ''The Waste Land''.}}


Admirateur de [[Charles Maurras]], il fut déçu par sa condamnation par Pie XI en [[1926]] ; elle le détourna du catholicisme comme nombre de partisans de la [[High Church]]<ref>[[Stéphane Giocanti]], ''Maurras – Le chaos et l'ordre'', éd. Flammarion, 2006, p. 330.</ref>. En [[1927]], T.S. Eliot devient citoyen [[Royaume-Uni|britannique]] et se convertit à la [[Anglicanisme|religion anglicane]].
Admirateur de [[Charles Maurras]]<ref>{{Article|langue=en|auteur1=James Torrens|titre=Charles Maurras and Eliot’s ‘New Life.’|périodique=PMLA|volume=89|numéro=2|date=1974|lire en ligne=https://www-jstor-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/stable/461454|pages=312-322}}</ref>, il fut déçu par sa condamnation par Pie XI en 1926 ; elle le détourna du catholicisme comme nombre de partisans de la [[High Church]]<ref>[[Stéphane Giocanti]], ''Maurras – Le chaos et l'ordre'', éd. Flammarion, 2006, p. 330.</ref>. En 1927, T.S. Eliot devient citoyen [[Royaume-Uni|britannique]] et se convertit à la [[Anglicanisme|religion anglicane]].


Eliot se sépare de sa femme en [[1933]]. Elle le poursuit, adhère même à l'Union britannique des Fascistes dans l'espoir de gagner les faveurs de son époux qui avait exprimé son admiration pour [[Benito Mussolini|Mussolini]] et assiste à ses conférences pour lui demander de revenir à la maison. Elle fut internée dans un [[Hôpital psychiatrique|asile psychiatrique]] pendant les neuf dernières années de sa vie sans qu'Eliot vienne lui rendre visite.
Eliot se sépare de sa femme en 1933. Elle le poursuit, adhère même au [[British Union of Fascists]] (union britannique des fascistes) dans l'espoir de regagner les faveurs de son époux qui avait exprimé son admiration pour [[Benito Mussolini|Mussolini]] et assiste à ses conférences pour lui demander de revenir à la maison. Elle fut internée dans un [[Hôpital psychiatrique|asile psychiatrique]] pendant les neuf dernières années de sa vie sans qu'Eliot vienne lui rendre visite.


Son second mariage, bien que presque aussi court, fut heureux. Il épouse Esme Valerie Fletcher, sa secrétaire depuis août [[1949]] et qui est de trente-huit ans sa cadette, le {{date|10|janvier|1957}}. Valerie passa ses années de veuvage à préserver l'œuvre de son mari ; elle édite et annote ''les Lettres de T.S. Eliot'' ainsi que le fac-simile de ''The Waste Land''.
Son second mariage, bien que presque aussi court, fut heureux. Il épouse Esme Valerie Fletcher, sa secrétaire depuis août [[1949]] et qui est de trente-huit ans sa cadette, le {{date-|10|janvier|1957}}. Valerie passa ses années de veuvage à préserver l'œuvre de son mari ; elle édite et annote ''les Lettres de T.S. Eliot'' ainsi que le fac-simile de ''The Waste Land''.


Eliot meurt d'un [[Emphysème pulmonaire|emphysème]] à sa maison à [[Kensington (Londres)|Kensington]] à [[Londres]], le {{date|4|janvier|1965}}. Ses cendres sont déposées en l'église de Saint Michael dans le village de [[East Coker]] d'où les ancêtres d'Eliot étaient originaires avant d'émigrer aux États-Unis. Au deuxième anniversaire de sa disparition, une plaque commémorative est apposée au [[Coin des poètes]] dans l'[[Abbaye de Westminster]].
Eliot meurt d'un [[Emphysème pulmonaire|emphysème]] à sa maison à [[Kensington (Londres)|Kensington]] à [[Londres]], le {{date-|4|janvier|1965}}. Ses cendres sont déposées en l'église de Saint Michael dans le village de [[East Coker]] d'où les ancêtres d'Eliot étaient originaires avant d'émigrer aux États-Unis. Au deuxième anniversaire de sa disparition, une plaque commémorative est apposée au [[Coin des poètes]] dans l'[[abbaye de Westminster]].


== Son œuvre ==
== Son œuvre ==
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=== Poésie ===
=== Poésie ===
En [[1915]], [[Ezra Pound]], alors éditeur international du magazine ''[[Poetry (revue)|Poetry]]'', recommande, à sa directrice et fondatrice [[Harriet Monroe]], la publication de ''[[The Love Song of J. Alfred Prufrock]]'', où le jeune poète de vingt-sept ans a parfaitement réussi à capter les états d'âme d'un homme de quarante ans.
En [[1915]], [[Ezra Pound]], alors éditeur international du magazine ''[[Poetry (revue)|Poetry]]'', recommande, à sa directrice et fondatrice [[Harriet Monroe]], la publication de ''[[La Chanson d'amour de J. Alfred Prufrock]]'', où le jeune poète de vingt-sept ans a parfaitement réussi à capter les états d'âme d'un homme de quarante ans.


En octobre [[1922]], Eliot publie ''The Waste Land'' (''[[La Terre vaine]]'') dans la revue qu'il a fondée, ''The Criterion'' (1922-1939)<ref>T.S. Eliot, ''L’unité de la culture européenne Causerie {{n°|2}} [Sur ''The Criterion''], présentation par Pierre Malherbet, Paris : [[Ent'revues]], [http://www.entrevues.org/revue_sommaire.php?n=43 ''La Revue des revues'' {{numéro|43}}], 2009, {{p.}}3-13.</ref>. Ce poème, écrit au moment où Eliot souffre au niveau personnel et familial (son mariage va à vau-l'eau) entre en résonance avec les peines de l'époque et de la [[génération perdue]] qui revient de la [[Première Guerre mondiale]] ; il devient l'un des modèles de la nouvelle poésie britannique. Avant même sa publication en livre (décembre [[1922]]), T.S. Eliot prend ses distances avec le ton du poème qu'il juge par trop sombre : {{citation|En ce qui concerne ''The Waste Land'', c'est une chose du passé et je me sens tourné vers l'avenir et vers une nouvelle forme et un nouveau style}}, écrit-il à [[Richard Aldington]] en novembre de la même année.
En octobre [[1922]], Eliot publie ''The Waste Land'' (''[[La Terre vaine]]'') dans la revue qu'il a fondée, ''The Criterion'' (1922-1939)<ref>T.S. Eliot, ''L’unité de la culture européenne Causerie'' {{n°|2}} [sur ''The Criterion''], présentation par Pierre Malherbet, Paris : [[Ent'revues]], [http://www.entrevues.org/revue_sommaire.php?n=43 ''La Revue des revues'' {{numéro|43}}], 2009, {{p.}}3-13.</ref>. Ce poème, écrit au moment où Eliot souffre au niveau personnel et familial (son mariage va à vau-l'eau) entre en résonance avec les peines de l'époque et de la [[génération perdue]] qui revient de la [[Première Guerre mondiale]] ; il devient l'un des modèles de la nouvelle poésie britannique. Avant même sa publication en livre (décembre [[1922]]), T.S. Eliot prend ses distances avec le ton du poème qu'il juge par trop sombre : {{citation|En ce qui concerne ''The Waste Land'', c'est une chose du passé et je me sens tourné vers l'avenir et vers une nouvelle forme et un nouveau style}}, écrit-il à [[Richard Aldington]] en novembre de la même année.


En dépit de la forme complexe du poème, des changements brusques de narrateur, de temps, de lieux, en dépit des références nombreuses et élégiaques à d'autres cultures et d'autres religions, ''The Waste Land'' est devenu un phare de la littérature moderne dont certaines phrases sont entrées dans l'anglais courant : ''April is the cruellest month'' {{incise|« Avril est le mois le plus cruel »|stop}} ; ''I will show you fear in a handful of dust'' {{incise|« Je vais vous montrer la peur en une poignée de poussières »|stop}} ; ou ''Shantih shantih shantih''.
En dépit de la forme complexe du poème, des changements brusques de narrateur, de temps, de lieux, en dépit des références nombreuses et élégiaques à d'autres cultures et d'autres religions, ''The Waste Land'' est devenu un phare de la littérature moderne dont certaines phrases sont entrées dans l'anglais courant : ''April is the cruellest month'' {{incise|« Avril est le mois le plus cruel »|stop}} ; ''I will show you fear in a handful of dust'' {{incise|« Je vais vous montrer la peur en une poignée de poussières »|stop}} ; ou ''Shantih shantih shantih''.
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* ''Ara vos prec''
* ''Ara vos prec''
* ''[[La Terre vaine]]'', [[1922]] (''The Waste Land'')
* ''[[La Terre vaine]]'', [[1922]] (''The Waste Land'')
* ''{{Lien|langue=en|fr=The Hollow Men}}'', [[1925]]
* ''[[Les Hommes creux]]'' (''The Hollow Men''), [[1925]]
* ''Ash Wednesday''
* ''Ash Wednesday''
* ''Animula''
* ''Animula''
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* ''Notes Towards a Definition of Culture''
* ''Notes Towards a Definition of Culture''
* ''The Dark side of the Moon'', [[1947]]
* ''The Dark side of the Moon'', [[1947]]
* ''{{Lien|langue=en|fr=Old Possum's Book of Practical Cats}}'' (dont la comédie musicale ''[[Cats (comédie musicale)|Cats]]'' s'est inspirée)
* ''[[Old Possum's Book of Practical Cats]]'' (dont la comédie musicale ''[[Cats (comédie musicale)|Cats]]'' s'est inspirée)


=== Théâtre ===
=== Théâtre ===
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* ''[[L'Homme d'État âgé]]'' ; [[1958]] (''The Elder Statesman'')
* ''[[L'Homme d'État âgé]]'' ; [[1958]] (''The Elder Statesman'')


''Meurtre dans la cathédrale'' raconte la mort de [[Thomas Becket]], Eliot raconte qu'il a été influencé, entre autres, par les œuvres du prêcheur Lancelot Andrewes. Cette œuvre a été créée en France et mise en scène par [[Jean Vilar]] en 1945 au [[théâtre du Vieux colombier]] à Paris, puis au [[festival d'Avignon]]. On a aussi pu en voir une version télévisée en 1967 (en noir et blanc), avec [[Alain Cuny]] dans le rôle principal.
''Meurtre dans la cathédrale'' raconte la mort de [[Thomas Becket]], Eliot raconte qu'il a été influencé, entre autres, par les œuvres du prêcheur Lancelot Andrewes. Cette œuvre a été créée en France et mise en scène par [[Jean Vilar]] en 1945 au [[théâtre du Vieux-Colombier]] à Paris, puis au [[festival d'Avignon]]. On a aussi pu en voir une version télévisée en 1967 (en noir et blanc), avec [[Alain Cuny]] dans le rôle principal.


=== Autres ===
=== Autres ===
Eliot est choisi pour faire partie du comité pour une nouvelle traduction de la [[Bible]] en [[anglais]] moderne.
Eliot est choisi pour faire partie du comité pour une nouvelle traduction de la [[Bible]] en [[anglais]] moderne.

En 1930, il publie la traduction anglaise du poème Anabase de Saint John Perse, agrémentée d'une préface (Londres, Faber & Faber Ltd).


En [[1939]], il publie un livre de poésie pour enfants, ''Old Possum's Book of Practical Cats'' qui, après sa mort, fut utilisé dans la [[comédie musicale]] à succès, ''[[Cats (comédie musicale)|Cats]]'' d'[[Andrew Lloyd Webber]].
En [[1939]], il publie un livre de poésie pour enfants, ''Old Possum's Book of Practical Cats'' qui, après sa mort, fut utilisé dans la [[comédie musicale]] à succès, ''[[Cats (comédie musicale)|Cats]]'' d'[[Andrew Lloyd Webber]].


Eliot est cité dans un épisode (''[[L'Expérience Lazarus]]'') de la série SF ''[[Doctor Who]]'' : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas dans une explosion mais dans un murmure ».
Eliot est cité dans un épisode (''[[L'Expérience Lazarus]]'') de la série SF ''[[Doctor Who]]'' : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas dans une explosion mais dans un gémissement ».

Eliot est cité dans l'épisode 18 de la saison 5 de la série ''[[The Big Bang Theory]]'' : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas avec une explosion mais avec un neveu».

Eliot est cité au début de la série "Le Fléau" tiré du roman de Stephen King réalisée en 1994 avec Gary Sinise


Dans les films ''[[Love Song (film)|A love song for Bobby Long]]'' et ''[[Io (film)|IO]]'', respectivement [[John Travolta]] et [[Margaret Qualley]] citent T.S. Eliot : « Jamais nous ne cesserons notre exploration et le terme de notre quête sera d'arriver à l'endroit que nous avons quitté et de le percevoir tel qu'il est. »
Eliot est cité dans l'épisode 18 de la saison 5 de la série ''[[The Big Bang Theory]]'' : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas avec une explosion mais avec un neveu».


Le compositeur Igor Stravinsky a écrit en 1965 un ''Introitus à la mémoire de T.S. Eliot''.
Dans le film ''A love song for Bobby Long'', John Travolta cite T.S. Eliot : « Jamais nous ne cesserons notre exploration et le terme de notre quête sera d'arriver à l'endroit que nous avons quitté et de le percevoir tel qu'il est. »


La [[compositrice]] [[Russie|russe]] [[Sofia Goubaïdoulina]] a écrit en [[1987]] un ''Hommage à T.S. Eliot'' pour octuor et soprano.
La [[compositrice]] [[Russie|russe]] [[Sofia Goubaïdoulina]] a écrit en [[1987]] un ''Hommage à T.S. Eliot'' pour octuor et soprano.


Le groupe de [[metal progressif]] français [[Hord]] rend très largement hommage au poète dans ses concepts albums, ''The Waste Land'' (2010) et ''The Book of Eliot'' (avril 2013).
Le groupe de [[metal progressif]] français [[Hord]] rend très largement hommage au poète dans ses concepts albums, ''The Waste Land'' (2010) et ''The Book of Eliot'' ({{date-|avril 2013}}).


La lettre [[encyclique]] [[Lumen fidei]], du 5 [[juillet]] [[2013]], cite un poème d'Eliot dans lequel la [[foi]] est mise en relation avec l'existence d'une société éduquée : {{citation|Avez-vous peut-être besoin qu'on vous dise que même ces modestes succès / qui vous permettent d'être fiers d'une société éduquée / survivront difficilement à la foi à laquelle ils doivent leur signification<ref name=":0">48] « Choruses from The Rock » in The Collected Poems and Plays 1909-1950, New York http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20130629_enciclica-lumen-fidei.html</ref>.}}
La lettre [[encyclique]] [[Lumen fidei]], du {{date|5 juillet 2013}}, cite un poème d'Eliot dans lequel la [[foi]] est mise en relation avec l'existence d'une société éduquée : {{citation|Avez-vous peut-être besoin qu'on vous dise que même ces modestes succès / qui vous permettent d'être fiers d'une société éduquée / survivront difficilement à la foi à laquelle ils doivent leur signification<ref name=":0">48 « Choruses from The Rock » in The Collected Poems and Plays 1909-1950, New York http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20130629_enciclica-lumen-fidei.html</ref>.}}


Lors d'une scène de ''[[It Follows]]'' de [[David Robert Mitchell]] (2014), une professeure de littérature lit à voix haute le poème ''The Love Song of J. Alfred Prufrock''. Le passage cité est une méditation sur la mort imminente, ce qui pourrait faire écho au danger se rapprochant de Jay, l'héroïne du film d'horreur.
Lors d'une scène de ''[[It Follows]]'' de [[David Robert Mitchell]] (2014), une professeure de littérature lit à voix haute le poème ''The Love Song of J. Alfred Prufrock''. Le passage cité est une méditation sur la mort imminente, ce qui pourrait faire écho au danger se rapprochant de Jay, l'héroïne du film d'horreur.
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* ''La Terre gaste'', traduit par Michèle Pinson, lithographies de [[François Righi]], Le Tailleur d'images, 1995
* ''La Terre gaste'', traduit par Michèle Pinson, lithographies de [[François Righi]], Le Tailleur d'images, 1995
* ''Ezra Pound, sa métrique et sa poésie'', traduit par [[Philippe Blanchon]], [[Éditions de la Nerthe]], 2015
* ''Ezra Pound, sa métrique et sa poésie'', traduit par [[Philippe Blanchon]], [[Éditions de la Nerthe]], 2015
* ''Les hommes creux'', cinq poèmes traduits par Aurélien Galateau et François Heusbourg, tirage limité à 19 exemplaires, [[Éditions Unes]], 2015


== Récompenses ==
== Récompenses ==
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=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
* Helen Gardner : ''T.S. Eliot. Poésie et théâtre''. Seghers. 1975. (Traduction par Claude Guillot de : <nowiki>''</nowiki>The Art of T.S. Eliot<nowiki>''</nowiki>, 1968.
* Helen Gardner : ''T.S. Eliot. Poésie et théâtre''. Seghers. 1975. (Traduction par Claude Guillot de : ''The Art of T.S. Eliot'', 1968).
* Georges Cattaui : ''T.S. Eliot'', 1966
* Georges Cattaui : ''T.S. Eliot'', 1966
* Stéphane Giocanti : ''T.S. Eliot ou le monde en poussières'', Jean-Claude Lattès, 2002
* [[Stéphane Giocanti]] : ''T.S. Eliot ou le monde en poussières'', Jean-Claude Lattès, 2002
* Lyndall Gordon : ''T.S. Eliot, An Imperfect Life'', Norton, New-York, 1999
* Lyndall Gordon : ''T.S. Eliot, An Imperfect Life'', Norton, New-York, 1999
* Jean-Paul Rosaye : "T.S. Eliot poète-philosophe, essai de typologie génétique'', Presses Universitaires du Septentrion, 2000
* Jean-Paul Rosaye : ''T.S. Eliot poète-philosophe, essai de typologie génétique'', Presses Universitaires du Septentrion, 2000
* Pierre Vinclair : ''Terre inculte. Penser dans l'illisible'' : The Waste Land, Hermann, 2018.
* Pierre Vinclair : ''Terre inculte. Penser dans l'illisible'' : The Waste Land, Hermann, 2018.


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* {{en}} [http://www.std.com/~raparker/exploring/thewasteland/exjean.html Influence de Jean Verdenal dans l’œuvre de T. S. Eliot]
* {{en}} [http://www.std.com/~raparker/exploring/thewasteland/exjean.html Influence de Jean Verdenal dans l’œuvre de T. S. Eliot]
* {{Site Fondation Nobel |https://www.nobelprize.org/prizes/literature/1948/eliot/biographical/ |Autobiographie }}
* {{Site Fondation Nobel |https://www.nobelprize.org/prizes/literature/1948/eliot/biographical/ |Autobiographie }}
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T. S. Eliot
T. S. Eliot en 1934 par Lady Ottoline Morrell.
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Church of Saint Michael (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Thomas Stearns Eliot
Nationalités
américaine (jusqu'en )
britannique (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Domiciles
Missouri, Saint-Louis, Ash Street (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Activités
Période d'activité
à partir de Voir et modifier les données sur Wikidata
Père
Henry Ware Eliot (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Charlotte Champe Stearns (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Ada Eliot Sheffield (d)
Margaret Dawes Eliot (d)
Charlotte Eliot (d)
Marian Cushing Eliot (d)
Henry Ware Eliot (d)
Theodora Sterling Eliot (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoints
Vivienne Haigh-Wood Eliot (de à )
Valerie Eliot (en) (de à )Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
Membre de
Mouvement
Genre artistique
Poetry and Fiction
Influencé par
Distinction
Archives conservées par
Bibliothèque Beinecke de livres rares et manuscrits (YCAL MSS 523)
Bibliothèque nationale du pays de Galles (GBR/0272/HB)[1],[2]
Bibliothèques de l'université du Maryland (en) (0066-LIT)
Harry Ransom Center (en) (MS-01300)[3]
University of Victoria Special Collections and University Archives (d) (SC041)[4]
Bibliothèque Bodléienne (CMD ID 12459)[5]Voir et modifier les données sur Wikidata
Œuvres principales
signature de T. S. Eliot
Signature

T. S. Eliot, de son nom complet Thomas Stearns Eliot, né le à Saint-Louis (Missouri) et mort le à Londres est un poète, dramaturge et critique littéraire américain naturalisé britannique. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1948.

Il est d'abord proche de la modernité poétique américaine et du groupe formé autour d'Ezra Pound, qui publie dans sa revue le poème d'Eliot La Chanson d'amour de J. Alfred Prufrock (1917), et à qui est dédié La Terre vaine (1922). Après sa conversion à l'anglicanisme et sa naturalisation britannique, il se tourne vers une écriture centrée sur la spiritualité, représentée notamment par Quatre Quatuors (1939-1942), recueil qui lui vaudra le prix Nobel de littérature en 1948. Il écrit également sept pièces de théâtre et un grand nombre d'essais sur la poésie et sur des auteurs comme William Shakespeare, Dante Alighieri et Ezra Pound.

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille et enfance[modifier | modifier le code]

T. S. Eliot est né dans une famille aisée de Saint-Louis dans le Missouri. Son père, Henry Ware Eliot, était un homme d'affaires influent et sa mère, Charlotte Champe Stearns, fut enseignante avant d'écrire de la poésie. Thomas était leur dernier enfant ; ses parents avaient 44 ans quand il est venu au monde, ses sœurs avaient de 11 à 18 ans de plus que lui, son frère 8 de plus.

Son grand-père, William Greenleaf Eliot, était un pasteur unitarien qui s'installa à Saint-Louis quand elle n'était encore qu'une ville-frontière et qui participa à l'établissement de plusieurs des institutions municipales, dont l'université Washington de Saint-Louis. L'un de ses lointains cousins était Charles William Eliot, Président de l'université Harvard de 1869 à 1909, alors qu'un autre, Tom Eliot, était chancelier de l'université de Washington.

Éducation[modifier | modifier le code]

De 1898 à 1905, Eliot est externe à la Smith Academy de St Louis, une classe préparatoire à l'Université Washington, il y étudie les lettres, le latin, le grec, le français et l'allemand. Il fait un an à la Milton Academy (en) dans le Massachusetts, près de Boston, où il fait la connaissance de Scofield Thayer qui publie plus tard son poème La Terre vaine (The Waste Land). Il étudie à Harvard de 1906 à 1909, où il publie ses premiers poèmes dans la revue The Harvard Advocate et où il se lie d'amitié avec Conrad Aiken. En 1910, il obtient son Master, puis continue ses études à la Sorbonne à Paris (1910-1911), où il suit notamment les cours de Henri Bergson et d'Alain-Fournier[source insuffisante]. Il se lie alors d'amitié avec un jeune Français étudiant en médecine, féru comme lui de littérature et de poésie, Jean-Jules Verdenal (né en 1890 à Pau, mort en 1915 dans les Dardanelles) avec lequel il correspond lors de son retour aux États-Unis. Il part en effet pour Harvard et il y poursuit des études de philosophie. Il achève brillamment une thèse sur le philosophe hégélien Bradley. Il se passionne pour la philologie indo-aryenne et le bouddhisme.

En 1914, il obtient une bourse pour étudier au Merton College d'Oxford. Il visite l'Allemagne et prévoit de faire un trimestre de philosophie à l'université de Marbourg pendant l'été, mais la Première Guerre mondiale éclate et il se rend au Royaume-Uni. Il n'est pas heureux au Merton College et décline une bourse de seconde année.

Il travaille sur sa thèse qu'il envoie à Harvard et qui est acceptée. En revanche n'étant pas présent pour sa soutenance, il n'obtient pas son PhD.

Durant ses années estudiantines, il côtoya George Santayana, Irving Babbitt, Henri Bergson, C.R. Lanman, Josiah Royce, Bertrand Russell et Harold Joachim.

Période britannique[modifier | modifier le code]

Dessin de Simon Fieldhouse.

Dans une lettre à Conrad Aiken écrite en décembre 1914, Eliot se plaint d'être toujours vierge, ajoutant : « Je suis dépendant des femmes. Je veux dire de la compagnie des femmes. » Quatre mois plus tard, il est présenté à Vivienne Haigh-Wood et ils se marient le . En 1960, Eliot écrivit : « Je me suis convaincu d'être amoureux de Vivienne simplement parce que je voulais rester en Angleterre et me forcer à rester en Angleterre. Et elle s'est convaincue (sous l'influence de Pound) qu'elle pourrait sauver un poète en le forçant à rester en Angleterre. Le mariage ne lui a apporté aucun bonheur… À moi, il m'a mis dans un état d'esprit qui aboutira à The Waste Land. »

Admirateur de Charles Maurras[6], il fut déçu par sa condamnation par Pie XI en 1926 ; elle le détourna du catholicisme comme nombre de partisans de la High Church[7]. En 1927, T.S. Eliot devient citoyen britannique et se convertit à la religion anglicane.

Eliot se sépare de sa femme en 1933. Elle le poursuit, adhère même au British Union of Fascists (union britannique des fascistes) dans l'espoir de regagner les faveurs de son époux qui avait exprimé son admiration pour Mussolini et assiste à ses conférences pour lui demander de revenir à la maison. Elle fut internée dans un asile psychiatrique pendant les neuf dernières années de sa vie sans qu'Eliot vienne lui rendre visite.

Son second mariage, bien que presque aussi court, fut heureux. Il épouse Esme Valerie Fletcher, sa secrétaire depuis août 1949 et qui est de trente-huit ans sa cadette, le . Valerie passa ses années de veuvage à préserver l'œuvre de son mari ; elle édite et annote les Lettres de T.S. Eliot ainsi que le fac-simile de The Waste Land.

Eliot meurt d'un emphysème à sa maison à Kensington à Londres, le . Ses cendres sont déposées en l'église de Saint Michael dans le village de East Coker d'où les ancêtres d'Eliot étaient originaires avant d'émigrer aux États-Unis. Au deuxième anniversaire de sa disparition, une plaque commémorative est apposée au Coin des poètes dans l'abbaye de Westminster.

Son œuvre[modifier | modifier le code]

T.S. Eliot a passé sa vie au Royaume-Uni à partir de 1914. Auparavant, en 1910, il a séjourné à Paris dans le quartier du Montparnasse, où il a rencontré d'autres artistes éminents de son temps. Man Ray fera son portrait. Il s'absorbe dans l'étude du sanskrit et des religions orientales. Il est alors étudiant de Georges Gurdjieff.

Poésie[modifier | modifier le code]

En 1915, Ezra Pound, alors éditeur international du magazine Poetry, recommande, à sa directrice et fondatrice Harriet Monroe, la publication de La Chanson d'amour de J. Alfred Prufrock, où le jeune poète de vingt-sept ans a parfaitement réussi à capter les états d'âme d'un homme de quarante ans.

En octobre 1922, Eliot publie The Waste Land (La Terre vaine) dans la revue qu'il a fondée, The Criterion (1922-1939)[8]. Ce poème, écrit au moment où Eliot souffre au niveau personnel et familial (son mariage va à vau-l'eau) entre en résonance avec les peines de l'époque et de la génération perdue qui revient de la Première Guerre mondiale ; il devient l'un des modèles de la nouvelle poésie britannique. Avant même sa publication en livre (décembre 1922), T.S. Eliot prend ses distances avec le ton du poème qu'il juge par trop sombre : « En ce qui concerne The Waste Land, c'est une chose du passé et je me sens tourné vers l'avenir et vers une nouvelle forme et un nouveau style », écrit-il à Richard Aldington en novembre de la même année.

En dépit de la forme complexe du poème, des changements brusques de narrateur, de temps, de lieux, en dépit des références nombreuses et élégiaques à d'autres cultures et d'autres religions, The Waste Land est devenu un phare de la littérature moderne dont certaines phrases sont entrées dans l'anglais courant : April is the cruellest month — « Avril est le mois le plus cruel » ; I will show you fear in a handful of dust — « Je vais vous montrer la peur en une poignée de poussières » ; ou Shantih shantih shantih.

La période qui suit sa conversion est, assez naturellement, religieuse, mais s'attache aussi à l'héritage britannique et à ses valeurs. En 1928, T.S. Eliot résume son sentiment dans la préface de son livre For Lancelot Andrewes : « Le point de vue général peut être décrit comme classique dans sa forme, royaliste dans ses idées et anglo-catholique [sic] dans ses convictions. » Cette période voit la publication du Mercredi des cendres – Ash Wednesday, du Voyage des mages – The Journey of the Magi et des Quatre Quatuors – Four Quartets, qu'Eliot considérait comme son chef-d'œuvre et qui est basé sur les quatre éléments et sur quatre aspects du temps : théologique, historique, physique et humain. Les Quatre Quatuors, écrits de 1935 à 1944, le signalent à l'attention des jurés du prix Nobel de littérature, lequel lui sera décerné en 1948.

Œuvres[modifier | modifier le code]

Poésie et essais[modifier | modifier le code]

Théâtre[modifier | modifier le code]

Les pièces de théâtre écrites par Eliot, la plupart en vers.

Meurtre dans la cathédrale raconte la mort de Thomas Becket, Eliot raconte qu'il a été influencé, entre autres, par les œuvres du prêcheur Lancelot Andrewes. Cette œuvre a été créée en France et mise en scène par Jean Vilar en 1945 au théâtre du Vieux-Colombier à Paris, puis au festival d'Avignon. On a aussi pu en voir une version télévisée en 1967 (en noir et blanc), avec Alain Cuny dans le rôle principal.

Autres[modifier | modifier le code]

Eliot est choisi pour faire partie du comité pour une nouvelle traduction de la Bible en anglais moderne.

En 1930, il publie la traduction anglaise du poème Anabase de Saint John Perse, agrémentée d'une préface (Londres, Faber & Faber Ltd).

En 1939, il publie un livre de poésie pour enfants, Old Possum's Book of Practical Cats qui, après sa mort, fut utilisé dans la comédie musicale à succès, Cats d'Andrew Lloyd Webber.

Eliot est cité dans un épisode (L'Expérience Lazarus) de la série SF Doctor Who : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas dans une explosion mais dans un gémissement ».

Eliot est cité dans l'épisode 18 de la saison 5 de la série The Big Bang Theory : « C'est ainsi que prend fin le monde, pas avec une explosion mais avec un neveu».

Eliot est cité au début de la série "Le Fléau" tiré du roman de Stephen King réalisée en 1994 avec Gary Sinise

Dans les films A love song for Bobby Long et IO, respectivement John Travolta et Margaret Qualley citent T.S. Eliot : « Jamais nous ne cesserons notre exploration et le terme de notre quête sera d'arriver à l'endroit que nous avons quitté et de le percevoir tel qu'il est. »

Le compositeur Igor Stravinsky a écrit en 1965 un Introitus à la mémoire de T.S. Eliot.

La compositrice russe Sofia Goubaïdoulina a écrit en 1987 un Hommage à T.S. Eliot pour octuor et soprano.

Le groupe de metal progressif français Hord rend très largement hommage au poète dans ses concepts albums, The Waste Land (2010) et The Book of Eliot ().

La lettre encyclique Lumen fidei, du , cite un poème d'Eliot dans lequel la foi est mise en relation avec l'existence d'une société éduquée : « Avez-vous peut-être besoin qu'on vous dise que même ces modestes succès / qui vous permettent d'être fiers d'une société éduquée / survivront difficilement à la foi à laquelle ils doivent leur signification[9]. »

Lors d'une scène de It Follows de David Robert Mitchell (2014), une professeure de littérature lit à voix haute le poème The Love Song of J. Alfred Prufrock. Le passage cité est une méditation sur la mort imminente, ce qui pourrait faire écho au danger se rapprochant de Jay, l'héroïne du film d'horreur.

Traductions françaises[modifier | modifier le code]

  • Poésie, traduit par Pierre Leyris, Paris, Le Seuil, 1947, 1950, 1969.
  • Meurtre dans la cathédrale, traduit par Henri Fluchère, Paris, Le Seuil, 1949.
  • Essais Choisis, traduit par Henri Fluchère, Paris, Le Seuil, 1950.
  • La Coktail Party suivi de La Réunion de famille, traduit par Henri Fluchère, Paris, Le Seuil, 1952.
  • De la poésie et de quelques poètes, traduit par Henri Fluchère, Paris, Le Seuil, 1957.
  • Dante, traduit par Bernard Hœpffner, Climats, 1991
  • La Terre gaste, traduit par Michèle Pinson, lithographies de François Righi, Le Tailleur d'images, 1995
  • Ezra Pound, sa métrique et sa poésie, traduit par Philippe Blanchon, Éditions de la Nerthe, 2015
  • Les hommes creux, cinq poèmes traduits par Aurélien Galateau et François Heusbourg, tirage limité à 19 exemplaires, Éditions Unes, 2015

Récompenses[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « http://discovery.nationalarchives.gov.uk/details/a/A13530954 »
  2. « http://discovery.nationalarchives.gov.uk/details/r/1c73e900-f220-41d3-88e4-0ab78ee61303 » (consulté le )
  3. « https://norman.hrc.utexas.edu/fasearch/findingAid.cfm?eadid=00478 » (consulté le )
  4. « https://uvic2.coppul.archivematica.org/t-s-eliot-collection » (consulté le )
  5. « https://archives.bodleian.ox.ac.uk/repositories/2/resources/8904 » (consulté le )
  6. (en) James Torrens, « Charles Maurras and Eliot’s ‘New Life.’ », PMLA, vol. 89, no 2,‎ , p. 312-322 (lire en ligne)
  7. Stéphane Giocanti, Maurras – Le chaos et l'ordre, éd. Flammarion, 2006, p. 330.
  8. T.S. Eliot, L’unité de la culture européenne Causerie no 2 [sur The Criterion], présentation par Pierre Malherbet, Paris : Ent'revues, La Revue des revues no 43, 2009, p. 3-13.
  9. a et b 48 « Choruses from The Rock » in The Collected Poems and Plays 1909-1950, New York http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-francesco_20130629_enciclica-lumen-fidei.html

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Helen Gardner : T.S. Eliot. Poésie et théâtre. Seghers. 1975. (Traduction par Claude Guillot de : The Art of T.S. Eliot, 1968).
  • Georges Cattaui : T.S. Eliot, 1966
  • Stéphane Giocanti : T.S. Eliot ou le monde en poussières, Jean-Claude Lattès, 2002
  • Lyndall Gordon : T.S. Eliot, An Imperfect Life, Norton, New-York, 1999
  • Jean-Paul Rosaye : T.S. Eliot poète-philosophe, essai de typologie génétique, Presses Universitaires du Septentrion, 2000
  • Pierre Vinclair : Terre inculte. Penser dans l'illisible : The Waste Land, Hermann, 2018.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Bases de données et dictionnaires[modifier | modifier le code]