« Luis Buñuel » : différence entre les versions

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{{voir homonymes|Buñuel}}
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| légende = Luis Buñuel photographié par [[Man Ray]] en 1929.
'''Luis Buñuel''' est en crash sur Abdallah wallah c’est vrai ! Sur la Mecque ! ({{MSAPI|/ˈlwiz βuˈɲwel/}}<ref name="Phonétique">[[Dialectologie de l'espagnol|Prononciation]] en [[espagnol d'Amérique]] [[Transcription phonétique|retranscrite]] selon la norme [[Alphabet phonétique international|API]].</ref>) est un [[réalisateur]] et [[scénariste]] [[Espagne|espagnol]] naturalisé [[Mexique|mexicain]], né le {{Date de naissance|22|février|1900}} à [[Calanda]] ([[Aragon (communauté autonome)|Aragon]], [[Restauration bourbonienne en Espagne |Espagne]]) et mort le {{Date de décès|29|juillet|1983}} à [[Mexico]] ([[Mexique]]).
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'''Luis Buñuel''' ({{MSAPI|/ˈlwiz βuˈɲwel/}}<ref name="Phonétique">[[Dialectologie de l'espagnol|Prononciation]] en [[espagnol d'Amérique]] [[Transcription phonétique|retranscrite]] selon la norme [[Alphabet phonétique international|API]].</ref>) est un [[réalisateur]], [[scénariste]] et [[acteur]] [[Espagne|espagnol]] naturalisé [[Mexique|mexicain]], né le {{Date de naissance|22|février|1900}} à [[Calanda]] ([[Aragon (communauté autonome)|Aragon]], [[Restauration (histoire de l'Espagne)|Espagne]]) et mort le {{Date de décès|29|juillet|1983}} à [[Mexico]].
Buñuel se fait connaître, dans les dernières années du [[cinéma muet]], comme metteur en scène [[Surréalisme|surréaliste]] d’[[Avant-garde (art)|avant-garde]]<ref>{{Article|langue=en|auteur=Peter B. Flint|titre=Luis Buñuel dies at 83; Filmmaker for 50 Years|url=https://www.nytimes.com/1983/07/30/obituaries/luis-bunuel-dies-at-83-film-maker-for-50-years.html|consulté le=6 août 2012|périodique=New York Times|date=30 juillet 1983}}.</ref>, travaillant aux côtés de [[Salvador Dalí]] et du groupe surréaliste [[paris]]ien autour d’[[André Breton]] ; sa création la plus marquante de cette époque est le [[court métrage]] ''[[Un chien andalou]]'' de 1929, qui fait scandale. Il tourne ensuite, après une interruption de {{nobr|15 ans}}, des films dans quasiment tous les genres cinématographiques — film expérimental, [[documentaire]], [[Mélodrame (cinéma)|mélodrame]], satire, [[comédie musicale]], comédie, film romantique et historique, [[Film fantastique|fantastique]], [[Film policier|policier]], film d’aventures, et même [[western]] — composant une œuvre insaisissable, inégale, réfractaire à toute récupération idéologique, d’un caractère souvent iconoclaste et subversif, mais où la dénonciation d’une bourgeoisie figée et hypocrite constitue l’un des thèmes de prédilection, ce qu’illustrent en particulier les films ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'' (1962), ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]'' (1967) et ''[[Le Charme discret de la bourgeoisie]]'' (1972).


Buñuel se fait connaître, dans les dernières années du [[cinéma muet]], comme metteur en scène [[Surréalisme|surréaliste]] d’[[Avant-garde (art)|avant-garde]]<ref>{{Article|langue=en|auteur=Peter B. Flint|titre=Luis Buñuel dies at 83; Filmmaker for 50 Years|url=https://www.nytimes.com/1983/07/30/obituaries/luis-bunuel-dies-at-83-film-maker-for-50-years.html|consulté le=6 août 2012|périodique=New York Times|date=30 juillet 1983}}.</ref>, travaillant aux côtés de [[Salvador Dalí]] et du groupe surréaliste [[paris]]ien autour d’[[André Breton]] ; sa création la plus marquante de cette époque est le [[court métrage]] ''[[Un chien andalou]]'' de 1929, qui fait scandale. Il tourne ensuite, après une interruption de quinze ans, des films dans quasiment tous les genres cinématographiques — film expérimental, [[documentaire]], [[Mélodrame (cinéma)|mélodrame]], satire, [[comédie musicale]], comédie, film romantique et historique, [[Cinéma fantastique|fantastique]], [[Film policier|policier]], film d’aventures, et même [[western]] — composant une œuvre insaisissable, inégale, réfractaire à toute récupération idéologique, d’un caractère souvent iconoclaste et subversif, mais où la dénonciation d’une bourgeoisie figée et hypocrite constitue l’un de ses thèmes de prédilection, ce qu’illustrent en particulier ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'' (1962), ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]'' (1967) et ''[[Le Charme discret de la bourgeoisie]]'' (1972).
Ainsi que le note [[Jean Collet (écrivain)|Jean Collet]], {{citation bloc|Buñuel est le peintre des contrastes violents, de l’ombre et de la lumière, de la nuit et du jour, du rêve et de la lucidité. Entre ces extrêmes, il cherche la plus grande tension. Il filme les fantasmes avec la caméra la plus terre-à-terre. Il est matérialiste quand il parle de Dieu, exalté, révolté quand il parle de la société des hommes<ref>''[[Encyclopædia Universalis]]'', tome III, 1985, art. « Luis Buñuel » par [[Jean Collet (écrivain)|Jean Collet]], {{p.|1109}}.</ref>.}}


Ainsi que le note [[Jean Collet (écrivain)|Jean Collet]], {{citation bloc|Buñuel est le peintre des contrastes violents, de l’ombre et de la lumière, de la nuit et du jour, du rêve et de la lucidité. Entre ces extrêmes, il cherche la plus grande tension. Il filme les fantasmes avec la caméra la plus terre-à-terre. Il est matérialiste quand il parle de Dieu, exalté, révolté quand il parle de la société des hommes<ref>''[[Encyclopædia Universalis]]'', tome III, 1985, art. « Luis Buñuel » par [[Jean Collet (écrivain)|Jean Collet]], {{p.|1109}}.</ref>.}}
En raison de ses convictions politiques et des obstacles imposés à sa création par la censure [[Francisco Franco|franquiste]], il préfère s’exiler et tourne la majeure partie de son œuvre au [[Mexique]] (dont il prend la nationalité en 1951) et en [[France]].


En raison de ses convictions politiques et des obstacles imposés à sa création par la censure [[Espagne franquiste|franquiste]], il a préféré s’exiler et a tourné la majeure partie de son œuvre en [[France]] et au [[Mexique]] dont il a pris la nationalité en 1951.
Buñuel est considéré comme l’un des réalisateurs les plus importants et les plus originaux de l’[[histoire du cinéma]].

Buñuel est considéré comme l’un des réalisateurs les plus importants et les plus originaux de l'[[histoire du cinéma]].


== Biographie ==
== Biographie ==
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=== Jeunesse ===
=== Jeunesse ===
À 19 ans, il part vivre à Madrid et y commence des études supérieures. Il rencontre [[Salvador Dalí]] et [[Federico García Lorca]] puis apporte son soutien au mouvement [[dada]]ïste. En 1919, il rencontre à [[Saint-Sébastien (Espagne)|Saint-Sébastien]] l'écrivaine [[Concha Méndez]], avec qui il se fiance et établi une relation de sept ans<ref>{{Lien web|langue=es|auteur1=|nom1=Aragón|prénom1=Heraldo de|titre=Concha Méndez recuerda en sus memorias sus siete años de noviazgo con el joven Luis Buñuel|url=https://www.heraldo.es/noticias/ocio-cultura/2018/08/20/concha-mendez-recuerda-sus-memorias-sus-siete-anos-noviazgo-con-joven-luis-bunuel-1262749-1361024.html|site=heraldo.es|périodique=|date=|consulté le=}}.</ref>. En 1923, il fonde avec [[Francisco García Lorca|Francisco]] et [[Federico García Lorca]], entre autres, l'[[ordre de Tolède]].
À 19 ans, il part vivre à Madrid et y commence des études supérieures. Il rencontre [[Salvador Dalí]] et [[Federico García Lorca]] puis apporte son soutien au mouvement [[dada]]ïste. En 1919, il rencontre à [[Saint-Sébastien (Espagne)|Saint-Sébastien]] l'écrivaine [[Concha Méndez]], avec qui il se fiance et établit une relation de sept ans<ref>{{Lien web|langue=es|nom1=Aragón|prénom1=Heraldo de|titre=Concha Méndez recuerda en sus memorias sus siete años de noviazgo con el joven Luis Buñuel|url=https://www.heraldo.es/noticias/ocio-cultura/2018/08/20/concha-mendez-recuerda-sus-memorias-sus-siete-anos-noviazgo-con-joven-luis-bunuel-1262749-1361024.html|site=heraldo.es|date=}}.</ref>. En 1923, il fonde avec [[Francisco García Lorca|Francisco]] et [[Federico García Lorca]], entre autres, l'[[ordre de Tolède]].


En 1925, il vient à Paris. Il se fait embaucher comme assistant réalisateur de [[Jean Epstein]], sur le tournage de ''[[Mauprat (film)|Mauprat]]'' en 1926 puis, deux ans plus tard, de ''[[La Chute de la maison Usher (film, 1928)|La Chute de la maison Usher]]''.
En 1925, il vient à Paris. Il se fait embaucher comme assistant réalisateur de [[Jean Epstein]], sur le tournage de ''[[Mauprat (film)|Mauprat]]'' en 1926 puis, deux ans plus tard, de ''[[La Chute de la maison Usher (film, 1928)|La Chute de la maison Usher]]''.
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Du ''Chien andalou'' à ''[[Cet obscur objet du désir]]'', Luis Buñuel construit une œuvre profondément marquée par le [[surréalisme]]. Ses films en portent pratiquement tous, à des degrés divers, la marque que ce soit dans la forme ou le discours. Buñuel remet en effet en cause, dans la quasi-totalité de ses réalisations, la continuité du récit et la lisibilité de la mise en espace. La temporalité et le rythme sont fragmentés. Se développe également un jeu stylistique sur le retournement, l'inversion et le mélange des contraires (notamment le trivial et le sublime). La réalité, le rêve, le quotidien, le fantasme, l'univers familier et l'hallucinatoire sont mis sur le même plan. Le cinéaste surréaliste est donc celui qui {{cita|aura détruit la représentation conventionnelle de la nature […], ébranlé l'optimisme bourgeois et obligé le spectateur à douter de la pérennité de l'ordre existant<ref>Luis Buñuel.</ref>.}}
Du ''Chien andalou'' à ''[[Cet obscur objet du désir]]'', Luis Buñuel construit une œuvre profondément marquée par le [[surréalisme]]. Ses films en portent pratiquement tous, à des degrés divers, la marque que ce soit dans la forme ou le discours. Buñuel remet en effet en cause, dans la quasi-totalité de ses réalisations, la continuité du récit et la lisibilité de la mise en espace. La temporalité et le rythme sont fragmentés. Se développe également un jeu stylistique sur le retournement, l'inversion et le mélange des contraires (notamment le trivial et le sublime). La réalité, le rêve, le quotidien, le fantasme, l'univers familier et l'hallucinatoire sont mis sur le même plan. Le cinéaste surréaliste est donc celui qui {{cita|aura détruit la représentation conventionnelle de la nature […], ébranlé l'optimisme bourgeois et obligé le spectateur à douter de la pérennité de l'ordre existant<ref>Luis Buñuel.</ref>.}}


[[Émile Malespine]] fait connaître son œuvre à Lyon, en France, au Théâtre du Donjon<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Thierry Roche|titre=Les arts décoratifs à Lyon 1910 à 1950|lieu=|éditeur=Beau Fixe|année=|passage=117}}.</ref>.
[[Émile Malespine]] fait connaître son œuvre à Lyon, en France, au Théâtre du Donjon<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Thierry Roche|titre=Les arts décoratifs à Lyon 1910 à 1950|éditeur=Beau Fixe|année=|passage=117}}.</ref>.


===Premiers films ===
=== Premiers films ===
[[Fichier:Cabeza de Luis Buñuel.JPG|vignette|Tête de Luis Buñuel, par le sculpteur Iñaki, au Centre Buñuel à [[Calanda]].]]
En 1928, avec l'aide matérielle de sa mère, Luis Buñuel tourne son premier film ''[[Un chien andalou|Un chiennes gitane,]]'' un court-métrage pas très cali muet d'une vingtaine de minutes dont il écrit le scénario avec [[Salvador Dalí]]. Le film, qui n'obéit pas à une logique narrative traditionnelle, contient des scènes restées célèbres, comme celle montrant une lame de rasoir tranchant un œil ou la finale dans laquelle des amants meurent dans le sable fin. Dans un premier temps, ce film est projeté en privé pour [[Man Ray]] et [[Louis Aragon]]. Très enthousiastes, ces derniers demandent à Buñuel d'organiser une séance pour les [[Surréalisme|surréalistes]].
En 1928, avec l'aide matérielle de sa mère, Luis Buñuel tourne son premier film ''[[Un chien andalou]]'', un [[court métrage]] muet d'une vingtaine de minutes dont il écrit le scénario avec [[Salvador Dalí]]. Le film, qui n'obéit pas à une logique narrative traditionnelle, contient des scènes restées célèbres, comme celle montrant une lame de rasoir tranchant un œil ou la finale dans laquelle des amants meurent dans le sable fin. Dans un premier temps, ce film est projeté en privé pour [[Man Ray]] et [[Louis Aragon]]. Très enthousiastes, ces derniers demandent à Buñuel d'organiser une séance pour les [[Surréalisme|surréalistes]].


Buñuel réalise ensuite ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]'', une fois encore scénarisé avec Dali et produit cette fois par le mécène [[Charles de Noailles (1891-1981)|Charles de Noailles]]. ''L'Âge d'or'' est décrit par José Pierre comme « peut-être l'unique film intentionnellement surréaliste ». Par son contenu délibérément provoquant, il ne tarde pas à provoquer de vives réactions.
Buñuel réalise ensuite ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]'', une fois encore scénarisé avec Dali et produit cette fois par le mécène [[Charles de Noailles (1891-1981)|Charles de Noailles]]. ''L'Âge d'or'' est décrit par José Pierre comme « peut-être l'unique film intentionnellement surréaliste ». Par son contenu délibérément provoquant, il ne tarde pas à provoquer de vives réactions.


Le {{date-|30 novembre 1930}}, après la première projection du film, la censure exige des coupes. Quelques jours après, la Ligue des patriotes et la Ligue anti-juive saccagent la salle de cinéma [[Studio 28]] à Montmartre, dans le {{18e|arrondissement}} de Paris, qui projette le film et propose dans son hall une exposition d'œuvres surréalistes. Ce saccage est le point de départ d'une virulente campagne de presse contre les surréalistes, et le préfet de police Chiappe<ref>Selon ''Le Journal d'une femme de chambre'', les manifestants défilent en criant « Vive Chiappe ! »</ref> fait saisir le film. En réalité, seule la copie de projection est confisquée puis détruite car le négatif reste en possession du [[Charles de Noailles (1891-1981)|vicomte de Noailles]] et de son épouse [[Marie-Laure de Noailles|Marie-Laure]], les mécènes du film. L'interdiction de projection ne va être finalement levée qu'en 1980.
Le {{date-|30 novembre 1930}}, après la première projection du film, la censure exige des coupes. Quelques jours après, la [[Ligue des patriotes]] et la Ligue anti-juive saccagent la salle de cinéma [[Studio 28]] à Montmartre, dans le {{18e|arrondissement}} de Paris, qui projette le film et propose dans son hall une exposition d'œuvres surréalistes. Ce saccage est le point de départ d'une virulente campagne de presse contre les surréalistes, et le préfet de police [[Jean Chiappe|Chiappe]]<ref>Selon ''Le Journal d'une femme de chambre'', les manifestants défilent en criant « Vive Chiappe ! »</ref> fait saisir le film. En réalité, seule la copie de projection est confisquée puis détruite car le négatif reste en possession de [[Charles de Noailles (1891-1981)|Charles]] et de [[Marie-Laure de Noailles]], les mécènes du film. L'interdiction de projection n'est finalement levée qu'en 1980.


Buñuel s'éloigne du surréalisme et change de registre pour son film suivant, ''[[Terre sans pain]]'', un moyen-métrage documentaire décrivant les conditions de vie misérables prévalant dans une région de l'Espagne, [[Les Hurdes]]. Le film est interdit par le gouvernement espagnol de 1933-1935.
Buñuel s'éloigne du surréalisme et change de registre pour son film suivant, ''[[Terre sans pain]]'', un moyen-métrage documentaire décrivant les conditions de vie misérables prévalant dans une région de l'Espagne, [[Les Hurdes]]. Le film est interdit par le gouvernement espagnol de 1933-1935.


=== États-Unis ===
=== États-Unis ===
Entre 1933 et 1935, Buñuel travaille en Espagne pour des compagnies américaines. La guerre civile qui éclate en Espagne le bouleverse. Il participe à un documentaire pro-républicain ''Madrid 36'' puis se rend aux [[États-Unis]]. Il se consacre à la démonstration de l'efficacité et du danger des films de propagande nazis (il utilise en particulier un film de [[Leni Riefenstahl]]).
Entre 1933 et 1935, Buñuel travaille en Espagne pour des compagnies américaines. La [[Guerre d'Espagne|guerre civile]] qui éclate en Espagne le bouleverse. Il participe à un documentaire pro-républicain ''Madrid 36'' puis se rend aux [[États-Unis]]. Il se consacre à la démonstration de l'efficacité et du danger des films de propagande nazis (il utilise en particulier un film de [[Leni Riefenstahl]]).


Mais il ne cache pas son [[anticatholicisme]] et son [[marxisme]] et subit des pressions, notamment après la parution, en 1942, du livre de [[Salvador Dalí]] ''La Vie secrète de Salvador Dali'' où il est décrit comme seul responsable des aspects les plus controversés de ''L'Âge d'or''. Il doit abandonner son poste au [[Museum of Modern Art]] de New York et s'exiler au Mexique.
Il ne cache pas son [[anticatholicisme]] et son [[marxisme]] et subit des pressions, notamment après la parution, en 1942, du livre de [[Salvador Dalí]] ''La Vie secrète de Salvador Dali'' où il est décrit comme seul responsable des aspects les plus controversés de ''L'Âge d'or''. Il doit abandonner son poste au [[Museum of Modern Art]] de New York et s'exiler au Mexique.


=== Mexique ===
=== Mexique ===
Il y reprend sa carrière de réalisateur, grâce au producteur [[Oscar Dancigers]]. Son premier film mexicain, la comédie musicale ''Gran Casino'' (1947), est un échec. Mais le second, une petite comédie avec [[Fernando Soler]], ''[[Le Grand Noceur]]'' (1949), remporte un réel succès. Elle lui vaut aussi la réputation d'un cinéaste fiable, capable de respecter ses budgets. Dancigers lui suggère ensuite de s'intéresser à la vie des enfants pauvres de Mexico. Il en résulte ''[[Los Olvidados]]'', littéralement ''Les Oubliés'', un drame social assez dur dans lequel l'influence du néo-réalisme italien côtoie certaines touches surréalistes. Le film est présenté au [[Festival de Cannes 1951]] et y remporte le [[Prix de la mise en scène (Festival de Cannes)|prix de la mise en scène]], remettant Buñuel au premier plan.
Il y reprend sa carrière de réalisateur, grâce au producteur [[Oscar Dancigers]]. Son premier film mexicain, la comédie musicale ''[[Le Grand Casino|Gran Casino]]'' (1947), est un échec. Le second, une petite comédie avec [[Fernando Soler]], ''[[Le Grand Noceur]]'' (1949), remporte un réel succès. Elle lui vaut aussi la réputation d'un cinéaste fiable, capable de respecter ses budgets. Dancigers lui suggère ensuite de s'intéresser à la vie des enfants pauvres de Mexico. Il en résulte ''[[Los Olvidados]]'', littéralement ''Les Oubliés'', un drame social assez dur dans lequel l'influence du néo-réalisme italien côtoie certaines touches surréalistes. Le film est présenté au [[Festival de Cannes 1951]] et y remporte le [[Prix de la mise en scène (Festival de Cannes)|prix de la mise en scène]], remettant Buñuel au premier plan.


Toujours pour Dancigers, Buñuel signe également des adaptations de romans classiques comme ''[[Les Aventures de Robinson Crusoé (film, 1954)|Les Aventures de Robinson Crusoé]]'' d'après le livre de [[Daniel Defoe]] ou ''[[Les Hauts de Hurlevent (film, 1954)|Les Hauts de Hurlevent]]'' d'après l'œuvre d'[[Emily Brontë]], tourné sous le titre ''Abismos de Pasión''. Parmi les autres films notables de cette période, on peut citer ''[[Tourments (film, 1953)|Tourments]]'', étude d'un cas de jalousie maladive, et ''[[La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz]]'', comédie macabre sur un tueur en série ; deux films qui multiplient les références au [[Donatien Alphonse François de Sade|marquis de Sade]], à la religion et à la bourgeoisie. ''[[Nazarín]]'' (1958) marque l'apogée de sa période mexicaine.
Toujours pour Dancigers, Buñuel signe également des adaptations de romans classiques comme ''[[Les Aventures de Robinson Crusoé (film, 1954)|Les Aventures de Robinson Crusoé]]'' d'après le livre de [[Daniel Defoe]] ou ''[[Les Hauts de Hurlevent (film, 1954)|Les Hauts de Hurlevent]]'' d'après l'œuvre d'[[Emily Brontë]], tourné sous le titre ''Abismos de Pasión''. Parmi les autres films notables de cette période, on peut citer ''[[Tourments (film, 1953)|Tourments]]'', étude d'un cas de jalousie maladive, et ''[[La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz]]'', comédie macabre sur un tueur en série ; deux films qui multiplient les références au [[Donatien Alphonse François de Sade|marquis de Sade]], à la religion et à la bourgeoisie. ''[[Nazarín]]'' (1958) marque l'apogée de sa période mexicaine.


=== Retour en Europe ===
=== Retour en Europe ===
[[Fichier:Luis Buñuel.JPG|vignette|gauche|Luis Buñuel en 1968.]]
Buñuel se voit proposer un tournage en Europe : il s'agit de ''[[Viridiana]]'', qui obtient la [[Palme d'or]] au [[festival de Cannes 1961]] mais provoque d'importants remous politiques, diplomatiques et religieux, notamment pour la représentation finale, parodiant la [[Cène]], d'indigents qui s'emparent de la demeure de propriétaires terriens et se livrent à une orgie. Le régime de [[Francisco Franco|Franco]], qui avait permis le tournage du film et accepté qu'il représente officiellement l'Espagne à Cannes, finit par l'interdire complètement. Les copies espagnoles sont saisies et détruites mais le film est distribué normalement en France. Le film n'est ensuite distribué en Espagne qu'en 1977, deux ans après la mort du ''caudillo''.
Buñuel se voit proposer un tournage en Europe : il s'agit de ''[[Viridiana]]'', qui obtient la [[Palme d'or]] au [[festival de Cannes 1961]], mais provoque d'importants remous politiques, diplomatiques et religieux, notamment pour la représentation finale, parodiant la [[Cène]], d'indigents qui s'emparent de la demeure de propriétaires terriens et se livrent à une orgie. Le régime de [[Francisco Franco|Franco]], qui avait permis le tournage du film et accepté qu'il représente officiellement l'Espagne à Cannes, finit par l'interdire complètement. Les copies espagnoles sont saisies et détruites mais le film est distribué normalement en France. Le film n'est ensuite distribué en Espagne qu'en 1977, deux ans après la mort du ''caudillo''.


Suivent ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'', tourné au Mexique, et ''[[Le Journal d'une femme de chambre (film, 1964)|Le Journal d'une femme de chambre]]'', adaptation du célèbre roman d'[[Octave Mirbeau]] et premier film tourné en France par Buñuel depuis ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]''. En choisissant de repousser de trente ans l'action du roman de Mirbeau, Luis Buñuel s'offre une belle vengeance sur ceux qui bâillonnèrent ses débuts dans les [[années 1930]] : dans la dernière séquence du film, des manifestants d'extrême droite scandent effectivement « Vive Chiappe ! » et « Mort aux Juifs ! ».
Suivent ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'', tourné au Mexique, et ''[[Le Journal d'une femme de chambre (film, 1964)|Le Journal d'une femme de chambre]]'', adaptation du célèbre roman d'[[Octave Mirbeau]] et premier film tourné en France par Buñuel depuis ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]''. En choisissant de repousser de trente ans l'action du roman de Mirbeau, Luis Buñuel s'offre une belle vengeance sur ceux qui bâillonnèrent ses débuts dans les [[années 1930]] : dans la dernière séquence du film, des manifestants d'extrême droite scandent effectivement « Vive Chiappe ! » et « Mort aux Juifs ! ».
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=== Vie privée ===
=== Vie privée ===
Le {{date-|23 juin 1934}}, Luis Buñuel épouse Jeanne Rucar<ref>Jeanne Rucar est née à [[Lille]] en 1908, elle est morte à [[Mexico]] en 1994. [https://books.google.fr/books?id=ZaHOMwAACAAJ&dq=isbn:0979472768&hl=fr&sa=X&ei=O_gpUtCBBIf80QWB_oHYBA&ved=0CDQQ6AEwAA Jeanne Rucar sur Google livres.]</ref> à la [[mairie du 20e arrondissement de Paris|mairie du {{20e|arrondissement}} de Paris]]<ref>[http://www.des-gens.net/Bunuel-en-nos-jardins-du-20e Voir sur des-gens.net.]</ref>. Ils vont vivre ensemble près de {{nobr|50 ans}}, jusqu'à la mort du cinéaste.
Le {{date-|23 juin 1934}}, Luis Buñuel épouse Jeanne Rucar<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Jeanne Rucar De|nom1=Bunuel|prénom2=Marisol Martin Del|nom2=Campo|titre=Memoirs of a Woman Without a Piano: My Life With Luis Bunuel|éditeur=Five Ties Publishing|date=2010-06-15|isbn=978-0-9794727-6-3|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=ZaHOMwAACAAJ&dq=isbn:0979472768&hl=fr&sa=X&ei=O_gpUtCBBIf80QWB_oHYBA&ved=0CDQQ6AEwAA|consulté le=2023-09-22|commentaire=Jeanne Rucar Lefebvre est née à Lille en 1908, et morte à Mexico en 1994.}}</ref> à la mairie du {{20e arrondissement de Paris}}<ref>[http://www.des-gens.net/Bunuel-en-nos-jardins-du-20e Voir sur des-gens.net.]</ref>. Ils vivent ensemble près de cinquante ans, jusqu'à la mort du cinéaste.


Il est le père de [[Juan Luis Buñuel]], réalisateur, et de Rafael Buñuel ; le grand-père du [[journaliste]] [[Diego Buñuel]] ; l'ex-beau-père de [[Joyce Buñuel]].
Il est le père de [[Juan Luis Buñuel]], réalisateur, et de Rafael Buñuel ; il est ainsi le grand-père du [[journaliste]] et réalisateur [[Diego Buñuel]] et l'ex-beau-père de la réalisatrice [[Joyce Buñuel]].

=== Mort ===
Luis Buñuel meurt le {{date de décès|29|juillet|1983}} à [[Mexico]], à l'âge de {{Nobr|83 ans}}.

Incinéré, ses cendres sont dispersées quatorze ans après sa mort sur le mont {{Lien|langue=es|trad=Tolocha}}<ref>{{Lien web |langue=es |prénom=Unidad Editorial |nom=Internet |titre=Buñuel, polvo de Calanda |url=https://www.elmundo.es/elmundo/2012/06/18/cultura/1340001475.html |site=www.elmundo.es |consulté le=2023-09-22 |extrait=''Mi hermano Juan Luis, mi primo Pedro Christian García-Buñuel y yo esparcimos esas cenizas en 1997 en el Monte Tolocha, en Calanda'' [en français : Mon frère Juan Luis, mon cousin Pedro Christian Garcia-Buñuel et moi avons répandu ces cendres en 1997 au Monte Tolocha, à Calanda].}}</ref>, en [[Espagne]]<ref>{{Lien web |langue=fr |titre=Luis Buñuel (1900-1983) - Mémorial Find a Grave |url=https://fr.findagrave.com/memorial/6946038/luis-bu%C3%B1uel |site=fr.findagrave.com |consulté le=2023-09-22}}</ref>.


== Filmographie ==
== Filmographie ==
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* [[1929 au cinéma|1929]] : ''[[Un chien andalou]]'' (court métrage)
* [[1929 au cinéma|1929]] : ''[[Un chien andalou]]'' (court métrage)
* [[1930 au cinéma|1930]] : ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]''
* [[1930 au cinéma|1930]] : ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]''
* [[1933 au cinéma|1933]] : ''[[Terre sans pain]]'' (''Las Hurdes'' ou ''Tierra Sin Pan'') (court métrage)
* [[1933 au cinéma|1933]] : ''[[Terre sans pain]]'' (''Las Hurdes, tierra sin pan'') (court métrage)
* [[1936 au cinéma|1936]] : ''[[¿Quién me quiere a mí?]]'', coréalisé avec [[José Luis Sáenz de Heredia]] + producteur exécutif
* [[1936 au cinéma|1936]] : ''{{Lien|langue=es|trad=¿Quién me quiere a mí?}}'', coréalisé avec [[José Luis Sáenz de Heredia]] + [[producteur délégué]]
* [[1936 au cinéma|1936]] : ''[[¡Centinela, alerta!]]'', coréalisé avec [[Jean Grémillon]] + producteur exécutif
* [[1936 au cinéma|1936]] : ''[[Sentinelle, alerte !]]'' (''¡Centinela, alerta!''), coréalisé avec [[Jean Grémillon]] + producteur délégué
* [[1937 au cinéma|1937]] : ''[[Espagne 37]]'' (''España leal en armas'') (moyen métrage)
* [[1937 au cinéma|1937]] : ''[[Le Souvenir - Espagne 36]]'' (''España leal en armas'') (moyen métrage), coréalisé avec [[Jean-Paul Le Chanois]]
* [[1947 au cinéma|1947]] : ''[[Le Grand Casino]]'' (''Gran Casino'')
* [[1947 au cinéma|1947]] : ''[[Le Grand Casino]]'' (''Gran Casino'')
* [[1949 au cinéma|1949]] : ''[[Le Grand Noceur]]'' (''El gran Calavera'')
* [[1949 au cinéma|1949]] : ''[[Le Grand Noceur]]'' (''El gran Calavera'')
* [[1950 au cinéma|1950]] : ''[[Los Olvidados]]'' (''Les Réprouvés / Pitié pour eux'')
* [[1950 au cinéma|1950]] : ''[[Los olvidados]]'' (''Les Réprouvés / Pitié pour eux'')
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Susana la perverse]]'' (''Susana, demonio y carne'')
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Susana la perverse]]'' (''Susana, demonio y carne'')
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Don Quintin l'amer]]'' (''La Hija del Engaño'') {{commentaire|{{2e|adaptation}} par Buñuel de la pièce de Carlos Arniches.}}
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Don Quintin l'amer]]'' (''La hija del engaño'') {{commentaire|{{2e|adaptation}} par Buñuel de la pièce de Carlos Arniches.}}
* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[Une femme sans amour]]'' (''Una Mujer Sin Amor / Cuando los hijos nos juzgan'')
* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[Une femme sans amour]]'' (''Una mujer sin amor / Cuando los hijos nos juzgan'')
* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[La Montée au ciel]]'' (''Subida Al Cielo'')
* [[1952 au cinéma|1952]] : ''[[La Montée au ciel]]'' (''Subida al cielo'')
* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[L'Enjôleuse]]'' (''El Bruto'')
* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[L'Enjôleuse]]'' (''El bruto'')
* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[Tourments (film, 1953)|Tourments]]'' (''Él'')
* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[Tourments (film, 1953)|Tourments]]'' (''Él'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[Les Aventures de Robinson Crusoé (film, 1954)|Les Aventures de Robinson Crusoé]]'' (''Aventuras de Robinson Crusoe'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[Les Aventures de Robinson Crusoé (film, 1954)|Les Aventures de Robinson Crusoé]]'' (''Robinson Crusoe'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[On a volé un tram]]'' (''La Illusión viaja en Tranvía'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[On a volé un tram]]'' (''La ilusión viaja en tranvía'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[Les Hauts de Hurlevent (film, 1954)|Les Hauts de Hurlevent]]'' (''Abismos de Pasión, Cumbres Borrascosas'')
* [[1954 au cinéma|1954]] : ''[[Les Hauts de Hurlevent (film, 1954)|Les Hauts de Hurlevent]]'' (''Abismos de pasión'')
* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[Le Fleuve de la mort (film, 1955)|Le Fleuve de la mort]]'' (''El Río y la Muerte'')
* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[Le Fleuve de la mort (film, 1955)|Le Fleuve de la mort]]'' (''El río y la muerte'')
* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz]]'' (''Ensayo de un Crimen'')
* [[1955 au cinéma|1955]] : ''[[La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz]]'' (''Ensayo de un crimen'')
* [[1956 au cinéma|1956]] : ''[[Cela s'appelle l'aurore]]''
* [[1956 au cinéma|1956]] : ''[[Cela s'appelle l'aurore]]''
* [[1956 au cinéma|1956]] : ''[[La Mort en ce jardin]]'' (''La Muerte en este Jardín'')
* [[1956 au cinéma|1956]] : ''[[La Mort en ce jardin]]'' (''La muerte en este jardín'')
* [[1959 au cinéma|1959]] : ''[[Nazarín]]''
* [[1959 au cinéma|1959]] : ''[[Nazarín]]''
* [[1959 au cinéma|1959]] : ''[[La fièvre monte à El Pao]]'' (''Los Ambiciosos'')
* [[1959 au cinéma|1959]] : ''[[La fièvre monte à El Pao]]'' (''Los ambiciosos'')
* [[1960 au cinéma|1960]] : ''[[La Jeune Fille]]'' (''The Young One'', ''La Joven'')
* [[1960 au cinéma|1960]] : ''[[La Jeune Fille]]'' (''La joven'')
* [[1961 au cinéma|1961]] : ''[[Viridiana]]''
* [[1961 au cinéma|1961]] : ''[[Viridiana]]''
* [[1962 au cinéma|1962]] : ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'' (''El Ángel Exterminador'')
* [[1962 au cinéma|1962]] : ''[[L'Ange exterminateur (film)|L'Ange exterminateur]]'' (''El ángel exterminador'')
* [[1964 au cinéma|1964]] : ''[[Le Journal d'une femme de chambre (film, 1964)|Le Journal d'une femme de chambre]]'', d'après le roman éponyme d'[[Octave Mirbeau]]
* [[1964 au cinéma|1964]] : ''[[Le Journal d'une femme de chambre (film, 1964)|Le Journal d'une femme de chambre]]'', d'après le roman éponyme d'[[Octave Mirbeau]]
* [[1965 au cinéma|1965]] : ''[[Simon du désert]]'' (''Simón del Desierto'') (moyen métrage)
* [[1965 au cinéma|1965]] : ''[[Simon du désert]]'' (''Simón del desierto'') (moyen métrage)
* [[1967 au cinéma|1967]] : ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]''
* [[1967 au cinéma|1967]] : ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]''
* [[1969 au cinéma|1969]] : ''[[La Voie lactée (film, 1969)|La Voie lactée]]''
* [[1969 au cinéma|1969]] : ''[[La Voie lactée (film, 1969)|La Voie lactée]]''
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=== Scénariste ===
=== Scénariste ===
Outre les films suivants, Luis Buñuel a participé à l'écriture de tous les films qu'il a réalisés.
Outre l'écriture ou la participation à l'écriture de tous les films qu'il a réalisés, Luis Buñuel a participé à l'écriture des films suivants :
* [[1928 au cinéma|1928]] : ''[[La Chute de la maison Usher (film, 1928)|La Chute de la maison Usher]]'' de [[Jean Epstein]]
* [[1928 au cinéma|1928]] : ''[[La Chute de la maison Usher (film, 1928)|La Chute de la maison Usher]]'' de [[Jean Epstein]]
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[Don Quintín el amargao]]'' de {{Lien|langue=es|fr=Luis Marquina}}
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[Don Quintín el amargao]]'' de [[Luis Marquina]]
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[La hija de Juan Simon]]'' de [[José Luis Sáenz de Heredia]]
* [[1935 au cinéma|1935]] : {{Référence nécessaire|''[[La hija de Juan Simón|La hija de Juan Simon]]'' de [[José Luis Sáenz de Heredia]]|date=19 août 2022|bloc=|background=}}
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Si usted no puede, yo sí]]'' de [[Julián Soler]]
* [[1951 au cinéma|1951]] : ''[[Si usted no puede, yo sí]]'' de [[Julián Soler]]
* [[1972 au cinéma|1972]] : ''[[Le Moine (film, 1972)|Le Moine]]'' d'[[Ado Kyrou]]
* [[1972 au cinéma|1972]] : ''[[Le Moine (film, 1972)|Le Moine]]'' d'[[Ado Kyrou]]
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=== Producteur ===
=== Producteur ===
{{...}}
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* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[Don Quintín el amargao]]'' de {{Lien|langue=es|fr=Luis Marquina}} - producteur exécutif
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[Don Quintín el amargao]]'' de [[Luis Marquina]] - producteur exécutif
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[La hija de Juan Simon]]'' de [[José Luis Sáenz de Heredia]] - producteur exécutif
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[La hija de Juan Simón |La hija de Juan Simon]]'' de [[José Luis Sáenz de Heredia]] - producteur exécutif


=== Monteur ===
=== Monteur ===
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=== Acteur ===
=== Acteur ===
* 1974 : ''[[Le Fantôme de la liberté]]'' - Un condamné à mort (non crédité)
* [[1926 au cinéma|1926]] : ''[[Mauprat (film)|Mauprat]]'' - Un moine, un homme de garde
* 1973 : ''[[La Chute d'un corps]]'' - Un invité (non crédité)
* [[1926 au cinéma|1926]] : ''[[Carmen (film, 1926)|Carmen]]'' - Un contrebandier chez Lillas Pastia
* 1969 : ''[[La Voie lactée (film, 1969)|La Voie lactée]]'' (voix, non crédité)
* [[1929 au cinéma|1929]] : ''[[Un chien andalou]]'' - L'homme au rasoir (non crédité)
* 1967 : ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]'' - L'homme dans le café (non crédité)
* [[1930 au cinéma|1930]] : ''[[L'Âge d'or (film, 1930) |L'Âge d'or]]'' (non crédité)
* 1965 : ''[[En este pueblo no hay ladrones]]'' - Le curé
* [[1935 au cinéma|1935]] : ''[[La hija de Juan Simón]]''
* [[1953 au cinéma|1953]] : ''[[Les Orgueilleux]]'' - Un trafiquant (non crédité)
* 1964 : ''La Charge des rebelles'' - El verdugo
* [[1964 au cinéma|1964]] : ''La Charge des rebelles'' - El verdugo
* 1953 : ''[[Les Orgueilleux]]'' - Un trafiquant (non crédité)
* [[1965 au cinéma|1965]] : ''[[En este pueblo no hay ladrones]]'' - Le curé
* 1935 : ''La hija de Juan Simón''
* 1930 : ''[[L'Âge d'or (film, 1930)|L'Âge d'or]]'' (non crédité)
* [[1967 au cinéma|1967]] : ''[[Belle de jour (film)|Belle de jour]]'' - L'homme dans le café (non crédité)
* 1929 : ''[[Un chien andalou]]'' - L'homme au rasoir (non crédité)
* [[1969 au cinéma|1969]] : ''[[La Voie lactée (film, 1969)|La Voie lactée]]'' (voix, non crédité)
* 1926 : ''[[Carmen (film, 1926)|Carmen]]'' - Un contrebandier chez Lillas Pastia
* [[1973 au cinéma|1973]] : ''[[La Chute d'un corps]]'' - Un invité (non crédité)
* 1926 : ''[[Mauprat (film)|Mauprat]]'' - Un moine, un homme de garde
* [[1974 au cinéma|1974]] : ''[[Le Fantôme de la liberté]]'' - Un condamné à mort (non crédité)


== Distinctions ==
== Distinctions ==
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=== Autre ===
=== Autre ===
* Nommé [[Satrape du Collège de 'Pataphysique]]<ref>{{ouvrage|langue=|auteur=Pierre Billard|titre= Le Mystère René Clair|sous-titre=9 - Un satrape en habit vert|éditeur=Plon|volume=|année=1998|pages totales=|passage=375-388|isbn=|lire en ligne=https://www.cairn.info/le-mystere-rene-clair--9782259189286-page-375.htm}}</ref>.
* Nommé [[Satrape du Collège de 'Pataphysique]]<ref>{{ouvrage|auteur=Pierre Billard|titre= Le Mystère René Clair|sous-titre=9 - Un satrape en habit vert|éditeur=Plon|année=1998|passage=375-388|isbn=|lire en ligne=https://www.cairn.info/le-mystere-rene-clair--9782259189286-page-375.htm}}</ref>.


== Publications ==
== Publications ==
* ''Mon dernier soupir'' ([[autobiographie]]), coécrit avec [[Jean-Claude Carrière]], 1982
* ''Mon dernier soupir'' ([[autobiographie]]), coécrit avec [[Jean-Claude Carrière]], Paris, Robert Laffont, 1982
* ''Entretiens avec [[Max Aub]]'', préface de Jean-Claude Carrière, Paris, Belfond, 1991
* ''Entretiens avec [[Max Aub]]'', préface de Jean-Claude Carrière, Paris, Belfond, 1991
* ''Conversations avec Luis Buñuel'', Tomas Perez Torrent et Jose de la Colina, Paris, [[Cahiers du cinéma]], 1993 (première édition espagnole, 1986)
* ''Conversations avec Luis Buñuel'', Tomas Perez Torrent et Jose de la Colina, Paris, [[Cahiers du cinéma]], 1993 (première édition espagnole, 1986)
* ''Goya de Buñuel'', scénario de Buñuel présenté par [[Marielle Issartel]], édité par [[Jacques Damase]]
* ''Goya'', scénario de Buñuel, trad. de l'espagnol par Dorita Nouhaud, présenté par [[Marielle Issartel]], Paris, édité par [[Jacques Damase]], 1987
* ''Le Chien andalou et autres textes poétiques'', traduit de l'espagnol par Jean-Marie Saint-Lu, édition bilingue, Paris, Gallimard, coll. « Poésie/Gallimard », 2022


== Notes et références ==
== Notes et références ==
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* Fernando Cesarman, ''L'Œil de Buñuel''
* Fernando Cesarman, ''L'Œil de Buñuel''
* Maurice Drouzy, ''Luis Buñuel, architecte du rêve'', Paris, Pierre Lherminier, 1978
* Maurice Drouzy, ''Luis Buñuel, architecte du rêve'', Paris, Pierre Lherminier, 1978
* Kenji Kanesaka, « Une visite à Luis Buñuel », ''[[Positif (revue)|Positif]], {{numéro|664}}'', [[Institut Lumière]]/[[Actes Sud]], Paris, {{date||juin|2016}}, {{page|23-55}}, {{ISSN|0048-4911}}
* [[Ado Kyrou]], ''Luis Buñuel'', Paris, Seghers, 1962 ; réédition 1970
* [[Ado Kyrou]], ''Luis Buñuel'', Paris, Seghers, 1962 ; réédition 1970
* Antonio Monegal, ''Luis Buñuel de la literatura al cine, una poética del objeto'', Barcelona, Anthropos, 1993
* Antonio Monegal, ''Luis Buñuel de la literatura al cine, una poética del objeto'', Barcelona, Anthropos, 1993
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* {{es}} Jeanne Rucar de Buñuel, ''Memorias de una mujer sin piano'', avec Marisol Martín del Campo, México : Alianza ed. mexicana, 1991 {{ISBN|968-39-0390-8}}
* {{es}} Jeanne Rucar de Buñuel, ''Memorias de una mujer sin piano'', avec Marisol Martín del Campo, México : Alianza ed. mexicana, 1991 {{ISBN|968-39-0390-8}}
** {{en}} ''Memoirs of a Woman Without a Piano: My Life With Luis Bunuel'', Five Ties Publishing, 2011 {{ISBN|0979472768|9780979472763}}
** {{en}} ''Memoirs of a Woman Without a Piano: My Life With Luis Bunuel'', Five Ties Publishing, 2011 {{ISBN|0979472768|9780979472763}}
* Lionel Souquet, ''Néo-picaresque, (néo)réalisme et faillite de l’humanisme : "Los Olvidados" de Buñuel et "La Virgen de los Sicarios" de Vallejo, de la modernité à la postmodernité'', Les Langues Néo-Latines, Colloque Concours 2012, {{105e|année}}, 4, {{numéro|359}}, {{date-|décembre 2011}}, {{p.|117-156}}
* Lionel Souquet, ''Néo-picaresque, (néo)réalisme et faillite de l’humanisme : "Los olvidados" de Buñuel et "La virgen de los sicarios" de Vallejo, de la modernité à la postmodernité'', Les Langues Néo-Latines, Colloque Concours 2012, {{105e|année}}, 4, {{numéro|359}}, {{date-|décembre 2011}}, {{p.|117-156}}
* [[Marie-Claude Taranger]], ''Luis Buñuel, le jeu et la loi'', Vincennes, PUV, 1998
* [[Marie-Claude Taranger]], ''Luis Buñuel, le jeu et la loi'', Vincennes, PUV, 1998
* [[Charles Tesson]], ''Luis Buñuel'', Paris, éditions de l'Étoile/Cahiers du Cinéma, {{coll|Auteurs}}, 1995
* [[Charles Tesson]], ''Luis Buñuel'', Paris, éditions de l'Étoile/Cahiers du Cinéma, {{coll|Auteurs}}, 1995
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=== Liens externes ===
=== Liens externes ===
* {{Liens biographiques}}
{{Liens}}
* [[Institut national de l'audiovisuel|INA]]: [http://www.ina.fr/recherche/search?search=luis+bunuel&vue=Video Archives de l'Ina - Luis Buñuel]
* [[Institut national de l'audiovisuel|INA]]: [http://www.ina.fr/recherche/search?search=luis+bunuel&vue=Video Archives de l'Ina - Luis Buñuel]
* [http://www.cinespagne.com/portraits/2048-luis-bunuel Portrait de Luis Buñuel par Claude Murcia]
* [http://www.cinespagne.com/portraits/2048-luis-bunuel Portrait de Luis Buñuel par Claude Murcia]
* [http://www.centrepompidou.fr/education/ressources/ens-bunuel/ens-bunuel.html Luis Buñuel et le surréalisme] sur le site du Centre Pompidou
* [http://www.centrepompidou.fr/education/ressources/ens-bunuel/ens-bunuel.html Luis Buñuel et le surréalisme] sur le site du Centre Pompidou
<!-- * {{en}} [http://www.videoartworld.com/beta/artist_232.html Videoartworld : The Masters Series (Films et documentaire en ligne)] lien inactif, 18/04/15 -->
<!-- * {{en}} [http://www.videoartworld.com/beta/artist_232.html Videoartworld : The Masters Series (Films et documentaire en ligne)] lien inactif, 18/04/15 -->


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[[Catégorie:Réalisateur de film expérimental]]
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[[Catégorie:Prix de la mise en scène au Festival de Cannes]]
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[[Catégorie:Exilé du franquisme au Mexique]]
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[[Catégorie:Élève de l'Institution libre d'enseignement]]
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[[Catégorie:Décès en juillet 1983]]
[[Catégorie:Décès en juillet 1983]]
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[[Catégorie:Décès à Mexico]]

Version du 15 janvier 2024 à 15:59

Luis Buñuel
Luis Buñuel photographié par Man Ray en 1929.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 83 ans)
MexicoVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Tolocha (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Luis Buñuel PortolésVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
espagnole ( - )
mexicaine ( - )Voir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Activités
Période d'activité
Père
Leonardo Buñuel González (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoint
Jeanne Rucar (en) (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfant
Autres informations
Membre de
Mouvement
Distinctions
Films notables
Filmographie de Luis Buñuel (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Œuvres principales

Luis Buñuel (/ˈlwiz βuˈɲwel/[1]) est un réalisateur, scénariste et acteur espagnol naturalisé mexicain, né le à Calanda (Aragon, Espagne) et mort le à Mexico.

Buñuel se fait connaître, dans les dernières années du cinéma muet, comme metteur en scène surréaliste d’avant-garde[2], travaillant aux côtés de Salvador Dalí et du groupe surréaliste parisien autour d’André Breton ; sa création la plus marquante de cette époque est le court métrage Un chien andalou de 1929, qui fait scandale. Il tourne ensuite, après une interruption de quinze ans, des films dans quasiment tous les genres cinématographiques — film expérimental, documentaire, mélodrame, satire, comédie musicale, comédie, film romantique et historique, fantastique, policier, film d’aventures, et même western — composant une œuvre insaisissable, inégale, réfractaire à toute récupération idéologique, d’un caractère souvent iconoclaste et subversif, mais où la dénonciation d’une bourgeoisie figée et hypocrite constitue l’un de ses thèmes de prédilection, ce qu’illustrent en particulier L'Ange exterminateur (1962), Belle de jour (1967) et Le Charme discret de la bourgeoisie (1972).

Ainsi que le note Jean Collet,

« Buñuel est le peintre des contrastes violents, de l’ombre et de la lumière, de la nuit et du jour, du rêve et de la lucidité. Entre ces extrêmes, il cherche la plus grande tension. Il filme les fantasmes avec la caméra la plus terre-à-terre. Il est matérialiste quand il parle de Dieu, exalté, révolté quand il parle de la société des hommes[3]. »

En raison de ses convictions politiques et des obstacles imposés à sa création par la censure franquiste, il a préféré s’exiler et a tourné la majeure partie de son œuvre en France et au Mexique — dont il a pris la nationalité en 1951.

Buñuel est considéré comme l’un des réalisateurs les plus importants et les plus originaux de l'histoire du cinéma.

Biographie

Enfance

Calanda.

Luis Buñuel Portolés [ˈlwiz βuˈɲwel poɾtoˈles][1] naît à Calanda, petite ville d'Aragon dans laquelle il séjourne peu de temps puisque sa famille déménage à Saragosse peu après sa naissance. Il reste cependant très attaché à son village natal, et y retourne par la suite régulièrement. Le relief rocailleux, les environs désertiques et le caractère rugueux des habitants de la région marquent durablement le futur artiste. Le court métrage Un chien andalou dénote ostensiblement cette influence.

Buñuel étudie chez les jésuites jusqu'à l'âge de 15 ans et reçoit une formation répressive qui le marque. Mais il note également : « Les deux sentiments essentiels de mon enfance, qui perdurèrent avec force pendant l’adolescence, furent ceux d’un profond érotisme, tout d’abord sublimé dans une forte religiosité, et une constante conscience de la mort. » (Autobiografía, 1939).

Il regrette toute sa vie de n'avoir pu jouer de la musique (il jouait du violon) en raison de sa surdité. Établissant un lien entre son passé et le présent, il résume :

« J’ai eu la chance de passer mon enfance au Moyen Âge, cette époque “douloureuse et exquise”, comme l’écrivait Huysmans[4]. Douloureuse dans sa vie matérielle. Exquise dans sa vie spirituelle. Juste le contraire d’aujourd’hui. »

— Mon dernier soupir, 1982

Jeunesse

À 19 ans, il part vivre à Madrid et y commence des études supérieures. Il rencontre Salvador Dalí et Federico García Lorca puis apporte son soutien au mouvement dadaïste. En 1919, il rencontre à Saint-Sébastien l'écrivaine Concha Méndez, avec qui il se fiance et établit une relation de sept ans[5]. En 1923, il fonde avec Francisco et Federico García Lorca, entre autres, l'ordre de Tolède.

En 1925, il vient à Paris. Il se fait embaucher comme assistant réalisateur de Jean Epstein, sur le tournage de Mauprat en 1926 puis, deux ans plus tard, de La Chute de la maison Usher.

Surréalisme

Du Chien andalou à Cet obscur objet du désir, Luis Buñuel construit une œuvre profondément marquée par le surréalisme. Ses films en portent pratiquement tous, à des degrés divers, la marque que ce soit dans la forme ou le discours. Buñuel remet en effet en cause, dans la quasi-totalité de ses réalisations, la continuité du récit et la lisibilité de la mise en espace. La temporalité et le rythme sont fragmentés. Se développe également un jeu stylistique sur le retournement, l'inversion et le mélange des contraires (notamment le trivial et le sublime). La réalité, le rêve, le quotidien, le fantasme, l'univers familier et l'hallucinatoire sont mis sur le même plan. Le cinéaste surréaliste est donc celui qui « aura détruit la représentation conventionnelle de la nature […], ébranlé l'optimisme bourgeois et obligé le spectateur à douter de la pérennité de l'ordre existant[6]. »

Émile Malespine fait connaître son œuvre à Lyon, en France, au Théâtre du Donjon[7].

Premiers films

Tête de Luis Buñuel, par le sculpteur Iñaki, au Centre Buñuel à Calanda.

En 1928, avec l'aide matérielle de sa mère, Luis Buñuel tourne son premier film Un chien andalou, un court métrage muet d'une vingtaine de minutes dont il écrit le scénario avec Salvador Dalí. Le film, qui n'obéit pas à une logique narrative traditionnelle, contient des scènes restées célèbres, comme celle montrant une lame de rasoir tranchant un œil ou la finale dans laquelle des amants meurent dans le sable fin. Dans un premier temps, ce film est projeté en privé pour Man Ray et Louis Aragon. Très enthousiastes, ces derniers demandent à Buñuel d'organiser une séance pour les surréalistes.

Buñuel réalise ensuite L'Âge d'or, une fois encore scénarisé avec Dali et produit cette fois par le mécène Charles de Noailles. L'Âge d'or est décrit par José Pierre comme « peut-être l'unique film intentionnellement surréaliste ». Par son contenu délibérément provoquant, il ne tarde pas à provoquer de vives réactions.

Le , après la première projection du film, la censure exige des coupes. Quelques jours après, la Ligue des patriotes et la Ligue anti-juive saccagent la salle de cinéma Studio 28 à Montmartre, dans le 18e arrondissement de Paris, qui projette le film et propose dans son hall une exposition d'œuvres surréalistes. Ce saccage est le point de départ d'une virulente campagne de presse contre les surréalistes, et le préfet de police Chiappe[8] fait saisir le film. En réalité, seule la copie de projection est confisquée puis détruite car le négatif reste en possession de Charles et de Marie-Laure de Noailles, les mécènes du film. L'interdiction de projection n'est finalement levée qu'en 1980.

Buñuel s'éloigne du surréalisme et change de registre pour son film suivant, Terre sans pain, un moyen-métrage documentaire décrivant les conditions de vie misérables prévalant dans une région de l'Espagne, Les Hurdes. Le film est interdit par le gouvernement espagnol de 1933-1935.

États-Unis

Entre 1933 et 1935, Buñuel travaille en Espagne pour des compagnies américaines. La guerre civile qui éclate en Espagne le bouleverse. Il participe à un documentaire pro-républicain Madrid 36 puis se rend aux États-Unis. Il se consacre à la démonstration de l'efficacité et du danger des films de propagande nazis (il utilise en particulier un film de Leni Riefenstahl).

Il ne cache pas son anticatholicisme et son marxisme et subit des pressions, notamment après la parution, en 1942, du livre de Salvador Dalí La Vie secrète de Salvador Dali où il est décrit comme seul responsable des aspects les plus controversés de L'Âge d'or. Il doit abandonner son poste au Museum of Modern Art de New York et s'exiler au Mexique.

Mexique

Il y reprend sa carrière de réalisateur, grâce au producteur Oscar Dancigers. Son premier film mexicain, la comédie musicale Gran Casino (1947), est un échec. Le second, une petite comédie avec Fernando Soler, Le Grand Noceur (1949), remporte un réel succès. Elle lui vaut aussi la réputation d'un cinéaste fiable, capable de respecter ses budgets. Dancigers lui suggère ensuite de s'intéresser à la vie des enfants pauvres de Mexico. Il en résulte Los Olvidados, littéralement Les Oubliés, un drame social assez dur dans lequel l'influence du néo-réalisme italien côtoie certaines touches surréalistes. Le film est présenté au Festival de Cannes 1951 et y remporte le prix de la mise en scène, remettant Buñuel au premier plan.

Toujours pour Dancigers, Buñuel signe également des adaptations de romans classiques comme Les Aventures de Robinson Crusoé d'après le livre de Daniel Defoe ou Les Hauts de Hurlevent d'après l'œuvre d'Emily Brontë, tourné sous le titre Abismos de Pasión. Parmi les autres films notables de cette période, on peut citer Tourments, étude d'un cas de jalousie maladive, et La Vie criminelle d'Archibald de la Cruz, comédie macabre sur un tueur en série ; deux films qui multiplient les références au marquis de Sade, à la religion et à la bourgeoisie. Nazarín (1958) marque l'apogée de sa période mexicaine.

Retour en Europe

Luis Buñuel en 1968.

Buñuel se voit proposer un tournage en Europe : il s'agit de Viridiana, qui obtient la Palme d'or au festival de Cannes 1961, mais provoque d'importants remous politiques, diplomatiques et religieux, notamment pour la représentation finale, parodiant la Cène, d'indigents qui s'emparent de la demeure de propriétaires terriens et se livrent à une orgie. Le régime de Franco, qui avait permis le tournage du film et accepté qu'il représente officiellement l'Espagne à Cannes, finit par l'interdire complètement. Les copies espagnoles sont saisies et détruites mais le film est distribué normalement en France. Le film n'est ensuite distribué en Espagne qu'en 1977, deux ans après la mort du caudillo.

Suivent L'Ange exterminateur, tourné au Mexique, et Le Journal d'une femme de chambre, adaptation du célèbre roman d'Octave Mirbeau et premier film tourné en France par Buñuel depuis L'Âge d'or. En choisissant de repousser de trente ans l'action du roman de Mirbeau, Luis Buñuel s'offre une belle vengeance sur ceux qui bâillonnèrent ses débuts dans les années 1930 : dans la dernière séquence du film, des manifestants d'extrême droite scandent effectivement « Vive Chiappe ! » et « Mort aux Juifs ! ».

Après cette adaptation, Buñuel signe son dernier film mexicain, le surprenant Simon du désert. Il vient alors régulièrement tourner en France, en particulier des projets développés en compagnie du scénariste Jean-Claude Carrière. Leur collaboration dure dix-neuf ans et ne s'interrompt qu'à la mort du cinéaste. Ses films sont toujours aussi puissants et en lutte contre la classe bourgeoise dominante : La Voie lactée, Belle de jour (un des plus gros succès commerciaux de la carrière de Buñuel) et Le Charme discret de la bourgeoisie, récompensé par l'Oscar du meilleur film étranger en 1973. Il tourne Tristana en Espagne, à Tolède, malgré l'incident provoqué par Viridiana.

Buñuel choisit d'arrêter sa carrière de réalisateur, en 1976, avec Cet obscur objet du désir.

Vie privée

Le , Luis Buñuel épouse Jeanne Rucar[9] à la mairie du 20e arrondissement de Paris[10]. Ils vivent ensemble près de cinquante ans, jusqu'à la mort du cinéaste.

Il est le père de Juan Luis Buñuel, réalisateur, et de Rafael Buñuel ; il est ainsi le grand-père du journaliste et réalisateur Diego Buñuel et l'ex-beau-père de la réalisatrice Joyce Buñuel.

Mort

Luis Buñuel meurt le à Mexico, à l'âge de 83 ans.

Incinéré, ses cendres sont dispersées quatorze ans après sa mort sur le mont Tolocha (es)[11], en Espagne[12].

Filmographie

Assistant réalisateur

Réalisateur

Scénariste

Outre l'écriture ou la participation à l'écriture de tous les films qu'il a réalisés, Luis Buñuel a participé à l'écriture des films suivants :

Producteur

Monteur

Acteur

Distinctions

Récompenses

Décoration

Autre

Publications

  • Mon dernier soupir (autobiographie), coécrit avec Jean-Claude Carrière, Paris, Robert Laffont, 1982
  • Entretiens avec Max Aub, préface de Jean-Claude Carrière, Paris, Belfond, 1991
  • Conversations avec Luis Buñuel, Tomas Perez Torrent et Jose de la Colina, Paris, Cahiers du cinéma, 1993 (première édition espagnole, 1986)
  • Goya, scénario de Buñuel, trad. de l'espagnol par Dorita Nouhaud, présenté par Marielle Issartel, Paris, édité par Jacques Damase, 1987
  • Le Chien andalou et autres textes poétiques, traduit de l'espagnol par Jean-Marie Saint-Lu, édition bilingue, Paris, Gallimard, coll. « Poésie/Gallimard », 2022

Notes et références

  1. a et b Prononciation en espagnol d'Amérique retranscrite selon la norme API.
  2. (en) Peter B. Flint, « Luis Buñuel dies at 83; Filmmaker for 50 Years », New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  3. Encyclopædia Universalis, tome III, 1985, art. « Luis Buñuel » par Jean Collet, p. 1109.
  4. Joris-Karl Huysmans, Là-Bas.
  5. (es) Heraldo de Aragón, « Concha Méndez recuerda en sus memorias sus siete años de noviazgo con el joven Luis Buñuel », sur heraldo.es.
  6. Luis Buñuel.
  7. Thierry Roche, Les arts décoratifs à Lyon 1910 à 1950, Beau Fixe, p. 117.
  8. Selon Le Journal d'une femme de chambre, les manifestants défilent en criant « Vive Chiappe ! »
  9. (en) Jeanne Rucar De Bunuel et Marisol Martin Del Campo, Memoirs of a Woman Without a Piano: My Life With Luis Bunuel, Five Ties Publishing, (ISBN 978-0-9794727-6-3, lire en ligne)
    Jeanne Rucar Lefebvre est née à Lille en 1908, et morte à Mexico en 1994.
  10. Voir sur des-gens.net.
  11. (es) Unidad Editorial Internet, « Buñuel, polvo de Calanda », sur www.elmundo.es (consulté le ) : « Mi hermano Juan Luis, mi primo Pedro Christian García-Buñuel y yo esparcimos esas cenizas en 1997 en el Monte Tolocha, en Calanda [en français : Mon frère Juan Luis, mon cousin Pedro Christian Garcia-Buñuel et moi avons répandu ces cendres en 1997 au Monte Tolocha, à Calanda]. »
  12. « Luis Buñuel (1900-1983) - Mémorial Find a Grave », sur fr.findagrave.com (consulté le )
  13. (es) « Real Decreto 1181/1981, de 8 de mayo, por el que se concede la Medalla al Mérito en las Bellas Artes, en su categoría de Oro, al Actor y Director don Fernando Fernán-Gómez », Boletin Oficial del Estado, Madrid, no 147,‎ , p. 14139 (lire en ligne).
  14. Pierre Billard, Le Mystère René Clair : 9 - Un satrape en habit vert, Plon, (lire en ligne), p. 375-388

Voir aussi

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Bibliographie

  • Freddy Buache, Buñuel, Genève, L'Âge d'homme, 1990
  • Raymonde Carasco, « Notes pour un cinéma de la cruauté, Artaud, Buñuel et le cinéma mexicain », Art-Latina, no 1, Mexico, 1995, en ligne [PDF]
  • Jean-Claude Carrière, Le Réveil de Buñuel, Paris, Odile Jacob, 2011
  • Fernando Cesarman, L'Œil de Buñuel
  • Maurice Drouzy, Luis Buñuel, architecte du rêve, Paris, Pierre Lherminier, 1978
  • Kenji Kanesaka, « Une visite à Luis Buñuel  », Positif, no 664, Institut Lumière/Actes Sud, Paris, , p. 23-55, (ISSN 0048-4911)
  • Ado Kyrou, Luis Buñuel, Paris, Seghers, 1962 ; réédition 1970
  • Antonio Monegal, Luis Buñuel de la literatura al cine, una poética del objeto, Barcelona, Anthropos, 1993
  • Marcel Oms, Don Luis Buñuel, préface de Jean-Claude Carrière, Paris, Le Cerf, coll. « 7e Art », 1985
  • (es) Jeanne Rucar de Buñuel, Memorias de una mujer sin piano, avec Marisol Martín del Campo, México : Alianza ed. mexicana, 1991 (ISBN 968-39-0390-8)
  • Lionel Souquet, Néo-picaresque, (néo)réalisme et faillite de l’humanisme : "Los olvidados" de Buñuel et "La virgen de los sicarios" de Vallejo, de la modernité à la postmodernité, Les Langues Néo-Latines, Colloque Concours 2012, 105e année, 4, no 359, , p. 117-156
  • Marie-Claude Taranger, Luis Buñuel, le jeu et la loi, Vincennes, PUV, 1998
  • Charles Tesson, Luis Buñuel, Paris, éditions de l'Étoile/Cahiers du Cinéma, coll. « Auteurs », 1995

Filmographie sur Luis Buñuel

Articles connexes

Liens externes