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L''''exercice nucléaire de Totskoïe''' était un [[exercice militaire]] mené par l'[[armée soviétique]] pour explorer la [[guerre]] défensive et offensive pendant la [[guerre nucléaire]]. L'exercice, connu sous le nom de code « boule de neige », impliquait une détonation aérienne d'une [[Bombe A|bombe atomique]] aussi puissante que les deux bombes utilisées dans les [[Bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki|attaques américaines sur Hiroshima et Nagasaki]] réunies. L'objectif affiché de l'opération était la formation militaire pour briser les lignes de défense fortifiées d'un adversaire utilisant des [[Arme nucléaire|armes nucléaires]]<ref>[http://actualhistory.ru/tozk_nuclear ''Exercice de Totskoïe. Mesures de sécurité (Russe)''] par Sergei Markov.</ref>. Une armée de {{nombre|45000|soldats}} marcha dans la zone autour de l'[[épicentre]], peu après l'[[explosion atomique]]<ref>[[Viktor Suvorov]], ''[http://militera.lib.ru/research/suvorov7/index.html La victoire de l'ombre]'' ({{lang|ru|Тень победы}}), Donetsk, 2003, {{ISBN|966-696-022-2}}, pages 353-375. Le compte rendu officiel de Georgui Jukov comme un chef militaire impeccable. Le chapitre sur l’exercice nucléaire de Totskoïe est principalement basé sur les publications dans la presse russe, comme [[Krasnaïa Zvezda]] (Étoile Rouge), un journal officiel du [[ministère de la Défense (Russie)]], et la [[Literatournaïa gazeta]].</ref>. L'exercice fut réalisé le {{date|14 septembre 1954}}, sous le commandement du [[Maréchal de l'Union soviétique|maréchal]] [[Gueorgui Joukov|Joukov]] au nord du village de Totskoïe dans l’[[oblast d'Orenbourg]], en [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie]], dans le [[district militaire]] du sud de l'[[Oural]]<ref name="podrobnosti"/>.
L''''exercice nucléaire de Totskoïe''' est un [[exercice militaire]] mené par l'[[armée soviétique]] pour explorer la [[guerre]] défensive et offensive pendant la [[guerre nucléaire]]. L'exercice, connu sous le nom de code « boule de neige », impliquait une détonation aérienne d'une [[Bombe A|bombe atomique]] aussi puissante que les deux bombes utilisées dans les [[Bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki|attaques américaines sur Hiroshima et Nagasaki]] réunies. L'objectif affiché de l'opération était un entraînement militaire pour briser les lignes de défense fortifiées d'un adversaire utilisant des [[Arme nucléaire|armes nucléaires]]<ref>[http://actualhistory.ru/tozk_nuclear ''Exercice de Totskoïe. Mesures de sécurité (Russe)''] par Sergei Markov.</ref>.
Une armée de {{nombre|45000|soldats}} marcha dans la zone autour de l'[[épicentre]], peu après l'[[explosion atomique]]<ref>[[Viktor Suvorov]], ''[http://militera.lib.ru/research/suvorov7/index.html La victoire de l'ombre]'' ({{lang|ru|Тень победы}}), Donetsk, 2003, {{ISBN|966-696-022-2}}, pages 353-375. Le compte rendu officiel de Georgui Jukov comme un chef militaire impeccable. Le chapitre sur l’exercice nucléaire de Totskoïe est principalement basé sur les publications dans la presse russe, comme [[Krasnaïa Zvezda]] (Étoile Rouge), un journal officiel du [[ministère de la Défense (Russie)]], et la [[Literatournaïa gazeta]].</ref>. L'exercice fut réalisé le {{date|14 septembre 1954}}, sous le commandement du [[Maréchal de l'Union soviétique|maréchal]] [[Gueorgui Joukov|Joukov]] au nord du village de Totskoïe dans l’[[oblast d'Orenbourg]], en [[République socialiste fédérative soviétique de Russie|Russie]], dans le [[district militaire]] du sud de l'[[Oural]]<ref name="podrobnosti"/>{{,}}<ref name="DM">[https://www.dissident-media.org/infonucleaire/totsk.html L'essai à Totsk en 1954]</ref> Le maréchal Joukov et les ministres de la Défense de Chine [[Peng Dehuai]] {{incise|accompagné du commandant en chef de l'[[armée populaire de libération]] [[Zhu De]]}}, de [[République populaire de Pologne|Pologne]] {{incise|accompagné du général [[Marian Spychalski]]}} et de [[République fédérative socialiste de Yougoslavie|Yougoslavie]], avec le général tchécoslovaque [[Ludvík Svoboda]]<ref name="news.ru"/>, observaient la scène d'une tour située à cinq kilomètres de l'explosion<ref>{{ouvrage|langue=fr|auteur1= Georges Charpak |auteur2= Richard L. Garwin |titre=Feux follets et champignons nucléaires|éditeur=[[Odile Jacob]]|année=|pages totales=382|passage=171|isbn=|lire en ligne=https://www.google.fr/books/edition/Feux_follets_et_champignons_nucl%C3%A9aires/BjGn9Bz0Q3MC?hl=fr&gbpv=1&dq=Joukov+exercice+nucl%C3%A9aire&pg=PA171&printsec=frontcover}}.</ref>


== Histoire ==
== Histoire ==
[[File:RDS-4 Nuclear bomb Army-2022 2022-08-20 2453.jpg|vignette|gauche|Une RDS-4 exposée en 2022.]]
[[Fichier:RIAN archive 2410 Marshal Zhukov speaking.jpg|vignette|gauche|Le [[Gueorgui Joukov|maréchal Joukov]] en 1941.]]
[[Fichier:RIAN archive 2410 Marshal Zhukov speaking.jpg|vignette|gauche|Le [[Gueorgui Joukov|maréchal Joukov]] en 1941.]]
À la mi-septembre 1954, des essais de [[Arme nucléaire|bombardement nucléaire]] furent effectués dans le [[polygone d’essai de Totskoïe]] lors de l'exercice de formation ''Snezhok'' (« boule de neige » ou « neige légère ») avec quelque {{nombre|45000|personnes}}, tous soldats ou officiers de l'[[armée de terre soviétique]]<ref name="podrobnosti">{{lien web | url=http://podrobnosti.ua/video/podrobnosti/2009/09/20/630445.html | titre= Il y a 55 ans, Jukov testait des armes nucléaires sur les personnes (russe) Ce lien fournit de vieux enregistrements vidéo de l'exercice nucléaire réel. | périodique=podrobnosti.ua | langue=ru | date=20 septembre 2009 | consulté le=5 mars 2011}}.</ref>{{,}}<ref name="news.ru">{{lien web | url=http://newsru.com/russia/14sep2004/ussr.html | titre= Il y a 50 ans, l'URSS réalisait l'opération « Boule de neige » : {{nombre|43000|soldats}} soviétiques mourraient. (en russe)| langue=ru | périodique=newsru.com | date=14 septembre 2004 | consulté le=5 mars 2011}}.</ref> qui furent exposés à des radiations d'une bombe deux fois plus puissante que celle d'[[Bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki|Hiroshima]] lâchée neuf ans plus tôt. L'exercice était commandé par le maréchal de l'Union soviétique Joukov. Le {{date|14 septembre 1954}} à {{heure|09|33}}, un [[Bombardier (avion)|bombardier]] soviétique [[Tupolev Tu-4|Tu-4]] lâcha une bombe atomique [[RDS-4]] de 40 [[Équivalent en TNT|kilotonnes]] ({{unité|170|TJ}}) d’une altitude de {{unité|8000|mètres}}. La bombe explosa à {{unité|350|mètres}} au-dessus du centre d’essai de Totskoïe, à {{unité|13|km}} de {{Lien|langue=en|trad=Totskoye|fr=Totskoïe}} dans l'[[oblast d'Orenbourg]]<ref name="news.ru"/>{{,}}<ref name="neu-samara.de">{{lien web | url=http://www.neu-samara.de/index.php?artikel=9&sprache=en | auteur=Dietrich Tissen | titre=Essai nucléaire à Totskoïe en 1954 | consulté le=10 janvier 2007}}.</ref>.
À la mi-septembre 1954, des essais de [[Arme nucléaire|bombardement nucléaire]] furent effectués dans le [[polygone d’essai de Totskoïe]] lors de l'exercice de formation ''Snezhok'' (« boule de neige » ou « neige légère ») avec quelque {{nombre|45000|personnes}}, tous soldats ou officiers de l'[[armée de terre soviétique]]<ref name="podrobnosti">{{lien web | url=http://podrobnosti.ua/video/podrobnosti/2009/09/20/630445.html | titre= Il y a 55 ans, Jukov testait des armes nucléaires sur les personnes (russe) Ce lien fournit de vieux enregistrements vidéo de l'exercice nucléaire réel. | périodique=podrobnosti.ua | langue=ru | date=20 septembre 2009 | consulté le=5 mars 2011}}.</ref>{{,}}<ref name="news.ru">{{lien web | url=http://newsru.com/russia/14sep2004/ussr.html | titre= Il y a 50 ans, l'URSS réalisait l'opération « Boule de neige » : {{nombre|43000|soldats}} soviétiques mourraient. (en russe)| langue=ru | périodique=newsru.com | date=14 septembre 2004 | consulté le=5 mars 2011}}.</ref> qui furent exposés à des radiations d'une bombe deux fois plus puissante que celle d'[[Bombardements atomiques d'Hiroshima et de Nagasaki|Hiroshima]] neuf ans plus tôt. L'exercice était commandé par le maréchal de l'Union soviétique [[Joukov]]. Le {{date|14 septembre 1954}} à {{heure|09|33}}, un [[Bombardier (avion)|bombardier]] soviétique [[Tupolev Tu-4|Tu-4]] largua une bombe atomique [[RDS-4]] de 40 [[Équivalent en TNT|kilotonnes]] ({{unité|170|TJ}}) d’une altitude de {{unité|8000|mètres}}. La bombe explosa à {{unité|350|mètres}} au-dessus du centre d’essai de Totskoïe, à {{unité|13|km}} de {{Lien|langue=en|trad=Totskoye|fr=Totskoïe}} dans l'[[oblast d'Orenbourg]]<ref name="news.ru"/>{{,}}<ref name="neu-samara.de">{{lien web | url=http://www.neu-samara.de/index.php?artikel=9&sprache=en | auteur=Dietrich Tissen | titre=Essai nucléaire à Totskoïe en 1954 | consulté le=10 janvier 2007}}.</ref>.


Au cours de l'exercice, plus de {{nombre|45000|personnes}} furent délibérément exposées aux radiations<ref name=nuclearfiles>{{lien web | url=http://www.nuclearfiles.org/menu/key-issues/ethics/issues/scientific/human-nuclear-experiments.htm | titre=Expérimentations nucléaires sur des humains | périodique = NuclearFiles.org | consulté le=10 janvier 2007}}.</ref>. Il s'agissait de la {{Lien|langue=en|trad=270th Rifle Division|fr=270e division d'infanterie (Russie)|texte=270{{e}} division d'infanterie}}<ref>V.I. Feskov et al., "''The Soviet Army in the Cold War 1945–90''", Tomsk, 2004, {{p.|94}}.</ref>, de 320 avions, de 600 [[char d'assaut|chars]] et de 600 [[véhicule blindé de transport de troupes|véhicules blindés de transport de troupes]]. Les soldats reçurent l'ordre qu'il y aurait un exercice militaire normal, avec une explosion nucléaire fictive et que ce serait filmé<ref name="podrobnosti"/>. Les militaires ne reçurent pas d'équipement de protection<ref name="podrobnosti"/>. Le ministre de la Défense adjoint Gueorgui Joukov fut témoin de l’explosion depuis un [[abri antiatomique]] souterrain. Les avions reçurent l’ordre de bombarder le site de l'explosion cinq minutes après l'explosion, et trois heures plus tard (après la délimitation de la zone radioactive) les véhicules blindés reçurent l’ordre de prendre une zone hostile après une attaque nucléaire<ref name="neu-samara.de"/>.
Au cours de l'exercice, plus de {{nombre|45000|personnes}}, dont {{unité|6000|officiers}}, furent délibérément exposées aux radiations<ref name=nuclearfiles>{{lien web | url=http://www.nuclearfiles.org/menu/key-issues/ethics/issues/scientific/human-nuclear-experiments.htm | titre=Expérimentations nucléaires sur des humains | périodique = NuclearFiles.org | consulté le=10 janvier 2007}}.</ref>. Il s'agissait de la {{Lien|langue=en|trad=270th Rifle Division (Soviet Union)|fr=270e division d'infanterie (Russie)|texte=270{{e}} division d'infanterie}}<ref>V.I. Feskov et al., "''The Soviet Army in the Cold War 1945–90''", Tomsk, 2004, {{p.|94}}.</ref>, de 320 avions, de 600 [[char d'assaut|chars]] et de 600 [[véhicule blindé de transport de troupes|véhicules blindés de transport de troupes]]. Les soldats reçurent l'ordre d’exécution d’un exercice militaire normal, avec une explosion nucléaire fictive, et avertis que ce serait filmé<ref name="podrobnosti"/>. Les militaires ne reçurent pas d'équipement de protection<ref name="podrobnosti"/>. Le ministre de la Défense adjoint [[Gueorgui Joukov]] fut témoin de l’explosion depuis un [[abri antiatomique]] souterrain. Les avions et l'artillerie reçurent l’ordre de bombarder le site de l'explosion cinq minutes après l'explosion, et trois heures plus tard (après la délimitation de la zone radioactive) les véhicules blindés reçurent l’ordre de prendre une zone hostile après une attaque nucléaire<ref name="neu-samara.de"/>.


Les militaires reçurent l'ordre de collecter des données dans les [[retombées radioactives]] de l'épicentre, mais sans excéder un [[röntgen]] par heure sur leurs détecteurs (1 [[rem]]/h = 10 mSv/h)<ref>Pereira, Caesar R., "A Process for ADM-300 Radiation Detector Modernization for Military Applications" (2021). UNLV Theses, Dissertations, Professional Papers, and Capstones. 4180. http://dx.doi.org/10.34917/25374073, p. 21</ref>. Pour déterminer les niveaux de rayonnement, il était prévu d'utiliser des patrouilles dosimétriques, qui devaient arriver sur la zone d'explosion 40 minutes après l'explosion et marquer les limites des zones de contamination par des panneaux d'avertissement. Le personnel de la patrouille se trouvait dans un char dont le blindage réduisait de 8 à 9 fois la dose de rayonnement pénétrant<ref>[https://podarilove.ru/sk/vzryv-atomnoi-bomby-v-sssr-ispytanie-pervoi-atomnoi-bomby-v-sssr-tockie/ Výbuch atómovej bomby v ZSSR].</ref>. À 300 mètres de l'épicentre, le débit de dose rencontré était de 25 R/h (zone interdite à la circulation) ; il n'était plus que de 0,5 R/h à 500 mètres et 0,1 R/h à 850 mètres<ref>[https://eurodomik.ru/de/materials/operaciya-snezhok-iz-istorii-sssr-poligon-tockii-ispytaniya-na-tockom.html Operation Schneeball. aus der Geschichte der UdSSR. Vieleck Totsky].</ref>.
Les habitants de certains villages (Bogdanovka et Fedorovka) qui étaient situés à environ {{unité|6|km}} de l'épicentre de la prochaine explosion furent évacués temporairement à l'extérieur d’un cercle de {{unité|50|km}} de rayon<ref name="news.ru"/>. La plupart des populations locales ne fut cependant jamais avertie.

Les habitants de certains villages (Bogdanovka et Fedorovka) qui étaient situés à environ {{unité|6|km}} de l'épicentre de la prochaine explosion furent évacués temporairement à l'extérieur d’un cercle de {{unité|50|km}} de rayon<ref name="news.ru"/>. La plupart des populations locales ne furent cependant pas averties.


== Conséquences ==
== Conséquences ==
[[File:Мемориал на месте ядерного взрыва на Тоцком полигоне.jpg|vignette|Mémorial bâti sur le site d'essais nucléaires.]]
Des milliers de personnes qui furent soupçonnées d'avoir cherché de l'aide dans les hôpitaux locaux auront la surprise, plus tard, de constater que leurs dossiers médicaux avaient disparu de l'hôpital régional. Ce fait fut confirmé par un ancien soldat qui avait participé à l’exercice, Alexeï Petrovitch Vavilov, lors d’un entretien<ref name="podrobnosti"/> pour le programme de télévision ''Podrobnosti'' (chaîne de télévision [[Inter (chaîne de télévision)|INTER]]), plus de 50 ans plus tard<ref name="podrobnosti"/>.
Des milliers de personnes qui furent soupçonnées d'avoir cherché de l'aide dans les hôpitaux locaux auront la surprise, plus tard, de constater que leurs dossiers médicaux avaient disparu de l'hôpital régional. Ce fait fut confirmé par un ancien soldat qui avait participé à l’exercice, Alexeï Petrovitch Vavilov, lors d’un entretien<ref name="podrobnosti"/> pour le programme de télévision ''Podrobnosti'' (chaîne de télévision [[Inter (chaîne de télévision)|INTER]]), plus de 50 ans plus tard<ref name="podrobnosti"/>.


Plus d'un demi-siècle plus tard, cette question est toujours sous le contrôle strict du gouvernement fédéral russe. Les membres des forces de l'ordre locales continuent de harceler les journalistes qui tentent d'obtenir des images du polygone d’essai<ref name="podrobnosti"/>. L'exercice n’est devenu largement connu qu'en 1993<ref name="podrobnosti"/>. Même les soldats qui participèrent à l'exercice ne savaient pas qu'ils y avaient pris part<ref name="podrobnosti"/>. Le gouvernement félicita la population locale pour son héroïsme dans la fourniture du bouclier nucléaire à leur patrie.
Plus d'un demi-siècle plus tard, cette question est toujours sous le contrôle strict du gouvernement fédéral russe. Les membres des forces de l'ordre locales continuent de harceler les journalistes qui tentent d'obtenir des images du polygone d’essai<ref name="podrobnosti"/>. L'exercice n’est devenu largement connu qu'en 1993<ref name="podrobnosti"/>. Même les soldats qui participèrent à l'exercice ne savaient pas qu'ils y avaient pris part<ref name="podrobnosti"/>. Le gouvernement félicita la population locale pour son héroïsme dans la fourniture du bouclier nucléaire à leur patrie.


En 2004, cinquante ans plus tard, un peu plus de {{unité|2000|vétérans}} sont encore en vie. La moitié d'entre eux (à présent âgés de plus de soixante-dix ans) sont officiellement reconnus comme personnes handicapées des premier et deuxième groupes, 74,5 % souffrent de maladies du système cardiovasculaire, notamment d'hypertension et d'athérosclérose cérébrale, 20,5 % de maladies du système digestif, 4,5 % de tumeurs malignes et de maladies du sang<ref name="news.ru"/>.
== Voir aussi ==

* [[Exercices Desert Rock]]
Pour le {{60e|anniversaire}} de l'exercice en 2014, les {{nobr|374 vétérans}} survivants des {{citation|unités à risque spécial}} résidant dans l'[[Oblast d'Orenbourg]], ont reçu une prime de {{unité|3000|roubles}} (équivalent à moins de {{nobr|50 euros}} en 2023)<ref>{{Lien web|langue= ru|url=https://www.atomic-energy.ru/news/2014/08/05/50713|titre=На месте Тоцкого ядерного взрыва пройдут памятные мероприятия|site=www.atomic-energy.ru |année=5 aout 2014 |consulté le=26 décembre 2023 }}.</ref>. Au {{date|15 septembre 2021}}, il reste {{nobr|37 vétérans}} dans cet oblast<ref>{{Lien web|langue= ru|url=https://www.atomic-energy.ru/news/2021/09/15/117444|titre=В Оренбурге почтили память участников ядерных испытаний на Тоцком полигоне|site=www.atomic-energy.ru |année=15 septembre 2021|consulté le=26 décembre 2023 }}.</ref>.
* [[Opération Plumbbob]]


== Références ==
== Références ==
{{Traduction/Référence|en|Totskoye nuclear exercise|3=584824796}}
{{reflist}}
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== Bibliographie ==
== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* ''Nuclear Testing in the USSR''. Volume 2. Soviet Nuclear Testing Technologies. Environmental Effects. Safety Provisions. Nuclear Test Sites, Begell-House, Inc., New York, 1998.
* ''Nuclear Testing in the USSR''. Volume 2. Soviet Nuclear Testing Technologies. Environmental Effects. Safety Provisions. Nuclear Test Sites, Begell-House, Inc., New York, 1998.
* A. A. Romanyukha, E. A. Ignatiev, D. V. Ivanov & A. G. Vasilyev, ''The Distance Effect on the Individual Exposures Evaluated from the Soviet Nuclear Bomb Test in 1954 at Totskoye Test Site in 1954'', Radiation Protection Dosimetry 86:53-58 (1999), [http://rpd.oxfordjournals.org/cgi/content/abstract/86/1/53 résumé en ligne].
* A. A. Romanyukha, E. A. Ignatiev, D. V. Ivanov & A. G. Vasilyev, ''The Distance Effect on the Individual Exposures Evaluated from the Soviet Nuclear Bomb Test in 1954 at Totskoye Test Site in 1954'', Radiation Protection Dosimetry 86:53-58 (1999), [http://rpd.oxfordjournals.org/cgi/content/abstract/86/1/53 résumé en ligne].
* {{lien web | url=http://www.iss-atom.ru/ksenia/tockoe/soder.htm | titre=Тоцкое войсковое учение (научно-публицистическая монография) | auteur=Генерал-лейтенант С.А. Зеленцов | traduction titre=Totskoye Military Exercise | langue=ru | consulté le=5 mars 2011}}.


== Liens externes ==
=== Articles connexes ===
* [[Exercices Desert Rock]]
* [[Opération Plumbbob]]

=== Liens externes ===
* {{lien web | url=http://www.iss-atom.ru/ksenia/tockoe/soder.htm | titre=Тоцкое войсковое учение (научно-публицистическая монография) | auteur=Генерал-лейтенант С.А. Зеленцов | traduction titre=Totskoye Military Exercise | langue=ru | consulté le=5 mars 2011}}.
* {{lien web | url=http://www.johnstonsarchive.net/nuclear/radevents/1954USSR1.html | titre=Totsk nuclear test, 1954 | auteur=Wm. Robert Johnston | date=5 mai 2005 | consulté le=5 mars 2011}}.
* {{lien web | url=http://www.johnstonsarchive.net/nuclear/radevents/1954USSR1.html | titre=Totsk nuclear test, 1954 | auteur=Wm. Robert Johnston | date=5 mai 2005 | consulté le=5 mars 2011}}.
*[http://scbist.com/blogs/admin/494-v-zone-yadernogo-udara.html ''In the zone of nuclear blast (Russian)''] par le général d'aviation Ostroumov
*[http://scbist.com/blogs/admin/494-v-zone-yadernogo-udara.html ''In the zone of nuclear blast (Russian)''] par le général d'aviation Ostroumov
*[http://www.mk.ru/editions/daily/article/2004/09/13/104911-pravda-poligona-smerti.html ''Truth about the testing site of death (Russian)''], ''a publication by [[Moskovskij Komsomolets|Moskovskii komsomolets]].
*[http://www.mk.ru/editions/daily/article/2004/09/13/104911-pravda-poligona-smerti.html ''Truth about the testing site of death (Russian)''], ''a publication by [[Moskovskij Komsomolets|Moskovskii komsomolets]].

{{Traduction/Référence|en|Totskoye nuclear exercise|3=584824796}}


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Dernière version du 19 janvier 2024 à 17:12

Exercice nucléaire de Totskoïe
Mémorial bâti à l’épicentre de l'explosion en 1994.
Mémorial bâti à l’épicentre de l'explosion en 1994.
Puissance nucléaire Drapeau de l'URSS Union soviétique
Localisation polygone d’essai de Totskoïe
Coordonnées 52° 38′ 41″ N, 52° 48′ 16″ E
Date
Nombre d'essais 1
Type d'arme nucléaire Bombe A RDS-4
Puissance maximale 40 kt
Type d'essais Atmosphérique
Géolocalisation sur la carte : Russie
(Voir situation sur carte : Russie)
Exercice nucléaire de Totskoïe

L'exercice nucléaire de Totskoïe est un exercice militaire mené par l'armée soviétique pour explorer la guerre défensive et offensive pendant la guerre nucléaire. L'exercice, connu sous le nom de code « boule de neige », impliquait une détonation aérienne d'une bombe atomique aussi puissante que les deux bombes utilisées dans les attaques américaines sur Hiroshima et Nagasaki réunies. L'objectif affiché de l'opération était un entraînement militaire pour briser les lignes de défense fortifiées d'un adversaire utilisant des armes nucléaires[1].

Une armée de 45 000 soldats marcha dans la zone autour de l'épicentre, peu après l'explosion atomique[2]. L'exercice fut réalisé le , sous le commandement du maréchal Joukov au nord du village de Totskoïe dans l’oblast d'Orenbourg, en Russie, dans le district militaire du sud de l'Oural[3],[4] Le maréchal Joukov et les ministres de la Défense de Chine Peng Dehuai — accompagné du commandant en chef de l'armée populaire de libération Zhu De —, de Pologne — accompagné du général Marian Spychalski — et de Yougoslavie, avec le général tchécoslovaque Ludvík Svoboda[5], observaient la scène d'une tour située à cinq kilomètres de l'explosion[6]

Histoire[modifier | modifier le code]

Une RDS-4 exposée en 2022.
Le maréchal Joukov en 1941.

À la mi-septembre 1954, des essais de bombardement nucléaire furent effectués dans le polygone d’essai de Totskoïe lors de l'exercice de formation Snezhok (« boule de neige » ou « neige légère ») avec quelque 45 000 personnes, tous soldats ou officiers de l'armée de terre soviétique[3],[5] qui furent exposés à des radiations d'une bombe deux fois plus puissante que celle d'Hiroshima neuf ans plus tôt. L'exercice était commandé par le maréchal de l'Union soviétique Joukov. Le à h 33, un bombardier soviétique Tu-4 largua une bombe atomique RDS-4 de 40 kilotonnes (170 TJ) d’une altitude de 8 000 mètres. La bombe explosa à 350 mètres au-dessus du centre d’essai de Totskoïe, à 13 km de Totskoïe (en) dans l'oblast d'Orenbourg[5],[7].

Au cours de l'exercice, plus de 45 000 personnes, dont 6 000 officiers, furent délibérément exposées aux radiations[8]. Il s'agissait de la 270e division d'infanterie (en)[9], de 320 avions, de 600 chars et de 600 véhicules blindés de transport de troupes. Les soldats reçurent l'ordre d’exécution d’un exercice militaire normal, avec une explosion nucléaire fictive, et avertis que ce serait filmé[3]. Les militaires ne reçurent pas d'équipement de protection[3]. Le ministre de la Défense adjoint Gueorgui Joukov fut témoin de l’explosion depuis un abri antiatomique souterrain. Les avions et l'artillerie reçurent l’ordre de bombarder le site de l'explosion cinq minutes après l'explosion, et trois heures plus tard (après la délimitation de la zone radioactive) les véhicules blindés reçurent l’ordre de prendre une zone hostile après une attaque nucléaire[7].

Les militaires reçurent l'ordre de collecter des données dans les retombées radioactives de l'épicentre, mais sans excéder un röntgen par heure sur leurs détecteurs (1 rem/h = 10 mSv/h)[10]. Pour déterminer les niveaux de rayonnement, il était prévu d'utiliser des patrouilles dosimétriques, qui devaient arriver sur la zone d'explosion 40 minutes après l'explosion et marquer les limites des zones de contamination par des panneaux d'avertissement. Le personnel de la patrouille se trouvait dans un char dont le blindage réduisait de 8 à 9 fois la dose de rayonnement pénétrant[11]. À 300 mètres de l'épicentre, le débit de dose rencontré était de 25 R/h (zone interdite à la circulation) ; il n'était plus que de 0,5 R/h à 500 mètres et 0,1 R/h à 850 mètres[12].

Les habitants de certains villages (Bogdanovka et Fedorovka) qui étaient situés à environ 6 km de l'épicentre de la prochaine explosion furent évacués temporairement à l'extérieur d’un cercle de 50 km de rayon[5]. La plupart des populations locales ne furent cependant pas averties.

Conséquences[modifier | modifier le code]

Des milliers de personnes qui furent soupçonnées d'avoir cherché de l'aide dans les hôpitaux locaux auront la surprise, plus tard, de constater que leurs dossiers médicaux avaient disparu de l'hôpital régional. Ce fait fut confirmé par un ancien soldat qui avait participé à l’exercice, Alexeï Petrovitch Vavilov, lors d’un entretien[3] pour le programme de télévision Podrobnosti (chaîne de télévision INTER), plus de 50 ans plus tard[3].

Plus d'un demi-siècle plus tard, cette question est toujours sous le contrôle strict du gouvernement fédéral russe. Les membres des forces de l'ordre locales continuent de harceler les journalistes qui tentent d'obtenir des images du polygone d’essai[3]. L'exercice n’est devenu largement connu qu'en 1993[3]. Même les soldats qui participèrent à l'exercice ne savaient pas qu'ils y avaient pris part[3]. Le gouvernement félicita la population locale pour son héroïsme dans la fourniture du bouclier nucléaire à leur patrie.

En 2004, cinquante ans plus tard, un peu plus de 2 000 vétérans sont encore en vie. La moitié d'entre eux (à présent âgés de plus de soixante-dix ans) sont officiellement reconnus comme personnes handicapées des premier et deuxième groupes, 74,5 % souffrent de maladies du système cardiovasculaire, notamment d'hypertension et d'athérosclérose cérébrale, 20,5 % de maladies du système digestif, 4,5 % de tumeurs malignes et de maladies du sang[5].

Pour le 60e anniversaire de l'exercice en 2014, les 374 vétérans survivants des « unités à risque spécial » résidant dans l'Oblast d'Orenbourg, ont reçu une prime de 3 000 roubles (équivalent à moins de 50 euros en 2023)[13]. Au , il reste 37 vétérans dans cet oblast[14].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Exercice de Totskoïe. Mesures de sécurité (Russe) par Sergei Markov.
  2. Viktor Suvorov, La victoire de l'ombre (Тень победы), Donetsk, 2003, (ISBN 966-696-022-2), pages 353-375. Le compte rendu officiel de Georgui Jukov comme un chef militaire impeccable. Le chapitre sur l’exercice nucléaire de Totskoïe est principalement basé sur les publications dans la presse russe, comme Krasnaïa Zvezda (Étoile Rouge), un journal officiel du ministère de la Défense (Russie), et la Literatournaïa gazeta.
  3. a b c d e f g h et i (ru) « Il y a 55 ans, Jukov testait des armes nucléaires sur les personnes (russe) Ce lien fournit de vieux enregistrements vidéo de l'exercice nucléaire réel. », podrobnosti.ua, (consulté le ).
  4. L'essai à Totsk en 1954
  5. a b c d et e (ru) « Il y a 50 ans, l'URSS réalisait l'opération « Boule de neige » : 43 000 soldats soviétiques mourraient. (en russe) », newsru.com, (consulté le ).
  6. Georges Charpak et Richard L. Garwin, Feux follets et champignons nucléaires, Odile Jacob, 382 p. (lire en ligne), p. 171.
  7. a et b Dietrich Tissen, « Essai nucléaire à Totskoïe en 1954 » (consulté le ).
  8. « Expérimentations nucléaires sur des humains », NuclearFiles.org (consulté le ).
  9. V.I. Feskov et al., "The Soviet Army in the Cold War 1945–90", Tomsk, 2004, p. 94.
  10. Pereira, Caesar R., "A Process for ADM-300 Radiation Detector Modernization for Military Applications" (2021). UNLV Theses, Dissertations, Professional Papers, and Capstones. 4180. http://dx.doi.org/10.34917/25374073, p. 21
  11. Výbuch atómovej bomby v ZSSR.
  12. Operation Schneeball. aus der Geschichte der UdSSR. Vieleck Totsky.
  13. (ru) « На месте Тоцкого ядерного взрыва пройдут памятные мероприятия », sur www.atomic-energy.ru,‎ (consulté le ).
  14. (ru) « В Оренбурге почтили память участников ядерных испытаний на Тоцком полигоне », sur www.atomic-energy.ru,‎ (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Nuclear Testing in the USSR. Volume 2. Soviet Nuclear Testing Technologies. Environmental Effects. Safety Provisions. Nuclear Test Sites, Begell-House, Inc., New York, 1998.
  • A. A. Romanyukha, E. A. Ignatiev, D. V. Ivanov & A. G. Vasilyev, The Distance Effect on the Individual Exposures Evaluated from the Soviet Nuclear Bomb Test in 1954 at Totskoye Test Site in 1954, Radiation Protection Dosimetry 86:53-58 (1999), résumé en ligne.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]