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{{Infobox Ancienne entité territoriale
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| langues=[[Arabe]]
| capitale [[Le Caire]]
| Monnaie Livre égyptienne
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| création={{17 avril}} [[1971]]
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L''''Union des Républiques arabes''' était une [[État fédéral|fédération]] créé en [[1971]] qui devait regrouper la [[République arabe libyenne]], la [[Égypte|République arabe d'Égypte]] et la [[Syrie|République arabe syrienne]]. Malgré la signature d'un accord prévoyant la fusion des trois pays, le projet a subi un coup d'arrêt dès [[1973]] et n'a plus existé que sur le papier jusqu'à sa dissolution officielle en [[1984]].
L''''Union des Républiques arabes''' (en {{lang-ar|اتحاد الجمهوريات العربية|ittiḥād al-jumhūriyyāt al-ʿarabiyya}}) était une [[État fédéral|fédération]] proposée en [[1971]] qui devait regrouper la [[République arabe libyenne]], la [[Égypte|République arabe d'Égypte]] et la [[Syrie|République arabe syrienne]]. Malgré la signature d'un accord prévoyant la fusion des trois pays, le projet a subi un coup d'arrêt dès [[1973]] et n'a plus existé que sur le papier jusqu'à sa dissolution officielle en [[1984]].
==Historique==
[[Fichier:Sadat Qaddafi Assad 1971.jpg|thumb|left|[[Anouar el-Sadate]], [[Mouammar Kadhafi]] et [[Hafez el-Assad]] signant l'accord de fédération de leurs trois pays en 1971.]]
[[Mouammar Kadhafi]] tente, dès sa prise de pouvoir en Libye en septembre [[1969]], de mettre en pratique les principes du [[panarabisme]], avec pour but proclamé d'unir la {{citation|nation arabe}}. Dans un premier temps, le panarabisme du projet d'union se mêle au [[panafricanisme]] : le [[27 décembre]] 1969, la Libye signe avec l'Égypte de [[Gamal Abdel Nasser]] et le [[Soudan]] de [[Gaafar Nimeiry]] une {{citation|charte révolutionnaire}}, dite également {{citation|Pacte de Tripoli}}, qui lance un projet de fédération, défini comme une {{citation|alliance révolutionnaire dont le but est de déjouer les intrigues impérialistes et sionistes}}. Nasser meurt moins d'un an plus tard, en septembre [[1970]], mais son décès ne freine pas le projet, qui recueille l'assentiment du nouveau président égyptien [[Anouar el-Sadate]]. En février [[1971]], [[Hafez el-Assad]] arrive au pouvoir en [[Syrie]], et s'associe bientôt au projet d'union panarabe, qui avait déjà tourné court une première fois en 1961 avec la fin de la [[République arabe unie]] (1958-1961) unissant la Syrie et l'Égypte. La situation politique intérieure instable du [[Soudan]] amène par contre ce pays à renoncer à participer à l'union. L'[[République d'Irak (1968-2003)|Irak]], alors présidé par [[Ahmad Hasan al-Bakr]], est un temps envisagé comme partenaire, mais écarté pour la même raison que le Soudan.


== Historique ==
Le [[17 avril]] [[1971]] l'Union des Républiques arabes, regroupant l’Égypte, la Libye et la Syrie, est proclamée lors d'une conférence à [[Benghazi]]<ref>{{Lien web | url = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4418677 | titre = , ''Études 1972/01'', p. 37-60 | auteur = Pierre Rondot | année = 1972 | éditeur = | consulté le = 1{{er}} mai 2011}}</ref>. L'Union des Républiques arabes est alors censée disposer d'une capitale, d'un drapeau unique ainsi que d'organes politiques communs (parlement fédéral, président), et d'une diplomatie et d'une armée communes : de [[1972]] à [[1977]], la Libye ajoute ainsi à son [[Drapeau de la Libye|drapeau]] un [[faucon]] d'or (dit "de [[Quraych]]") au centre, saisissant avec ses griffes un ruban portant l'inscription Union des Républiques Arabes ([[arabe]] : اتحاد الجمهوريات العربية, ''ittiħād al-jumhūriyyāt al-`arabiyya''). Le drapeau est le même que celui de l'[[Drapeau de l'Égypte|Égypte]] et de la [[Drapeau de la Syrie|Syrie]] (de [[1971]] à [[1980]]). Il ne se distingue des deux autres que par une petite cartouche sous le faucon portant le nom de l'État : République Arabe de Libye. Le [[1er septembre]] de la même année, à la date anniversaire du coup d'État libyen, un [[référendum]] organisé simultanément dans les trois pays approuve le projet. Le [[2 août]] [[1972]], voulant aller plus loin dans l'unité, obtient de Sadate un accord prévoyant l'{{citation|union totale}} entre l'Égypte et la Libye avant le 1er septembre [[1973]] : la Syrie n'est plus mentionnée dans cet aspect de l'accord<ref name="M'Bokolo p96">Elikia M'Bokolo, ''L'Afrique au XXe siècle : le continent convoité'', Seuil, 1985, page 96</ref>{{,}}<ref>Christiane Souriau, Juliette Bessis, ''Libye: l'économie des femmes'', L'Harmattan, 1991, pages 110-111</ref>.
[[Mouammar Kadhafi]] tente, dès sa prise de pouvoir en Libye en septembre [[1969]], de mettre en pratique les principes du [[panarabisme]], avec pour but proclamé d'unir la {{citation|nation arabe}}. Dans un premier temps, le panarabisme du projet d'union se mêle au [[panafricanisme]] : le {{date|27 décembre 1969}}, la Libye signe avec l'Égypte de [[Gamal Abdel Nasser]] et le [[Soudan]] de [[Gaafar Nimeiry]] une {{citation|charte révolutionnaire}}, dite également {{citation|Pacte de Tripoli}}, qui lance un projet de fédération, défini comme une {{citation|alliance révolutionnaire dont le but est de déjouer les intrigues impérialistes et sionistes}}. Nasser meurt moins d'un an plus tard, en septembre [[1970]], mais son décès ne freine pas le projet, qui recueille l'assentiment du nouveau président égyptien [[Anouar el-Sadate]]. En février [[1971]], [[Hafez el-Assad]] arrive au pouvoir en [[Syrie]], et s'associe bientôt au projet d'union panarabe, qui avait déjà tourné court une première fois en 1961 avec la fin de la [[République arabe unie]] (1958-1961) unissant la Syrie et l'Égypte. La situation politique intérieure instable du [[Soudan]] amène par contre ce pays à renoncer à participer à l'union. L'[[République d'Irak (1968-2003)|Irak]], alors présidé par [[Ahmad Hassan al-Bakr]], est un temps envisagé comme partenaire, mais écarté pour la même raison que le Soudan.


=== Fondation ===
Rapidement, le président égyptien [[Anouar el-Sadate]], inquiet des surenchères de Kadhafi et dubitatif devant la personnalité du dirigeant libyen qu'il tend à considérer comme un {{citation|déséquilibre}}, choisit de s'éloigner de la fédération<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 67-68</ref>. Impatient devant les réticences manifestes de l'Égypte, Kadhafi lance, le [[18 juillet]] [[1973]], une {{citation|marche de l'unité}}, à laquelle participent environ 50 000 Libyens, qui partent de la [[frontière entre la Libye et la Tunisie]] et doivent aller jusqu'au [[Le Caire|Caire]] : la marche est finalement bloquée à la [[Frontière entre l'Égypte et la Libye|frontière égyptienne]], en n'ayant foulé que quelques kilomètres du sol égyptien<ref name="M'Bokolo p96"/>{{,}}<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 106-107</ref>. Kadhafi menace de quitter ses fonctions en cas de refus égyptien, mais Sadate le prend au mot et l'engage à assumer ses responsabilités, lui rappelant la caducité des accords en cas de défaillance de l'un des signataires; Kadhafi doit alors se plier aux conditions de Sadate et opter pour une union {{citation|par étapes}}. Sadate reçoit une délégation des participants à la {{citation|marche de l'unité}}, qui lui remettent une pétition écrite avec leur sang. Le président égyptien évite de polémiquer, déclarant que la Libye est une {{citation|extension naturelle}} de l'Égypte, mais rappelant dans le même temps les liens entre son pays et la Syrie, qu'il privilégie désormais en tant qu'allié. Sadate s'éloigne désormais implicitement du projet et réoriente le centre de gravité politique de l'Égypte vers le [[Proche-Orient]]. La volte-face égyptienne est entre autres due aux pressions du roi [[Fayçal ben Abdelaziz Al Saoud|Fayçal {{Ier}}]] d'[[Arabie saoudite]]. Sadate reçoit par la suite Kadhafi, à qui il fait accepter des mesures d'union sans portée réelle (assemblée constituante, unité monétaire commune, le dinar arabe, et zone franche frontalière) bien modestes en regard des ambitions du dirigeant libyen<ref>René Otayek, ''La politique africaine de la Libye'', Karthala, 1986, pages 36-38</ref>.
[[Image:Sadat Qaddafi Assad 1971.jpg|vignette|gauche|[[Anouar el-Sadate]], [[Mouammar Kadhafi]] et [[Hafez el-Assad]] signant l'accord de fédération en 1971.]]
[[Image:Heliopolis Palace in Cairo.JPG|vignette|droite|Le [[Palais d'el-Orouba|palais d'Héliopolis]], siège de l'Union à partir de 1972.]]


Le {{date|17 avril 1971}}, l'Union des Républiques arabes, regroupant l’Égypte, la Libye et la Syrie, est proclamée lors d'une conférence à [[Benghazi]]<ref>{{Lien web | url = https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4418677 | titre = , ''Études 1972/01'', p. 37-60 | auteur = Pierre Rondot | année = 1972 | éditeur = | consulté le = 1{{er}} mai 2011}}</ref>. L'Union des Républiques arabes est alors censée disposer d'une capitale, d'un drapeau unique ainsi que d'organes politiques communs (parlement fédéral, président), et d'une diplomatie et d'une armée communes : de [[1972]] à [[1977]], la Libye ajoute ainsi à son [[Drapeau de la Libye|drapeau]] un [[faucon]] d'or (dit « de [[Quraych]] ») au centre, saisissant avec ses griffes un ruban portant l'inscription Union des Républiques Arabes (en {{lang-ar|اتحاد الجمهوريات العربية|ittiḥād al-jumhūriyyāt al-ʿarabiyya}}). Le drapeau est le même que celui de l'[[Drapeau de l'Égypte|Égypte]] et de la [[Drapeau de la Syrie|Syrie]] (de [[1971]] à [[1980]]). Il ne se distingue des deux autres que par une petite cartouche sous le faucon portant le nom de l'État : République Arabe de Libye. Le {{date|1er septembre 1971-}} de la même année, à la date anniversaire du [[Coup d'État de 1969 en Libye|coup d'État]] libyen, un [[référendum]] organisé simultanément dans les trois pays approuve le projet. Le {{date|2 août 1972}}, voulant aller plus loin dans l'unité, obtient de Sadate un accord prévoyant l'{{citation|union totale}} entre l'Égypte et la Libye avant le {{date|1 septembre 1973}} : la Syrie n'est plus mentionnée dans cet aspect de l'accord<ref name="M'Bokolo p96">Elikia M'Bokolo, ''L'Afrique au XXe siècle : le continent convoité'', Seuil, 1985, page 96</ref>{{,}}<ref>Christiane Souriau, Juliette Bessis, ''Libye: l'économie des femmes'', L'Harmattan, 1991, pages 110-111</ref>.
Les relations entre la Libye et l'Égypte se détériorent ensuite, Kadhafi appréciant peu de ne pas être associé à la [[guerre du Kippour]] en octobre 1973, ni même informé de l'offensive contre [[Israël]]. Dans le même temps, Kadhafi cherche de nouveaux débouchés unitaires, d'abord avec l'[[Algérie]], puis avec la [[Tunisie]], manquant de concrétiser une [[Projet d'union entre la Tunisie et la Libye|Union tuniso-libyenne]] qui tourne court du fait du retrait de [[Habib Bourguiba]]<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 107-109</ref>. Déçu par l'échec de ses projets unitaires, et souhaitant donner à son régime une nouvelle impulsion {{citation|révolutionnaire}}, Mouammar Kadhafi lance à partir de [[1973]] son projet de [[Jamahiriya arabe libyenne|Jamahiriya]], qui se concrétise en mars [[1977]], adoptant un mode de gouvernement inédit dans la région<ref>{{Lien web | url = http://www.cairn.info/revue-outre-terre-2009-3-page-289.htm | titre = « Les migrations en Libye, un instrument de la diplomatie kadhafienne », ''Outre-Terre 3/2009 (n° 23)'', p. 289-303. | auteur = Delphine Perrin | année = 2009 | éditeur = Outre-Terre | consulté le = 1{{er}} mai 2011}}</ref>. Entretemps, l'Égypte manœuvre pour isoler la Libye : en [[1976]], un accord tripartite contre la Libye est signé avec l'Arabie Saoudite et le Soudan, alors en pleine brouille avec la Libye<ref name="Souriau Bessis p113">Christiane Souriau, Juliette Bessis, ''Libye: l'économie des femmes'', L'Harmattan, 1991, page 113</ref>. En juillet [[1977]], un [[Guerre égypto-libyenne|bref conflit frontalier]] éclate entre l'Égypte et la Libye. Les services secrets égyptiens, alors sous la responsabilité effective du vice-président [[Hosni Moubarak]] soutiennent, en collaboration avec le [[Service de documentation extérieure et de contre-espionnage|SDECE]] français, la formation au Caire d'un [[gouvernement en exil]] d'opposants à Kadhafi. Les hostilités égypto-libyennes cessent au bout de trois jours grâce aux bons offices de [[Yasser Arafat]] et de [[Houari Boumediene]]<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 82-83</ref>{{,}}<ref>René Otayek, ''La politique africaine de la Libye'', Karthala, 1986, pages 183-186</ref>{{,}}<ref>Roger Faligot, ''La piscine : les services secrets français, 1944-1984'', Seuil, 1985, page 346</ref>. Les rapports exécrables entre la Libye et l'Égypte empirent encore lors de la signature par Sadate des [[accords de Camp David]] avec [[Israël]], en septembre [[1978]]<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, page 108</ref>. Deux mois plus tard, les accords internationaux entre l'Égypte et la Libye sont dénoncés<ref>Pierre Pinta, ''La Libye'', Karthala, 2006, page 271</ref>. En septembre [[1980]], un nouveau projet d'union entre la Libye et la Syrie est annoncé, mais ne se concrétise pas<ref name="Souriau Bessis p113"/>.


=== Éloignement de l'Égypte ===
L'Union des Républiques arabes continue néanmoins d'exister en théorie, mais demeure en sommeil jusqu'en octobre [[1984]], date à laquelle le retrait unilatéral de l'Égypte entraîne sa fin officielle<ref>Collectif, ''The Middle East and North Africa 2003'', Europa Publications Ltd, 2002, page 756</ref>.
Rapidement, le président égyptien [[Anouar el-Sadate]], inquiet des surenchères de Kadhafi et dubitatif devant la personnalité du dirigeant libyen qu'il tend à considérer comme un {{citation|déséquilibré}}, choisit de s'éloigner de la fédération<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 67-68</ref>. Impatient devant les réticences manifestes de l'Égypte, Kadhafi lance, le {{date|18 juillet 1973}}, une {{citation|marche de l'unité}}, à laquelle participent environ 50 000 Libyens, qui partent de la [[frontière entre la Libye et la Tunisie]] et doivent aller jusqu'au [[Le Caire|Caire]] : la marche est finalement bloquée à la [[Frontière entre l'Égypte et la Libye|frontière égyptienne]], en n'ayant foulé que quelques kilomètres du sol égyptien<ref name="M'Bokolo p96"/>{{,}}<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 106-107</ref>. Kadhafi menace de quitter ses fonctions en cas de refus égyptien, mais Sadate le prend au mot et l'engage à assumer ses responsabilités, lui rappelant la caducité des accords en cas de défaillance de l'un des signataires ; Kadhafi doit alors se plier aux conditions de Sadate et opter pour une union {{citation|par étapes}}. Sadate reçoit une délégation des participants à la {{citation|marche de l'unité}}, qui lui remettent une pétition écrite avec leur sang. Le président égyptien évite de polémiquer, déclarant que la Libye est une {{citation|extension naturelle}} de l'Égypte, mais rappelant dans le même temps les liens entre son pays et la Syrie, qu'il privilégie désormais en tant qu'allié. Sadate s'éloigne désormais implicitement du projet et réoriente le centre de gravité politique de l'Égypte vers le [[Proche-Orient]]. La volte-face égyptienne est entre autres due aux pressions du roi [[Fayçal ben Abdelaziz Al Saoud|Fayçal {{Ier}}]] d'[[Arabie saoudite]]. Sadate reçoit par la suite Kadhafi, à qui il fait accepter des mesures d'union sans portée réelle (assemblée constituante, unité monétaire commune, le dinar arabe, et zone franche frontalière) bien modestes en regard des ambitions du dirigeant libyen<ref>René Otayek, ''La politique africaine de la Libye'', Karthala, 1986, pages 36-38</ref>.

[[Image:Egypt flag on 6oct war.jpg|vignette|droite|Levée du drapeau de l'armée égyptienne dans le [[Sinaï]] durant la [[guerre du Kippour]] en 1973.]]
Les relations entre la Libye et l'Égypte se détériorent ensuite, Kadhafi appréciant peu de ne pas être associé à la [[guerre du Kippour]] en {{date-|octobre 1973}}, ni même informé de l'offensive contre [[Israël]]. Dans le même temps, Kadhafi cherche de nouveaux débouchés unitaires, d'abord avec l'[[Algérie]], puis avec la [[Tunisie]], manquant de concrétiser une [[Projet d'union entre la Tunisie et la Libye|Union tuniso-libyenne]] qui tourne court du fait du retrait de [[Habib Bourguiba]]<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 107-109</ref>. Déçu par l'échec de ses projets unitaires, et souhaitant donner à son régime une nouvelle impulsion {{citation|révolutionnaire}}, Mouammar Kadhafi lance à partir de [[1973]] son projet de [[Jamahiriya arabe libyenne|Jamahiriya]], qui se concrétise en mars [[1977]], adoptant un mode de gouvernement inédit dans la région<ref>{{Lien web | url = http://www.cairn.info/revue-outre-terre-2009-3-page-289.htm | titre = « Les migrations en Libye, un instrument de la diplomatie kadhafienne », ''Outre-Terre 3/2009 (n° 23)'', p. 289-303. | auteur = Delphine Perrin | année = 2009 | éditeur = Outre-Terre | consulté le = 1{{er}} mai 2011}}</ref>. Entretemps, l'Égypte manœuvre pour isoler la Libye : en [[1976]], un accord tripartite contre la Libye est signé avec l'Arabie saoudite et le Soudan, alors en pleine brouille avec la Libye<ref name="Souriau Bessis p113">Christiane Souriau, Juliette Bessis, ''Libye: l'économie des femmes'', L'Harmattan, 1991, page 113</ref>. En {{date|juillet 1977}}, un [[Guerre égypto-libyenne|bref conflit frontalier]] éclate entre l'Égypte et la Libye. Les services secrets égyptiens, alors sous la responsabilité effective du vice-président [[Hosni Moubarak]] soutiennent, en collaboration avec le [[Service de documentation extérieure et de contre-espionnage|SDECE]] français, la formation au Caire d'un [[gouvernement en exil]] d'opposants à Kadhafi. Les hostilités égypto-libyennes cessent au bout de trois jours grâce aux bons offices de [[Yasser Arafat]] et de [[Houari Boumédiène]]<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, pages 82-83</ref>{{,}}<ref>René Otayek, ''La politique africaine de la Libye'', Karthala, 1986, pages 183-186</ref>{{,}}<ref>Roger Faligot, ''La piscine : les services secrets français, 1944-1984'', Seuil, 1985, page 346</ref>. Les rapports exécrables entre la Libye et l'Égypte empirent encore lors de la signature par Sadate des [[accords de Camp David]] avec [[Israël]], en {{date|septembre 1978}}<ref>François Burgat, André Laronde, ''La Libye'', Presses universitaires de France, 2003, page 108</ref>. Deux mois plus tard, les accords internationaux entre l'Égypte et la Libye sont dénoncés<ref>Pierre Pinta, ''La Libye'', Karthala, 2006, page 271</ref>. En septembre [[1980]], un nouveau projet d'union entre la Libye et la Syrie est annoncé, mais ne se concrétise pas<ref name="Souriau Bessis p113"/>.

L'Union des Républiques arabes continue néanmoins d'exister en théorie, mais demeure en sommeil jusqu'en {{date|octobre 1984}}, date à laquelle le retrait unilatéral de l'Égypte entraîne sa fin officielle<ref>Collectif, ''The Middle East and North Africa 2003'', Europa Publications Ltd, 2002, page 756</ref>.


== Voir aussi ==
== Voir aussi ==
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== Notes et références ==
== Notes et références ==
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<references />


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[[zh-yue:阿拉伯聯邦共和國]]

Dernière version du 12 mars 2024 à 14:13

Union des Républiques arabes
(ar) اتحاد الجمهوريات العربية

1971–1984

Drapeau
Drapeau
Blason
Armoiries
Description de cette image, également commentée ci-après
Localisation de l'Union des Républiques arabes
Informations générales
Statut Fédération
Capitale Tripoli
Langue(s) Arabe
Monnaie Dinar libyen

L'Union des Républiques arabes (en arabe : اتحاد الجمهوريات العربية (ittiḥād al-jumhūriyyāt al-ʿarabiyya)) était une fédération proposée en 1971 qui devait regrouper la République arabe libyenne, la République arabe d'Égypte et la République arabe syrienne. Malgré la signature d'un accord prévoyant la fusion des trois pays, le projet a subi un coup d'arrêt dès 1973 et n'a plus existé que sur le papier jusqu'à sa dissolution officielle en 1984.

Historique[modifier | modifier le code]

Mouammar Kadhafi tente, dès sa prise de pouvoir en Libye en septembre 1969, de mettre en pratique les principes du panarabisme, avec pour but proclamé d'unir la « nation arabe ». Dans un premier temps, le panarabisme du projet d'union se mêle au panafricanisme : le , la Libye signe avec l'Égypte de Gamal Abdel Nasser et le Soudan de Gaafar Nimeiry une « charte révolutionnaire », dite également « Pacte de Tripoli », qui lance un projet de fédération, défini comme une « alliance révolutionnaire dont le but est de déjouer les intrigues impérialistes et sionistes ». Nasser meurt moins d'un an plus tard, en septembre 1970, mais son décès ne freine pas le projet, qui recueille l'assentiment du nouveau président égyptien Anouar el-Sadate. En février 1971, Hafez el-Assad arrive au pouvoir en Syrie, et s'associe bientôt au projet d'union panarabe, qui avait déjà tourné court une première fois en 1961 avec la fin de la République arabe unie (1958-1961) unissant la Syrie et l'Égypte. La situation politique intérieure instable du Soudan amène par contre ce pays à renoncer à participer à l'union. L'Irak, alors présidé par Ahmad Hassan al-Bakr, est un temps envisagé comme partenaire, mais écarté pour la même raison que le Soudan.

Fondation[modifier | modifier le code]

Anouar el-Sadate, Mouammar Kadhafi et Hafez el-Assad signant l'accord de fédération en 1971.
Le palais d'Héliopolis, siège de l'Union à partir de 1972.

Le , l'Union des Républiques arabes, regroupant l’Égypte, la Libye et la Syrie, est proclamée lors d'une conférence à Benghazi[1]. L'Union des Républiques arabes est alors censée disposer d'une capitale, d'un drapeau unique ainsi que d'organes politiques communs (parlement fédéral, président), et d'une diplomatie et d'une armée communes : de 1972 à 1977, la Libye ajoute ainsi à son drapeau un faucon d'or (dit « de Quraych ») au centre, saisissant avec ses griffes un ruban portant l'inscription Union des Républiques Arabes (en arabe : اتحاد الجمهوريات العربية (ittiḥād al-jumhūriyyāt al-ʿarabiyya)). Le drapeau est le même que celui de l'Égypte et de la Syrie (de 1971 à 1980). Il ne se distingue des deux autres que par une petite cartouche sous le faucon portant le nom de l'État : République Arabe de Libye. Le de la même année, à la date anniversaire du coup d'État libyen, un référendum organisé simultanément dans les trois pays approuve le projet. Le , voulant aller plus loin dans l'unité, obtient de Sadate un accord prévoyant l'« union totale » entre l'Égypte et la Libye avant le  : la Syrie n'est plus mentionnée dans cet aspect de l'accord[2],[3].

Éloignement de l'Égypte[modifier | modifier le code]

Rapidement, le président égyptien Anouar el-Sadate, inquiet des surenchères de Kadhafi et dubitatif devant la personnalité du dirigeant libyen qu'il tend à considérer comme un « déséquilibré », choisit de s'éloigner de la fédération[4]. Impatient devant les réticences manifestes de l'Égypte, Kadhafi lance, le , une « marche de l'unité », à laquelle participent environ 50 000 Libyens, qui partent de la frontière entre la Libye et la Tunisie et doivent aller jusqu'au Caire : la marche est finalement bloquée à la frontière égyptienne, en n'ayant foulé que quelques kilomètres du sol égyptien[2],[5]. Kadhafi menace de quitter ses fonctions en cas de refus égyptien, mais Sadate le prend au mot et l'engage à assumer ses responsabilités, lui rappelant la caducité des accords en cas de défaillance de l'un des signataires ; Kadhafi doit alors se plier aux conditions de Sadate et opter pour une union « par étapes ». Sadate reçoit une délégation des participants à la « marche de l'unité », qui lui remettent une pétition écrite avec leur sang. Le président égyptien évite de polémiquer, déclarant que la Libye est une « extension naturelle » de l'Égypte, mais rappelant dans le même temps les liens entre son pays et la Syrie, qu'il privilégie désormais en tant qu'allié. Sadate s'éloigne désormais implicitement du projet et réoriente le centre de gravité politique de l'Égypte vers le Proche-Orient. La volte-face égyptienne est entre autres due aux pressions du roi Fayçal Ier d'Arabie saoudite. Sadate reçoit par la suite Kadhafi, à qui il fait accepter des mesures d'union sans portée réelle (assemblée constituante, unité monétaire commune, le dinar arabe, et zone franche frontalière) bien modestes en regard des ambitions du dirigeant libyen[6].

Levée du drapeau de l'armée égyptienne dans le Sinaï durant la guerre du Kippour en 1973.

Les relations entre la Libye et l'Égypte se détériorent ensuite, Kadhafi appréciant peu de ne pas être associé à la guerre du Kippour en , ni même informé de l'offensive contre Israël. Dans le même temps, Kadhafi cherche de nouveaux débouchés unitaires, d'abord avec l'Algérie, puis avec la Tunisie, manquant de concrétiser une Union tuniso-libyenne qui tourne court du fait du retrait de Habib Bourguiba[7]. Déçu par l'échec de ses projets unitaires, et souhaitant donner à son régime une nouvelle impulsion « révolutionnaire », Mouammar Kadhafi lance à partir de 1973 son projet de Jamahiriya, qui se concrétise en mars 1977, adoptant un mode de gouvernement inédit dans la région[8]. Entretemps, l'Égypte manœuvre pour isoler la Libye : en 1976, un accord tripartite contre la Libye est signé avec l'Arabie saoudite et le Soudan, alors en pleine brouille avec la Libye[9]. En , un bref conflit frontalier éclate entre l'Égypte et la Libye. Les services secrets égyptiens, alors sous la responsabilité effective du vice-président Hosni Moubarak soutiennent, en collaboration avec le SDECE français, la formation au Caire d'un gouvernement en exil d'opposants à Kadhafi. Les hostilités égypto-libyennes cessent au bout de trois jours grâce aux bons offices de Yasser Arafat et de Houari Boumédiène[10],[11],[12]. Les rapports exécrables entre la Libye et l'Égypte empirent encore lors de la signature par Sadate des accords de Camp David avec Israël, en [13]. Deux mois plus tard, les accords internationaux entre l'Égypte et la Libye sont dénoncés[14]. En septembre 1980, un nouveau projet d'union entre la Libye et la Syrie est annoncé, mais ne se concrétise pas[9].

L'Union des Républiques arabes continue néanmoins d'exister en théorie, mais demeure en sommeil jusqu'en , date à laquelle le retrait unilatéral de l'Égypte entraîne sa fin officielle[15].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Pierre Rondot, « , Études 1972/01, p. 37-60 », (consulté le )
  2. a et b Elikia M'Bokolo, L'Afrique au XXe siècle : le continent convoité, Seuil, 1985, page 96
  3. Christiane Souriau, Juliette Bessis, Libye: l'économie des femmes, L'Harmattan, 1991, pages 110-111
  4. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, pages 67-68
  5. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, pages 106-107
  6. René Otayek, La politique africaine de la Libye, Karthala, 1986, pages 36-38
  7. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, pages 107-109
  8. Delphine Perrin, « « Les migrations en Libye, un instrument de la diplomatie kadhafienne », Outre-Terre 3/2009 (n° 23), p. 289-303. », Outre-Terre, (consulté le )
  9. a et b Christiane Souriau, Juliette Bessis, Libye: l'économie des femmes, L'Harmattan, 1991, page 113
  10. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, pages 82-83
  11. René Otayek, La politique africaine de la Libye, Karthala, 1986, pages 183-186
  12. Roger Faligot, La piscine : les services secrets français, 1944-1984, Seuil, 1985, page 346
  13. François Burgat, André Laronde, La Libye, Presses universitaires de France, 2003, page 108
  14. Pierre Pinta, La Libye, Karthala, 2006, page 271
  15. Collectif, The Middle East and North Africa 2003, Europa Publications Ltd, 2002, page 756