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| critique = ''[[AllMusic]]'' (favorable)<ref>{{en}} [http://www.allmusic.com/cg/amg.dll?p=amg&sql=33:wjfuxqwrldfe « ''Rain'' »], Richie Unterberger, ''[[AllMusic]]''. Consulté le 9 août 2010.</ref>
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'''''Rain''''' est une chanson des [[The Beatles|Beatles]], principalement écrite par [[John Lennon]] avec le concours de [[Paul McCartney]], et publiée en face B du [[single (musique)|single]] ''[[Paperback Writer]]''. Le disque sort le 30 mai 1966 aux [[États-Unis]], et le 10 juin suivant au [[Royaume-Uni]]. Enregistrée durant les sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', ''Rain'' est la première chanson à contenir des bandes inversées. Son destin de « face B » d'un [[45 tours]] en fait un titre relativement méconnu, pourtant remarquable et reconnu comme tel.
'''''Rain''''' est une chanson des [[The Beatles|Beatles]], principalement écrite par [[John Lennon]] avec le concours de [[Paul McCartney]], et publiée en face B du [[single (musique)|single]] ''[[Paperback Writer]]''. Le disque sort le {{date-|30 mai 1966}} aux [[États-Unis]], et le {{date-|10 juin}} suivant au [[Royaume-Uni]]. Enregistrée durant les sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', ''Rain'' est la première chanson à contenir des bandes inversées. Son destin de « face B » d'un [[45 tours]] en fait un titre relativement méconnu (car ce titre n'est jamais paru sur un album des Beatles, hormis des compilations), pourtant remarquable et reconnu comme tel.


Son ambiance [[psychédélique]], sa sonorité puissante, ses instruments ralentis, sa voix trainante, ses vocaux inversés et la technologie employée pour l'enregistrer sont en effet annonciateurs de bien d'autres innovations à venir dans la carrière du groupe, à commencer par [[Revolver (album)|l'album]] qui sera publié deux mois plus tard.
Son ambiance [[psychédélique]], sa sonorité puissante, ses instruments ralentis, sa voix trainante, ses vocaux inversés et la technologie employée pour l'enregistrer sont en effet annonciateurs de bien d'autres innovations à venir dans la carrière du groupe, à commencer par [[Revolver (album)|l'album]] qui sera publié deux mois plus tard.


== Composition ==
== Composition ==
Pendant leur passage à [[Amsterdam]], lors de leur tournée mondiale de 1964, à partir du bateau sur lequel le groupe visite la ville, John Lennon remarque un badaud portant une cape ancienne de [[Facteur (métier)|postier]] néerlandais. Il envoie un assistant l'acquérir et une commande est envoyée en toute hâte à [[Hong Kong]] pour en faire faire des copies qu'ils pourront prendre possession la semaine suivante lors de leur passage dans la colonie britannique. À leur arrivée en [[Australie]], le groupe porte fièrement leurs nouvelles redingotes mais doivent se faire transporter lentement sur la plateforme d'un camion afin de donner la chance aux fans assemblés d'apercevoir leurs héros. Confrontées à une pluie torrentielle, les Beatles rentrent trempés à leur hotel. Le manteau tout neuf a déteint sur eux et tout le groupe en a la peau bleue<ref>Lucas Ligtenberg et Piet Schreuders, Titre : ''« So They Canal See Us », Said John'', ''{{langue|en|Furore Magazine #24: Beatles Issue}}'', Piet Schreuders Editeur, Stichting Furore. [[Pays-Bas]], janvier 2019</ref>.


À l'origine, selon [[Neil Aspinall]] et [[John Lennon]], l'inspiration pour ''Rain'' remonterait à la tournée des Beatles en Australie en {{date||juin|1964}} et à leur arrivée à l'aéroport de [[Sydney]] sous une pluie battante<ref>{{YouTube|HpMR8ZLHYjg|Arrivée des Beatles à Sydney le 11 juin 1964|en}}</ref>. « Je n'ai jamais vu un tel déluge, à part à Tahiti » a expliqué le fondateur des Beatles<ref name="anthology"/>.
À l'origine, selon [[Neil Aspinall]] et [[John Lennon]], l'inspiration pour ''Rain'' remonterait à cette tournée des Beatles en Australie en {{date||juin|1964}} et à leur arrivée à l'aéroport de [[Sydney]] sous une pluie battante<ref>{{YouTube|HpMR8ZLHYjg|Arrivée des Beatles à Sydney le 11 juin 1964|en}}</ref>. « Je n'ai jamais vu un tel déluge, à part à Tahiti » a expliqué le fondateur des Beatles<ref name="anthology"/>.


Le titre semble être du seul [[John Lennon]], mais [[Paul McCartney]] précise qu'il a participé à l'écriture, et que la chanson dans son ensemble résulte d'une collaboration et non du fait de son partenaire en solitaire<ref name="anthology">{{fr}} {{ouvrage|éditeur=Seuil|titre=The Beatles Anthology|auteur=Collectif|année=2000|isbn=2-02-041880-0|passage=212-214}}</ref>. Ce dernier explique que ''Rain'' est {{Citation|une chanson sur les gens qui se lamentent sans arrêt à propos du temps}}<ref name="turner">{{fr}} {{ouvrage|éditeur=Hors Collection|titre=L’Intégrale Beatles: les secrets de toutes leurs chansons|titre vo=A Hard Day’s Write|auteur=Steve Turner|année=1999|isbn=2-258-06585-2|passage=102}}</ref>.
Le titre semble être du seul [[John Lennon]], mais [[Paul McCartney]] précise qu'il a participé à l'écriture, et que la chanson dans son ensemble résulte d'une collaboration et non du fait de son partenaire en solitaire<ref name="anthology">{{fr}} {{Ouvrage|auteur1=Collectif|titre=The Beatles Anthology|éditeur=[[Éditions du Seuil|Seuil]]|année=2000|passage=212-214|isbn=2-02-041880-0}}</ref>. Ce dernier explique que ''Rain'' est {{Citation|une chanson sur les gens qui se lamentent sans arrêt à propos du temps}}<ref name="turner">{{fr}} {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=en|auteur1=Steve Turner|titre=L’Intégrale Beatles|sous-titre=les secrets de toutes leurs chansons|titre original=A Hard Day’s Write|lieu=Paris|éditeur=Hors Collection|année=1999|pages totales=284|passage=102|isbn=2-258-06585-2}}</ref>.


Le critique Steve Turner voit dans ''Rain'' les premières références à l'élévation d'esprit, à la capacité à transcender les événements, références qui, les années suivantes, abondent dans les albums et les déclarations du groupe. Selon Turner, ''Rain'' délivre un message visant à expliquer que l'important est l'état d'esprit dans lequel on se trouve ({{Citation étrangère|lang=en|It's just a state of mind}}, comme le dit la chanson). Ce message est d'une part caractérisé par une [[métaphore]] qui tourne en dérision les gens qui fuient la pluie, comme si leur vie était en jeu ({{Citation étrangère|lang=en|They might as well be dead}}). Ainsi, il suffit de prendre de la distance face aux choses terre à terre de la vie, représentées dans la chanson par la pluie, puisque, scande [[John Lennon]], {{Citation|Tout est pareil lorsqu'il commence à pleuvoir}}. Et d'autre part, le chant récurrent du vers {{Citation|Je peux vous montrer}} ({{Citation étrangère|langue=en|I can show you}}) témoigne d'une évolution dans le rôle que s'attribue Lennon, puisqu'il se pose ici en porte-parole, en montreur de chemin à suivre, plutôt que comme conteur d'une quelconque histoire d'amour<ref name="turner"/>.
Le critique Steve Turner voit dans ''Rain'' les premières références à l'élévation d'esprit, à la capacité à transcender les événements, références qui, les années suivantes, abondent dans les albums et les déclarations du groupe. Selon Turner, ''Rain'' délivre un message visant à expliquer que l'important est l'état d'esprit dans lequel on se trouve ({{Citation étrangère|lang=en|It's just a state of mind}}, comme le dit la chanson). Ce message est d'une part caractérisé par une [[métaphore]] qui tourne en dérision les gens qui fuient la pluie, comme si leur vie était en jeu ({{Citation étrangère|lang=en|They might as well be dead}}). Ainsi, il suffit de prendre de la distance face aux choses terre à terre de la vie, représentées dans la chanson par la pluie, puisque, scande [[John Lennon]], {{Citation|Tout est pareil lorsqu'il commence à pleuvoir}}. Et d'autre part, le chant récurrent du vers {{Citation|Je peux vous montrer}} ({{Citation étrangère|langue=en|I can show you}}) témoigne d'une évolution dans le rôle que s'attribue Lennon, puisqu'il se pose ici en porte-parole, en montreur de chemin à suivre, plutôt que comme conteur d'une quelconque histoire d'amour<ref name="turner"/>.
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[[Fichier:Rickenbacker 4001.jpg|thumb|100px|Le modèle Rickenbacker 4001 utilisé par McCartney sur ''Rain''.]]
[[Fichier:Rickenbacker 4001.jpg|thumb|100px|Le modèle Rickenbacker 4001 utilisé par McCartney sur ''Rain''.]]


La chanson est [[Enregistrement sonore|enregistrée]] les [[14 avril|14]] et [[16 avril]] [[1966]] aux [[studios EMI]] de Londres, durant les sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]''<ref>{{fr}} {{Lien web|titre=Fiche technique de Rain|url=http://www.yellow-sub.net/article.php3?id_article=1699|site=[http://www.yellow-sub.net yellow-sub.net]|consulté le=27/11/2008}}</ref>.
La chanson est [[Enregistrement sonore|enregistrée]] les [[14 avril|14]] et {{date|16 avril 1966}} aux [[studios EMI]] de Londres, durant les sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]''<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Fiche technique de Rain|url=http://www.yellow-sub.net/article.php3?id_article=1699|site=[http://www.yellow-sub.net yellow-sub.net]|consulté le=27/11/2008}}</ref>.


Dans la soirée du 14 avril, après avoir travaillé sur ''[[Paperback Writer]]''<ref name="lewisohn"/>, les Beatles enregistrent cinq prises de la chanson. [[John Lennon]] est au chant et à la guitare rythmique ([[Gretsch]] ''Nashville 6120''), [[Paul McCartney]] à la basse ([[Rickenbacker]] ''4001 S''), [[George Harrison]] à la guitare ([[Gibson Guitar Corporation|Gibson]] ''Les Paul SG Standard'') et [[Ringo Starr]] à la batterie ([[Ludwig-Musser|Ludwig]])<ref name="fontenot"/>.
Dans la soirée du {{date-|14 avril}}, après avoir travaillé sur ''[[Paperback Writer]]''<ref name="lewisohn"/>, les Beatles enregistrent cinq prises de la chanson. [[John Lennon]] est au chant et à la guitare rythmique ([[Gretsch]] ''Nashville 6120''), [[Paul McCartney]] à la basse ([[Rickenbacker]] ''4001 S''), [[George Harrison]] à la guitare ([[Gibson Guitar Corporation|Gibson]] ''Les Paul SG Standard'') et [[Ringo Starr]] à la batterie ([[Ludwig-Musser|Ludwig]])<ref name="fontenot"/>.
Le travail reprend le surlendemain dans l’après-midi, pour l’ajout d’[[overdub]]s à la prise 5 : vocaux par Lennon, McCartney et Harrison, tambourin par Ringo Starr, basse par McCartney et effets divers, pour une séance longue de 11 heures<ref name="lewisohn"/>. Ce travail donne naissance à 3 autres prises, par transfert des pistes sur une autre machine (''tape reduction''), pour libérer de la place et continuer à enregistrer. Le [[Mixage audio|mixage]] définitif en [[Monophonique|mono]] est réalisé à partir de la prise 8<ref name="lewisohn"/>.
Le travail reprend le surlendemain dans l’après-midi, pour l’ajout d’[[overdub]]s à la prise 5 : vocaux par Lennon, McCartney et Harrison, tambourin par Ringo Starr, basse par McCartney et effets divers, pour une séance longue de 11 heures<ref name="lewisohn"/>. Ce travail donne naissance à 3 autres prises, par transfert des pistes sur une autre machine (''tape reduction''), pour libérer de la place et continuer à enregistrer. Le [[Mixage audio|mixage]] définitif en [[Monophonique|mono]] est réalisé à partir de la prise 8<ref name="lewisohn"/>.


Plus que jamais avides d’expérimentations, les Beatles exécutent leurs parties instrumentales d’accompagnement plus rapidement qu’ils ne l’auraient dû, puis ralentissent la bande<ref name="lewisohn">{{en}} {{ouvrage|éditeur=Hamlyn|titre=The Complete Beatles Recording Sessions: The Official Story of the Abbey Road Years|auteur=Mark Lewisohn|lieu=Londres|année=1988|isbn=0-600-55784-7|passage=74}}</ref>, ce qui donne une lourdeur particulière à l’ensemble, rendant la basse très profonde et la batterie massive.
Plus que jamais avides d’expérimentations, les Beatles exécutent leurs parties instrumentales d’accompagnement plus rapidement qu’ils ne l’auraient dû, puis ralentissent la bande<ref name="lewisohn">{{en}} {{ouvrage|éditeur=Hamlyn|titre=The Complete Beatles Recording Sessions: The Official Story of the Abbey Road Years|auteur=Mark Lewisohn|lieu=Londres|année=1988|isbn=0-600-55784-7|passage=74}}</ref>, ce qui donne une lourdeur particulière à l’ensemble, rendant la basse très profonde et la batterie massive.
« La batterie devient une batterie géante. Si vous ralentissez un bruit de pas, ça devient le pas d’un géant, ça ajoute quelques tonnes au poids de la personne. Alors on a obtenu un accompagnement bien gros, bien gras, bien percutant, et on a empilé dessus à vitesse normale, ce qui fait que l’ensemble n’a pas sonné comme un truc qui avait été ralenti, mais ça avait un énorme son. C’était génial, j’ai adoré ça »<ref name="anthology"/>, raconte Paul McCartney. Le même traitement - consistant à enregistrer plus vite puis à ralentir la bande - est appliqué sur la voix de John Lennon. Ce procédé consistant à ajuster la vitesse de défilement des bandes, avec un outil nommé ''vari-speed'', va désormais être fréquemment utilisé pour les réalisations du groupe<ref name="emerick"/>
« La batterie devient une batterie géante. Si vous ralentissez un bruit de pas, ça devient le pas d’un géant, ça ajoute quelques tonnes au poids de la personne. Alors on a obtenu un accompagnement bien gros, bien gras, bien percutant, et on a empilé dessus à vitesse normale, ce qui fait que l’ensemble n’a pas sonné comme un truc qui avait été ralenti, mais ça avait un énorme son. C’était génial, j’ai adoré ça »<ref name="anthology"/>, raconte Paul McCartney. Le même traitement - consistant à enregistrer plus vite puis à ralentir la bande - est appliqué sur la voix de John Lennon. Ce procédé consistant à ajuster la vitesse de défilement des bandes, avec un outil nommé ''vari-speed'', va désormais être fréquemment utilisé pour les réalisations du groupe<ref name="emerick"/>


''Rain'' est historiquement la première chanson de la musique populaire du {{s-|XX|e}} où des bandes magnétiques sont passées à l'envers<ref name="turner"/>, phénomène qui intervient à la fin de la chanson avec le chant de [[John Lennon]]. Le crédit de cette trouvaille est incertain. Le producteur du groupe, [[George Martin]], explique qu'il fut à l'origine de cette idée, trouvée alors qu'il travaillait dans les studios après le départ du groupe. John Lennon a une autre version des faits. Une fois rentré chez lui, ce dernier avait accidentellement enclenché à l'envers, sur son magnétophone personnel, une copie des premiers enregistrements de la chanson, arrivant aux studios le lendemain matin tout heureux de proposer cette innovation. En [[1980]], dans son interview au magazine [[Playboy]], Lennon explique que c'était la [[marijuana]] (et non la fatigue, comme il l'avait déclaré en [[1966]]) qui l'avait empêché de savoir vraiment ce qu'il faisait, ce qui l'amène à dire de cette chanson qu'il s'agit {{Citation|d'un don de Dieu, de Jah en fait, le dieu de la marijuana}}<ref name="extraits_itw">{{en}} Notes sur ''Revolver'' sur [http://www.beatlesinterviews.org/ The Beatles Interview Database] {{lire en ligne|lien=http://www.beatlesinterviews.org/dba07revol.html}}</ref>.
''Rain'' est historiquement la première chanson de la musique populaire du {{s-|XX}} où des bandes magnétiques sont passées à l'envers<ref name="turner"/>, phénomène qui intervient à la fin de la chanson avec le chant de [[John Lennon]]. Le crédit de cette trouvaille est incertain. Le producteur du groupe, [[George Martin]], explique qu'il fut à l'origine de cette idée, trouvée alors qu'il travaillait dans les studios après le départ du groupe. John Lennon a une autre version des faits. Une fois rentré chez lui, ce dernier avait accidentellement enclenché à l'envers, sur son magnétophone personnel, une copie des premiers enregistrements de la chanson, arrivant aux studios le lendemain matin tout heureux de proposer cette innovation. En [[1980]], dans son interview au magazine [[Playboy]], Lennon explique que c'était la [[marijuana]] (et non la fatigue, comme il l'avait déclaré en [[1966]]) qui l'avait empêché de savoir vraiment ce qu'il faisait, ce qui l'amène à dire de cette chanson qu'il s'agit {{Citation|d'un don de Dieu, de Jah en fait, le dieu de la marijuana}}<ref name="extraits_itw">{{en}} Notes sur ''Revolver'' sur [http://www.beatlesinterviews.org/ The Beatles Interview Database] {{lire en ligne|lien=http://www.beatlesinterviews.org/dba07revol.html}}</ref>.


La version de John Lennon est corroborée par l'ingénieur du son [[Geoff Emerick]], qui explique : « Ils avaient tous un [[magnétophone]] ''Brenell'' chez eux à cette époque. John avait demandé une copie des premières prises de la chanson [...]. Il arriva le lendemain dans la salle de contrôle, la bande magnétique en mains, et nous demanda à tous d'écouter son « incroyable » découverte [...] C'était le son qu'il voulait pour la fin de la chanson, et c'était à nous de réaliser ce travail. George Martin me demanda de copier la piste de chant de John sur une machine deux-pistes, puis nous retournâmes la bande pour la réinjecter au bon endroit dans l'enregistrement multipistes. Lennon était émerveillé par le résultat. À partir de ce jour, les Beatles furent gagnés par la fièvre de l'inversement (''backward fever'') et tous les [[overdub]]s qu'ils réalisaient pour ''Revolver'' devaient être essayés à l'envers, aussi bien qu'à l'endroit »<ref name="emerick">{{en}} {{ouvrage|éditeur=Gotham Books|titre=Here There and Everywhere, My Life Recording The Music of The Beatles|auteur=Geoff Emerick|lieu=|année=2006|isbn=1-59240-179-1|passage=116-117}}</ref>.
La version de John Lennon est corroborée par l'ingénieur du son [[Geoff Emerick]], qui explique : « Ils avaient tous un [[magnétophone]] ''Brenell'' chez eux à cette époque. John avait demandé une copie des premières prises de la chanson [...]. Il arriva le lendemain dans la salle de contrôle, la bande magnétique en mains, et nous demanda à tous d'écouter son « incroyable » découverte [...] C'était le son qu'il voulait pour la fin de la chanson, et c'était à nous de réaliser ce travail. George Martin me demanda de copier la piste de chant de John sur une machine deux-pistes, puis nous retournâmes la bande pour la réinjecter au bon endroit dans l'enregistrement multipistes. Lennon était émerveillé par le résultat. À partir de ce jour, les Beatles furent gagnés par la fièvre de l'inversement (''backward fever'') et tous les [[overdub]]s qu'ils réalisaient pour ''Revolver'' devaient être essayés à l'envers, aussi bien qu'à l'endroit »<ref name="emerick">{{en}} {{ouvrage|éditeur=Gotham Books|titre=Here There and Everywhere, My Life Recording The Music of The Beatles|auteur=Geoff Emerick|lieu=|année=2006|isbn=1-59240-179-1|passage=116-117}}</ref>.


Outre la partie instrumentale, l'inversion concerne le vers « ''If the rain comes they run and hide their heads'' », qui est donc devenu « ''sdaeh rieht edih dna nur yeht semoc niar eht fI'' », ainsi que les derniers mots de la chanson, ''rain'' (« ''niar'' ») et ''sunshine'' (« ''enishnus'' »).
Outre la partie instrumentale, l'inversion concerne le vers « ''If the rain comes they run and hide their heads'' », qui est donc devenu « ''sdaeh rieht edih dna nur yeht semoc niar eht fI'' », ainsi que les derniers mots de la chanson, ''rain'' (« ''niar'' ») et ''sunshine'' (« ''enishnus'' »). Une édition japonaise de l'album ''[[Hey Jude (album des Beatles)|{{langue|en|Hey Jude}}]]'' prend même l'initiative de transcrire les paroles comme si elles n'étaient pas inversées, ce qui donne « ''Stare it down and nourish / what comes near you.'' »<ref>The Radical Innovations of the Perfect Beatles Song ; https://www.youtube.com/watch?v=68oFp5LoL74</ref>


== Évolutions techniques ==
== Évolutions techniques ==


La réalisation du single ''Paberback Writer'' / ''Rain'' se déroule au début des sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', qui ont démarré le 6 avril 1966 avec, d'emblée, l'expérimental ''[[Tomorrow Never Knows]]''<ref name="lewisohn"/>. C'est une période de grandes avancées techniques dans les [[studios EMI]], œuvres d'un personnel entièrement au service des Beatles. Ainsi, [[Geoff Emerick]] change la façon d'enregistrer la [[guitare basse|basse]], à la demande de Paul McCartney, qui souhaite que son instrument puisse être entendu comme dans les productions [[Motown]] qu'il écoute assidument à cette époque<ref name="emerick"/>. Emerick a l'idée de se servir d'un gros haut-parleur comme micro, placé en face de l'ampli de Paul. L'ingénieur du son, à peine âgé de 19 ans en 1966, explique : « le mouvement du diaphragme du second haut-parleur générait le courant électrique ». Par ailleurs, Paul McCartney utilise pour la première fois une basse [[Rickenbacker]] au lieu de sa traditionnelle ''Höfner violon''. Il en résulte un son de basse particulièrement renforcé, et beaucoup plus audible que d'habitude<ref name="emerick"/>.
La réalisation du single ''Paberback Writer'' / ''Rain'' se déroule au début des sessions de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', qui ont démarré le {{date-|6 avril 1966}} avec, d'emblée, l'expérimental ''[[Tomorrow Never Knows]]''<ref name="lewisohn"/>. C'est une période de grandes avancées techniques dans les [[studios EMI]], œuvres d'un personnel entièrement au service des Beatles. Ainsi, [[Geoff Emerick]] change la façon d'enregistrer la [[guitare basse|basse]], à la demande de Paul McCartney, qui souhaite que son instrument puisse être entendu comme dans les productions [[Motown]] qu'il écoute assidument à cette époque<ref name="emerick"/>. Emerick a l'idée de se servir d'un gros haut-parleur comme micro, placé en face de l'ampli de Paul. L'ingénieur du son, à peine âgé de 19 ans en 1966, explique : « le mouvement du diaphragme du second haut-parleur générait le courant électrique ». Par ailleurs, Paul McCartney utilise pour la première fois une basse [[Rickenbacker]] au lieu de sa traditionnelle ''Höfner violon''. Il en résulte un son de basse particulièrement renforcé, et beaucoup plus audible que d'habitude<ref name="emerick"/>.


Toujours pour enrichir les productions du groupe en basses fréquences et en volume sonore, Emerick peut utiliser un tout nouvel appareil pour mixer le single : l'ATOC, pour ''Automatic Transient Overload Control'', c'est-à-dire « contrôle automatique de surcharge transitoire ». Il permet de monter le volume général du mixage tout en aplanissant les crêtes maximales des signaux, évitant ainsi les risques de débordement à la gravure du vinyle. « C'était une énorme machine développée par le département de maintenance d'EMI, remplie de lumières clignotantes », raconte Geoff Emerick, « Et cela nous a permis de graver le single à un volume sonore plus élevé qu'aucune autre production de l'époque »<ref name="emerick"/>.
Toujours pour enrichir les productions du groupe en basses fréquences et en volume sonore, Emerick peut utiliser un tout nouvel appareil pour mixer le single : l'ATOC, pour ''Automatic Transient Overload Control'', c'est-à-dire « contrôle automatique de surcharge transitoire ». Il permet de monter le volume général du mixage tout en aplanissant les crêtes maximales des signaux, évitant ainsi les risques de débordement à la gravure du vinyle. « C'était une énorme machine développée par le département de maintenance d'EMI, remplie de lumières clignotantes », raconte Geoff Emerick, « Et cela nous a permis de graver le single à un volume sonore plus élevé qu'aucune autre production de l'époque »<ref name="emerick"/>.
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Les chœurs arrivent en réponse aux paroles de John Lennon, à partir du deuxième couplet, répétant deux fois « ''when the sun shines down'' », puis « ''when the rain comes down'' » sur le couplet suivant et enfin, « ''when it rains and shine'' » sur le dernier couplet. Le refrain est chanté par les deux voix de McCartney et Lennon en [[harmonie]] : les mots ''rain'', puis ''shine'' modulés sur quatre mesures. La fin du morceau est donc ponctuée de ces fameuses lignes inversées de John Lennon sur fond de chœur qui répète « ''Rain!'' ».
Les chœurs arrivent en réponse aux paroles de John Lennon, à partir du deuxième couplet, répétant deux fois « ''when the sun shines down'' », puis « ''when the rain comes down'' » sur le couplet suivant et enfin, « ''when it rains and shine'' » sur le dernier couplet. Le refrain est chanté par les deux voix de McCartney et Lennon en [[harmonie]] : les mots ''rain'', puis ''shine'' modulés sur quatre mesures. La fin du morceau est donc ponctuée de ces fameuses lignes inversées de John Lennon sur fond de chœur qui répète « ''Rain!'' ».


La chanson est notamment soutenue par une grande performance de la section rythmique (basse-batterie). [[Paul McCartney]] visite sur sa basse la gamme de sol majeur à une rapidité étonnante. Avec le rythme hypnotique de ''[[Tomorrow Never Knows]]'', et son jeu foisonnant sur ''[[She Said She Said]]'', le batteur [[Ringo Starr]] reconnaît être, durant ces sessions d’avril 1966, au sommet de son art<ref name="anthology"/> : {{Citation bloc|Ce dont je suis le plus fier, c’est certainement mon travail sur ''Rain''. Je crois que je joue génialement sur ce titre. D’habitude, je tape la caisse claire et le charleston. Je crois que c’est la première fois que j’ai utilisé cette combine de démarrer par un coup sur le charleston au lieu d’attaquer l’un des toms directement. Je crois que c’est ce que j’ai enregistré de meilleur. ''Rain'' me stupéfie à chaque fois que je l’écoute. C’est au-dessus du reste. Je me connais, je sais ce dont je suis capable à la batterie et, au-dessus de ça, il y a ''Rain''.}}
La chanson est notamment soutenue par une grande performance de la section rythmique (basse-batterie). [[Paul McCartney]] visite sur sa basse la gamme de sol majeur à une rapidité étonnante. Avec le rythme hypnotique de ''[[Tomorrow Never Knows]]'', et son jeu foisonnant sur ''[[She Said She Said]]'', le batteur [[Ringo Starr]] reconnaît être, durant ces sessions d’{{date-|avril 1966}}, au sommet de son art<ref name="anthology"/> : {{Citation bloc|Ce dont je suis le plus fier, c’est certainement mon travail sur ''Rain''. Je crois que je joue génialement sur ce titre. D’habitude, je tape la caisse claire et le charleston. Je crois que c’est la première fois que j’ai utilisé cette combine de démarrer par un coup sur le charleston au lieu d’attaquer l’un des toms directement. Je crois que c’est ce que j’ai enregistré de meilleur. ''Rain'' me stupéfie à chaque fois que je l’écoute. C’est au-dessus du reste. Je me connais, je sais ce dont je suis capable à la batterie et, au-dessus de ça, il y a ''Rain''.}}


La fin du morceau est d’ailleurs ponctuée par un [[Break (musique)|break]] rythmiquement très compliqué exécuté par les deux compères dans un « timing » parfait.
La fin du morceau est d’ailleurs ponctuée par un [[Break (musique)|break]] rythmiquement très compliqué exécuté par les deux compères dans un « timing » parfait.
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[[Fichier:Chiswick House, London.jpg|thumb|right|Chiswick House, lieu du tournage du clip.]]
[[Fichier:Chiswick House, London.jpg|thumb|right|Chiswick House, lieu du tournage du clip.]]


''Rain'' est publiée en tant que [[face B]] de ''Paperback Writer'' le {{date|30|mai|1966|en musique}} aux [[États-Unis]] ([[Capitol Records]]) et le [[10 juin]] suivant au [[Royaume-Uni]] ([[Parlophone (label)|Parlophone]]). Elle apparait ensuite sur les compilations ''[[Hey Jude (album des Beatles)|Hey Jude]]'' aux États-Unis et ailleurs en 1970 et ''Rarities''<ref>[[:en:Rarities (Beatles compilation)|''Rarities'' sur wp:en]]</ref> au Royaume-Uni en 1978. Depuis [[1988 en musique|1988]], on retrouve ''Rain'' en sur l'album ''[[Past Masters]]'', une compilation qui reprend des titres de [[45-tours]] non présents dans la discographie officielle du groupe.
''Rain'' est publiée en tant que [[face B]] de ''Paperback Writer'' le {{date|30|mai|1966|en musique}} aux [[États-Unis]] ([[Capitol Records]]) et le [[10 juin]] suivant au [[Royaume-Uni]] ([[Parlophone (label)|Parlophone]]). Elle apparait ensuite sur les compilations ''[[Hey Jude (album des Beatles)|Hey Jude]]'' aux États-Unis et ailleurs en 1970 et ''Rarities''<ref>[[:en:Rarities (Beatles compilation)|''Rarities'' sur wp:en]]</ref> au Royaume-Uni en 1978. Depuis [[1988 en musique|1988]], on retrouve ''Rain'' en sur l'album ''[[Past Masters]]'', une compilation qui reprend des titres de [[45-tours]] non présents dans la discographie officielle du groupe.


[[Klaus Voormann]], ami des Beatles depuis l'époque de leurs débuts à [[Hambourg]], a conçu les décors du [[clip|vidéoclip]] promotionnel pour ''Rain''<ref>Klaus Voormann est aussi le créateur de la pochette de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', sorti peu après le single.</ref>, tourné dans les jardins de [[Chiswick House]] à [[Londres]]<ref name="anthology"/>. La vidéo alterne des plans en couleur des Beatles dans les jardins, et quelques scènes prises en noir et blanc, le groupe aux instruments<ref name="cliprain"/>. Des photos prises lors de ces séquences en noir et blanc sont d'ailleurs utilisées pour le verso de la pochette de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]''<ref>{{en}} Notes sur la pochette de ''Revolver'' sur [http://www.norwegianwood.org/ Norwegianwood.org] {{lire en ligne|lien=http://www.norwegianwood.org/beatles/english/albumcovers7.html}}</ref>.
[[Klaus Voormann]], ami des Beatles depuis l'époque de leurs débuts à [[Hambourg]], a conçu les décors du [[clip|vidéoclip]] promotionnel pour ''Rain''<ref>Klaus Voormann est aussi le créateur de la pochette de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]'', sorti peu après le single.</ref>, tourné dans les jardins de [[Chiswick House]] à [[Londres]]<ref name="anthology"/>. La vidéo alterne des plans en couleur des Beatles dans les jardins, et quelques scènes prises en noir et blanc, le groupe aux instruments<ref name="cliprain"/>. Des photos prises lors de ces séquences en noir et blanc sont d'ailleurs utilisées pour le verso de la pochette de l'album ''[[Revolver (album)|Revolver]]''<ref>{{en}} Notes sur la pochette de ''Revolver'' sur [http://www.norwegianwood.org/ Norwegianwood.org] {{lire en ligne|lien=http://www.norwegianwood.org/beatles/english/albumcovers7.html}}</ref>.
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Le clip constitue la seule vidéo sur laquelle les Beatles interprètent ''Rain''. Si, lors de leurs ultimes concerts, de [[juin]] à {{date||août|1966|en musique}}, ils ont interprété ''Paperback Writer'' sur scène<ref>{{YouTube|4AC957ByEuw|Paperback Witer live à Tokyo, juin 1966|en}}</ref>, cela n'a pas été le cas de ''Rain'', ni d'ailleurs d'aucune des autres chansons enregistrées à la même période pour l'album ''Revolver''.
Le clip constitue la seule vidéo sur laquelle les Beatles interprètent ''Rain''. Si, lors de leurs ultimes concerts, de [[juin]] à {{date||août|1966|en musique}}, ils ont interprété ''Paperback Writer'' sur scène<ref>{{YouTube|4AC957ByEuw|Paperback Witer live à Tokyo, juin 1966|en}}</ref>, cela n'a pas été le cas de ''Rain'', ni d'ailleurs d'aucune des autres chansons enregistrées à la même période pour l'album ''Revolver''.

=== Publication en France ===
La chanson arrive en France en {{date-|juin 1966}} sur la face B d'un [[45 tours]] [[Extended play|EP]] (« super 45 tours ») ; elle est accompagnée de ''[[Nowhere Man]]''. Sur la face A figurent ''[[Paperback Writer]]'' et ''[[The Word]]''<ref>{{Lien web |auteur=Masanori Yokono|titre=24. The Beatles (MEO 119)|url=http://www.yokono.co.uk/collection/beatles/france/ep/meo119.html|consulté=1 juin 2022}}.</ref>. La photo de la pochette est prise dans les [[Twickenham Film Studios|studios Twickenham]] le {{date-|23 novembre 1965}} lors du tournage du film promotionnel de la chanson ''[[Help! (chanson)|Help!]]''<ref>Livret du disque ''[[1 (album des Beatles)|1+]]''.</ref>.


== Réception ==
== Réception ==


''Rain'' atteint la {{23e|position}} des ''charts'' aux États-Unis le {{date|11|juin|1966|en musique}} grâce à ses diffusions radio<ref>''Rain'' étant une face B, elle n'entre pas en compte dans les ventes du disque. Voir le fonctionnement du Billboard Hot 100 : [http://www.billboard.com/bbcom/about_us/bbmethodology.jsp Billboard Methodology]</ref>, tandis que sa face A ''[[Paperback Writer]]'' est N°1 des deux côtés de l’Atlantique. ''Paperback Writer'' atteint aussi, notamment, la première place en Allemagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Norvège<ref name="fontenot">{{en}} {{Lien web|titre=Rain - The history of this classic Beatles song|url=http://oldies.about.com/od/thebeatlessongs/a/rain.htm|site=[http://oldies.about.com/ oldies.about.com]|auteur=Robert Fontenot|éditeur=The New York Times Company|consulté le= 27/11/2008}}</ref>. Aux États-Unis, le single est certifié ''gold'' le {{date|14|juillet|1966|en musique}} par la [[Recording Industry Association of America|RIAA]]<ref name="riaa">{{en}} [https://www.riaa.com/goldandplatinumdata.php?table=SEARCH Site de la RIAA], rechercher « Paperback Writer ». Consulté le 5/12/2008</ref>, ce qui correspond à plus de 500 000 exemplaires vendus<ref>{{en}} {{Lien web|titre=Critères de la RIAA|url=https://www.riaa.com/goldandplatinum.php?content_selector=criteria|site=[https://www.riaa.com/ RIAA.com]|consulté le=21/06/2008}}</ref> sur le sol américain.
''Rain'' atteint la {{23e|position}} des ''charts'' aux États-Unis le {{date|11|juin|1966|en musique}} grâce à ses diffusions radio<ref>''Rain'' étant une face B, elle n'entre pas en compte dans les ventes du disque. Voir le fonctionnement du Billboard Hot 100 : [http://www.billboard.com/bbcom/about_us/bbmethodology.jsp Billboard Methodology]</ref>, tandis que sa face A ''[[Paperback Writer]]'' est {{|1}} des deux côtés de l’Atlantique. ''Paperback Writer'' atteint aussi, notamment, la première place en Allemagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Norvège<ref name="fontenot">{{Lien web|langue=en|titre=Rain - The history of this classic Beatles song|url=http://oldies.about.com/od/thebeatlessongs/a/rain.htm|site=[http://oldies.about.com/ oldies.about.com]|auteur=Robert Fontenot|éditeur=The New York Times Company|consulté le= 27/11/2008}}</ref>. Aux États-Unis, le single est certifié ''gold'' le {{date|14|juillet|1966|en musique}} par la [[Recording Industry Association of America|RIAA]]<ref name="riaa">{{en}} [https://www.riaa.com/goldandplatinumdata.php?table=SEARCH Site de la RIAA], rechercher « Paperback Writer ». Consulté le 5/12/2008</ref>, ce qui correspond à plus de 500 000 exemplaires vendus<ref>{{Lien web|langue=en|titre=Critères de la RIAA|url=https://www.riaa.com/goldandplatinum.php?content_selector=criteria|site=[https://www.riaa.com/ RIAA.com]|consulté le=21/06/2008}}</ref> sur le sol américain.


''Rain'' est un des titres des Beatles les plus salués par la critique, figurant sur bon nombre de listes, comme celle des [[500 plus grandes chansons de tous les temps]] de ''[[Rolling Stone|Rolling Stone Magazine]]'' (N°463)<ref>{{en}} {{Lien web|titre=The RS 500 Greatest Songs of All Time|url=https://www.rollingstone.com/news/coverstory/500songs/page/5|éditeur=''[[Rolling Stone]]''|consulté le=27/11/2008}}</ref>. {{Passage à actualiser|''AcclaimedMusic.net'', un site web qui compile des centaines de listes de ce type dans le monde entier, classe ''Rain'' à la {{557e|place}} du « Top 3000 », ce qui en fait la {{22e|chanson}} classée des Beatles sur ce site<ref>{{en}} {{Lien web|titre=The Top Songs from 1966|url=http://www.acclaimedmusic.net/Current/1966s.htm|site=[http://www.acclaimedmusic.net acclaimedmusic.net]|consulté le= 27/11/2008}}</ref>{{,}}<ref>Liste et critiques utilisées pour établir ce classement : Blender (USA) - The 1001 Greatest Songs to Download Right Now, Bruce Pollock (USA) - The 7,500 Most Important Songs of 1944-2000 (2005), Rolling Stone (USA) - The 500 Greatest Songs of All Time (2004), Stephen Spignesi and Michael Lewis (USA) - The 100 Best Beatles Songs (2004), Elvis Costello - The Best Songs from the 500 Best Albums Ever (2000)
''Rain'' est un des titres des Beatles les plus salués par la critique, figurant sur bon nombre de listes, comme celle des [[500 plus grandes chansons de tous les temps]] de ''[[Rolling Stone|Rolling Stone Magazine]]'' ({{|463}})<ref>{{Lien web|langue=en|titre=The RS 500 Greatest Songs of All Time|url=https://www.rollingstone.com/news/coverstory/500songs/page/5|éditeur=''[[Rolling Stone]]''|consulté le=27/11/2008}}</ref>. ''AcclaimedMusic.net'', un site web qui compile des centaines de listes de ce type dans le monde entier, classe ''Rain'' à la {{991e|place}} du « Top 3000 », ce qui en fait la {{32e|chanson}} classée des Beatles sur ce site<ref>{{Lien web|langue=en|titre=The Top Songs from 1966|url=http://www.acclaimedmusic.net/Current/1966s.htm|site=[http://www.acclaimedmusic.net acclaimedmusic.net]|consulté le= 21/04/2021}}</ref>{{,}}<ref>Liste et critiques utilisées pour établir ce classement : Blender (USA) - The 1001 Greatest Songs to Download Right Now, Bruce Pollock (USA) - The 7,500 Most Important Songs of 1944-2000 (2005), Rolling Stone (USA) - The 500 Greatest Songs of All Time (2004), Stephen Spignesi and Michael Lewis (USA) - The 100 Best Beatles Songs (2004), Elvis Costello - The Best Songs from the 500 Best Albums Ever (2000)
Mojo (UK) - The 100 Greatest Singles of All Time (1997), Mojo (UK) - The 101 Greatest Tracks by The Beatles (2006), Q (UK) - The Ultimate Music Collection (2005), Uncut (UK) - The 50 Greatest Beatles Tracks (2001), Now & Then (Sweden) - The Beatles' 50 Best Songs (1992), Toby Creswell (Australia) - 1001 Songs (2005)</ref>}}.
Mojo (UK) - The 100 Greatest Singles of All Time (1997), Mojo (UK) - The 101 Greatest Tracks by The Beatles (2006), Q (UK) - The Ultimate Music Collection (2005), Uncut (UK) - The 50 Greatest Beatles Tracks (2001), Now & Then (Sweden) - The Beatles' 50 Best Songs (1992), Toby Creswell (Australia) - 1001 Songs (2005)</ref>.


Le jeu de [[Batterie (musique)|batterie]] de [[Ringo Starr]], qu’il reconnaît lui-même comme la meilleure performance de sa carrière, est également salué par ''[[Rolling Stone]]'' (« superbe ») et ''[[AllMusic]]'', qui loue ses « créatifs breaks de batterie »<ref name="unterberger">{{en}} {{Lien web|titre=Rain: Song Review|auteur=Richie Unterberger|url=http://allmusic.com/cg/amg.dll?p=amg&token=&sql=33:wjfuxqwrldfe|éditeur=''[[AllMusic]]''|consulté le=27/11/2008}}</ref>.
Le jeu de [[Batterie (musique)|batterie]] de [[Ringo Starr]], qu’il reconnaît lui-même comme la meilleure performance de sa carrière, est également salué par ''[[Rolling Stone]]'' (« superbe ») et ''[[AllMusic]]'', qui loue ses « créatifs breaks de batterie »<ref name="unterberger">{{Lien web|langue=en|titre=Rain: Song Review|auteur=Richie Unterberger|url=http://allmusic.com/cg/amg.dll?p=amg&token=&sql=33:wjfuxqwrldfe|éditeur=''[[AllMusic]]''|consulté le=27/11/2008}}</ref>.


Quant à la tonalité générale du morceau, le critique américain Richie Unterberger écrit sur ''Allmusic'' : « Rétrospectivement (et peut-être même à l’époque, pour ceux qui savaient), l'apparente nonchalance, lenteur, de ''Rain'' semble bel et bien motivée par l’expérience des drogues hallucinogènes, entraînant des changements de perception sensorielle dont résultent un état altéré et une élasticité temporelle. Que le fait de refléter cette expérience ait été intentionnel ou non, la texture « brumeuse » de la chanson a certainement réussi à la traduire »<ref name="unterberger"/>.
Quant à la tonalité générale du morceau, le critique américain Richie Unterberger écrit sur ''Allmusic'' : « Rétrospectivement (et peut-être même à l’époque, pour ceux qui savaient), l'apparente nonchalance, lenteur, de ''Rain'' semble bel et bien motivée par l’expérience des drogues hallucinogènes, entraînant des changements de perception sensorielle dont résultent un état altéré et une élasticité temporelle. Que le fait de refléter cette expérience ait été intentionnel ou non, la texture « brumeuse » de la chanson a certainement réussi à la traduire »<ref name="unterberger"/>.


Pour sa part, le [[Musicologie|musicologue]] Allan W. Pollack note : « En dehors des arrangements, la chanson est structurellement organisée de manière très « [[Musique indienne|indienne]] »[...]. Quant aux parties vocales et instrumentales de la piste, sujettes à des changements de vitesse entre l’enregistrement original et le mixage, elles accréditent, au même titre que d’autres facteurs, la qualité [[psychédélique]], surréelle, qui entoure le tout »<ref>{{en}} {{Lien web|auteur=Allan W. Pollack|titre=Notes on "Paperback Writer" and "Rain"|url=http://www.icce.rug.nl/~soundscapes/DATABASES/AWP/pw_and_r.shtml|consulté le=5/12/2008}}</ref>.
Pour sa part, le [[Musicologie|musicologue]] Allan W. Pollack note : « En dehors des arrangements, la chanson est structurellement organisée de manière très « [[Musique indienne|indienne]] »[...]. Quant aux parties vocales et instrumentales de la piste, sujettes à des changements de vitesse entre l’enregistrement original et le mixage, elles accréditent, au même titre que d’autres facteurs, la qualité [[psychédélique]], surréelle, qui entoure le tout »<ref>{{Lien web|langue=en|auteur=Allan W. Pollack|titre=Notes on "Paperback Writer" and "Rain"|url=http://www.icce.rug.nl/~soundscapes/DATABASES/AWP/pw_and_r.shtml|consulté le=5/12/2008}}</ref>.


== Interprètes ==
== Interprètes ==
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* [[Paul McCartney]] – [[guitare basse|basse]], [[chœurs]]
* [[Paul McCartney]] – [[guitare basse|basse]], [[chœurs]]
* [[George Harrison]] – [[guitare solo]], chœurs
* [[George Harrison]] – [[guitare solo]], chœurs
* [[Ringo Starr]] – [[batterie (instrument)|batterie]], [[tambourin]]
* [[Ringo Starr]] – [[batterie (instrument)|batterie]], [[Tambourin (sur cadre)|tambourin]]


== Reprises ==
== Reprises ==
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* [[Dan Ar Braz]] sur l'album ''The Earth's Lament'' (1979) ;
* [[Dan Ar Braz]] sur l'album ''The Earth's Lament'' (1979) ;
* [[The Allman Brothers Band]] sur la compilation ''Dreams'' (1989) ;
* [[The Allman Brothers Band]] sur la compilation ''Dreams'' (1989) ;
* {{lien|Marty Willson-Piper}} a interprété la chanson en acoustique ''Rain'' avec Jules Shear (The Church a été présentée dans le spectacle numéro 6 de MTV Unplugged, partageant une facture fractionnée avec Sinéad O'Connor. Ce spectacle a été enregistré le 30 janvier 1990 au National Video Center, à New York, et a été diffusé le 18 mars 1990 sur [[Music Television|MTV]]) ;
* {{lien|Marty Willson-Piper}} a interprété la chanson en acoustique ''Rain'' avec Jules Shear (The Church a été présentée dans le spectacle numéro 6 de MTV Unplugged, partageant une facture fractionnée avec Sinéad O'Connor. Ce spectacle a été enregistré le {{date-|30 janvier 1990}} au National Video Center, à New York, et a été diffusé le {{date-|18 mars 1990}} sur [[Music Television|MTV]]) ;
* [[Yellow Matter Custard]], composé de [[Mike Portnoy]], [[Neal Morse]], [[Paul Gilbert]] et [[Matt Bissonette]] a repris la chanson lors de leurs deux concerts en 2005.
* [[Yellow Matter Custard]], composé de [[Mike Portnoy]], [[Neal Morse]], [[Paul Gilbert (guitariste)|Paul Gilbert]] et [[Matt Bissonette]] a repris la chanson lors de leurs deux concerts en 2005.


Des groupes comme [[The Grateful Dead]], [[U2]]<ref>En juillet 2012, le groupe chante cette chanson ''a cappella'' lorsqu'il commence à pleuvoir tout à la fin du premier spectacle donné à Montréal. Une pluie diluvienne inonde les 60 000 spectateurs aussitôt après.</ref>, [[Galaxie 500]] ont repris ou reprennent également la chanson en concert. Elle a servi de premier nom à [[Oasis (groupe)|Oasis]] (The Rain).
Des groupes comme [[The Grateful Dead]], [[U2]]<ref>En juillet 2012, le groupe chante cette chanson ''a cappella'' lorsqu'il commence à pleuvoir tout à la fin du premier spectacle donné à Montréal. Une pluie diluvienne inonde les 60 000 spectateurs aussitôt après.</ref>, [[Galaxie 500]] ont repris ou reprennent également la chanson en concert. Elle a servi de premier nom à [[Oasis (groupe)|Oasis]] (The Rain).


== Notes et références ==
== Notes et références ==
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{{Palette|Singles des Beatles}}
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[[Catégorie:Chanson évoquant la pluie]]
[[Catégorie:Chanson évoquant la pluie]]
[[Catégorie:Chanson produite par George Martin]]
[[Catégorie:Chanson produite par George Martin]]
[[Catégorie:Chanson évoquant l'Australie]]

Dernière version du 21 mars 2024 à 11:24

Rain

Single de The Beatles
Face A Paperback Writer
Face B Rain
Sortie Drapeau des États-Unis
Drapeau du Royaume-Uni
Enregistré Les 14 et
aux studios EMI (Londres)
Durée 3:00
Genre Rock psychédélique
Format 45 tours
Auteur-compositeur John Lennon
Paul McCartney
Producteur George Martin
Label Parlophone
Critique

AllMusic (favorable)[1]

Singles de The Beatles

Pistes de Past Masters

Rain est une chanson des Beatles, principalement écrite par John Lennon avec le concours de Paul McCartney, et publiée en face B du single Paperback Writer. Le disque sort le aux États-Unis, et le suivant au Royaume-Uni. Enregistrée durant les sessions de l'album Revolver, Rain est la première chanson à contenir des bandes inversées. Son destin de « face B » d'un 45 tours en fait un titre relativement méconnu (car ce titre n'est jamais paru sur un album des Beatles, hormis des compilations), pourtant remarquable et reconnu comme tel.

Son ambiance psychédélique, sa sonorité puissante, ses instruments ralentis, sa voix trainante, ses vocaux inversés et la technologie employée pour l'enregistrer sont en effet annonciateurs de bien d'autres innovations à venir dans la carrière du groupe, à commencer par l'album qui sera publié deux mois plus tard.

Composition[modifier | modifier le code]

Pendant leur passage à Amsterdam, lors de leur tournée mondiale de 1964, à partir du bateau sur lequel le groupe visite la ville, John Lennon remarque un badaud portant une cape ancienne de postier néerlandais. Il envoie un assistant l'acquérir et une commande est envoyée en toute hâte à Hong Kong pour en faire faire des copies qu'ils pourront prendre possession la semaine suivante lors de leur passage dans la colonie britannique. À leur arrivée en Australie, le groupe porte fièrement leurs nouvelles redingotes mais doivent se faire transporter lentement sur la plateforme d'un camion afin de donner la chance aux fans assemblés d'apercevoir leurs héros. Confrontées à une pluie torrentielle, les Beatles rentrent trempés à leur hotel. Le manteau tout neuf a déteint sur eux et tout le groupe en a la peau bleue[2].

À l'origine, selon Neil Aspinall et John Lennon, l'inspiration pour Rain remonterait à cette tournée des Beatles en Australie en et à leur arrivée à l'aéroport de Sydney sous une pluie battante[3]. « Je n'ai jamais vu un tel déluge, à part à Tahiti » a expliqué le fondateur des Beatles[4].

Le titre semble être du seul John Lennon, mais Paul McCartney précise qu'il a participé à l'écriture, et que la chanson dans son ensemble résulte d'une collaboration et non du fait de son partenaire en solitaire[4]. Ce dernier explique que Rain est « une chanson sur les gens qui se lamentent sans arrêt à propos du temps »[5].

Le critique Steve Turner voit dans Rain les premières références à l'élévation d'esprit, à la capacité à transcender les événements, références qui, les années suivantes, abondent dans les albums et les déclarations du groupe. Selon Turner, Rain délivre un message visant à expliquer que l'important est l'état d'esprit dans lequel on se trouve (« It's just a state of mind », comme le dit la chanson). Ce message est d'une part caractérisé par une métaphore qui tourne en dérision les gens qui fuient la pluie, comme si leur vie était en jeu (« They might as well be dead »). Ainsi, il suffit de prendre de la distance face aux choses terre à terre de la vie, représentées dans la chanson par la pluie, puisque, scande John Lennon, « Tout est pareil lorsqu'il commence à pleuvoir ». Et d'autre part, le chant récurrent du vers « Je peux vous montrer » (« I can show you ») témoigne d'une évolution dans le rôle que s'attribue Lennon, puisqu'il se pose ici en porte-parole, en montreur de chemin à suivre, plutôt que comme conteur d'une quelconque histoire d'amour[5].

Enregistrement[modifier | modifier le code]

Le modèle Rickenbacker 4001 utilisé par McCartney sur Rain.

La chanson est enregistrée les 14 et aux studios EMI de Londres, durant les sessions de l'album Revolver[6].

Dans la soirée du , après avoir travaillé sur Paperback Writer[7], les Beatles enregistrent cinq prises de la chanson. John Lennon est au chant et à la guitare rythmique (Gretsch Nashville 6120), Paul McCartney à la basse (Rickenbacker 4001 S), George Harrison à la guitare (Gibson Les Paul SG Standard) et Ringo Starr à la batterie (Ludwig)[8]. Le travail reprend le surlendemain dans l’après-midi, pour l’ajout d’overdubs à la prise 5 : vocaux par Lennon, McCartney et Harrison, tambourin par Ringo Starr, basse par McCartney et effets divers, pour une séance longue de 11 heures[7]. Ce travail donne naissance à 3 autres prises, par transfert des pistes sur une autre machine (tape reduction), pour libérer de la place et continuer à enregistrer. Le mixage définitif en mono est réalisé à partir de la prise 8[7].

Plus que jamais avides d’expérimentations, les Beatles exécutent leurs parties instrumentales d’accompagnement plus rapidement qu’ils ne l’auraient dû, puis ralentissent la bande[7], ce qui donne une lourdeur particulière à l’ensemble, rendant la basse très profonde et la batterie massive. « La batterie devient une batterie géante. Si vous ralentissez un bruit de pas, ça devient le pas d’un géant, ça ajoute quelques tonnes au poids de la personne. Alors on a obtenu un accompagnement bien gros, bien gras, bien percutant, et on a empilé dessus à vitesse normale, ce qui fait que l’ensemble n’a pas sonné comme un truc qui avait été ralenti, mais ça avait un énorme son. C’était génial, j’ai adoré ça »[4], raconte Paul McCartney. Le même traitement - consistant à enregistrer plus vite puis à ralentir la bande - est appliqué sur la voix de John Lennon. Ce procédé consistant à ajuster la vitesse de défilement des bandes, avec un outil nommé vari-speed, va désormais être fréquemment utilisé pour les réalisations du groupe[9]

Rain est historiquement la première chanson de la musique populaire du XXe siècle où des bandes magnétiques sont passées à l'envers[5], phénomène qui intervient à la fin de la chanson avec le chant de John Lennon. Le crédit de cette trouvaille est incertain. Le producteur du groupe, George Martin, explique qu'il fut à l'origine de cette idée, trouvée alors qu'il travaillait dans les studios après le départ du groupe. John Lennon a une autre version des faits. Une fois rentré chez lui, ce dernier avait accidentellement enclenché à l'envers, sur son magnétophone personnel, une copie des premiers enregistrements de la chanson, arrivant aux studios le lendemain matin tout heureux de proposer cette innovation. En 1980, dans son interview au magazine Playboy, Lennon explique que c'était la marijuana (et non la fatigue, comme il l'avait déclaré en 1966) qui l'avait empêché de savoir vraiment ce qu'il faisait, ce qui l'amène à dire de cette chanson qu'il s'agit « d'un don de Dieu, de Jah en fait, le dieu de la marijuana »[10].

La version de John Lennon est corroborée par l'ingénieur du son Geoff Emerick, qui explique : « Ils avaient tous un magnétophone Brenell chez eux à cette époque. John avait demandé une copie des premières prises de la chanson [...]. Il arriva le lendemain dans la salle de contrôle, la bande magnétique en mains, et nous demanda à tous d'écouter son « incroyable » découverte [...] C'était le son qu'il voulait pour la fin de la chanson, et c'était à nous de réaliser ce travail. George Martin me demanda de copier la piste de chant de John sur une machine deux-pistes, puis nous retournâmes la bande pour la réinjecter au bon endroit dans l'enregistrement multipistes. Lennon était émerveillé par le résultat. À partir de ce jour, les Beatles furent gagnés par la fièvre de l'inversement (backward fever) et tous les overdubs qu'ils réalisaient pour Revolver devaient être essayés à l'envers, aussi bien qu'à l'endroit »[9].

Outre la partie instrumentale, l'inversion concerne le vers « If the rain comes they run and hide their heads », qui est donc devenu « sdaeh rieht edih dna nur yeht semoc niar eht fI », ainsi que les derniers mots de la chanson, rain (« niar ») et sunshine (« enishnus »). Une édition japonaise de l'album Hey Jude prend même l'initiative de transcrire les paroles comme si elles n'étaient pas inversées, ce qui donne « Stare it down and nourish / what comes near you. »[11]

Évolutions techniques[modifier | modifier le code]

La réalisation du single Paberback Writer / Rain se déroule au début des sessions de l'album Revolver, qui ont démarré le avec, d'emblée, l'expérimental Tomorrow Never Knows[7]. C'est une période de grandes avancées techniques dans les studios EMI, œuvres d'un personnel entièrement au service des Beatles. Ainsi, Geoff Emerick change la façon d'enregistrer la basse, à la demande de Paul McCartney, qui souhaite que son instrument puisse être entendu comme dans les productions Motown qu'il écoute assidument à cette époque[9]. Emerick a l'idée de se servir d'un gros haut-parleur comme micro, placé en face de l'ampli de Paul. L'ingénieur du son, à peine âgé de 19 ans en 1966, explique : « le mouvement du diaphragme du second haut-parleur générait le courant électrique ». Par ailleurs, Paul McCartney utilise pour la première fois une basse Rickenbacker au lieu de sa traditionnelle Höfner violon. Il en résulte un son de basse particulièrement renforcé, et beaucoup plus audible que d'habitude[9].

Toujours pour enrichir les productions du groupe en basses fréquences et en volume sonore, Emerick peut utiliser un tout nouvel appareil pour mixer le single : l'ATOC, pour Automatic Transient Overload Control, c'est-à-dire « contrôle automatique de surcharge transitoire ». Il permet de monter le volume général du mixage tout en aplanissant les crêtes maximales des signaux, évitant ainsi les risques de débordement à la gravure du vinyle. « C'était une énorme machine développée par le département de maintenance d'EMI, remplie de lumières clignotantes », raconte Geoff Emerick, « Et cela nous a permis de graver le single à un volume sonore plus élevé qu'aucune autre production de l'époque »[9].

Comme l'explique George Martin, producteur du groupe : « Les garçons écoutaient beaucoup de disques américains et demandaient ensuite : « Est-ce qu’on peut obtenir cet effet-là ? »[4]. Ainsi, les Beatles voient exaucé leur vœu d'obtenir un son proche de ces productions venues de l'autre côté de l'Atlantique (typiquement, celles de Motown ou de Phil Spector), elles aussi riches en basses fréquences et en niveau sonore.

Enfin, et ce n'est pas la moindre des inventions du personnel technique d'EMI, la voix de John Lennon est passée dans l'Automatic Double Tracking (ADT)[12], une réalisation de l'ingénieur du son Ken Townsend pour les sessions de Revolver, qui permet de ne plus avoir à doubler sa propre voix, et débouchera bientôt sur une autre application, le flanger[7].

Structure musicale[modifier | modifier le code]

Rain démarre par cinq coups de caisse claire (tatap, tatatap) de Ringo Starr, puis c’est l’introduction à la guitare, en sol, accompagnée par la basse dans les aigus. Le morceau se déroule ensuite en sol, do et ré sur les couplets (la basse navigue toujours en bas du manche, à l’octave de ces trois notes) avant le refrain « rain, I don’t mind, shine the weather’s fine » tout en sol, dont la signature rythmique est 6/4 (« rain »), 4/4 (« I don't mind »), 6/4 (« shine ») et à nouveau 4/4 (« The weather's fine ») pour enchaîner sur le couplet suivant : une tendance aux signatures rythmiques multiples dont John Lennon va devenir de plus en plus friand.

Le refrain semble être joué plus lentement que les couplets, dans une véritable ambiance psychédélique – précurseur en ce sens – mais il est pourtant exécuté au même tempo. L’effet étant produit sur ses douze mesures (2 fois 6) par le changement de signature rythmique.

Les chœurs arrivent en réponse aux paroles de John Lennon, à partir du deuxième couplet, répétant deux fois « when the sun shines down », puis « when the rain comes down » sur le couplet suivant et enfin, « when it rains and shine » sur le dernier couplet. Le refrain est chanté par les deux voix de McCartney et Lennon en harmonie : les mots rain, puis shine modulés sur quatre mesures. La fin du morceau est donc ponctuée de ces fameuses lignes inversées de John Lennon sur fond de chœur qui répète « Rain! ».

La chanson est notamment soutenue par une grande performance de la section rythmique (basse-batterie). Paul McCartney visite sur sa basse la gamme de sol majeur à une rapidité étonnante. Avec le rythme hypnotique de Tomorrow Never Knows, et son jeu foisonnant sur She Said She Said, le batteur Ringo Starr reconnaît être, durant ces sessions d’, au sommet de son art[4] :

« Ce dont je suis le plus fier, c’est certainement mon travail sur Rain. Je crois que je joue génialement sur ce titre. D’habitude, je tape la caisse claire et le charleston. Je crois que c’est la première fois que j’ai utilisé cette combine de démarrer par un coup sur le charleston au lieu d’attaquer l’un des toms directement. Je crois que c’est ce que j’ai enregistré de meilleur. Rain me stupéfie à chaque fois que je l’écoute. C’est au-dessus du reste. Je me connais, je sais ce dont je suis capable à la batterie et, au-dessus de ça, il y a Rain. »

La fin du morceau est d’ailleurs ponctuée par un break rythmiquement très compliqué exécuté par les deux compères dans un « timing » parfait.

Publication et clip vidéo[modifier | modifier le code]

Chiswick House, lieu du tournage du clip.

Rain est publiée en tant que face B de Paperback Writer le aux États-Unis (Capitol Records) et le 10 juin suivant au Royaume-Uni (Parlophone). Elle apparait ensuite sur les compilations Hey Jude aux États-Unis et ailleurs en 1970 et Rarities[13] au Royaume-Uni en 1978. Depuis 1988, on retrouve Rain en sur l'album Past Masters, une compilation qui reprend des titres de 45-tours non présents dans la discographie officielle du groupe.

Klaus Voormann, ami des Beatles depuis l'époque de leurs débuts à Hambourg, a conçu les décors du vidéoclip promotionnel pour Rain[14], tourné dans les jardins de Chiswick House à Londres[4]. La vidéo alterne des plans en couleur des Beatles dans les jardins, et quelques scènes prises en noir et blanc, le groupe aux instruments[15]. Des photos prises lors de ces séquences en noir et blanc sont d'ailleurs utilisées pour le verso de la pochette de l'album Revolver[16].

George Harrison introduit ce clip dans la série Anthology avec ces mots : « D'une certaine manière, nous avons inventé MTV »[4],[15]. En fait, le principe du clip existait déjà avec les scopitones, mais ceux-ci n'étaient pas destinés à une diffusion télévisée. Le clip est projeté pour la première fois le au Ed Sullivan Show en même temps que celui de Paperback Writer.

Le clip constitue la seule vidéo sur laquelle les Beatles interprètent Rain. Si, lors de leurs ultimes concerts, de juin à , ils ont interprété Paperback Writer sur scène[17], cela n'a pas été le cas de Rain, ni d'ailleurs d'aucune des autres chansons enregistrées à la même période pour l'album Revolver.

Publication en France[modifier | modifier le code]

La chanson arrive en France en sur la face B d'un 45 tours EP (« super 45 tours ») ; elle est accompagnée de Nowhere Man. Sur la face A figurent Paperback Writer et The Word[18]. La photo de la pochette est prise dans les studios Twickenham le lors du tournage du film promotionnel de la chanson Help![19].

Réception[modifier | modifier le code]

Rain atteint la 23e position des charts aux États-Unis le grâce à ses diffusions radio[20], tandis que sa face A Paperback Writer est no 1 des deux côtés de l’Atlantique. Paperback Writer atteint aussi, notamment, la première place en Allemagne, en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Norvège[8]. Aux États-Unis, le single est certifié gold le par la RIAA[21], ce qui correspond à plus de 500 000 exemplaires vendus[22] sur le sol américain.

Rain est un des titres des Beatles les plus salués par la critique, figurant sur bon nombre de listes, comme celle des 500 plus grandes chansons de tous les temps de Rolling Stone Magazine (no 463)[23]. AcclaimedMusic.net, un site web qui compile des centaines de listes de ce type dans le monde entier, classe Rain à la 991e place du « Top 3000 », ce qui en fait la 32e chanson classée des Beatles sur ce site[24],[25].

Le jeu de batterie de Ringo Starr, qu’il reconnaît lui-même comme la meilleure performance de sa carrière, est également salué par Rolling Stone (« superbe ») et AllMusic, qui loue ses « créatifs breaks de batterie »[26].

Quant à la tonalité générale du morceau, le critique américain Richie Unterberger écrit sur Allmusic : « Rétrospectivement (et peut-être même à l’époque, pour ceux qui savaient), l'apparente nonchalance, lenteur, de Rain semble bel et bien motivée par l’expérience des drogues hallucinogènes, entraînant des changements de perception sensorielle dont résultent un état altéré et une élasticité temporelle. Que le fait de refléter cette expérience ait été intentionnel ou non, la texture « brumeuse » de la chanson a certainement réussi à la traduire »[26].

Pour sa part, le musicologue Allan W. Pollack note : « En dehors des arrangements, la chanson est structurellement organisée de manière très « indienne »[...]. Quant aux parties vocales et instrumentales de la piste, sujettes à des changements de vitesse entre l’enregistrement original et le mixage, elles accréditent, au même titre que d’autres facteurs, la qualité psychédélique, surréelle, qui entoure le tout »[27].

Interprètes[modifier | modifier le code]

Reprises[modifier | modifier le code]

Rain a été reprise notamment par :

Des groupes comme The Grateful Dead, U2[28], Galaxie 500 ont repris ou reprennent également la chanson en concert. Elle a servi de premier nom à Oasis (The Rain).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) « Rain », Richie Unterberger, AllMusic. Consulté le 9 août 2010.
  2. Lucas Ligtenberg et Piet Schreuders, Titre : « So They Canal See Us », Said John, Furore Magazine #24: Beatles Issue, Piet Schreuders Editeur, Stichting Furore. Pays-Bas, janvier 2019
  3. (en) [vidéo] Arrivée des Beatles à Sydney le 11 juin 1964 sur YouTube
  4. a b c d e f et g (fr) Collectif, The Beatles Anthology, Seuil, (ISBN 2-02-041880-0), p. 212-214
  5. a b et c (fr) Steve Turner (trad. de l'anglais), L’Intégrale Beatles : les secrets de toutes leurs chansons [« A Hard Day’s Write »], Paris, Hors Collection, , 284 p. (ISBN 2-258-06585-2), p. 102
  6. « Fiche technique de Rain », sur yellow-sub.net (consulté le )
  7. a b c d e et f (en) Mark Lewisohn, The Complete Beatles Recording Sessions: The Official Story of the Abbey Road Years, Londres, Hamlyn, (ISBN 0-600-55784-7), p. 74
  8. a et b (en) Robert Fontenot, « Rain - The history of this classic Beatles song », sur oldies.about.com, The New York Times Company (consulté le )
  9. a b c d et e (en) Geoff Emerick, Here There and Everywhere, My Life Recording The Music of The Beatles, Gotham Books, (ISBN 1-59240-179-1), p. 116-117
  10. (en) Notes sur Revolver sur The Beatles Interview Database [lire en ligne]
  11. The Radical Innovations of the Perfect Beatles Song ; https://www.youtube.com/watch?v=68oFp5LoL74
  12. (en) Automatic double tracking sur la Wikipédia anglophone
  13. Rarities sur wp:en
  14. Klaus Voormann est aussi le créateur de la pochette de l'album Revolver, sorti peu après le single.
  15. a et b (en) [vidéo] Clip de Rain sur YouTube
  16. (en) Notes sur la pochette de Revolver sur Norwegianwood.org [lire en ligne]
  17. (en) [vidéo] Paperback Witer live à Tokyo, juin 1966 sur YouTube
  18. Masanori Yokono, « 24. The Beatles (MEO 119) » (consulté le ).
  19. Livret du disque 1+.
  20. Rain étant une face B, elle n'entre pas en compte dans les ventes du disque. Voir le fonctionnement du Billboard Hot 100 : Billboard Methodology
  21. (en) Site de la RIAA, rechercher « Paperback Writer ». Consulté le 5/12/2008
  22. (en) « Critères de la RIAA », sur RIAA.com (consulté le )
  23. (en) « The RS 500 Greatest Songs of All Time », Rolling Stone (consulté le )
  24. (en) « The Top Songs from 1966 », sur acclaimedmusic.net (consulté le )
  25. Liste et critiques utilisées pour établir ce classement : Blender (USA) - The 1001 Greatest Songs to Download Right Now, Bruce Pollock (USA) - The 7,500 Most Important Songs of 1944-2000 (2005), Rolling Stone (USA) - The 500 Greatest Songs of All Time (2004), Stephen Spignesi and Michael Lewis (USA) - The 100 Best Beatles Songs (2004), Elvis Costello - The Best Songs from the 500 Best Albums Ever (2000) Mojo (UK) - The 100 Greatest Singles of All Time (1997), Mojo (UK) - The 101 Greatest Tracks by The Beatles (2006), Q (UK) - The Ultimate Music Collection (2005), Uncut (UK) - The 50 Greatest Beatles Tracks (2001), Now & Then (Sweden) - The Beatles' 50 Best Songs (1992), Toby Creswell (Australia) - 1001 Songs (2005)
  26. a et b (en) Richie Unterberger, « Rain: Song Review », AllMusic (consulté le )
  27. (en) Allan W. Pollack, « Notes on "Paperback Writer" and "Rain" » (consulté le )
  28. En juillet 2012, le groupe chante cette chanson a cappella lorsqu'il commence à pleuvoir tout à la fin du premier spectacle donné à Montréal. Une pluie diluvienne inonde les 60 000 spectateurs aussitôt après.