« Love You To » : différence entre les versions

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'''''{{lang|en|Love You To}}''''' est une chanson du groupe [[Royaume-Uni|britannique]] [[The Beatles]]. Elle a été écrite par [[George Harrison]], à une époque le groupe, et lui en particulier, est intéressé par la culture indienne depuis le tournage du film ''{{lang|en|[[Help! (album)|Help!]]}}''. Séduit par le [[sitar]], Harrison s'en est procuré un exemplaire et apprend à en jouer auprès de musiciens indiens, notamment [[Ravi Shankar]]. C'est une des trois chansons à d'inspiration indienne qu'il compose au sein des Beatles.
'''''{{lang|en|Love You To}}''''' est une chanson du groupe [[Royaume-Uni|britannique]] [[The Beatles]]. Écrite par [[George Harrison]], elle illustre l'intérêt des quatre musiciens, et de Harrison en particulier, pour la [[culture indienne]], une passion qui remonte au tournage du film ''{{lang|en|[[Help! (album)|Help!]]}}''. Séduit par le [[sitar]], Harrison s'en est procuré un exemplaire et apprend à en jouer auprès de musiciens indiens, notamment [[Ravi Shankar (musicien)|Ravi Shankar]]. C'est l'une des trois chansons d'inspiration indienne qu'il compose au sein des Beatles.


L'enregistrement se déroule les 11 et 13 avril 1966 dans les [[studios Abbey Road|studios EMI d'Abbey Road]] et fait intervenir, outre Harrison qui joue de la guitare et chante, une équipe de musiciens indiens dont un seul est crédité, pour son jeu de [[tablâ]]. Il est de fait difficile de savoir si les parties de sitar de la chanson ont été interprétées par le Beatle. [[Ringo Starr]] et [[Paul McCartney]] apportent également une contribution mineure à la chanson. Les paroles, particulièrement pessimistes, sont une invitation à aimer les gens avant qu'il ne soit trop tard. La musique mêle formes indiennes et occidentales.
L'enregistrement se déroule les 11 et {{date-|13 avril 1966}} dans les [[studios Abbey Road|studios EMI d'Abbey Road]] et fait intervenir, outre Harrison qui joue de la guitare et chante, une équipe de musiciens indiens dont un seul est crédité, pour son jeu de [[tablâ]]. Il reste difficile de savoir si les parties de sitar de la chanson ont été interprétées par George Harrrison. [[Ringo Starr]] et [[Paul McCartney]] apportent également une contribution mineure à la chanson, seul [[John Lennon]] n'y a pas participé. Les paroles, particulièrement pessimistes, sont une invitation à aimer les gens avant qu'il ne soit trop tard. La musique mêle formes indiennes et occidentales.


''{{lang|en|Love You To}}'' apparaît début août 1966 sur l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', lui-même teinté de sonorités indiennes. L'album est un grand succès et se classe numéro un dans de nombreux pays. La chanson est généralement négligée par les critiques occidentaux, mais les critiques asiatiques la considèrent comme la première chanson à savoir utiliser la musique indienne sans la parodier. Elle contribue également à forger l'image d'un George Harrison calme et spirituel. Elle a fait l'objet de quelques reprises assez peu notoires.
''{{lang|en|Love You To}}'' apparaît début {{date-|août 1966}} sur l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', lui-même teinté de sonorités indiennes. L'album est un grand succès et se classe numéro un dans de nombreux pays. La chanson est généralement négligée par les critiques occidentaux, mais les critiques asiatiques la considèrent comme la première chanson à savoir utiliser la musique indienne sans la parodier. Elle contribue également à forger l'image d'un George Harrison calme et spirituel. Elle a fait l'objet de quelques reprises assez peu notoires.


==Historique==
== Historique ==
=== Genèse ===
=== Genèse ===
[[Fichier:Ravi Shankar - Madhuvanti.ogg|thumb|En 1966, [[George Harrison]] a appris à jouer du [[sitar]] auprès de [[Ravi Shankar]].]]
''{{lang|en|Love You To}}'' est la première chanson du groupe à véritablement intégrer des éléments de la [[musique indienne]]. C'est durant le tournage du film ''{{lang|en|[[Help! (film)|Help!]]}}'', dont l'intrigue implique une mystérieuse secte indienne à la poursuite de [[Ringo Starr]], que [[George Harrison]] a pour la première fois été mis en contact avec cette forme de musique. Pour [[John Lennon]], {{citation|Toute l'approche indienne est née de ''Help!''<ref name=A171>{{harvsp|The Beatles|2000|p=171}}</ref>}}. Harrison complète en déclarant à propos de sa découverte de l'[[Inde]] que c'est {{citation|là où tout a commencé pour [lui]<ref name=A171/>}}. Séduit par le son du [[sitar]], il s'empresse d'en acheter un, et propose d'en ajouter des phrases sur la chanson ''{{lang|en|[[Norwegian Wood (This Bird Has Flown)]]}}'' de Lennon sur l'album ''{{lang|en|[[Rubber Soul]]}}''. Cette tentative marque le début de l'utilisation d'instruments indiens dans la musique des [[The Beatles|Beatles]], et dans la musique [[pop-rock]] en général<ref>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=103}}</ref>. Cependant, dans son autobiographie ''{{lang|en|I, Me, Mine}}'', Harrison déclare {{citation|''{{lang|en|Love You To}}'' est une des premières chansons que j'ai écrites pour le sitar. ''{{lang|en|Norwegian Wood}}'' était un accident en ce qui concerne le sitar, mais celle-là est la première chanson où j'ai consciemment essayé d'utiliser le sitar et le [[tabla]] sur la piste de base. J'ai ajouté la guitare et le chant plus tard}}<ref name=BH255>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=255}}</ref>.


''{{lang|en|Love You To}}'' est la première chanson du groupe à véritablement intégrer des éléments de la [[musique indienne]]. C'est durant le tournage du film ''{{lang|en|[[Help! (film)|Help!]]}}'', dont l'intrigue implique une mystérieuse secte indienne à la poursuite de [[Ringo Starr]], que [[George Harrison]] a pour la première fois été mis en contact avec cette forme de musique. Pour [[John Lennon]], {{citation|Toute l'approche indienne est née de ''Help!''<ref name=A171>{{harvsp|The Beatles|2000|p=171}}</ref>}}. Harrison complète en déclarant à propos de sa découverte de l'[[Inde]] que c'est {{citation|là où tout a commencé pour [lui]<ref name=A171/>}}. Séduit par le son du [[sitar]], il s'empresse d'en acheter un, et propose d'en ajouter des phrases sur la chanson ''{{lang|en|[[Norwegian Wood (This Bird Has Flown)]]}}'' de Lennon sur l'album ''{{lang|en|[[Rubber Soul]]}}''. Cette tentative marque le début de l'utilisation d'instruments indiens dans la musique des [[The Beatles|Beatles]], et dans la musique [[pop rock]] en général<ref>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=103}}</ref>. Cependant, dans son autobiographie ''{{lang|en|I, Me, Mine}}'', Harrison déclare {{citation|''{{lang|en|Love You To}}'' est une des premières chansons que j'ai écrites pour le sitar. ''{{lang|en|Norwegian Wood}}'' était un accident en ce qui concerne le sitar, mais celle-là est la première chanson où j'ai consciemment essayé d'utiliser le sitar et les [[tablâ]] sur la piste de base. J'ai ajouté la guitare et le chant plus tard}}<ref name=BH255>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=255}}</ref>.
La chanson est en effet préparée pour l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', enregistré au printemps 1966. Depuis sa découverte du sitar l'année précédente, Harrison a rencontré [[Ravi Shankar]] et lui a demandé de lui apprendre à jouer de l'instrument. Après lui avoir appris les bases du maniement correct, Shankar lui donne des cours en Angleterre, puis lui suggère d'aller approfondir sa maîtrise en Inde, ce que finit par faire Harrison fin 1966<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=344 - 345}}</ref>. Au total, le Beatle pratique le sitar de 1965 à 1968. Il arrête finalement sur conseil de Shankar et d'[[Eric Clapton]] qui lui suggèrent de se recentrer sur son jeu de guitare<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=346}}</ref>. La place de l'Inde reste cependant très importante pour lui, et il admire toute sa vie sa culture et sa spiritualité, qui transparaissent nettement dans ''{{lang|en|Love You To}}''<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=320 - 321}}</ref>.

La chanson est en effet préparée pour l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', enregistré au printemps 1966. Depuis sa découverte du sitar l'année précédente, Harrison a rencontré [[Ravi Shankar (musicien)|Ravi Shankar]] et lui a demandé de lui apprendre à jouer de l'instrument. Après lui avoir appris les bases du maniement correct, Shankar lui donne des cours en Angleterre, puis lui suggère d'aller approfondir sa maîtrise en Inde, ce que finit par faire Harrison fin 1966<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=344 - 345}}</ref>. Au total, le Beatle pratique le sitar de 1965 à 1968. Il arrête finalement sur conseil de Shankar et d'[[Eric Clapton]] qui lui suggèrent de se recentrer sur son jeu de guitare<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=346}}</ref>. La place de l'Inde reste cependant très importante pour lui, et il admire toute sa vie sa culture et sa spiritualité, qui transparaissent nettement dans ''{{lang|en|Love You To}}''<ref>{{harvsp|Bill Harry|2003|p=320 - 321}}</ref>.


=== Enregistrement ===
=== Enregistrement ===
[[Fichier:Prop. Tabla.jpg|thumb|left|Durant l'enregistrement de ''{{lang|en|Love You To}}'', l'ingénieur du son [[Geoff Emerick]] a cherché à innover dans l'enregistrement du [[tablâ]].]]
[[Fichier:Prop. Tabla.jpg|thumb|left|Durant l'enregistrement de ''{{lang|en|Love You To}}'', l'ingénieur du son [[Geoff Emerick]] a cherché à innover dans l'enregistrement des [[tablâ]].]]
Comme souvent avec ses chansons à l'époque, [[George Harrison]] a bien du mal à trouver un titre à sa chanson : le titre final, ''{{lang|en|Love You To}}'', n'a d'ailleurs que peu de rapport avec ses paroles<ref name=ST123>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=123}}</ref>. Deux des trois chansons qu'il travaille pour ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'' se voient donc affublés de titres humoristiques : celle-ci devient en effet provisoirement ''{{lang|en|[[Granny Smith]]}}'', du nom de la variété de [[pomme]]s préférées de l'ingénieur du son, [[Geoff Emerick]]. Quelques jours plus tard, lorsque [[George Martin]] demande à Harrison le titre de la future ''{{lang|en|[[I Want to Tell You]]}}'', le guitariste n'a toujours pas d'idée. Un Lennon moqueur lui propose ''{{lang|en|Granny Smith Part Friggin' Two}}'', et Geoff Emerick propose finalement ''{{lang|en|Laxton's Suberb}}'' (une autre marque de pommes), qui est finalement provisoirement inscrit sur les bandes<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=81}}</ref>.
Comme souvent avec ses chansons à l'époque, [[George Harrison]] a bien du mal à trouver un titre à sa chanson : le titre final, ''{{lang|en|Love You To}}'', n'a d'ailleurs que peu de rapport avec ses paroles<ref name=ST123>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=123}}</ref>. Deux des trois chansons qu'il travaille pour ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'' se voient donc affublées de titres humoristiques : celle-ci devient en effet provisoirement ''{{lang|en|[[Granny Smith]]}}'', du nom de la variété de [[pomme]]s préférées de l'ingénieur du son, [[Geoff Emerick]]. Quelques jours plus tard, lorsque [[George Martin]] demande à Harrison le titre de la future ''{{lang|en|[[I Want to Tell You]]}}'', le guitariste n'a toujours pas d'idée. Un Lennon moqueur lui propose ''{{lang|en|Granny Smith Part Friggin' Two}}'', et Geoff Emerick propose finalement ''{{lang|en|Laxton's Suberb}}'' (une autre marque de pommes), qui est finalement provisoirement inscrit sur les bandes<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=81}}</ref>.


L’enregistrement de la chanson a lieu les 11 et 13 avril 1966 dans les [[studios Abbey Road|studios EMI]] d'Abbey Road. Comme le remarque Emerick, les chansons de Harrison étaient souvent traitées différemment des compositions du duo [[Lennon/McCartney]], le producteur George Martin étant souvent réticent à y accorder trop de temps et inquiet pour leur qualité, ce qu'il regrettera par la suite amèrement dans des interviews<ref>{{harvsp|Geoff Emerick|2009|p=166}}</ref>. Trois premières prises sont enregistrées au début de l'après-midi, les deux premières n'incluant que Harrison, sa guitare acoustique, et les chœurs de [[Paul McCartney]]<ref name=ML72>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=72}}</ref>. Contrairement aux souvenirs du guitariste dans son autobiographie, en effet, les instruments indiens ne sont intervenus qu'à partir de la troisième prise<ref name=ST123/>. Trois autres prises sont effectués dans la journée, ajoutant du [[tabla]], de la [[guitare basse|basse]], et une guitare avec ''{{lang|en|[[Distorsion (guitare)|Fuzzbox]]}}''<ref name=ML72/>.
L’enregistrement de la chanson a lieu les 11 et {{date-|13 avril 1966}} dans les [[studios Abbey Road|studios EMI]] d'Abbey Road. Comme le remarque Emerick, les chansons de Harrison étaient souvent traitées différemment des compositions du duo [[Lennon/McCartney]], le producteur George Martin étant souvent réticent à y accorder trop de temps et inquiet pour leur qualité, ce qu'il regrettera par la suite amèrement dans des interviews<ref>{{harvsp|Geoff Emerick|2009|p=166}}</ref>. Trois premières prises sont enregistrées au début de l'après-midi, les deux premières n'incluant que Harrison, sa guitare acoustique, et les chœurs de [[Paul McCartney]]<ref name=ML72>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=72}}</ref>. Contrairement aux souvenirs du guitariste dans son autobiographie, en effet, les instruments indiens ne sont intervenus qu'à partir de la troisième prise<ref name=ST123/>. Trois autres prises sont effectuées dans la journée, ajoutant des [[tabla]], de la [[guitare basse|basse]], et une guitare avec ''{{lang|en|[[Distorsion (guitare)|Fuzzbox]]}}''<ref name=ML72/>.


Cette session est particulière pour l'équipe technique qui doit, pour la première fois, enregistrer des musiciens indiens. Geoff Emerick innove ainsi en plaçant ses micros très près du tablâ, obtenant un son inédit qui surprend les musiciens<ref>{{harvsp|Geoff Emerick|2009|p=165}}</ref>. Pour cet instrument, un musicien indien a été engagé, Anil Bhagwat, qui déclare : {{citation|George m'a dit ce qu'il voulait et j'ai enregistré le tabla avec lui. Il m'a suggéré de jouer quelque chose dans le style de Ravi Shankar [...], bien qu'il ait approuvé le fait que je devais improviser. La musique indienne n'est qu'improvisation. J'ai eu beaucoup de chance, ils ont mis mon nom sur la pochette. J'en suis très fier, ils étaient les plus grands et mon nom est sur la pochette. C'était un des moments les plus excitants de ma vie<ref name=ML72/>.}} Concernant le sitar, il est difficile de savoir qui en joue : l'écrivain Ian MacDonald pense qu'il s'agit du professeur de George Harrison, resté anonyme, mais Shankara Angardi, proche du musicien, pense que Harrison a joué lui même ces parties<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=24}}</ref>.
Cette session est particulière pour l'équipe technique qui doit, pour la première fois, enregistrer des musiciens indiens. Geoff Emerick innove ainsi en plaçant ses micros très près des tablâ, obtenant un son inédit qui surprend les musiciens<ref>{{harvsp|Geoff Emerick|2009|p=165}}</ref>. Pour cet instrument, un musicien indien a été engagé, Anil Bhagwat, qui déclare : {{citation|George m'a dit ce qu'il voulait et j'ai enregistré les tabla avec lui. Il m'a suggéré de jouer quelque chose dans le style de Ravi Shankar [...], bien qu'il ait approuvé le fait que je devais improviser. La musique indienne n'est qu'improvisation. J'ai eu beaucoup de chance, ils ont mis mon nom sur la pochette. J'en suis très fier, ils étaient les plus grands et mon nom est sur la pochette. C'était un des moments les plus excitants de ma vie<ref name=ML72/>.}} Concernant le sitar, il est difficile de savoir qui en joue : l'écrivain Ian MacDonald pense qu'il s'agit du professeur de George Harrison, resté anonyme, mais Shankara Angardi, proche du musicien, pense que Harrison a joué lui-même ces parties<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=24}}</ref>.


Deux jours plus tard, des [[Re-recording|overdub]]s sont réalisés : [[Ringo Starr]] joue du tambourin, tandis que [[Paul McCartney]] enregistre des choeurs qui sont finalement supprimés. La version mono est mixée dans la foulée, avant que le groupe ne commence à travailler sur son prochain single, ''{{lang|en|[[Paperback Writer]]}}''<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=72}}</ref>. Les mixages stéréos sont bouclés le 21 juin, la chanson ayant toujours son nom de pomme, qui ne change que pour la sortie de l'album<ref name=ML44>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=84}}</ref>.
Deux jours plus tard, des [[Re-recording|overdubs]] sont réalisés : [[Ringo Starr]] joue du tambourin, tandis que [[Paul McCartney]] enregistre des chœurs qui sont finalement supprimés. La version [[Monophonique|mono]] est mixée dans la foulée, avant que le groupe ne commence à travailler sur son prochain single, ''{{lang|en|[[Paperback Writer]]}}''<ref name=ML72/>. Les mixages stéréos sont bouclés le {{date-|21 juin}}, la chanson ayant toujours son nom de pomme, qui ne change que pour la sortie de l'album<ref name=ML44>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=84}}</ref>.


===Parution et réception===
=== Parution et réception ===
''{{lang|en|Love You To}}'' est la quatrième piste de l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'' publié au [[Royaume-Uni]] le 5 août 1966. Elle occupe la troisième position de la version américaine publiée trois jours plus tard, dans la mesure où celle-ci est amputée de trois chansons<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=200 - 201}}</ref>. L'album, perçu comme révolutionnaire par la critique, s'élève rapidement en première place des charts<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=85}}</ref>. Cette chanson inaugure la période indienne de Harrison, qui utilise à nouveau ces sonorités dans ''{{lang|en|[[Within You Without You]]}}'' et ''{{lang|en|[[The Inner Light]]}}'' ainsi que sur son album ''{{lang|en|[[Wonderwall Music]]}}''<ref>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=48}}</ref>. Avec ''{{lang|en|[[Taxman]]}}'' et ''{{lang|en|[[I Want to Tell You]]}}'', ''{{lang|en|Love You To}}'' est une des trois chansons publiée par [[George Harrison]] sur l'album. Il commence ainsi à gagner une réputation de compositeur au sein des Beatles<ref>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=23}}</ref>. La chanson elle même arrive dans un contexte où l'Occident se prend d'un véritable engouement pour l'Inde, particulièrement virulent, mais assez bref<ref name=pollack/>.
''{{lang|en|Love You To}}'' est la quatrième piste de l'album ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'' publié au [[Royaume-Uni]] le {{date-|5 août 1966}}. Elle occupe la troisième position de la version américaine publiée trois jours plus tard, dans la mesure où celle-ci est amputée de trois chansons<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=200 - 201}}</ref>. L'album, perçu comme révolutionnaire par la critique, s'élève rapidement en première place des charts<ref>{{harvsp|Mark Lewisohn|1988|p=85}}</ref>. Cette chanson inaugure la période indienne de Harrison, qui utilise à nouveau ces sonorités dans ''{{lang|en|[[Within You Without You]]}}'' et ''{{lang|en|[[The Inner Light]]}}'' ainsi que sur son album ''{{lang|en|[[Wonderwall Music]]}}''<ref>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=48}}</ref>. Avec ''{{lang|en|[[Taxman]]}}'' et ''{{lang|en|[[I Want to Tell You]]}}'', ''{{lang|en|Love You To}}'' est une des trois chansons publiées par [[George Harrison]] sur l'album. Il commence ainsi à gagner une réputation de compositeur au sein des Beatles<ref>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=23}}</ref>. La chanson elle-même arrive dans un contexte où l'Occident se prend d'un véritable engouement pour l'Inde, particulièrement enthousiaste mais assez bref<ref name=pollack/>.


Les critiques occidentaux ont généralement négligé cette chanson qui n'est pas la meilleure performance « indienne » de Harrison (le critique et auteur Ian MacDonald la trouve {{citation|lourdement répétitive}}<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=12}}</ref>) ; cependant, pour les critiques asiatique, la chanson a fait l'effet d'une révolution : pour la première fois, des musiciens occidentaux reprenaient de la musique indienne en respectant ses codes, sans tomber dans la parodie<ref name=SL22>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=22}}</ref>. Cette chanson contribue également à créer l'image du {{citation étrangère|langue=en|Quiet Beatle}} ({{citation|Beatle tranquille}} : dans le dessin animé ''{{lang|en|[[Yellow Submarine (film)|Yellow Submarine]]}}'', Harrison est représenté comme le membre pacifique et méditatif du groupe ; et est introduit sur quelques notes de ''{{lang|en|Love You To}}''<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=32}}</ref>.
Les critiques occidentaux ont généralement négligé cette chanson qui n'est pas la meilleure performance « indienne » de Harrison (le critique et auteur Ian MacDonald la trouve {{citation|lourdement répétitive}}<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=12}}</ref>) ; cependant, pour les critiques asiatiques, la chanson a fait l'effet d'une révolution : pour la première fois, des musiciens occidentaux reprenaient de la musique indienne en respectant ses codes, sans tomber dans la parodie<ref name=SL22>{{harvsp|Simon Leng|2006|p=22}}</ref>. Cette chanson contribue également à créer l'image du {{citation étrangère|langue=en|Quiet Beatle}} ({{citation|Beatle tranquille}}) : dans le dessin animé ''{{lang|en|[[Yellow Submarine (film)|Yellow Submarine]]}}'', Harrison est représenté comme le membre pacifique et méditatif du groupe ; et est introduit sur quelques notes de ''{{lang|en|Love You To}}''<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=32}}</ref>.


Si la plupart des chansons des Beatles ont été l'objet de nombreuses reprises, ''{{lang|en|Love You To}}'' a été relativement peu interprétée par d'autres artistes. Parmi ceux qui l'ont chantée, [[Ronnie Montrose]], Sukilove, Les Fradkin, Bonhwater et Joel Harrison<ref>{{en}} [http://www.secondhandsongs.com/performance/25193 ''Love You To''], ''Second Hand Songs''. Consulté le 12 janvier 2012</ref>.
Si la plupart des chansons des Beatles ont été l'objet de nombreuses reprises, ''{{lang|en|Love You To}}'' a été relativement peu interprétée par d'autres artistes. Parmi ceux qui l'ont chantée, [[Ronnie Montrose]], Sukilove, Les Fradkin, Bonhwater et Joel Harrison<ref>{{en}} [http://www.secondhandsongs.com/performance/25193 « ''Love You To'' »], ''Second Hand Songs''. Consulté le 12 janvier 2012</ref>.


== Analyse musicale ==
== Analyse musicale ==
[[Fichier:George Harrison Vrindavan.jpg|thumb|''{{lang|en|Love You To}}'' marque le début de la période indienne dans la musique de [[George Harrison]], et de l'attachement qu'il voue à cette culture durant toute sa vie.]]
[[Fichier:George Harrison Vrindavan.jpg|thumb|''{{lang|en|Love You To}}'' marque le début de la période indienne dans la musique de [[George Harrison]], et de l'attachement qu'il voue à cette culture durant toute sa vie.]]
Le titre final de la chanson, ''{{lang|en|Love you to}}'' ({{citation|J'aimerai que tu/vous...}}), est assez déconcertant dans la mesure où ces mots n’apparaissent pas dans le texte et ne reflètent pas le contenu de la chanson. En effet, les paroles sont plutôt une invitation à profiter de l'instant présent, comme en témoignent les passages {{citation étrangère|langue=en|A life time is so short}} ({{citation|Une vie est si courte}}) ou encore {{citation|Love me while you can}} ({{citation|Aime-moi tant que tu le peux}})<ref name=ST123 />. Ce message est en partie repris dans ''{{lang|en|[[Within You Without You]]}}'', dans lequel Harrison détaille son apprentissage de la [[philosophie indienne]], notamment le besoin de dire les choses aux gens avant qu'ils ne meurent<ref>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=148 - 150}}</ref>. Ce sont donc des paroles particulièrement pessimistes, qui parlent notamment d'aimer le chanteur avant qu'il soit un {{citation étrangère|langue=en|dead old man}} ({{citation|vieil homme mort}}), tranchant avec les tons optimistes de la pop britannique de l'époque<ref name=pollack/>.
Le titre final de la chanson, ''{{lang|en|Love you to}}'' ({{citation|J'aimerais que tu/vous...}}), est assez déconcertant dans la mesure où ces mots n’apparaissent pas dans le texte et ne reflètent pas le contenu de la chanson. En effet, les paroles sont plutôt une invitation à profiter de l'instant présent, comme en témoignent les passages {{citation étrangère|langue=en|A life time is so short}} ({{citation|Une vie est si courte}}) ou encore {{citation étrangère|langue=en|Love me while you can}} ({{citation|Aime-moi tant que tu le peux}})<ref name=ST123 />. Ce message est en partie repris dans ''{{lang|en|[[Within You Without You]]}}'', dans lequel Harrison détaille son apprentissage de la [[philosophie indienne]], notamment le besoin de dire les choses aux gens avant qu'ils ne meurent<ref>{{harvsp|Steve Turner|2006|p=148 - 150}}</ref>. Ce sont donc des paroles particulièrement pessimistes, qui parlent notamment d'aimer le chanteur avant qu'il soit un {{citation étrangère|langue=en|dead old man}} ({{citation|vieil homme mort}}), tranchant avec les tons optimistes de la pop britannique de l'époque<ref name=pollack/>.


D'un point de vue musical, si la chanson utilise des instruments indiens, elle reste ancrée dans la musique occidentale. [[George Harrison]] y joue en effet du sitar comme il joue habituellement de la guitare, selon Simon Leng, en ayant recours à des formes typiques du blues et du rock<ref name=SL22/>. Cependant, la chanson a également un tempo particulier typique de la musique indienne, ainsi qu'une introduction plus lente. Celle-ci est une succession de [[glissando]]s de [[sitar]] assez symboliques des compositions indiennes, avant que la chanson ne parte sur un [[Drone (musique)|drone]] ponctué de phrases de sitar répondant au chant. La chanson contient également un solo de cet instrument, suffisamment élaboré pour pousser le musicologue Allan W. Pollack à penser que Harrison n'en est pas l'interprète, vu la brièveté de sa formation à l'époque<ref name=pollack>{{en}} Allan W. Pollack [http://www.icce.rug.nl/~soundscapes/DATABASES/AWP/lyt.shtml ''Notes on'' Love You To], ''Soundscapes''. Consulté le 12 janvier 2012</ref>.
D'un point de vue musical, si la chanson utilise des instruments indiens, elle reste ancrée dans la musique occidentale. [[George Harrison]] y joue en effet du sitar comme il joue habituellement de la guitare, selon Simon Leng, en ayant recours à des formes typiques du blues et du rock<ref name=SL22/>. Cependant, la chanson a également un tempo particulier typique de la musique indienne, ainsi qu'une introduction plus lente. Celle-ci est une succession de [[glissando]]s de [[sitar]] assez symboliques des compositions indiennes, avant que la chanson ne parte sur un [[Drone (musique)|drone]] ponctué de phrases de sitar répondant au chant. La chanson contient également un solo de cet instrument, suffisamment élaboré pour pousser le musicologue Allan W. Pollack à penser que Harrison n'en est pas l'interprète, vu la brièveté de sa formation à l'époque<ref name=pollack>{{en}} Allan W. Pollack [http://www.icce.rug.nl/~soundscapes/DATABASES/AWP/lyt.shtml « ''Notes on'' Love You To »], ''Soundscapes''. Consulté le 12 janvier 2012</ref>.


''{{lang|en|Love You To}}'' pose les bases du travail de George Harrison pour les années suivantes, non seulement dans ses compositions indiennes pures (''{{lang|en|Within You Without You}}'', ''{{lang|en|[[The Inner Light]]}}'', ''{{lang|en|[[Wonderwall Music]]}}''), mais aussi dans plusieurs autres chansons plus occidentales qui en sont teintées, comme ''{{lang|en|[[Blue Jay Way]]}}'' et ''{{lang|en|[[It's All Too Much]]}}''<ref name=pollack/>. Plus encore, la chanson imprègne ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', album assez hétéroclite, d'une tonalité indienne dans plusieurs chansons, qu'il s'agisse des solos de ''{{lang|en|[[Taxman]]}}'' et d{{'}}''{{lang|en|[[I'm Only Sleeping]]}}'' ou de l'aspect général de ''{{lang|en|[[Tomorrow Never Knows]]}}'' et de ''{{lang|en|[[Rain (chanson)|Rain]]}}'' (publiée en face B du single ''{{lang|en|[[Paperback Writer]]}}'' à la même époque)<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=11 - 12}}</ref>.
''{{lang|en|Love You To}}'' pose les bases du travail de George Harrison pour les années suivantes, non seulement dans ses compositions indiennes pures (''{{lang|en|Within You Without You}}'', ''{{lang|en|[[The Inner Light]]}}'', ''{{lang|en|[[Wonderwall Music]]}}''), mais aussi dans plusieurs autres chansons plus occidentales qui en sont teintées, comme ''{{lang|en|[[Blue Jay Way]]}}'' et ''{{lang|en|[[It's All Too Much]]}}''<ref name=pollack/>. Plus encore, la chanson imprègne ''{{lang|en|[[Revolver (album)|Revolver]]}}'', album assez hétéroclite, d'une tonalité indienne dans plusieurs chansons, qu'il s'agisse des solos de ''{{lang|en|[[Taxman]]}}'' et ''{{lang|en|[[I'm Only Sleeping]]}}'' ou de l'aspect général de ''{{lang|en|[[Tomorrow Never Knows]]}}'' et ''{{lang|en|[[Rain (chanson)|Rain]]}}'' (publiée en face B du single ''{{lang|en|[[Paperback Writer]]}}'' à la même époque)<ref>{{harvsp|Ray Newman|2006|p=11 - 12}}</ref>.


==Fiche technique==
== Fiche technique ==
=== Interprètes ===
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* [[George Harrison]] : [[chant]], [[sitar]], [[tampoura]], [[guitare]]
* [[George Harrison]] : [[chant]], [[sitar]], [[guitare acoustique]], [[guitare rythmique]], [[guitare solo]], pédale fuzz
* [[Ringo Starr]] : [[tambourin]]
* [[Paul McCartney]] : [[Choriste|chœurs]], [[Guitare basse|basse]]
* [[Paul McCartney]] : [[choriste|chœurs]]
* [[Ringo Starr]] : tambourin
* Anil Bhagwat – [[tablâ]]
* Anil Bhagwat – [[tabla]]
* Musiciens non cités de l'Asian Music Circle : sitar, [[tampura]]<br><small>selon Kenneth Womack et Ian McDonald</small>


=== Équipe technique ===
=== Équipe technique ===
* [[George Martin]] : [[producteur de musique|production]]
* [[George Martin]] : [[Réalisateur artistique|production]]
* [[Geoff Emerick]] : [[ingénieur du son]]
* [[Geoff Emerick]] : [[ingénieur du son]]
* Phil McDonald : ingénieur du son assistant
* Phil McDonald : ingénieur du son assistant
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== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}
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== Bibliographie ==
== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* {{fr}} {{ouvrage|auteur=The Beatles|titre=The Beatles Anthology|éditeur=Seuil|année=2000|pages totales=367|isbn=2-02-041880-0}}
* {{fr}} {{ouvrage|auteur=Geoff Emerick|préface=Elvis Costello|traducteur=Philippe Paringaux|titre=En studio avec les Beatles|sous-titre=les mémoires de leur ingénieur du son|éditeur=Le Mot et le Reste|année=2009|pages totales=486|isbn=978-2-915378-99-3}}
* {{fr}} {{Ouvrage|auteur1=The Beatles|titre=The Beatles Anthology|éditeur=[[Éditions du Seuil|Seuil]]|année=2000|pages totales=367|isbn=2-02-041880-0}}
* {{fr}} {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=en|auteur1=[[Geoff Emerick]]|titre=En studio avec les Beatles|sous-titre=les mémoires de leur ingénieur du son|lieu=Marseille|éditeur=[[Le Mot et le Reste|Le mot et le reste]]|année=2009|pages totales=486|isbn=978-2-915378-99-3|id=Geoff Emerick2009}}
* {{en}} {{ouvrage|prénom1=Bill |nom1=Harry |lien auteur=Bill Harry|titre=The George Harrison Encyclopedia |éditeur= Virgin Books |année=2003 |pages totales=400 |isbn=0-7535-0822-2|id=Bill Harry2003}}
* {{en}} {{ouvrage|prénom1=Bill |nom1=Harry |lien auteur=Bill Harry|titre=The George Harrison Encyclopedia |éditeur= Virgin Books |année=2003 |pages totales=400 |isbn=0-7535-0822-2|id=Bill Harry2003}}
* {{fr}} Leante Laura, ''« Love you to. Un exemple de rencontre entre musique indienne et musique pop dans la production des Beatles »'', Cahiers d’ethnomusicologie ([http://ethnomusicologie.revues.org/696 en ligne])
* {{en}} {{ouvrage|prénom1=Simon |nom1=Leng |titre=While My Guitar Gently Weeps : The Music of George Harrison |éditeur=Firefly (2002, 224 p. et réédition entièrement révisée et augmentée, Hal Leonard, 2006, 304 p.|id=Simon Leng2003}}
* {{en}} {{ouvrage|prénom1=Simon |nom1=Leng |titre=While My Guitar Gently Weeps : The Music of George Harrison |éditeur=Firefly (2002, 224 p. et réédition entièrement révisée et augmentée, Hal Leonard, 2006, 304 p.|id=Simon Leng2006}}
* {{ouvrage|langue=en|auteur=Mark Lewisohn|préface=Ken Townsend|titre=The Complete Beatles Recording Sessions|sous-titre=The Official Story of the Abbey Road Years 1962-1970|éditeur=Hamlyn/EMI|lieu=Londres|année=2004|année première édition=1988|pages totales=204|isbn=0-517-57066-1}}
* {{fr}} {{ouvrage|auteur=Ray Newman|titre=Abracadabra!|sous-titre=The Complete Story of The Beatles' Revolver|éditeur=|année=2006|pages totales=288|isbn=2-258-06585-2}}
* {{en}} {{ouvrage|auteur=Mark Lewisohn|titre=The Beatles Recording Sessions|éditeur=Harmony Books|lieu=New York|année=1988|pages totales=204|isbn=0-517-57066-1}}
* {{fr}} {{ouvrage|auteur=Steve Turner|titre=L’Intégrale Beatles|sous-titre=les secrets de toutes leurs chansons|éditeur=Hors Collection|année=2006|pages totales=103|isbn=|lire en ligne=http://www.revolverbook.co.uk/}}
* {{fr}} {{Ouvrage|auteur1=Ray Newman|titre=Abracadabra!|sous-titre=The Complete Story of The Beatles' Revolver|éditeur=|année=2006|pages totales=103|isbn=|lire en ligne=http://www.revolverbook.co.uk/|id=Ray Newman2006}}
* {{fr}} {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=en|auteur1=Steve Turner|titre=L’Intégrale Beatles|sous-titre=les secrets de toutes leurs chansons|lieu=Paris|éditeur=Hors Collection|année=2006|pages totales=288|isbn=2-258-06585-2}}


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Dernière version du 30 mars 2024 à 01:35

Love You To

Chanson de The Beatles
extrait de l'album Revolver
Sortie
Enregistré 11 et
Studios EMI, Londres
Durée 3:01
Genre Musique indienne, rock psychédélique
Auteur-compositeur George Harrison
Producteur George Martin
Label Parlophone/Capitol

Pistes de Revolver

Love You To est une chanson du groupe britannique The Beatles. Écrite par George Harrison, elle illustre l'intérêt des quatre musiciens, et de Harrison en particulier, pour la culture indienne, une passion qui remonte au tournage du film Help!. Séduit par le sitar, Harrison s'en est procuré un exemplaire et apprend à en jouer auprès de musiciens indiens, notamment Ravi Shankar. C'est l'une des trois chansons d'inspiration indienne qu'il compose au sein des Beatles.

L'enregistrement se déroule les 11 et dans les studios EMI d'Abbey Road et fait intervenir, outre Harrison qui joue de la guitare et chante, une équipe de musiciens indiens dont un seul est crédité, pour son jeu de tablâ. Il reste difficile de savoir si les parties de sitar de la chanson ont été interprétées par George Harrrison. Ringo Starr et Paul McCartney apportent également une contribution mineure à la chanson, seul John Lennon n'y a pas participé. Les paroles, particulièrement pessimistes, sont une invitation à aimer les gens avant qu'il ne soit trop tard. La musique mêle formes indiennes et occidentales.

Love You To apparaît début sur l'album Revolver, lui-même teinté de sonorités indiennes. L'album est un grand succès et se classe numéro un dans de nombreux pays. La chanson est généralement négligée par les critiques occidentaux, mais les critiques asiatiques la considèrent comme la première chanson à savoir utiliser la musique indienne sans la parodier. Elle contribue également à forger l'image d'un George Harrison calme et spirituel. Elle a fait l'objet de quelques reprises assez peu notoires.

Historique[modifier | modifier le code]

Genèse[modifier | modifier le code]

Love You To est la première chanson du groupe à véritablement intégrer des éléments de la musique indienne. C'est durant le tournage du film Help!, dont l'intrigue implique une mystérieuse secte indienne à la poursuite de Ringo Starr, que George Harrison a pour la première fois été mis en contact avec cette forme de musique. Pour John Lennon, « Toute l'approche indienne est née de Help![1] ». Harrison complète en déclarant à propos de sa découverte de l'Inde que c'est « là où tout a commencé pour [lui][1] ». Séduit par le son du sitar, il s'empresse d'en acheter un, et propose d'en ajouter des phrases sur la chanson Norwegian Wood (This Bird Has Flown) de Lennon sur l'album Rubber Soul. Cette tentative marque le début de l'utilisation d'instruments indiens dans la musique des Beatles, et dans la musique pop rock en général[2]. Cependant, dans son autobiographie I, Me, Mine, Harrison déclare « Love You To est une des premières chansons que j'ai écrites pour le sitar. Norwegian Wood était un accident en ce qui concerne le sitar, mais celle-là est la première chanson où j'ai consciemment essayé d'utiliser le sitar et les tablâ sur la piste de base. J'ai ajouté la guitare et le chant plus tard »[3].

La chanson est en effet préparée pour l'album Revolver, enregistré au printemps 1966. Depuis sa découverte du sitar l'année précédente, Harrison a rencontré Ravi Shankar et lui a demandé de lui apprendre à jouer de l'instrument. Après lui avoir appris les bases du maniement correct, Shankar lui donne des cours en Angleterre, puis lui suggère d'aller approfondir sa maîtrise en Inde, ce que finit par faire Harrison fin 1966[4]. Au total, le Beatle pratique le sitar de 1965 à 1968. Il arrête finalement sur conseil de Shankar et d'Eric Clapton qui lui suggèrent de se recentrer sur son jeu de guitare[5]. La place de l'Inde reste cependant très importante pour lui, et il admire toute sa vie sa culture et sa spiritualité, qui transparaissent nettement dans Love You To[6].

Enregistrement[modifier | modifier le code]

Durant l'enregistrement de Love You To, l'ingénieur du son Geoff Emerick a cherché à innover dans l'enregistrement des tablâ.

Comme souvent avec ses chansons à l'époque, George Harrison a bien du mal à trouver un titre à sa chanson : le titre final, Love You To, n'a d'ailleurs que peu de rapport avec ses paroles[7]. Deux des trois chansons qu'il travaille pour Revolver se voient donc affublées de titres humoristiques : celle-ci devient en effet provisoirement Granny Smith, du nom de la variété de pommes préférées de l'ingénieur du son, Geoff Emerick. Quelques jours plus tard, lorsque George Martin demande à Harrison le titre de la future I Want to Tell You, le guitariste n'a toujours pas d'idée. Un Lennon moqueur lui propose Granny Smith Part Friggin' Two, et Geoff Emerick propose finalement Laxton's Suberb (une autre marque de pommes), qui est finalement provisoirement inscrit sur les bandes[8].

L’enregistrement de la chanson a lieu les 11 et dans les studios EMI d'Abbey Road. Comme le remarque Emerick, les chansons de Harrison étaient souvent traitées différemment des compositions du duo Lennon/McCartney, le producteur George Martin étant souvent réticent à y accorder trop de temps et inquiet pour leur qualité, ce qu'il regrettera par la suite amèrement dans des interviews[9]. Trois premières prises sont enregistrées au début de l'après-midi, les deux premières n'incluant que Harrison, sa guitare acoustique, et les chœurs de Paul McCartney[10]. Contrairement aux souvenirs du guitariste dans son autobiographie, en effet, les instruments indiens ne sont intervenus qu'à partir de la troisième prise[7]. Trois autres prises sont effectuées dans la journée, ajoutant des tabla, de la basse, et une guitare avec Fuzzbox[10].

Cette session est particulière pour l'équipe technique qui doit, pour la première fois, enregistrer des musiciens indiens. Geoff Emerick innove ainsi en plaçant ses micros très près des tablâ, obtenant un son inédit qui surprend les musiciens[11]. Pour cet instrument, un musicien indien a été engagé, Anil Bhagwat, qui déclare : « George m'a dit ce qu'il voulait et j'ai enregistré les tabla avec lui. Il m'a suggéré de jouer quelque chose dans le style de Ravi Shankar [...], bien qu'il ait approuvé le fait que je devais improviser. La musique indienne n'est qu'improvisation. J'ai eu beaucoup de chance, ils ont mis mon nom sur la pochette. J'en suis très fier, ils étaient les plus grands et mon nom est sur la pochette. C'était un des moments les plus excitants de ma vie[10]. » Concernant le sitar, il est difficile de savoir qui en joue : l'écrivain Ian MacDonald pense qu'il s'agit du professeur de George Harrison, resté anonyme, mais Shankara Angardi, proche du musicien, pense que Harrison a joué lui-même ces parties[12].

Deux jours plus tard, des overdubs sont réalisés : Ringo Starr joue du tambourin, tandis que Paul McCartney enregistre des chœurs qui sont finalement supprimés. La version mono est mixée dans la foulée, avant que le groupe ne commence à travailler sur son prochain single, Paperback Writer[10]. Les mixages stéréos sont bouclés le , la chanson ayant toujours son nom de pomme, qui ne change que pour la sortie de l'album[13].

Parution et réception[modifier | modifier le code]

Love You To est la quatrième piste de l'album Revolver publié au Royaume-Uni le . Elle occupe la troisième position de la version américaine publiée trois jours plus tard, dans la mesure où celle-ci est amputée de trois chansons[14]. L'album, perçu comme révolutionnaire par la critique, s'élève rapidement en première place des charts[15]. Cette chanson inaugure la période indienne de Harrison, qui utilise à nouveau ces sonorités dans Within You Without You et The Inner Light ainsi que sur son album Wonderwall Music[16]. Avec Taxman et I Want to Tell You, Love You To est une des trois chansons publiées par George Harrison sur l'album. Il commence ainsi à gagner une réputation de compositeur au sein des Beatles[17]. La chanson elle-même arrive dans un contexte où l'Occident se prend d'un véritable engouement pour l'Inde, particulièrement enthousiaste mais assez bref[18].

Les critiques occidentaux ont généralement négligé cette chanson qui n'est pas la meilleure performance « indienne » de Harrison (le critique et auteur Ian MacDonald la trouve « lourdement répétitive »[19]) ; cependant, pour les critiques asiatiques, la chanson a fait l'effet d'une révolution : pour la première fois, des musiciens occidentaux reprenaient de la musique indienne en respectant ses codes, sans tomber dans la parodie[20]. Cette chanson contribue également à créer l'image du « Quiet Beatle » (« Beatle tranquille ») : dans le dessin animé Yellow Submarine, Harrison est représenté comme le membre pacifique et méditatif du groupe ; et est introduit sur quelques notes de Love You To[21].

Si la plupart des chansons des Beatles ont été l'objet de nombreuses reprises, Love You To a été relativement peu interprétée par d'autres artistes. Parmi ceux qui l'ont chantée, Ronnie Montrose, Sukilove, Les Fradkin, Bonhwater et Joel Harrison[22].

Analyse musicale[modifier | modifier le code]

Love You To marque le début de la période indienne dans la musique de George Harrison, et de l'attachement qu'il voue à cette culture durant toute sa vie.

Le titre final de la chanson, Love you to (« J'aimerais que tu/vous... »), est assez déconcertant dans la mesure où ces mots n’apparaissent pas dans le texte et ne reflètent pas le contenu de la chanson. En effet, les paroles sont plutôt une invitation à profiter de l'instant présent, comme en témoignent les passages « A life time is so short » (« Une vie est si courte ») ou encore « Love me while you can » (« Aime-moi tant que tu le peux »)[7]. Ce message est en partie repris dans Within You Without You, dans lequel Harrison détaille son apprentissage de la philosophie indienne, notamment le besoin de dire les choses aux gens avant qu'ils ne meurent[23]. Ce sont donc des paroles particulièrement pessimistes, qui parlent notamment d'aimer le chanteur avant qu'il soit un « dead old man » (« vieil homme mort »), tranchant avec les tons optimistes de la pop britannique de l'époque[18].

D'un point de vue musical, si la chanson utilise des instruments indiens, elle reste ancrée dans la musique occidentale. George Harrison y joue en effet du sitar comme il joue habituellement de la guitare, selon Simon Leng, en ayant recours à des formes typiques du blues et du rock[20]. Cependant, la chanson a également un tempo particulier typique de la musique indienne, ainsi qu'une introduction plus lente. Celle-ci est une succession de glissandos de sitar assez symboliques des compositions indiennes, avant que la chanson ne parte sur un drone ponctué de phrases de sitar répondant au chant. La chanson contient également un solo de cet instrument, suffisamment élaboré pour pousser le musicologue Allan W. Pollack à penser que Harrison n'en est pas l'interprète, vu la brièveté de sa formation à l'époque[18].

Love You To pose les bases du travail de George Harrison pour les années suivantes, non seulement dans ses compositions indiennes pures (Within You Without You, The Inner Light, Wonderwall Music), mais aussi dans plusieurs autres chansons plus occidentales qui en sont teintées, comme Blue Jay Way et It's All Too Much[18]. Plus encore, la chanson imprègne Revolver, album assez hétéroclite, d'une tonalité indienne dans plusieurs chansons, qu'il s'agisse des solos de Taxman et I'm Only Sleeping ou de l'aspect général de Tomorrow Never Knows et Rain (publiée en face B du single Paperback Writer à la même époque)[24].

Fiche technique[modifier | modifier le code]

Interprètes[modifier | modifier le code]

Équipe technique[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b The Beatles 2000, p. 171
  2. Steve Turner 2006, p. 103
  3. Bill Harry 2003, p. 255
  4. Bill Harry 2003, p. 344 - 345
  5. Bill Harry 2003, p. 346
  6. Bill Harry 2003, p. 320 - 321
  7. a b et c Steve Turner 2006, p. 123
  8. Mark Lewisohn 1988, p. 81
  9. Geoff Emerick 2009, p. 166
  10. a b c et d Mark Lewisohn 1988, p. 72
  11. Geoff Emerick 2009, p. 165
  12. Ray Newman 2006, p. 24
  13. Mark Lewisohn 1988, p. 84
  14. Mark Lewisohn 1988, p. 200 - 201
  15. Mark Lewisohn 1988, p. 85
  16. Simon Leng 2006, p. 48
  17. Simon Leng 2006, p. 23
  18. a b c et d (en) Allan W. Pollack « Notes on Love You To », Soundscapes. Consulté le 12 janvier 2012
  19. Ray Newman 2006, p. 12
  20. a et b Simon Leng 2006, p. 22
  21. Ray Newman 2006, p. 32
  22. (en) « Love You To », Second Hand Songs. Consulté le 12 janvier 2012
  23. Steve Turner 2006, p. 148 - 150
  24. Ray Newman 2006, p. 11 - 12

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (fr) The Beatles, The Beatles Anthology, Seuil, , 367 p. (ISBN 2-02-041880-0)
  • (fr) Geoff Emerick (trad. de l'anglais), En studio avec les Beatles : les mémoires de leur ingénieur du son, Marseille, Le mot et le reste, , 486 p. (ISBN 978-2-915378-99-3)
  • (en) Bill Harry, The George Harrison Encyclopedia, Virgin Books, , 400 p. (ISBN 0-7535-0822-2)
  • (fr) Leante Laura, « Love you to. Un exemple de rencontre entre musique indienne et musique pop dans la production des Beatles », Cahiers d’ethnomusicologie (en ligne)
  • (en) Simon Leng, While My Guitar Gently Weeps : The Music of George Harrison, Firefly (2002, 224 p. et réédition entièrement révisée et augmentée, Hal Leonard, 2006, 304 p.
  • (en) Mark Lewisohn, The Beatles Recording Sessions, New York, Harmony Books, , 204 p. (ISBN 0-517-57066-1)
  • (fr) Ray Newman, Abracadabra! : The Complete Story of The Beatles' Revolver, , 103 p. (lire en ligne)
  • (fr) Steve Turner (trad. de l'anglais), L’Intégrale Beatles : les secrets de toutes leurs chansons, Paris, Hors Collection, , 288 p. (ISBN 2-258-06585-2)

Liens externes[modifier | modifier le code]