« Herta Müller » : différence entre les versions

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{{Infobox Écrivain
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| nom = Herta Müller
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'''Herta Müller''', née le {{date de naissance|17|août|1953}} à {{Lien|Nițchidorf}}, est une romancière [[Allemagne|allemande]] d'origine [[Roumanie|roumaine]], douzième femme lauréate du [[prix Nobel de littérature]] en 2009. [[Allemands du Banat|Allemande du Banat]], née à Nițchidorf/Nitzkydorf, alors village germanophone du [[județ de Timiș]], dans la région de [[Timișoara]], elle a émigré en [[Allemagne]] en [[1987]], fuyant la [[dictature]] de [[Nicolae Ceaușescu]]. Ses œuvres, marquées par une extraordinaire force poétique et un langage d'une précision sèche, évoquent souvent la violence contre les plus faibles, l'injustice, la peur d'être surveillé et la terreur de la dictature. Ses deux premiers livres (''{{lang|de|Niederungen}}'' et ''{{lang|de|Drückender Tango}}''), parus à [[Bucarest]] avant la chute du régime, ont été [[censure|censurés]]. En Allemagne, Müller est considérée comme faisant partie de la ''{{lang|de|Weltliteratur}}'' ou ''{{lang|en|[[World literature]]}}'' en anglais (« la littérature mondiale »)<ref>{{de}} [http://www.zeit.de/2009/35/L-B-Mueller-Pro ''Kitsch oder Weltliteratur?''], [[Michael Naumann]] dans ''{{lang|de|[[Die Zeit]]}}''</ref>.
'''Herta Müller''' (née le {{date de naissance-|17|août|1953}} à [[Nițchidorf]]) est une romancière [[Allemagne|gérmano]]-[[Roumanie|roumaine]], douzième femme lauréate du [[prix Nobel de littérature]] en 2009. [[Allemands du Banat|Allemande du Banat]], née à Nițchidorf/Nitzkydorf, alors village germanophone du [[județ de Timiș]], dans la région de [[Timișoara]], elle a émigré en [[Allemagne de l'Ouest]] en [[1987]], fuyant la [[dictature]] de [[Nicolae Ceaușescu]]. Ses œuvres, marquées par une extraordinaire force poétique et un langage d'une précision sèche, évoquent souvent la violence contre les plus faibles, l'injustice, la peur d'être surveillé et la terreur de la dictature. Ses deux premiers livres (''[[Dépressions|{{langue|de|Niederungen}}]]'' et ''{{langue|de|Drückender Tango}}''), parus à [[Bucarest]] avant la chute du régime, ont été [[censure|censurés]]. En Allemagne, Müller est considérée comme faisant partie de la ''{{langue|de|Weltliteratur}}'' ou ''{{langue|en|[[World literature]]}}'' en anglais (« la littérature mondiale »)<ref>{{de}} [http://www.zeit.de/2009/35/L-B-Mueller-Pro ''Kitsch oder Weltliteratur?''], [[Michael Naumann]] dans ''{{langue|de|[[Die Zeit]]}}''</ref>.


== Biographie ==
== Biographie ==


=== Enfance et études ===
=== Enfance et études ===
Herta Müller est née dans une famille de [[Allemands du Banat|Souabes]] du [[Banat roumain|Banat]], une des [[Allemands de Roumanie|minorités allemandes de Roumanie]]<ref name="Margantin2009"/>. Cette zone géographique est située au sud-ouest de la [[Roumanie]] et fut occupée par les [[Empire ottoman|Ottomans]] avant d'être colonisée et germanisée par l'[[Monarchie de Habsbourg|Empire des Habsbourg]] au {{XVIIIe siècle}} et d'être finalement rattachée à l'État roumain à la suite du démantèlement de l'[[Autriche-Hongrie]]<ref name="Margantin2009">{{article|prénom1=Laurent|nom1=Margantin|url=http://www.oeuvresouvertes.net/spip.php?article13|titre=Entretien avec Nicole Bary, traductrice et éditrice de Herta Müller|périodique=Œuvres ouvertes|jour=01|mois=décembre|année=2009}}.</ref>. Son grand-père est un riche fermier et homme d'affaires exproprié par le [[Histoire de la Roumanie#La République populaire de Roumanie (R.P.R.)|régime communiste]] d'après-guerre. Comme de nombreux Roumains germanophones, sa mère est déportée en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] en [[1945]] et y passe cinq années dans un [[goulag|camp de travaux forcés]] du [[Goulag]]<ref name="NoticeAS">[http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2009/bio-bibl_fr.html Bio-bibliographie de Herta Müller] par l'[[Académie suédoise]] sur le site des [[prix Nobel]], consulté le {{date-|11 novembre 2013}}.</ref>. Son père, ancien soldat de la [[Waffen-SS]] ([[10e Panzerdivision SS Frundsberg]]), gagne sa vie comme chauffeur de camion<ref name="NoticeAS"/>.
Herta Müller est née dans une famille de [[Allemands du Banat|Souabes]] du [[Banat roumain|Banat]], une des [[Allemands de Roumanie|minorités allemandes de Roumanie]]<ref name="Margantin2009"/>. Cette zone géographique est située au sud-ouest de la [[Roumanie]] et fut occupée par les [[Empire ottoman|Ottomans]] avant d'être colonisée et germanisée par l'[[Monarchie de Habsbourg|Empire des Habsbourg]] au {{XVIIIe siècle}} et d'être finalement rattachée à l'État roumain à la suite du démantèlement de l'[[Autriche-Hongrie]]<ref name="Margantin2009">{{article|prénom1=Laurent|nom1=Margantin|url=http://www.oeuvresouvertes.net/spip.php?article13|titre=Entretien avec Nicole Bary, traductrice et éditrice de Herta Müller|périodique=Œuvres ouvertes|jour=01|mois=décembre|année=2009}}.</ref>. Son grand-père est un riche fermier et homme d'affaires exproprié par le [[Histoire de la Roumanie#La République populaire de Roumanie (R.P.R.)|régime communiste]] d'après-guerre. Comme de nombreux Roumains germanophones, sa mère est déportée en [[Union des républiques socialistes soviétiques|URSS]] en [[1945]] et y passe cinq années dans un [[goulag|camp de travaux forcés]] du [[Goulag]]<ref name="NoticeAS">[http://www.nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2009/bio-bibl_fr.html Bio-bibliographie de Herta Müller] par l'[[Académie suédoise]] sur le site des [[prix Nobel]], consulté le {{date-|11 novembre 2013}}.</ref>. Son père, ancien soldat de la [[Waffen-SS]] ([[10e division SS Frundsberg|{{10e}} Panzerdivision SS Frundsberg]]), gagne sa vie comme chauffeur de camion<ref name="NoticeAS"/>.


Après ses études secondaires, Müller suit un cursus dans les lettres allemandes et roumaines à l'[[université de l'Ouest (Timișoara)|université de Timișoara]].
Après ses études secondaires, Müller suit un cursus dans les lettres allemandes et roumaines à l'[[université de l'Ouest (Timișoara)|université de Timișoara]].


=== Carrière professionnelle en Roumanie ===
=== Carrière professionnelle en Roumanie ===
À partir de [[1976]], elle travaille comme [[traduction|traductrice]] dans une usine de machines, mais est licenciée en [[1979]] après son refus de coopérer avec la [[Securitate]], la police secrète roumaine. Son domicile est mis sur écoute<ref name="Artus2009">{{article|prénom1=Hubert|nom1=Artus|url=http://www.lesinrocks.com/2009/10/09/actualite/herta-muller-prix-nobel-de-litterature-1136772/|titre=Herta Müller, prix Nobel de littérature|périodique=Les Inrocks|jour=09|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Elle gagne alors sa vie comme enseignante temporaire dans des centres d'études parmi lesquels le lycée germanophone [[Nikolaus Lenau]] de [[Timișoara]] et des écoles maternelles prodiguant des cours privés en [[allemand]]. Dans les [[années 1970]], elle est proche de l'{{Lien|fr=Aktionsgruppe Banat|lang=ro|trad=Aktionsgruppe Banat|texte=Aktionsgruppe Banat}}, un groupe d'intellectuels roumains d'origine allemande, surveillé de près par la [[Securitate]]. Elle fait aussi partie du cénacle littéraire (''{{lang|de|Literaturkreis}}'') ''Adam Müller-Guttenbrunn'', affilié à l'Association des écrivains de Timișoara (''{{lang|ro|Asociația Scriitorilor din Timișoara}}''). Müller évoque la difficulté d'appartenir à une minorité linguistique et souligne le situation précaire des écrivains roumains de langue allemande : {{citation|La langue de l’écriture, le [[haut allemand]], coexistait avec le dialecte, le [[Souabe (dialecte)|souabe]] du Banat, et la langue véhiculaire, le [[roumain]]. À cela s’ajoutait la langue de bois du régime qui avait détourné le langage à son profit. D'où notre vigilance pour éviter les mots ou les concepts violés ou souillés par le politique. Ils renvoyaient à une réalité qui n’était pas la nôtre.}}<ref name="Artus2009"/>.
À partir de [[1976]], elle travaille comme [[traduction|traductrice]] dans une usine de machines, mais est licenciée en [[1979]] après son refus de coopérer avec la [[Securitate]], la police secrète roumaine. Son domicile est mis sur écoute<ref name="Artus2009">{{article|prénom1=Hubert|nom1=Artus|url=http://www.lesinrocks.com/2009/10/09/actualite/herta-muller-prix-nobel-de-litterature-1136772/|titre=Herta Müller, prix Nobel de littérature|périodique=Les Inrocks|jour=09|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Elle gagne alors sa vie comme enseignante temporaire dans des centres d'études parmi lesquels le lycée germanophone [[Nikolaus Lenau]] de [[Timișoara]] et des écoles maternelles prodiguant des cours privés en [[allemand]]. Dans les [[années 1970]], elle est proche de l'{{Lien|fr=Aktionsgruppe Banat|lang=ro|trad=Aktionsgruppe Banat|texte=Aktionsgruppe Banat}}, un groupe d'intellectuels roumains d'origine allemande, surveillé de près par la [[Securitate]]. Elle fait aussi partie du cénacle littéraire (''{{langue|de|Literaturkreis}}'') ''Adam Müller-Guttenbrunn'', affilié à l'Association des écrivains de Timișoara (''{{langue|ro|Asociația Scriitorilor din Timișoara}}''). Müller évoque la difficulté d'appartenir à une minorité linguistique et souligne la situation précaire des écrivains roumains de langue allemande : {{citation|La langue de l’écriture, le [[haut allemand]], coexistait avec le dialecte, le [[Souabe (dialecte)|souabe]] du Banat, et la langue véhiculaire, le [[roumain]]. À cela s’ajoutait la langue de bois du régime qui avait détourné le langage à son profit. D'où notre vigilance pour éviter les mots ou les concepts violés ou souillés par le politique. Ils renvoyaient à une réalité qui n’était pas la nôtre.}}<ref name="Artus2009"/>.


Son premier livre, ''{{lang|de|Niederungen}}'' (''Dépressions'') est publié en [[1982]], mais est [[censure|censuré]], comme tous ses autres ouvrages parus en Roumanie avant la chute du régime communiste. Il est édité dans son intégralité en [[Allemagne de l'Ouest]], deux ans plus tard, peu de temps après la publication de sa deuxième œuvre en Roumanie<ref name="NoticeAS"/>. La réaction des autorités communistes est sévère : Herta Müller se voit interdire le droit de faire paraître des livres sur le sol roumain<ref name="NoticeAS"/>.
Son premier livre, ''[[Dépressions]]'' (''{{langue|de|Niederungen}}'') est publié en [[1982]], mais est [[censure|censuré]], comme tous ses autres ouvrages parus en Roumanie avant la chute du régime communiste. Il est édité dans son intégralité en [[Allemagne de l'Ouest]], deux ans plus tard, peu de temps après la publication de sa deuxième œuvre en Roumanie<ref name="NoticeAS"/>. La réaction des autorités communistes est sévère : Herta Müller se voit interdire de faire paraître des livres sur le sol roumain<ref name="NoticeAS"/>.


==== Installation en Allemagne et succès international ====
=== Installation en Allemagne et succès international ===
Sous la pression de l'Union des écrivains ouest-allemands et du [[PEN club]], les autorités autorisent Herta Müller et son mari, l'écrivain [[Richard Wagner (écrivain)|Richard Wagner]], à partir vivre en [[Allemagne de l'Ouest|République fédérale d'Allemagne]] en [[1987]]<ref name="NouvelObs2009">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/romans/20091008.BIB4146/l-039-etrange-parcours-de-herta-muller.html|titre=L'étrange parcours de Herta Müller|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=08|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Les années suivantes, elle obtient plusieurs postes d'enseignante, comme écrivain « en résidence », dans des universités allemandes et étrangères.
Sous la pression de l'Union des écrivains ouest-allemands et du [[PEN club]], les autorités autorisent Herta Müller et son mari, l'écrivain [[Richard Wagner (écrivain)|Richard Wagner]], à partir vivre en [[Allemagne de l'Ouest|République fédérale d'Allemagne]] en [[1987]]<ref name="NouvelObs2009">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/romans/20091008.BIB4146/l-039-etrange-parcours-de-herta-muller.html|titre=L'étrange parcours de Herta Müller|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=08|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Les années suivantes, elle obtient plusieurs postes d'enseignante, comme écrivain « en résidence », dans des universités allemandes et étrangères.


Herta Müller est membre jusqu'à sa démission en [[1997]], du [[PEN club]] d'Allemagne. Depuis [[1995]], elle est membre de l'[[Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung|Académie allemande pour la langue et la littérature]].
Herta Müller est membre jusqu'à sa démission en [[1997]], du [[PEN club]] d'Allemagne. Depuis [[1995]], elle est membre de l'[[Deutsche Akademie für Sprache und Dichtung|Académie allemande pour la langue et la littérature]].


En [[2005]], elle est invitée comme professeur à la chaire « [[Heiner Müller]] » de l'[[université libre de Berlin]], où elle vit aujourd'hui. Au cours de la même année, elle publie son premier livre écrit en roumain (le volume de poésie-collage ''{{lang|ro|Este sau nu este Ion}}'', [[Iași]] : Polirom).
En [[2005]], elle est invitée comme professeur à la chaire « [[Heiner Müller]] » de l'[[université libre de Berlin]], où elle vit aujourd'hui. Au cours de la même année, elle publie son premier livre écrit en roumain (le volume de poésie-collage ''{{langue|ro|Este sau nu este Ion}}'', [[Iași]] : Polirom).


En [[2009]], son roman ''{{lang|de|Atemschaukel}}'' publié grâce à une bourse<ref>[http://www.bosch-stiftung.de/content/language1/html/1100.asp] Grenzgänger-Programm der Robert Bosch Stiftung</ref> de la Fondation Robert Bosch, est nommé pour le prix du livre allemand, et atteint la finale des six meilleurs romans<ref>[[Deutsche Presse-Agentur|dpa]]: [http://www.zeit.de/newsticker/2009/9/16/iptc-bdt-20090916-153-22407246xml ''Sechs Romane für Deutschen Buchpreis nominiert''] ''Die Zeit'', {{date-|16 septembre 2009}}.</ref>.
En [[2009]], son roman ''{{langue|de|Atemschaukel}}'', publié grâce à une bourse<ref>[http://www.bosch-stiftung.de/content/language1/html/1100.asp] Grenzgänger-Programm der Robert Bosch Stiftung</ref> de la Fondation Robert Bosch, est nommé pour le prix du livre allemand et atteint la finale des six meilleurs romans<ref>[[Deutsche Presse-Agentur|dpa]]: [http://www.zeit.de/newsticker/2009/9/16/iptc-bdt-20090916-153-22407246xml ''Sechs Romane für Deutschen Buchpreis nominiert''] ''Die Zeit'', {{date-|16 septembre 2009}}.</ref>.


Le {{date-|8|octobre|2009|en littérature}}, elle reçoit le [[prix Nobel de littérature]]<ref>[http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2009/ Prix Nobel de littérature] sur le site officiel des Nobel</ref> pour l'ensemble de son œuvre {{Citation|qui, avec la concentration de la poésie et l'objectivité de la prose, dépeint les paysages de l'abandon}}<ref>[http://www.romandie.com/infos/ats/display.asp?page=20091008142526550172019048000_brf029.xml&associate=phf1115 Romandie News : Prix Nobel pour Herta Müller]</ref>. Dix ans après [[Günter Grass]] et cinq ans après [[Elfriede Jelinek]], elle devient le troisième auteur de [[Allemand|langue allemande]] distingué à [[Stockholm]] sur une décennie<ref name="Leménager2009" />.
Le {{date-|8|octobre|2009|en littérature}}, elle reçoit le [[prix Nobel de littérature]]<ref>[http://nobelprize.org/nobel_prizes/literature/laureates/2009/ Prix Nobel de littérature] sur le site officiel des Nobel</ref> pour l'ensemble de son œuvre {{Citation|qui, avec la concentration de la poésie et l'objectivité de la prose, dépeint les paysages de l'abandon}}<ref>{{lien web|url=http://www.lefigaro.fr/livres/2009/10/08/03005-20091008ARTFIG00600-le-nobel-de-litterature-remis-a-herta-mller-.php|titre=Le Nobel de littérature remis à Herta Müller |date=08/10/2009|site=[[Le Figaro]]}}.</ref>. Dix ans après [[Günter Grass]] et cinq ans après [[Elfriede Jelinek]], elle devient le troisième auteur de [[Allemand|langue allemande]] distingué à [[Stockholm]] sur une décennie<ref name="Leménager2009" />.


== Prises de position ==
== Prises de position ==
Herta Müller est connue en Allemagne pour des prises de positions qui s'écartent de la ligne majoritaire de l'[[opinion publique]] et de l'[[intelligentsia]]<ref name="Leménager2009">{{article|prénom1=Grégoire|nom1=Leménager|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20091008.BIB4145/le-nobel-2009-s-039-appelle-herta-muller.html|titre=Le Nobel 2009 s'appelle Herta Müller|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=08|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Elle ne condamne pas l'intervention américaine en [[Irak]] en [[2003]] et rappelle à quel point son pays natal, qui a souffert de la dictature, aurait aimé être libéré par le « [[monde libre]] »<ref name="Leménager2009" />.
Herta Müller est connue en Allemagne pour des prises de positions qui s'écartent de la ligne majoritaire de l'[[opinion publique]] et de l'[[intelligentsia]]<ref name="Leménager2009">{{article|prénom1=Grégoire|nom1=Leménager|url=http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20091008.BIB4145/le-nobel-2009-s-039-appelle-herta-muller.html|titre=Le Nobel 2009 s'appelle Herta Müller|périodique=Le Nouvel Observateur|jour=08|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Elle ne condamne pas l'intervention américaine en [[Irak]] en [[2003]] et rappelle à quel point son pays natal, qui a souffert de la dictature, aurait aimé être libéré par le « [[monde libre]] »<ref name="Leménager2009" />.


En [[2008]] a eu lieu un débat de politique intérieure concernant la participation de l'[[historien]] {{lien|Sorin Antohi}} et du [[germanistique|germaniste]] {{Lien|trad=Andrei Corbea Hoișie|lang=ro}} à une réunion de l[[Institut culturel roumain|Institut culturel roumain de Berlin]] du {{date-|25|juillet|2008}}, car tous deux furent informateurs de la Securitate.
En [[2008]] a eu lieu un débat de politique intérieure concernant la participation de l'[[historien]] {{lien|Sorin Antohi}} et du [[germanistique|germaniste]] {{Lien|trad=Andrei Corbea Hoișie|lang=ro}} à une réunion de l'[[Institut culturel roumain|Institut culturel roumain de Berlin]] du {{date-|25|juillet|2008}}, car tous deux furent informateurs de la [[Securitate]].


Müller critique l'invitation dans une lettre ouverte<ref>[http://www.fr-online.de/in_und_ausland/kultur_und_medien/feuilleton/?em_cnt=1368607& Spitzel in der Sommerakademie], Frankfurter Rundschau (fr-online.de), 23. Juli 2008. Vgl. [http://www.siebenbuerger.de/zeitung/artikel/kultur/8033-spitzelaffaere-in-berlin.html „Spitzelaffäre“ in Berlin], Siebenbürger Zeitung (Siebenbuerger.de), {{date-|9 août 2008}}.</ref>. Dans le cadre de cette polémique, l'historien, philosophe et homme de lettres {{Lien|trad=Carl Gibson (Autor)|lang=de|fr=Carl Gibson}}, lui aussi natif du Banat, lui reproche, dans son livre ''{{lang|de|Symphonie der Freiheit}}'' (''Symphonie de la liberté''), sa loyauté passée envers le régime de Ceaușescu<ref>[http://rti-radio.de/content/view/688/40/lang,de_DE Interview mit Carl Gibson auf Radio Transylvania International, {{date-|27 août 2008}}], Zugriff September 2008; u. [http://www.fnweb.de/regionales/me/bad_mergentheim/20080902_srv0000003070304.html Carl Gibson aus Bad Mergentheim: ''Symphonie der Freiheit'' beleuchtet die Menschenrechtsbewegung in Rumänien – Der Zeitzeuge legt Buch mit 400 Seiten vor], Fränkische Nachrichten (fnweb.de), Bad Mergentheim</ref>.
Müller critique l'invitation dans une lettre ouverte<ref>[http://www.fr-online.de/in_und_ausland/kultur_und_medien/feuilleton/?em_cnt=1368607& Spitzel in der Sommerakademie], Frankfurter Rundschau (fr-online.de), 23. Juli 2008. Vgl. [http://www.siebenbuerger.de/zeitung/artikel/kultur/8033-spitzelaffaere-in-berlin.html „Spitzelaffäre“ in Berlin], Siebenbürger Zeitung (Siebenbuerger.de), {{date-|9 août 2008}}.</ref>. Dans le cadre de cette polémique, l'historien, philosophe et homme de lettres {{Lien|trad=Carl Gibson (Autor)|lang=de|fr=Carl Gibson}}, lui aussi natif du Banat, lui reproche, dans son livre ''{{langue|de|Symphonie der Freiheit}}'' (''Symphonie de la liberté''), sa loyauté passée envers le régime de Ceaușescu<ref>[http://rti-radio.de/content/view/688/40/lang,de_DE Interview mit Carl Gibson auf Radio Transylvania International, {{date-|27 août 2008}}], Zugriff September 2008; u. [http://www.fnweb.de/regionales/me/bad_mergentheim/20080902_srv0000003070304.html Carl Gibson aus Bad Mergentheim: ''Symphonie der Freiheit'' beleuchtet die Menschenrechtsbewegung in Rumänien – Der Zeitzeuge legt Buch mit 400 Seiten vor], Fränkische Nachrichten (fnweb.de), Bad Mergentheim</ref>.


Dans un article paru dans l'hebdomadaire ''{{lang|de|[[Die Zeit]]}}'' le {{date-|23|juillet|2009}} et intitulé « La Securitate est toujours en service », Müller accuse l’État roumain d'être toujours sous l'emprise des méthodes du [[République socialiste de Roumanie|régime communiste]]. Elle décrit à quelles mesures « pour le compromis et l'isolement » elle fut soumise par les services secrets dont elle subirait la pression encore aujourd'hui. Les dossiers de la Securitate indiquent comment sa critique infatigable vis-à-vis de la dictature de Ceaușescu devait être rendue peu digne de foi par des mesures visant à la calomnier.
Dans un article paru dans l'hebdomadaire ''{{langue|de|[[Die Zeit]]}}'' le {{date-|23|juillet|2009}} et intitulé « La Securitate est toujours en service », Müller accuse l’État roumain d'être toujours sous l'emprise des méthodes du [[République socialiste de Roumanie|régime communiste]]. Elle décrit à quelles mesures « pour le compromis et l'isolement » elle fut soumise par les services secrets dont elle subirait la pression encore aujourd'hui. Les dossiers de la Securitate indiquent comment sa critique infatigable vis-à-vis de la dictature de Ceaușescu devait être rendue peu digne de foi par des mesures visant à la calomnier.


Ainsi, des lettres, montées de toutes pièces par la police secrète, ont été envoyées à des stations de radio allemandes afin de la compromettre en véhiculant des fausses preuves sur son rôle d'agent de la [[Securitate]]. En outre, plusieurs autres personnes appartenant à la minorité [[Allemands du Banat|souabe du Banat]], auraient été présentées à tort comme des collaborateurs informels de la police secrète<ref>[http://www.zeit.de/2009/31/Securitate ''Die Zeit'': ''Die Securitate ist noch im Dienst'']. {{date-|28 juillet 2009}}.</ref>.
Ainsi, des lettres, montées de toutes pièces par la police secrète, ont été envoyées à des stations de radio allemandes afin de la compromettre en véhiculant des fausses preuves sur son rôle d'agent de la [[Securitate]]. En outre, plusieurs autres personnes appartenant à la minorité [[Allemands du Banat|souabe du Banat]], auraient été présentées à tort comme des collaborateurs informels de la police secrète<ref>[http://www.zeit.de/2009/31/Securitate ''Die Zeit'': ''Die Securitate ist noch im Dienst'']. {{date-|28 juillet 2009}}.</ref>.
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En [[2016]], au côté du chef d'orchestre [[Daniel Barenboim]], elle fait partie des 70 intellectuels et artistes signataires d'une lettre de soutien à la politique de la chancelière [[Angela Merkel]] en faveur de l'accueil des réfugiés en [[Europe]]<ref>{{article|prénom1=Sabine|nom1=Syfuss-Arnaud|url=https://www.challenges.fr/challenges-soir/20160304.CHA5807/crise-des-migrants-merkel-isolee-en-europe.html|titre=Crise des migrants: Angela Merkel totalement isolée en Europe|périodique=Challenge|jour=04|mois=mars|année=2016}}.</ref>.
En [[2016]], au côté du chef d'orchestre [[Daniel Barenboim]], elle fait partie des 70 intellectuels et artistes signataires d'une lettre de soutien à la politique de la chancelière [[Angela Merkel]] en faveur de l'accueil des réfugiés en [[Europe]]<ref>{{article|prénom1=Sabine|nom1=Syfuss-Arnaud|url=https://www.challenges.fr/challenges-soir/20160304.CHA5807/crise-des-migrants-merkel-isolee-en-europe.html|titre=Crise des migrants: Angela Merkel totalement isolée en Europe|périodique=Challenge|jour=04|mois=mars|année=2016}}.</ref>.


[[Fichier:Herta Müller.jpg|thumb|upright|Herta Müller dédicaçant un ouvrage en {{date-|septembre 2009}}.]]
[[Fichier:Herta Müller.jpg|vignette|redresse|Herta Müller dédicaçant un ouvrage en {{date-|septembre 2009}}.]]


== Œuvre ==
== Œuvre ==
L'œuvre de Herta Müller, qui comprend une vingtaine de romans et récits, est classée en [[Allemagne]] dans la ''{{lang|de|Weltliteratur}}'' (''{{lang|en|[[world literature]]}}'') pour son régionalisme à vocation universelle : le milieu rural roumain, la référence historique à [[Nicolae Ceaușescu]] et l'évocation des minorités de langue allemande forment une peinture de mœurs et de caractères transfrontalière, polyglotte et multiculturelle<ref name="Larousse">[http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Herta_M%C3%BCller/184891 Herta Müller] sur l'[[encyclopédie Larousse]], consulté le {{date-|11 novembre 2013}}.</ref>. Seuls six titres ont été, pour le moment, traduits en [[français]] ; Müller étant presque inconnue en [[France]] avant l'attribution du prix Nobel<ref name="Leménager2009"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009">{{article|prénom1=Pierre|nom1=Deshusses|url=https://www.lemonde.fr/livres/article/2009/10/09/herta-muller-prix-nobel-de-litterature-l-ecriture-contre-l-oubli_1251741_3260.html|titre=Herta Müller, Prix Nobel de littérature, l'écriture contre l'oubli|périodique=Le Monde|jour=09|mois=octobre|année=2009}}.</ref>.
L'œuvre de Herta Müller, qui comprend une vingtaine de romans et récits, est classée en [[Allemagne]] dans la ''{{langue|de|Weltliteratur}}'' (''{{langue|en|[[world literature]]}}'') pour son régionalisme à vocation universelle : le milieu rural roumain, la référence historique à [[Nicolae Ceaușescu]] et l'évocation des minorités de langue allemande forment une peinture de mœurs et de caractères transfrontalière, polyglotte et multiculturelle<ref name="Larousse">[http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Herta_M%C3%BCller/184891 Herta Müller] sur l'[[encyclopédie Larousse]], consulté le {{date-|11 novembre 2013}}.</ref>. Seuls six titres ont été, pour le moment, traduits en [[français]] ; Müller étant presque inconnue en [[France]] avant l'attribution du prix Nobel<ref name="Leménager2009"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009">{{article|prénom1=Pierre|nom1=Deshusses|url=https://www.lemonde.fr/livres/article/2009/10/09/herta-muller-prix-nobel-de-litterature-l-ecriture-contre-l-oubli_1251741_3260.html|titre=Herta Müller, Prix Nobel de littérature, l'écriture contre l'oubli|périodique=Le Monde|jour=09|mois=octobre|année=2009}}.</ref>.


Ses livres se consacrent à l’[[histoire de la Roumanie]] sous le règne du ''[[Nicolae Ceaușescu|{{lang|ro|Conducător}}]]''. Ils évoquent les vexations, les persécutions, les humiliations, la privation de la langue d'origine et les expulsions dont sont victimes, à partir de [[1945]], les populations germanophones d'[[Europe de l'Est]], délogées et martyrisées<ref name="Larousse"/>. Ce pan sombre de l'[[histoire de l'Europe|histoire européenne]] est encore peu relayé par les ouvrages spécialisés, les historiens et la presse en dehors de l'[[Allemagne]]<ref name="Larousse"/>. Müller s'axe entièrement sur la dénonciation des horreurs silencieuses et de l'oppression quotidienne sous la dictature<ref name="Deshusses2009"/>. De manière métaphorique ou détournée, ses ouvrages rendent tous compte de l'aliénation de l'individu et de sa capitulation face à une société liberticide<ref name="Makhlouf2015">{{article|prénom1=Georgia|nom1=Makhlouf|url=http://www.lorientlitteraire.com/article_details.php?cid=73&nid=6286|titre=Herta Müller : écrire au scalpel|périodique=L'Orient-Le Jour|jour=01|mois=octobrel|année=2015}}.</ref>.
Ses livres se consacrent à l’[[histoire de la Roumanie]] sous le règne du ''[[Nicolae Ceaușescu|{{langue|ro|Conducător}}]]''. Ils évoquent les vexations, les persécutions, les humiliations, la privation de la langue d'origine et les expulsions dont sont victimes, à partir de [[1945]], les populations germanophones d'[[Europe de l'Est]], délogées et martyrisées<ref name="Larousse"/>. Ce pan sombre de l'[[histoire de l'Europe|histoire européenne]] est encore peu relayé par les ouvrages spécialisés, les historiens et la presse en dehors de l'[[Allemagne]]<ref name="Larousse"/>. Müller s'axe entièrement sur la dénonciation des horreurs silencieuses et de l'oppression quotidienne sous la dictature<ref name="Deshusses2009"/>. De manière métaphorique ou détournée, ses ouvrages rendent tous compte de l'aliénation de l'individu et de sa capitulation face à une société liberticide<ref name="Makhlouf2015">{{article|prénom1=Georgia|nom1=Makhlouf|url=http://www.lorientlitteraire.com/article_details.php?cid=73&nid=6286|titre=Herta Müller : écrire au scalpel|périodique=L'Orient-Le Jour|jour=01|mois=octobrel|année=2015}}.</ref>.


Son œuvre est, en ce sens, caractérisée par une logique mémorielle et une esthétique de la résistance : la littérature devient un outil politique et une arme contre l'oubli<ref name="Deshusses2009"/>. ''{{lang|de|Niederungen}}'' (''Dépressions'', [[1982 en littérature|1982]]), rassemble plusieurs nouvelles à tonalité autobiographique et évoque la vie pénible de paysans du [[Banat roumain|Banat]]<ref name="Larousse"/>. ''{{lang|de|Drückender Tango}}'' ([[1984 en littérature|1984]]) fustige l'intolérance, la violence et la corruption d'un village dont la minorité allemande ne dissimule pas sa proximité avec l'[[fascisme|idéologie fasciste]]<ref name="Leménager2009"/>. ''{{lang|de|Der Mensch ist ein grosser Fasan auf der Welt}}'' (''L'Homme est un grand faisan sur terre'', [[1987 en littérature|1987]]) évoque l'angoisse et le déchirement de la famille d'un meunier qui souhaite quitter sa terre et devient la victime des tracasseries de l'administration, des menaces de la police et de la malhonnêteté des passeurs<ref name="Larousse"/>{{,}}<ref name="NouvelObs2009"/>. Dans ''{{lang|de|Reisende auf einem Bein}}'' ([[1989 en littérature|1989]]), Müller raconte son installation en Allemagne qui fut à la fois une rupture douloureuse avec son pays natal et un retour aux sources, lui permettant de pratiquer sa langue maternelle en toute liberté<ref name="Deshusses2009"/>.
Son œuvre est, en ce sens, caractérisée par une logique mémorielle et une esthétique de la résistance : la littérature devient un outil politique et une arme contre l'oubli<ref name="Deshusses2009"/>. ''[[Dépressions]]'' (''{{langue|de|Niederungen}}'', [[1982 en littérature|1982]]), rassemble plusieurs nouvelles à tonalité autobiographique et évoque la vie pénible de paysans du [[Banat roumain|Banat]]<ref name="Larousse"/>. ''{{langue|de|Drückender Tango}}'' ([[1984 en littérature|1984]]) fustige l'intolérance, la violence et la corruption d'un village dont la minorité allemande ne dissimule pas sa proximité avec l'[[fascisme|idéologie fasciste]]<ref name="Leménager2009"/>. ''L'Homme est un grand faisan sur terre'' (''{{langue|de|Der Mensch ist ein grosser Fasan auf der Welt}}'', [[1987 en littérature|1987]]) évoque l'angoisse et le déchirement de la famille d'un meunier qui souhaite quitter sa terre et devient la victime des tracasseries de l'administration, des menaces de la police et de la malhonnêteté des passeurs<ref name="Larousse"/>{{,}}<ref name="NouvelObs2009"/>. Dans ''{{langue|de|Reisende auf einem Bein}}'' ([[1989 en littérature|1989]]), Müller raconte son installation en Allemagne qui fut à la fois une rupture douloureuse avec son pays natal et un retour aux sources, lui permettant de pratiquer sa langue maternelle en toute liberté<ref name="Deshusses2009"/>.


''{{lang|de|Der Fuchs war damals schon der Jäger}}'' (''Le Renard était déjà le chasseur'', [[1992 en littérature|1992]]) dépeint la terreur d'une enseignante qui comprend que son appartement est visité par des agents de la [[Securitate]]<ref name="Larousse"/>. ''{{lang|de|Herztier}}'' (''[[Animal du cœur]]'', [[1993 en littérature|1993]]) narre le destin brisé de quatre étudiants roumains, dans les [[années 1980]], à la recherche d’eux-mêmes et de leur pays dévasté par le régime communiste<ref name="MG2012">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.magazine-litteraire.com/critique/fiction/animal-du-coeur-herta-muller-29-03-2012-36720|titre=Animal du cœur, de Herta Müller|périodique=Le Magazine littéraire|jour=29|mois=mars|année=2012}}.</ref>.
''Le renard était déjà le chasseur'' (''{{langue|de|Der Fuchs war damals schon der Jäger}}'', [[1992 en littérature|1992]]) dépeint la terreur d'une enseignante qui comprend que son appartement est visité par des agents de la [[Securitate]]<ref name="Larousse"/>. ''{{langue|de|Herztier}}'' (''[[Animal du cœur]]'', [[1993 en littérature|1993]]) narre le destin brisé de quatre étudiants roumains, dans les [[années 1980]], à la recherche d’eux-mêmes et de leur pays dévasté par le régime communiste<ref name="MG2012">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.magazine-litteraire.com/critique/fiction/animal-du-coeur-herta-muller-29-03-2012-36720|titre=Animal du cœur, de Herta Müller|périodique=Le Magazine littéraire|jour=29|mois=mars|année=2012}}.</ref>.


[[File:Lesung "Atemschaukel", Potsdam, Juli 2010.jpg|thumb|Lecture, ''La Bascule du souffle'', [[Potsdam]], {{date-|juillet 2010}}.]]
[[Fichier:Lesung "Atemschaukel", Potsdam, Juli 2010.jpg|vignette|Lecture, ''La Bascule du souffle'', [[Potsdam]], {{date-|juillet 2010}}.]]
''{{lang|de|Heute wär ich mir lieber nicht begegnet}}'' (''La Convocation'', [[1997 en littérature|1997]]) décrit la vie d’une femme bouleversée par les interrogatoires de la police d’État<ref name="Larousse"/>. Dans ''{{lang|de|Atemschaukel}}'' (''[[La Bascule du souffle]]'', [[2009 en littérature|2009]]), l'auteur retrace le parcours d'un jeune homme dans un [[goulag]] soviétique, exemplaire du sort des Allemands de [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] après la [[Seconde Guerre mondiale]]. La faim, ressentie par le protagoniste, change sa perception du réel<ref name="MG2011">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.magazine-litteraire.com/critique/fiction/bascule-du-souffle-herta-muller-10-01-2011-32937|titre=La Bascule du souffle, de Herta Müller|périodique=Le Magazine littéraire|jour=10|mois=janvier|année=2011}}.</ref>{{,}}<ref name="Rérolle2010">{{article|prénom1=Raphaëlle|nom1=Rérolle|url=https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/12/02/la-bascule-du-souffle-d-herta-muller_1447787_3260.html|titre="La Bascule du souffle", d'Herta Müller : les objets animés d'Herta Müller|périodique=Le Monde|jour=02|mois=février|année=2010}}.</ref>. La romancière dit s’être inspirée de l'expérience du poète [[Oskar Pastior]], décédé en [[2006]] et lauréat du [[prix Georg-Büchner|prix Büchner]], dont elle avait consigné les souvenirs dans plusieurs cahiers<ref name="MG2011"/>. Néanmoins, l'histoire personnelle de sa mère a également nourri son inspiration<ref name="NoticeAS"/>.
''La Convocation'' (''{{langue|de|Heute wär ich mir lieber nicht begegnet}}'', [[1997 en littérature|1997]]) décrit la vie d’une femme bouleversée par les interrogatoires de la police d’État<ref name="Larousse"/>. Dans ''{{langue|de|Atemschaukel}}'' (''[[La Bascule du souffle]]'', [[2009 en littérature|2009]]), l'auteur retrace le parcours d'un jeune homme dans un [[goulag]] soviétique, exemplaire du sort des Allemands de [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] après la [[Seconde Guerre mondiale]]. La faim, ressentie par le protagoniste, change sa perception du réel<ref name="MG2011">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.magazine-litteraire.com/critique/fiction/bascule-du-souffle-herta-muller-10-01-2011-32937|titre=La Bascule du souffle, de Herta Müller|périodique=Le Magazine littéraire|jour=10|mois=janvier|année=2011}}.</ref>{{,}}<ref name="Rérolle2010">{{article|prénom1=Raphaëlle|nom1=Rérolle|url=https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/12/02/la-bascule-du-souffle-d-herta-muller_1447787_3260.html|titre="La Bascule du souffle", d'Herta Müller : les objets animés d'Herta Müller|périodique=Le Monde|jour=02|mois=février|année=2010}}.</ref>. La romancière dit s’être inspirée de l'expérience du poète [[Oskar Pastior]], décédé en [[2006]] et lauréat du [[prix Georg-Büchner|prix Büchner]], dont elle avait consigné les souvenirs dans plusieurs cahiers<ref name="MG2011"/>. Néanmoins, l'histoire personnelle de sa mère a également nourri son inspiration<ref name="NoticeAS"/>.


=== Style ===
=== Style ===
Le style de Müller est loué par la critique pour sa concision et sa puissance<ref name="Deshusses2009"/>{{,}}<ref name="MG2012"/>. Son écriture relève d'une blessure intime et sociale qu'elle tente de réparer à travers une mosaïque linguistique complexe et le désir d'accéder à l'universel<ref name="Margantin2009"/>{{,}}<ref name="France Cuture 2009">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.franceculture.fr/emission-autour-d-herta-m%C3%BCller-lautr%C3%A9amont-2009-10-16.html|titre=autour d'Herta Müller / Lautréamont|périodique=France Culture|jour=16|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Sa syntaxe est très découpée, voire hachée et ses phrases vont à l'essentiel<ref name="Makhlouf2015"/>. Les jurés du prix Nobel saluent la force d'évocation de sa prose, emplie d'« images ciselées »<ref name="NoticeAS"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009"/>. Le comité de Stockholm souligne par ailleurs son habileté à donner « une image de la vie quotidienne dans une dictature pétrifiée » et à peindre « le paysage des dépossédés »<ref name="NoticeAS"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009"/>. En effet, ses récits mettent en scène des éléments composites (animaux, paysages, végétaux, fruits) qui forment un tableau fantasmagorique et angoissant du quotidien totalitaire<ref name="MG2011"/>. L'écrivain retranscrit autant la pauvreté extérieure que l'univers mental des protagonistes, ravagés par l'effroi, la soumission, l'impuissance et l'abandon<ref name="Rérolle2010"/>.
Le style de Müller est loué par la critique pour sa concision et sa puissance<ref name="Deshusses2009"/>{{,}}<ref name="MG2012"/>. Son écriture relève d'une blessure intime et sociale qu'elle tente de réparer à travers une mosaïque linguistique complexe et le désir d'accéder à l'universel<ref name="Margantin2009"/>{{,}}<ref name="France Cuture 2009">{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.franceculture.fr/emission-autour-d-herta-m%C3%BCller-lautréamont-2009-10-16.html|titre=autour d'Herta Müller / Lautréamont|périodique=France Culture|jour=16|mois=octobre|année=2009}}.</ref>. Sa syntaxe est très découpée, voire hachée et ses phrases vont à l'essentiel<ref name="Makhlouf2015"/>. Les jurés du prix Nobel saluent la force d'évocation de sa prose, emplie d'« images ciselées »<ref name="NoticeAS"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009"/>. Le comité de Stockholm souligne par ailleurs son habileté à donner « une image de la vie quotidienne dans une dictature pétrifiée » et à peindre « le paysage des dépossédés »<ref name="NoticeAS"/>{{,}}<ref name="Deshusses2009"/>. En effet, ses récits mettent en scène des éléments composites (animaux, paysages, végétaux, fruits) qui forment un tableau fantasmagorique et angoissant du quotidien totalitaire<ref name="MG2011"/>. L'écrivain retranscrit autant la pauvreté extérieure que l'univers mental des protagonistes, ravagés par l'effroi, la soumission, l'impuissance et l'abandon<ref name="Rérolle2010"/>.


Müller abolit souvent la frontière entre réalité concrète et imaginaire, prosaïque et fantastique<ref name="Makhlouf2015"/> : les éléments du quotidien sont détournés puis réagencés dans une forme de [[surréalisme]] accessible et fragmentaire<ref name="France Cuture 2009"/>. Les personnages ressemblent à des spectres et les objets banals, minutieusement détaillés, finissent par s'animer<ref name="Rérolle2010"/>{{,}}<ref>{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.franceculture.fr/oeuvre-la-bascule-du-souffle-de-herta-mueller.html|titre=La bascule du souffle|périodique=France Culture|jour=15|mois=novembre|année=2010}}.</ref>. ''{{lang|de|Arbeitstag}}'' (''Journée de travail''), dernière nouvelle du recueil ''{{lang|de|Niederungen}}'', dépeint un univers familier où toutes les habitudes sont inversées : les individus se sèchent avec un peigne, se coiffent avec une brosse à dents, boivent le pain, mangent le thé, montent à l'étage pour accéder à la rue et disent « au revoir » une fois arrivés au bureau<ref name="Makhlouf2015"/>. L'auteur met ainsi en exergue un monde apparemment banal mais totalement détraqué et menaçant où seul l'[[absurde]] tient lieu d’explication<ref name="Makhlouf2015"/>.
Müller abolit souvent la frontière entre réalité concrète et imaginaire, prosaïque et fantastique<ref name="Makhlouf2015"/> : les éléments du quotidien sont détournés puis réagencés dans une forme de [[surréalisme]] accessible et fragmentaire<ref name="France Cuture 2009"/>. Les personnages ressemblent à des spectres et les objets banals, minutieusement détaillés, finissent par s'animer<ref name="Rérolle2010"/>{{,}}<ref>{{article|prénom1=|nom1=|url=http://www.franceculture.fr/oeuvre-la-bascule-du-souffle-de-herta-mueller.html|titre=La bascule du souffle|périodique=France Culture|jour=15|mois=novembre|année=2010}}.</ref>. ''{{langue|de|Arbeitstag}}'' (''Journée de travail''), dernière nouvelle du recueil ''{{langue|de|Niederungen}}'', dépeint un univers familier où toutes les habitudes sont inversées : les individus se sèchent avec un peigne, se coiffent avec une brosse à dents, boivent le pain, mangent le thé, montent à l'étage pour accéder à la rue et disent « au revoir » une fois arrivés au bureau<ref name="Makhlouf2015"/>. L'auteur met ainsi en exergue un monde apparemment banal mais totalement détraqué et menaçant où seul l'[[absurde]] tient lieu d’explication<ref name="Makhlouf2015"/>.


Les nouvelles de ''{{lang|de|Niederungen}}'', rédigées à la première personne et dans un souci d'épure, mettent de côté toute forme de progression dramatique au profit d'impressions, de situations et de descriptions des mœurs rurales, liées par un temps cyclique, comme suspendu ou bloqué (évocation du réveil qui sonne ou non, des « samedi » ou « samedi matin », de l'heure répétée : « cinq » ou « huit heures »)<ref name="Makhlouf2015"/>{{,}}<ref name="Massoutre2016">{{article|prénom1=Guylaine|nom1=Massoutre|url=https://www.ledevoir.com/culture/livres/460894/litterature-roumaine-chronique-d-un-monde-a-l-envers|titre=Chronique d’un monde à l’envers,
Les nouvelles de ''{{langue|de|Niederungen}}'', rédigées à la première personne et dans un souci d'épure, mettent de côté toute forme de progression dramatique au profit d'impressions, de situations et de descriptions des mœurs rurales, liées par un temps cyclique, comme suspendu ou bloqué (évocation du réveil qui sonne ou non, des « samedi » ou « samedi matin », de l'heure répétée : « cinq » ou « huit heures »)<ref name="Makhlouf2015"/>{{,}}<ref name="Massoutre2016">{{article|prénom1=Guylaine|nom1=Massoutre|url=https://www.ledevoir.com/culture/livres/460894/litterature-roumaine-chronique-d-un-monde-a-l-envers|titre=Chronique d’un monde à l’envers,
le premier roman de Herta Müller, Nobel 2009, est enfin traduit|périodique=Le Devoir|jour=23|mois=janvier|année=2016}}.</ref>{{,}}<ref>{{article|prénom1=Stéphane|nom1=Maffli|url=https://www.letemps.ch/culture/2016/04/29/herta-muller-etait-une-petite-fille|titre=Quand Herta Müller était une petite fille|périodique=Le Temps|jour=29|mois=avril|année=2016}}.</ref>. L'autre fil directeur tourne autour des thèmes de l'humiliation ordinaire, la violence symbolique et physique et la désillusion d'une jeune fille face au monde des adultes, alcoolisé et brutal<ref name="Massoutre2016"/>. L'auteur cherche par ailleurs à créer une tension constante et à soigner la picturalité de ses notations visuelles dans lesquelles la couleur joue un rôle central<ref name="Makhlouf2015"/>.
le premier roman de Herta Müller, Nobel 2009, est enfin traduit|périodique=Le Devoir|jour=23|mois=janvier|année=2016}}.</ref>{{,}}<ref>{{article|prénom1=Stéphane|nom1=Maffli|url=https://www.letemps.ch/culture/2016/04/29/herta-muller-etait-une-petite-fille|titre=Quand Herta Müller était une petite fille|périodique=Le Temps|jour=29|mois=avril|année=2016}}.</ref>. L'autre fil directeur tourne autour des thèmes de l'humiliation ordinaire, la violence symbolique et physique et la désillusion d'une jeune fille face au monde des adultes, alcoolisé et brutal<ref name="Massoutre2016"/>. L'auteur cherche par ailleurs à créer une tension constante et à soigner la picturalité de ses notations visuelles dans lesquelles la couleur joue un rôle central<ref name="Makhlouf2015"/>.


Müller procède par [[Collage (art)|collages]]<ref name="Makhlouf2015"/>. ''{{lang|de|Atemschaukel}}'' est cité comme représentatif de sa technique narrative<ref>Par ''Le Magazine littéraire'' de {{date-|janvier 2011}} notamment.</ref> qui morcelle l'intrigue et scinde la fiction en divers chapitres courts, entre souvenirs, méditations, observations, portraits et anecdotes<ref name="MG2011"/>. ''L'Homme est un gros faisan sur terre'' se compose, quant à lui, d'une série de textes très brefs<ref name="Larousse"/>. Par le biais d'une prose sèche et intense, le dialogue disparaît et le [[réalisme (littérature)|réalisme]] se confond avec la [[poésie]]<ref name="Larousse"/>. L'écriture de Müller réfute tout embellissement symbolique et onirique<ref name="MG2011"/>. Sa langue, comprimée et rugueuse, emprunte des formules aux [[poème]]s, aux [[dialecte]]s et au langage populaire afin de restituer des situations parfois difficilement lisibles ou supportables<ref name="Deshusses2009"/>. Ses phrases révèlent souvent un sens caché qui rejette les mots et leur signification dévoyés ou souillés par le pouvoir central<ref name="MG2011"/>. Ainsi, Müller tente de retrouver une innocence, voire une certaine pureté d'expression<ref name="MG2011"/>.
Müller procède par [[Collage (art)|collages]]<ref name="Makhlouf2015"/>. ''{{langue|de|Atemschaukel}}'' est cité comme représentatif de sa technique narrative<ref>Par ''Le Magazine littéraire'' de {{date-|janvier 2011}} notamment.</ref> qui morcelle l'intrigue et scinde la fiction en divers chapitres courts, entre souvenirs, méditations, observations, portraits et anecdotes<ref name="MG2011"/>. ''L'Homme est un gros faisan sur terre'' se compose, quant à lui, d'une série de textes très brefs<ref name="Larousse"/>. Par le biais d'une prose sèche et intense, le dialogue disparaît et le [[réalisme (littérature)|réalisme]] se confond avec la [[poésie]]<ref name="Larousse"/>. L'écriture de Müller réfute tout embellissement symbolique et onirique<ref name="MG2011"/>. Sa langue, comprimée et rugueuse, emprunte des formules aux [[poème]]s, aux [[dialecte]]s et au langage populaire afin de restituer des situations parfois difficilement lisibles ou supportables<ref name="Deshusses2009"/>. Ses phrases révèlent souvent un sens caché qui rejette les mots et leur signification dévoyés ou souillés par le pouvoir central<ref name="MG2011"/>. Ainsi, Müller tente de retrouver une innocence, voire une certaine pureté d'expression<ref name="MG2011"/>.


=== Influences ===
=== Influences ===
[[Image:Herta Müller 2007.JPG|thumb|left|upright|Herta Müller à la Foire du livre de [[Leipzig]] en [[2007]].]]
[[Fichier:Herta Müller 2007.JPG|vignette|gauche|redresse|Herta Müller à la Foire du livre de [[Leipzig]] en [[2007]].]]
Müller n'a jamais évoqué publiquement les personnes et les ouvrages littéraires qui l'ont influencée, attribuant les racines qu'on lui prêtait communément à d'autres sources. La plus importante d'entre elles serait ses études universitaires en [[littérature de langue allemande|littératures allemande]] et [[littérature roumaine|roumaine]]. Bien qu'elle ne l'ait jamais précisé, l'empreinte globale de la littérature d'[[Europe centrale]], de l'[[absurde]] et de [[Franz Kafka]] sur ses travaux est indéniable<ref>{{Article |langue=en |prénom1=Julian |nom1=Evans |titre=Herta Müller has an eye on absurdity |périodique=The Guardian |jour=08 |mois=octobre |année=2009 |lire en ligne=https://www.theguardian.com/books/2009/oct/08/huerta-muller-expert-view-life}}.</ref>. La critique allemande rapproche notamment sa démarche littéraire de celle de [[Joseph Roth]], [[Thomas Bernhard]], [[Paul Celan]] et {{Lien|trad=Franz Innerhofer|langue=de|fr=Franz Innerhofer|texte=Franz Innerhofer}}<ref>{{Lien web |langue=de |titre=Rumäniendeutsche Herta Müller: Nobelpreis für das amputierte Leben |url=https://www.welt.de/kultur/article4779483/Nobelpreis-fuer-das-amputierte-Leben-in-der-Diktatur.html |site=[[Die Welt|Welt Online]] |date=7-12-2009}}.</ref>{{,}}<ref>Andrea Köhler : ''Der Schneezackensaum der Sätze. Herta Müllers poetische Erweiterung der Wahrnehmung'' dans ''Neue Zürcher Zeitung'', {{date-|27 septembre 2003}}, ''Literatur und Kunst'', page 66.</ref>.
Müller n'a jamais évoqué publiquement les personnes et les ouvrages littéraires qui l'ont influencée, attribuant les racines qu'on lui prêtait communément à d'autres sources. La plus importante d'entre elles serait ses études universitaires en [[littérature de langue allemande|littératures allemande]] et [[littérature roumaine|roumaine]]. Bien qu'elle ne l'ait jamais précisé, l'empreinte globale de la littérature d'[[Europe centrale]], de l'[[absurde]] et de [[Franz Kafka]] sur ses travaux est indéniable<ref>{{Article |langue=en |prénom1=Julian |nom1=Evans |titre=Herta Müller has an eye on absurdity |périodique=The Guardian |jour=08 |mois=octobre |année=2009 |lire en ligne=https://www.theguardian.com/books/2009/oct/08/huerta-muller-expert-view-life}}.</ref>. La critique allemande rapproche notamment sa démarche littéraire de celle de [[Joseph Roth]], [[Thomas Bernhard]], [[Paul Celan]] et [[Franz Innerhofer]]<ref>{{Lien web |langue=de |titre=Rumäniendeutsche Herta Müller: Nobelpreis für das amputierte Leben |url=https://www.welt.de/kultur/article4779483/Nobelpreis-fuer-das-amputierte-Leben-in-der-Diktatur.html |site=[[Die Welt|Welt Online]] |date=7-12-2009}}.</ref>{{,}}<ref>Andrea Köhler : ''Der Schneezackensaum der Sätze. Herta Müllers poetische Erweiterung der Wahrnehmung'' dans ''Neue Zürcher Zeitung'', {{date-|27 septembre 2003}}, ''Literatur und Kunst'', page 66.</ref>.


En comparant l'[[allemand]] et le [[roumain]], la romancière relève qu'un concept simple, comme une étoile filante peut être interprétée de façon différente : {{citation|Nous ne parlons pas seulement de mots différents, mais aussi de différents ''mondes''. [Par exemple] les Roumains voient une étoile filante et disent que quelqu'un est décédé, alors que les Allemands font un vœu lorsqu'ils voient une étoile filante.}}. Müller poursuit en disant que la [[musique roumaine|musique folklorique roumaine]] occupe une place particulière dans son cœur. {{citation|Quand j'ai entendu [[Maria Tănase]], elle sonnait incroyablement pour moi, c'est alors la première fois que j'ai vraiment ressenti ce que signifie le folklore. La musique folklorique roumaine est liée à l'existence d'une façon très significative.}}<ref>{{Lien brisé|url=http://www.infloox.com/influence?id=94fcba54}}.</ref>.
En comparant l'[[allemand]] et le [[roumain]], la romancière relève qu'un concept simple, comme une étoile filante peut être interprétée de façon différente : {{citation|Nous ne parlons pas seulement de mots différents, mais aussi de différents ''mondes''. [Par exemple] les Roumains voient une étoile filante et disent que quelqu'un est décédé, alors que les Allemands font un vœu lorsqu'ils voient une étoile filante.}}. Müller poursuit en disant que la [[musique roumaine|musique folklorique roumaine]] occupe une place particulière dans son cœur. {{citation|Quand j'ai entendu [[Maria Tănase]], elle sonnait incroyablement pour moi, c'est alors la première fois que j'ai vraiment ressenti ce que signifie le folklore. La musique folklorique roumaine est liée à l'existence d'une façon très significative.}}<ref>{{Lien brisé|url=http://www.infloox.com/influence?id=94fcba54}}.</ref>.
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== Œuvres ==
== Œuvres ==
* [[1982 en littérature|1982]] : ''Niederungen'', [[Bucarest]] {{Commentaire biblio|''[[Dépressions]]'', traduit par Nicole Bary, Paris, Gallimard, {{Coll.|Du monde entier}}, [[2015 en littérature|2015]], 184 p. {{ISBN|978-2-07-013602-5}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}} {{n°|6436}}, [[2018 en littérature|2018]], 236 p. {{ISBN|978-2-07-044550-9}}}}
* [[1982 en littérature|1982]] : ''Niederungen'', [[Bucarest]] ;
* [[1984 en littérature|1984]] : ''Drückender Tango'', Bucarest ;
* [[1984 en littérature|1984]] : ''Drückender Tango'', Bucarest
* [[1986 en littérature|1986]] : ''Der Mensch ist ein großer Fasan auf der Welt'' [[Berlin]] (''L'Homme est un grand faisan sur terre'') ;
* [[1986 en littérature|1986]] : ''Der Mensch ist ein großer Fasan auf der Welt'', [[Berlin]] {{Commentaire biblio|''L'homme est un grand faisan sur terre'', traduit par Nicole Bary, Paris, Maren Sell, {{Coll.|Petite bibliothèque européenne du {{XXe}} siècle}}, [[1988 en littérature|1988]], 105 p. {{ISBN|2-87604-019-0}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}} {{n°|2173}}, [[1990 en littérature|1990]], 123 p. {{ISBN|2-07-038238-9}}}}
* [[1987 en littérature|1987]] : ''Barfüßiger Februar'', Berlin ;
* [[1987 en littérature|1987]] : ''Barfüßiger Februar'', Berlin
* [[1989 en littérature|1989]] : ''Reisende auf einem Bein'', Berlin ;
* [[1989 en littérature|1989]] : ''Reisende auf einem Bein'', Berlin
* [[1990 en littérature|1990]] : ''Wie Wahrnehmung sich erfindet'', [[Paderborn]] ;
* [[1990 en littérature|1990]] : ''Wie Wahrnehmung sich erfindet'', [[Paderborn]]
* [[1991 en littérature|1991]] : ''Der Teufel sitzt im Spiegel'', Berlin ;
* [[1991 en littérature|1991]] : ''Der Teufel sitzt im Spiegel'', Berlin
* [[1992 en littérature|1992]] : ''Der Fuchs war damals schon der Jäger'', Reinbek bei Hamburg (''Le Renard était déjà le chasseur'') ;
* [[1992 en littérature|1992]] : ''Der Fuchs war damals schon der Jäger'', Reinbek bei Hamburg {{Commentaire biblio|''Le renard était déjà le chasseur'', traduit par Claire de Oliveira, Paris, Éditions du Seuil, [[1997 en littérature|1997]], 235 p. {{ISBN|2-02-019361-2}} ; réédition, Paris, Points {{n°|P2486}}, [[2010 en littérature|2010]], 250 p. {{ISBN|978-2-7578-2002-5}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}}, 2019 {{ISBN|978-2-07-283292-5}}}}
* [[1992 en littérature|1992]] : ''Eine warme Kartoffel ist ein warmes Bett'', [[Hambourg]] ;
* [[1992 en littérature|1992]] : ''Eine warme Kartoffel ist ein warmes Bett'', [[Hambourg]]
* [[1993 en littérature|1993]] : ''Der Wächter nimmt seinen Kamm'', Reinbek bei Hamburg ;
* [[1993 en littérature|1993]] : ''Der Wächter nimmt seinen Kamm'', Reinbek bei Hamburg
* [[1994 en littérature|1994]] : ''Angekommen wie nicht da'', [[Lichtenfels (Bavière)|Lichtenfels]] ;
* [[1994 en littérature|1994]] : ''Angekommen wie nicht da'', [[Lichtenfels (Bavière)|Lichtenfels]]
* [[1994 en littérature|1994]] : ''Herztier'', Reinbek bei Hambourg (''[[Animal du cœur]]'') ;
* [[1994 en littérature|1994]] : ''Herztier'', Reinbek bei Hambourg {{Commentaire biblio|''[[Animal du cœur]]'', traduit par Claire de Oliveira, Paris, Gallimard, {{Coll.|Du monde entier}}, [[2012 en littérature|2012]], 231 p. {{ISBN|978-2-07-012970-6}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}} {{n°|5627}}, [[2013 en littérature|2013]], 275 p. {{ISBN|978-2-07-045323-8}}}}
* [[1995 en littérature|1995]] : ''Hunger und Seide'', Reinbek bei Hamburg ;
* [[1995 en littérature|1995]] : ''Hunger und Seide'', Reinbek bei Hamburg
* [[1996 en littérature|1996]] : ''In der Falle'', [[Göttingen]] ;
* [[1996 en littérature|1996]] : ''In der Falle'', [[Göttingen]]
* [[1997 en littérature|1997]] : ''Heute wär ich mir lieber nicht begegnet'', Reinbek bei Hamburg (''La Convocation'') ;
* [[1997 en littérature|1997]] : ''Heute wär ich mir lieber nicht begegnet'', Reinbek bei Hamburg {{Commentaire biblio|''La Convocation'', traduit par Claire de Oliveira, Paris, Métailié, {{Coll.|Bibliothèque allemande}}, [[2001 en littérature|2001]], 207 p. {{ISBN|2-86424-372-5}} ; réédition, Paris, Points {{n°|P2478}}, [[2010 en littérature|2010]], 246 p. {{ISBN|978-2-7578-2014-8}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}}, [[2020 en littérature|2020]] {{ISBN|978-2-07-288036-0}}}}
* [[1999 en littérature|1999]] : ''Der fremde Blick oder Das Leben ist ein Furz in der Laterne'', Göttingen ;
* [[1999 en littérature|1999]] : ''Der fremde Blick oder Das Leben ist ein Furz in der Laterne'', Göttingen
* [[2000 en littérature|2000]] : ''Im Haarknoten wohnt eine Dame'', Reinbek bei Hamburg ;
* [[2000 en littérature|2000]] : ''Im Haarknoten wohnt eine Dame'', Reinbek bei Hamburg
* [[2001 en littérature|2001]] : ''Heimat ist das, was gesprochen wird'', [[Blieskastel]] ;
* [[2001 en littérature|2001]] : ''Heimat ist das, was gesprochen wird'', [[Blieskastel]]
* [[2003 en littérature|2003]] : ''Der König verneigt sich und tötet'', [[Munich]] ;
* [[2003 en littérature|2003]] : ''Der König verneigt sich und tötet'', [[Munich]]
* [[2005 en littérature|2005]] : ''Die blassen Herren mit den Mokkatassen'', Munich ;
* [[2005 en littérature|2005]] : ''Die blassen Herren mit den Mokkatassen'', Munich
* [[2005 en littérature|2005]] : ''Este sau nu este Ion'', [[Iași]] ;
* [[2005 en littérature|2005]] : ''Este sau nu este Ion'', [[Iași]]
* [[2009 en littérature|2009]] : ''Atemschaukel'', Munich (''[[La Bascule du souffle]]'') ;
* [[2009 en littérature|2009]] : ''Atemschaukel'', Munich {{Commentaire biblio|''[[La Bascule du souffle]]'', traduit par Claire de Oliveira, Paris, Gallimard, {{Coll.|Du monde entier}}, [[2010 en littérature|2010]], 308 p. {{ISBN|978-2-07-012883-9}} ; réédition, Paris, Gallimard, {{Coll.|Folio}} {{n°|5341}}, [[2011 en littérature|2011]], 354 p. {{ISBN|978-2-07-044533-2}}}}
* [[2009 en littérature|2009]] : ''Cristina und ihre Attrappe oder Was (nicht) in den Akten der Securitate steht'', Göttingen ;
* [[2009 en littérature|2009]] : ''Cristina und ihre Attrappe oder Was (nicht) in den Akten der Securitate steht'', Göttingen
* [[2012 en littérature|2012]] : ''[[Vater telephoniert mit den Fliegen|Vater telefoniert mit den Fliegen]]'', Munich ;
* [[2012 en littérature|2012]] : ''[[Vater telephoniert mit den Fliegen|Vater telefoniert mit den Fliegen]]'', Munich
* [[2014 en littérature|2014]] : ''Mein Vaterland war ein Apfelkern''.
* [[2014 en littérature|2014]] : ''Mein Vaterland war ein Apfelkern'' (entretiens) {{Commentaire biblio|''Tous les chats sautent à leur façon'', traduit par Claire de Oliveira, Paris, Gallimard, [[2018 en littérature|2018]], 232 p. {{ISBN|978-2-07-273563-9}}}}
* [[2015 en littérature|2015]] : ''Hunger und Seide'', Munich
* [[2015 en littérature|2015]] : ''Hunger und Seide'', Munich

=== Traductions en français ===
* {{Ouvrage|titre =L'homme est un grand faisan sur terre|titre vo=Der Mensch ist ein groβer Fasan auf der Welt|éditeur=Maren Sell et Cie|auteur=|année=[[1994 en littérature|1994]]|lieu=traduction de Nicole Bary, Paris|pages=105|isbn=978-2876040199}}
* {{Ouvrage|titre =Le renard était déjà le chasseur|titre vo=Der Fuchs war damals schon der Jäger|éditeur=trad. Nicole Bary, Le Seuil|collection=Cadre vert|auteur=|année=[[1996 en littérature|1996]]|lieu=traduction de Claire de Oliveira, Paris|pages=226|isbn=978-2020193610}}
* {{Ouvrage|titre =La Convocation|titre vo=Heute wär ich mir lieber nicht begegnet|éditeur=Éditions Métailié|collection=Bibliothèque allemande|auteur=|année=[[2001 en littérature|2001]]|réimpression=[[2009 en littérature|2009]]|lieu=traduction de Claire de Oliveira, Paris|pages=208|isbn=978-2864243724}}
* {{Ouvrage|titre =[[La Bascule du souffle]]|titre vo=Atemschaukel|éditeur=Éditions Gallimard|collection=Du monde entier|auteur=|année=[[2010 en littérature|2010]]|lieu=traduction de Claire de Oliveira, Paris|pages=|isbn=978-2070128839}}
* {{Ouvrage|titre =[[Animal du cœur]]|titre vo=Herztier|éditeur=Éditions Gallimard|collection=Du monde entier|auteur=|année=[[2012 en littérature|2012]]|lieu=trad. de Claire de Oliveira, Paris|pages=|isbn=978-2070129706}}
* {{Ouvrage|titre =[[Dépressions]]|titre vo=Niederungen|éditeur=Éditions Gallimard|collection=Du monde entier|auteur=|année=[[2015 en littérature|2015]]|lieu=trad. de Nicole Bary, Paris|pages=|isbn=978-2-07-013602-5}}
* {{Ouvrage|titre =Tous les chats sautent à leur façon. Entretien avec Angelika Klammer|titre vo=Mein Vaterland war ein Apfelkern|éditeur=Éditions Gallimard|collection=Hors série Littérature|auteur=|année=[[2018 en littérature|2018]]|lieu=trad. de Claire de Oliveira, Paris|pages=240|isbn=978-2-07-273563-9}}


== Adaptation cinématographique ==
== Adaptation cinématographique ==
Un seul roman de Herta Müller a été porté à l'écran :
Un seul roman de Herta Müller a été porté à l'écran :
* [[1993 au cinéma|1993]] : ''Vulpe - vânător'' (''Le Renard était déjà le chasseur'') réalisé par {{Lien|fr=Stere Gulea|lang=ro|trad=Stere Gulea|texte=Stere Gulea}} avec [[Oana Pellea]], {{Lien|fr=Dorel Vișan|lang=ro|trad=Dorel Vișan|texte=Dorel Vișan}}, {{Lien|fr=George Alexandru|lang=ro|trad=George Alexandru|texte=George Alexandru}} etc.
* [[1993 au cinéma|1993]] : ''Vulpe - vânător'', [[Cinéma allemand|film germano]]-[[Industrie cinématographique roumaine|roumain]] réalisé par {{Lien|fr=Stere Gulea|lang=ro|trad=Stere Gulea|texte=Stere Gulea}}, adaptation du roman ''Le renard était déjà le chasseur'', avec [[Oana Pellea]], {{Lien|fr=Dorel Vișan|lang=ro|trad=Dorel Vișan|texte=Dorel Vișan}}, {{Lien|fr=George Alexandru|lang=ro|trad=George Alexandru|texte=George Alexandru}} etc.


== Récompenses ==
== Récompenses ==
* 1981 : prix {{Lien|Adam Müller Guttenbrunn}} du Cercle littéraire de [[Timișoara]]
* 1981 : prix {{Lien|Adam Müller-Guttenbrunn}} du Cercle littéraire de [[Timișoara]]
* 1984 : prix Aspects de la littérature (''{{lien|Aspekte-Literaturpreis}}'')
* 1984 : prix Aspects de la littérature (''{{lien|Aspekte-Literaturpreis}}'')
* 1985 : prix Rauris de littérature
* 1985 : prix Rauris de littérature
* 1985 : prix d'Encouragement littéraire de [[Brême]]
* 1985 : prix d'Encouragement littéraire de [[Brême]]
* 1987 : prix Ricarda-Huch Prize à [[Darmstadt]]
* 1987 : prix Ricarda-Huch Prize à [[Darmstadt]]
* 1989 : prix Marieluise-Fleißer à [[Ingolstadt]]
* 1989 : [[Marieluise-Fleißer-Preis|prix Marieluise-Fleißer]] à [[Ingolstadt]]
* 1989 : prix de langue allemande de la Fondation Henning-Kaufmann<ref>Prix attribué conjointement à Gerhardt Csejka, Helmuth Frauendorfer, Klaus Hensel, Johann Lippet, Werner Söllner, William Totok et [[Richard Wagner (écrivain)|Richard Wagner]]. À l'exception de Johann Lippet qui naquit à [[Wels]] en [[Autriche]] et vécut en [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] à partir de {{nombre|5|ans}}, tous ces auteurs sont d'origine [[Transylvanie (région)|transylvaine]] et ils firent partie soit de l'Aktionsgruppe Banat, soit de l'Adam Müller-Guttenbrunn Literaturkreis.</ref>
* 1989 : prix de langue allemande de la Fondation Henning-Kaufmann<ref>Prix attribué conjointement à Gerhardt Csejka, Helmuth Frauendorfer, Klaus Hensel, Johann Lippet, Werner Söllner, William Totok et [[Richard Wagner (écrivain)|Richard Wagner]]. À l'exception de Johann Lippet qui naquit à [[Wels]] en [[Autriche]] et vécut en [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] à partir de {{nombre|5|ans}}, tous ces auteurs sont d'origine [[Transylvanie (région)|transylvaine]] et ils firent partie soit de l'Aktionsgruppe Banat, soit de l'Adam Müller-Guttenbrunn Literaturkreis.</ref>
* 1990 : {{Lien|trad=Roswitha Prize|fr=Roswitha Prize|texte=Roswitha Medal of Knowledge}} of [[Bad Gandersheim]]
* 1990 : {{Lien|trad=Roswitha Prize|fr=Roswitha Prize|texte=Roswitha Medal of Knowledge}} of [[Bad Gandersheim]]
* 1991 : prix Kranichsteiner de littérature
* 1991 : prix Kranichsteiner de littérature
* 1993 : prix de la critique littéraire
* 1993 : prix de la critique littéraire
* 1994 : [[prix Kleist]]
* 1994 : [[prix Kleist]]
* 1995 : [[:en!Aristeion Prize|prix Aristeion]]
* 1995 : {{lien|lang=en|trad=Aristeion Prize|fr=prix Aristeion}}
* 1995/96 : Écrivain de la ville de [[Francfort-sur-le-Main]]
* 1995/96 : Écrivain de la ville de [[Francfort-sur-le-Main]]
* 1997 : prix de littérature de [[Graz]]
* 1997 : prix de littérature de [[Graz]]
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* 2004 : prix de littérature de la Fondation Konrad-Adenauer
* 2004 : prix de littérature de la Fondation Konrad-Adenauer
* 2005 : prix de littérature de Berlin
* 2005 : prix de littérature de Berlin
* 2006 : prix Würth de la littérature européenne<ref>[http://www.wurth.fr/fr/wurth-france/entreprise/art/lieu_de_travail__lieu_de_culture/Lieu_de_travail___lieu_de_culture.html Site internet de Würth]</ref> et prix Walter-Hasenclever de littérature
* 2006 : prix Würth de la littérature européenne<ref>{{lien web|url=https://www.france24.com/fr/20091008-le-prix-nobel-cern-lallemande-dorigine-roumaine-herta-ller|titre=Le prix Nobel décerné à l'Allemande d'origine roumaine Herta Müller|date=08/10/2009|site=[[france 24|france24.com]]}}.</ref> et prix Walter-Hasenclever de littérature
* 2009 : {{Lien|langue=de|trad=Franz Werfel Human Rights Award|fr=Prix Franz Werfel des droits humains}}
* 2009 : [[prix Franz Werfel des Droits de L'homme]]
* 2009 : [[prix Nobel de littérature]]
* 2009 : [[prix Nobel de littérature]]
* 2010 : prix littéraire [[August Heinrich Hoffmann von Fallersleben|Hoffmann von Fallersleben]], {{Lien|langue=de|trad=Hoffmann-von-Fallersleben-Preis|fr=Prix Hoffmann-von-Fallersleben}}
* 2010 : prix littéraire [[August Heinrich Hoffmann von Fallersleben|Hoffmann von Fallersleben]], {{Lien|langue=de|trad=Hoffmann-von-Fallersleben-Preis|fr=Prix Hoffmann-von-Fallersleben}}
* 2010 : Grand officier de l'[[ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne]]<ref>[http://www.zeit.de/newsticker/2010/5/6/iptc-bdt-20100506-354-24752512xml ''Köhler würdigt Herta Müller als «Unbeugsame»''], in ''[[Die Zeit]]'' du {{date-|6 mai 2010}}, consulté le {{date-|8 août 2010}}.</ref>
* 2010 : Grand officier de l'[[ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne]]<ref>[http://www.zeit.de/newsticker/2010/5/6/iptc-bdt-20100506-354-24752512xml ''Köhler würdigt Herta Müller als «Unbeugsame»''], in ''[[Die Zeit]]'' du {{date-|6 mai 2010}}, consulté le {{date-|8 août 2010}}.</ref>
* 2013 : {{Lien|langue=en|trad=Best Translated Book Award|fr=Prix de la meilleure traduction littéraire en anglais}}
* 2013 : {{Lien|langue=en|trad=Best Translated Book Award|fr=Prix de la meilleure traduction littéraire en anglais}}
* 2013 [[Prix mondial de l'humanisme]] <ref>[http://cnrj.org/macedoine-prix-mondial-de-lhumanisme-long-cnrj-mise-a-lhonneur/ Ed. Ong cnrj : Le prix mondiale de l'humanisme]</ref>{{,}}<ref>https://www.ohrid-academy.org/news</ref>
* 2013 : Prix mondial de l'humanisme<ref>{{lien web|url=https://cnrj.org/macedoine-prix-mondial-de-lhumanisme-long-cnrj-mise-a-lhonneur/|titre=Macédoine : Prix mondial de l'Humanisme. L'ONG CNRJ mise à l'honneur|date=10 janvier 2018|site=cnrj.org|auteur1=Lutina Campana}}.</ref>.
* 2018 : [[Prix Mondello]]
* 2018 : [[Prix Mondello]]


== Sur quelques ouvrages ==
== Notes et références ==
=== ''Convocation'' ===
Une femme est convoquée chez le commandant Albu, qui lui fait le baisemain, l'interroge, puis la laisse aller, même si elle s'est préparée à rester au poste. Le texte se présente comme les confidences d'une femme jeune, entre {{unité|30|et=40|ans}}, vivant mal dans une ville roumaine sans nom : usine (de boutons, de vêtements, pour l'export), marché, marché aux puces, boutiques, église, bar, barre d'habitation, tramway, autobus, moto, bicyclette.
Elle raconte sa vie avec son premier mari, avec Paul son second mari, avec Nelu le chef de bureau, surtout avec Lilli, collègue abattue dans sa fuite à la frontière hongroise puis déchiquetée par les chiens des gardes-frontières. Pour la vie quotidienne, sont évoqués valise, cuisine, corde à linge, corsage, noix, bretzel, eau-de-vie de prune, vodka polonaise à l'herbe de bison, cuite...
Et surtout, loin du plan et des objectifs, il y a les humiliations, l'importance du mépris, le bonheur bancal, le silence, l'absence de vérité, le crédit, le vol de vêtements dans les douches de l'usine, la surveillance, les mouchards, les intimidations, les convocations... Elle a autrefois écrit des messages d'appel au secours individuel dans des vêtements pour l'export. Un grand-père raconte les rancœurs anciennes (des années 1950) des gens du village contre le beau-père, alors dirigeant communiste tyrannique local, cravachant les paysans sur son cheval blanc.
La vie continue.

{{Citation|Il y a tellement de saleté à l’intérieur de Nelu qu'on ne voit pas à travers}} ({{p.|53}}).

{{Citation|Avec notre socialisme, les ouvriers sortent tout nus de l'industrie}} ({{p.|86}}).

{{Citation|J'ai demandé la main de la fille de Staline, mais elle était déjà casée}} ({{p.|89}}).

{{Citation|Il faut parler et non écrire }} ({{p.|62}}).

== Sources ==
{{Traduction/Référence|lang1=de|art1=Herta Müller|id1=65391575|lang2=en|art2=Herta Müller|id2=318827562}}
{{Traduction/Référence|lang1=de|art1=Herta Müller|id1=65391575|lang2=en|art2=Herta Müller|id2=318827562}}

== Notes et références ==
{{Références nombreuses|taille=30}}
{{Références nombreuses|taille=30}}


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=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
* {{article|auteur1=Nicole Bary|titre=Herta Müller, une écriture entre deux cultures |périodique=[[Études (revue)|Études]]| tome=412| numéro= 3|date= 2010|pages=365-372}}.
* {{article|auteur1=Nicole Bary|titre=Herta Müller, une écriture entre deux cultures |périodique=[[Études (revue)|Études]]| tome=412| numéro= 3|date= 2010|pages=365-372}}.
*Nicole Bary, « Herta Müller (1953- ) », dans ''[[Encyclopædia Universalis]]'': [https://www.universalis.fr/encyclopedie/herta-muller/]; également à « La fin d'une époque » du chapitre « Allemandes (Langues et littératures) », écrit par Nicole Bary, Claude David, [[Claude Lecouteux]], Étienne Mazingue, [[Claude Porcell]].
* Nicole Bary, « Herta Müller (1953- ) », dans ''[[Encyclopædia Universalis]]'': [https://www.universalis.fr/encyclopedie/herta-muller/]; également à « La fin d'une époque » du chapitre « Allemandes (Langues et littératures) », écrit par Nicole Bary, Claude David, [[Claude Lecouteux]], Étienne Mazingue, [[Claude Porcell]].
* {{ouvrage|auteur1=Radu Clit|titre=Du trauma à l'écriture. Un point de vue sur la création littéraire de Herta Müller|lieu= Paris|édition= [[Éditions L'Harmattan|L'Harmattan]]|collection = Études psychanalytiques |année= 2018|isbn=978-2-343-14532-7}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Radu Clit|titre=Du trauma à l'écriture. Un point de vue sur la création littéraire de Herta Müller|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions L'Harmattan|L'Harmattan]]|collection=Études psychanalytiques|année=2018|pages totales=226|isbn=978-2-343-14532-7|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=XFxdDwAAQBAJ&printsec=frontcover}}


=== Articles connexes ===
=== Articles connexes ===
* [[Littérature de langue allemande # Littérature de la RDA]]
* [[Littérature de langue allemande#Littérature de la RDA]]
* [[Littérature roumaine]]
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Herta Müller
Description de cette image, également commentée ci-après
Herta Müller en 2012.
Naissance (70 ans)
Nițchidorf (Roumanie)
Activité principale
Distinctions
Auteur
Langue d’écriture allemand, roumain
Mouvement Weltliteratur
Genres

Herta Müller (née le à Nițchidorf) est une romancière gérmano-roumaine, douzième femme lauréate du prix Nobel de littérature en 2009. Allemande du Banat, née à Nițchidorf/Nitzkydorf, alors village germanophone du județ de Timiș, dans la région de Timișoara, elle a émigré en Allemagne de l'Ouest en 1987, fuyant la dictature de Nicolae Ceaușescu. Ses œuvres, marquées par une extraordinaire force poétique et un langage d'une précision sèche, évoquent souvent la violence contre les plus faibles, l'injustice, la peur d'être surveillé et la terreur de la dictature. Ses deux premiers livres (Niederungen et Drückender Tango), parus à Bucarest avant la chute du régime, ont été censurés. En Allemagne, Müller est considérée comme faisant partie de la Weltliteratur ou World literature en anglais (« la littérature mondiale »)[1].

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et études[modifier | modifier le code]

Herta Müller est née dans une famille de Souabes du Banat, une des minorités allemandes de Roumanie[2]. Cette zone géographique est située au sud-ouest de la Roumanie et fut occupée par les Ottomans avant d'être colonisée et germanisée par l'Empire des Habsbourg au XVIIIe siècle et d'être finalement rattachée à l'État roumain à la suite du démantèlement de l'Autriche-Hongrie[2]. Son grand-père est un riche fermier et homme d'affaires exproprié par le régime communiste d'après-guerre. Comme de nombreux Roumains germanophones, sa mère est déportée en URSS en 1945 et y passe cinq années dans un camp de travaux forcés du Goulag[3]. Son père, ancien soldat de la Waffen-SS (10e Panzerdivision SS Frundsberg), gagne sa vie comme chauffeur de camion[3].

Après ses études secondaires, Müller suit un cursus dans les lettres allemandes et roumaines à l'université de Timișoara.

Carrière professionnelle en Roumanie[modifier | modifier le code]

À partir de 1976, elle travaille comme traductrice dans une usine de machines, mais est licenciée en 1979 après son refus de coopérer avec la Securitate, la police secrète roumaine. Son domicile est mis sur écoute[4]. Elle gagne alors sa vie comme enseignante temporaire dans des centres d'études parmi lesquels le lycée germanophone Nikolaus Lenau de Timișoara et des écoles maternelles prodiguant des cours privés en allemand. Dans les années 1970, elle est proche de l'Aktionsgruppe Banat (ro), un groupe d'intellectuels roumains d'origine allemande, surveillé de près par la Securitate. Elle fait aussi partie du cénacle littéraire (Literaturkreis) Adam Müller-Guttenbrunn, affilié à l'Association des écrivains de Timișoara (Asociația Scriitorilor din Timișoara). Müller évoque la difficulté d'appartenir à une minorité linguistique et souligne la situation précaire des écrivains roumains de langue allemande : « La langue de l’écriture, le haut allemand, coexistait avec le dialecte, le souabe du Banat, et la langue véhiculaire, le roumain. À cela s’ajoutait la langue de bois du régime qui avait détourné le langage à son profit. D'où notre vigilance pour éviter les mots ou les concepts violés ou souillés par le politique. Ils renvoyaient à une réalité qui n’était pas la nôtre. »[4].

Son premier livre, Dépressions (Niederungen) est publié en 1982, mais est censuré, comme tous ses autres ouvrages parus en Roumanie avant la chute du régime communiste. Il est édité dans son intégralité en Allemagne de l'Ouest, deux ans plus tard, peu de temps après la publication de sa deuxième œuvre en Roumanie[3]. La réaction des autorités communistes est sévère : Herta Müller se voit interdire de faire paraître des livres sur le sol roumain[3].

Installation en Allemagne et succès international[modifier | modifier le code]

Sous la pression de l'Union des écrivains ouest-allemands et du PEN club, les autorités autorisent Herta Müller et son mari, l'écrivain Richard Wagner, à partir vivre en République fédérale d'Allemagne en 1987[5]. Les années suivantes, elle obtient plusieurs postes d'enseignante, comme écrivain « en résidence », dans des universités allemandes et étrangères.

Herta Müller est membre jusqu'à sa démission en 1997, du PEN club d'Allemagne. Depuis 1995, elle est membre de l'Académie allemande pour la langue et la littérature.

En 2005, elle est invitée comme professeur à la chaire « Heiner Müller » de l'université libre de Berlin, où elle vit aujourd'hui. Au cours de la même année, elle publie son premier livre écrit en roumain (le volume de poésie-collage Este sau nu este Ion, Iași : Polirom).

En 2009, son roman Atemschaukel, publié grâce à une bourse[6] de la Fondation Robert Bosch, est nommé pour le prix du livre allemand et atteint la finale des six meilleurs romans[7].

Le , elle reçoit le prix Nobel de littérature[8] pour l'ensemble de son œuvre « qui, avec la concentration de la poésie et l'objectivité de la prose, dépeint les paysages de l'abandon »[9]. Dix ans après Günter Grass et cinq ans après Elfriede Jelinek, elle devient le troisième auteur de langue allemande distingué à Stockholm sur une décennie[10].

Prises de position[modifier | modifier le code]

Herta Müller est connue en Allemagne pour des prises de positions qui s'écartent de la ligne majoritaire de l'opinion publique et de l'intelligentsia[10]. Elle ne condamne pas l'intervention américaine en Irak en 2003 et rappelle à quel point son pays natal, qui a souffert de la dictature, aurait aimé être libéré par le « monde libre »[10].

En 2008 a eu lieu un débat de politique intérieure concernant la participation de l'historien Sorin Antohi (en) et du germaniste Andrei Corbea Hoișie (ro) à une réunion de l'Institut culturel roumain de Berlin du , car tous deux furent informateurs de la Securitate.

Müller critique l'invitation dans une lettre ouverte[11]. Dans le cadre de cette polémique, l'historien, philosophe et homme de lettres Carl Gibson (de), lui aussi natif du Banat, lui reproche, dans son livre Symphonie der Freiheit (Symphonie de la liberté), sa loyauté passée envers le régime de Ceaușescu[12].

Dans un article paru dans l'hebdomadaire Die Zeit le et intitulé « La Securitate est toujours en service », Müller accuse l’État roumain d'être toujours sous l'emprise des méthodes du régime communiste. Elle décrit à quelles mesures « pour le compromis et l'isolement » elle fut soumise par les services secrets dont elle subirait la pression encore aujourd'hui. Les dossiers de la Securitate indiquent comment sa critique infatigable vis-à-vis de la dictature de Ceaușescu devait être rendue peu digne de foi par des mesures visant à la calomnier.

Ainsi, des lettres, montées de toutes pièces par la police secrète, ont été envoyées à des stations de radio allemandes afin de la compromettre en véhiculant des fausses preuves sur son rôle d'agent de la Securitate. En outre, plusieurs autres personnes appartenant à la minorité souabe du Banat, auraient été présentées à tort comme des collaborateurs informels de la police secrète[13].

En , elle rejoint l'artiste Ai Weiwei pour exprimer son mécontentement face au choix de l'écrivain chinois Mo Yan pour le Nobel qu'elle juge être une « honte », une catastrophe » et « une claque pour tous ceux qui travaillent au respect de la démocratie et les droits de l’homme » ; Mo étant considéré comme trop servile vis-à-vis des autorités de Pékin[14],[15].

En 2016, au côté du chef d'orchestre Daniel Barenboim, elle fait partie des 70 intellectuels et artistes signataires d'une lettre de soutien à la politique de la chancelière Angela Merkel en faveur de l'accueil des réfugiés en Europe[16].

Herta Müller dédicaçant un ouvrage en .

Œuvre[modifier | modifier le code]

L'œuvre de Herta Müller, qui comprend une vingtaine de romans et récits, est classée en Allemagne dans la Weltliteratur (world literature) pour son régionalisme à vocation universelle : le milieu rural roumain, la référence historique à Nicolae Ceaușescu et l'évocation des minorités de langue allemande forment une peinture de mœurs et de caractères transfrontalière, polyglotte et multiculturelle[17]. Seuls six titres ont été, pour le moment, traduits en français ; Müller étant presque inconnue en France avant l'attribution du prix Nobel[10],[18].

Ses livres se consacrent à l’histoire de la Roumanie sous le règne du Conducător. Ils évoquent les vexations, les persécutions, les humiliations, la privation de la langue d'origine et les expulsions dont sont victimes, à partir de 1945, les populations germanophones d'Europe de l'Est, délogées et martyrisées[17]. Ce pan sombre de l'histoire européenne est encore peu relayé par les ouvrages spécialisés, les historiens et la presse en dehors de l'Allemagne[17]. Müller s'axe entièrement sur la dénonciation des horreurs silencieuses et de l'oppression quotidienne sous la dictature[18]. De manière métaphorique ou détournée, ses ouvrages rendent tous compte de l'aliénation de l'individu et de sa capitulation face à une société liberticide[19].

Son œuvre est, en ce sens, caractérisée par une logique mémorielle et une esthétique de la résistance : la littérature devient un outil politique et une arme contre l'oubli[18]. Dépressions (Niederungen, 1982), rassemble plusieurs nouvelles à tonalité autobiographique et évoque la vie pénible de paysans du Banat[17]. Drückender Tango (1984) fustige l'intolérance, la violence et la corruption d'un village dont la minorité allemande ne dissimule pas sa proximité avec l'idéologie fasciste[10]. L'Homme est un grand faisan sur terre (Der Mensch ist ein grosser Fasan auf der Welt, 1987) évoque l'angoisse et le déchirement de la famille d'un meunier qui souhaite quitter sa terre et devient la victime des tracasseries de l'administration, des menaces de la police et de la malhonnêteté des passeurs[17],[5]. Dans Reisende auf einem Bein (1989), Müller raconte son installation en Allemagne qui fut à la fois une rupture douloureuse avec son pays natal et un retour aux sources, lui permettant de pratiquer sa langue maternelle en toute liberté[18].

Le renard était déjà le chasseur (Der Fuchs war damals schon der Jäger, 1992) dépeint la terreur d'une enseignante qui comprend que son appartement est visité par des agents de la Securitate[17]. Herztier (Animal du cœur, 1993) narre le destin brisé de quatre étudiants roumains, dans les années 1980, à la recherche d’eux-mêmes et de leur pays dévasté par le régime communiste[20].

Lecture, La Bascule du souffle, Potsdam, .

La Convocation (Heute wär ich mir lieber nicht begegnet, 1997) décrit la vie d’une femme bouleversée par les interrogatoires de la police d’État[17]. Dans Atemschaukel (La Bascule du souffle, 2009), l'auteur retrace le parcours d'un jeune homme dans un goulag soviétique, exemplaire du sort des Allemands de Transylvanie après la Seconde Guerre mondiale. La faim, ressentie par le protagoniste, change sa perception du réel[21],[22]. La romancière dit s’être inspirée de l'expérience du poète Oskar Pastior, décédé en 2006 et lauréat du prix Büchner, dont elle avait consigné les souvenirs dans plusieurs cahiers[21]. Néanmoins, l'histoire personnelle de sa mère a également nourri son inspiration[3].

Style[modifier | modifier le code]

Le style de Müller est loué par la critique pour sa concision et sa puissance[18],[20]. Son écriture relève d'une blessure intime et sociale qu'elle tente de réparer à travers une mosaïque linguistique complexe et le désir d'accéder à l'universel[2],[23]. Sa syntaxe est très découpée, voire hachée et ses phrases vont à l'essentiel[19]. Les jurés du prix Nobel saluent la force d'évocation de sa prose, emplie d'« images ciselées »[3],[18]. Le comité de Stockholm souligne par ailleurs son habileté à donner « une image de la vie quotidienne dans une dictature pétrifiée » et à peindre « le paysage des dépossédés »[3],[18]. En effet, ses récits mettent en scène des éléments composites (animaux, paysages, végétaux, fruits) qui forment un tableau fantasmagorique et angoissant du quotidien totalitaire[21]. L'écrivain retranscrit autant la pauvreté extérieure que l'univers mental des protagonistes, ravagés par l'effroi, la soumission, l'impuissance et l'abandon[22].

Müller abolit souvent la frontière entre réalité concrète et imaginaire, prosaïque et fantastique[19] : les éléments du quotidien sont détournés puis réagencés dans une forme de surréalisme accessible et fragmentaire[23]. Les personnages ressemblent à des spectres et les objets banals, minutieusement détaillés, finissent par s'animer[22],[24]. Arbeitstag (Journée de travail), dernière nouvelle du recueil Niederungen, dépeint un univers familier où toutes les habitudes sont inversées : les individus se sèchent avec un peigne, se coiffent avec une brosse à dents, boivent le pain, mangent le thé, montent à l'étage pour accéder à la rue et disent « au revoir » une fois arrivés au bureau[19]. L'auteur met ainsi en exergue un monde apparemment banal mais totalement détraqué et menaçant où seul l'absurde tient lieu d’explication[19].

Les nouvelles de Niederungen, rédigées à la première personne et dans un souci d'épure, mettent de côté toute forme de progression dramatique au profit d'impressions, de situations et de descriptions des mœurs rurales, liées par un temps cyclique, comme suspendu ou bloqué (évocation du réveil qui sonne ou non, des « samedi » ou « samedi matin », de l'heure répétée : « cinq » ou « huit heures »)[19],[25],[26]. L'autre fil directeur tourne autour des thèmes de l'humiliation ordinaire, la violence symbolique et physique et la désillusion d'une jeune fille face au monde des adultes, alcoolisé et brutal[25]. L'auteur cherche par ailleurs à créer une tension constante et à soigner la picturalité de ses notations visuelles dans lesquelles la couleur joue un rôle central[19].

Müller procède par collages[19]. Atemschaukel est cité comme représentatif de sa technique narrative[27] qui morcelle l'intrigue et scinde la fiction en divers chapitres courts, entre souvenirs, méditations, observations, portraits et anecdotes[21]. L'Homme est un gros faisan sur terre se compose, quant à lui, d'une série de textes très brefs[17]. Par le biais d'une prose sèche et intense, le dialogue disparaît et le réalisme se confond avec la poésie[17]. L'écriture de Müller réfute tout embellissement symbolique et onirique[21]. Sa langue, comprimée et rugueuse, emprunte des formules aux poèmes, aux dialectes et au langage populaire afin de restituer des situations parfois difficilement lisibles ou supportables[18]. Ses phrases révèlent souvent un sens caché qui rejette les mots et leur signification dévoyés ou souillés par le pouvoir central[21]. Ainsi, Müller tente de retrouver une innocence, voire une certaine pureté d'expression[21].

Influences[modifier | modifier le code]

Herta Müller à la Foire du livre de Leipzig en 2007.

Müller n'a jamais évoqué publiquement les personnes et les ouvrages littéraires qui l'ont influencée, attribuant les racines qu'on lui prêtait communément à d'autres sources. La plus importante d'entre elles serait ses études universitaires en littératures allemande et roumaine. Bien qu'elle ne l'ait jamais précisé, l'empreinte globale de la littérature d'Europe centrale, de l'absurde et de Franz Kafka sur ses travaux est indéniable[28]. La critique allemande rapproche notamment sa démarche littéraire de celle de Joseph Roth, Thomas Bernhard, Paul Celan et Franz Innerhofer[29],[30].

En comparant l'allemand et le roumain, la romancière relève qu'un concept simple, comme une étoile filante peut être interprétée de façon différente : « Nous ne parlons pas seulement de mots différents, mais aussi de différents mondes. [Par exemple] les Roumains voient une étoile filante et disent que quelqu'un est décédé, alors que les Allemands font un vœu lorsqu'ils voient une étoile filante. ». Müller poursuit en disant que la musique folklorique roumaine occupe une place particulière dans son cœur. « Quand j'ai entendu Maria Tănase, elle sonnait incroyablement pour moi, c'est alors la première fois que j'ai vraiment ressenti ce que signifie le folklore. La musique folklorique roumaine est liée à l'existence d'une façon très significative. »[31].

L'autre influence majeure exercée sur Müller viendrait de son époux, Richard Wagner. Leurs vies ont de nombreux points communs : tous deux ont grandi au sein de la minorité germanophone de Roumanie et ont entrepris des études littéraires bilingues (allemand et roumain) à l'université de Timișoara. Après leurs études, ils travaillent comme enseignants de langue allemande et deviennent membres de l'Aktionsgruppe Banat (ro), une société littéraire qui se bat pour la liberté d'expression et le cheminement du pays vers la démocratie. Comme son épouse, Wagner est un romancier et un essayiste publié et reconnu.

L'implication de Müller dans l'Aktionsgruppe Banat aurait également nourri la hardiesse et la fougue avec lesquelles elle écrit en dépit des menaces, des intimidations et des pressions de la police secrète roumaine. Si ses ouvrages sont avant tout des fictions, ils relatent une série d'événements réels ou des anecdotes de la vie quotidienne. Müller met assez souvent en scène des personnages existants. Ainsi, l'un des protagonistes de son roman de 1994, Herztier[32], s'inspire d'un ami proche de l'Aktionsgruppe Banat. Ce roman a été écrit après le décès de deux amis. L'auteur soupçonne d'ailleurs fortement la police secrète d'être impliquée dans cette double mort[33].

Œuvres[modifier | modifier le code]

Adaptation cinématographique[modifier | modifier le code]

Un seul roman de Herta Müller a été porté à l'écran :

Récompenses[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (de) Kitsch oder Weltliteratur?, Michael Naumann dans Die Zeit
  2. a b et c Laurent Margantin, « Entretien avec Nicole Bary, traductrice et éditrice de Herta Müller », Œuvres ouvertes,‎ (lire en ligne).
  3. a b c d e f et g Bio-bibliographie de Herta Müller par l'Académie suédoise sur le site des prix Nobel, consulté le .
  4. a et b Hubert Artus, « Herta Müller, prix Nobel de littérature », Les Inrocks,‎ (lire en ligne).
  5. a et b « L'étrange parcours de Herta Müller », Le Nouvel Observateur,‎ (lire en ligne).
  6. [1] Grenzgänger-Programm der Robert Bosch Stiftung
  7. dpa: Sechs Romane für Deutschen Buchpreis nominiert Die Zeit, .
  8. Prix Nobel de littérature sur le site officiel des Nobel
  9. « Le Nobel de littérature remis à Herta Müller », sur Le Figaro, .
  10. a b c d et e Grégoire Leménager, « Le Nobel 2009 s'appelle Herta Müller », Le Nouvel Observateur,‎ (lire en ligne).
  11. Spitzel in der Sommerakademie, Frankfurter Rundschau (fr-online.de), 23. Juli 2008. Vgl. „Spitzelaffäre“ in Berlin, Siebenbürger Zeitung (Siebenbuerger.de), .
  12. Interview mit Carl Gibson auf Radio Transylvania International, , Zugriff September 2008; u. Carl Gibson aus Bad Mergentheim: Symphonie der Freiheit beleuchtet die Menschenrechtsbewegung in Rumänien – Der Zeitzeuge legt Buch mit 400 Seiten vor, Fränkische Nachrichten (fnweb.de), Bad Mergentheim
  13. Die Zeit: Die Securitate ist noch im Dienst. .
  14. « Mo Yan mérite-t-il le prix Nobel ? », Le Magazine littéraire,‎ (lire en ligne).
  15. Nicolas Guégan, « Mo Yan prix Nobel? "Une catastrophe" et "une honte" selon Herta Müller », Le Nouvel Observateur,‎ (lire en ligne).
  16. Sabine Syfuss-Arnaud, « Crise des migrants: Angela Merkel totalement isolée en Europe », Challenge,‎ (lire en ligne).
  17. a b c d e f g h et i Herta Müller sur l'encyclopédie Larousse, consulté le .
  18. a b c d e f g et h Pierre Deshusses, « Herta Müller, Prix Nobel de littérature, l'écriture contre l'oubli », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  19. a b c d e f g et h Georgia Makhlouf, « Herta Müller : écrire au scalpel », L'Orient-Le Jour,‎ (lire en ligne).
  20. a et b « Animal du cœur, de Herta Müller », Le Magazine littéraire,‎ (lire en ligne).
  21. a b c d e f et g « La Bascule du souffle, de Herta Müller », Le Magazine littéraire,‎ (lire en ligne).
  22. a b et c Raphaëlle Rérolle, « "La Bascule du souffle", d'Herta Müller : les objets animés d'Herta Müller », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  23. a et b « autour d'Herta Müller / Lautréamont », France Culture,‎ (lire en ligne).
  24. « La bascule du souffle », France Culture,‎ (lire en ligne).
  25. a et b Guylaine Massoutre, « Chronique d’un monde à l’envers, le premier roman de Herta Müller, Nobel 2009, est enfin traduit », Le Devoir,‎ (lire en ligne).
  26. Stéphane Maffli, « Quand Herta Müller était une petite fille », Le Temps,‎ (lire en ligne).
  27. Par Le Magazine littéraire de notamment.
  28. (en) Julian Evans, « Herta Müller has an eye on absurdity », The Guardian,‎ (lire en ligne).
  29. (de) « Rumäniendeutsche Herta Müller: Nobelpreis für das amputierte Leben », sur Welt Online, .
  30. Andrea Köhler : Der Schneezackensaum der Sätze. Herta Müllers poetische Erweiterung der Wahrnehmung dans Neue Zürcher Zeitung, , Literatur und Kunst, page 66.
  31. « http://www.infloox.com/influence?id=94fcba54 »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  32. C. Till R. Kuhnle: La Résistance des monades : Herztier d'Herta Müller, ds. Bernard Bach, Bernard (dir.): Les Littératures minoritaires de langue allemande après 1945 (= Germanica XVII), Université de Lille III 1995, 25-38
  33. http://www.infloox.com/influence?id=6b8a8351 Herta Müller and the Aktionsgruppe Banat
  34. Prix attribué conjointement à Gerhardt Csejka, Helmuth Frauendorfer, Klaus Hensel, Johann Lippet, Werner Söllner, William Totok et Richard Wagner. À l'exception de Johann Lippet qui naquit à Wels en Autriche et vécut en Transylvanie à partir de 5 ans, tous ces auteurs sont d'origine transylvaine et ils firent partie soit de l'Aktionsgruppe Banat, soit de l'Adam Müller-Guttenbrunn Literaturkreis.
  35. « Le prix Nobel décerné à l'Allemande d'origine roumaine Herta Müller », sur france24.com, .
  36. Köhler würdigt Herta Müller als «Unbeugsame», in Die Zeit du , consulté le .
  37. Lutina Campana, « Macédoine : Prix mondial de l'Humanisme. L'ONG CNRJ mise à l'honneur », sur cnrj.org, .

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Nicole Bary, « Herta Müller, une écriture entre deux cultures », Études, t. 412, no 3,‎ , p. 365-372.
  • Nicole Bary, « Herta Müller (1953- ) », dans Encyclopædia Universalis: [2]; également à « La fin d'une époque » du chapitre « Allemandes (Langues et littératures) », écrit par Nicole Bary, Claude David, Claude Lecouteux, Étienne Mazingue, Claude Porcell.
  • Radu Clit, Du trauma à l'écriture. Un point de vue sur la création littéraire de Herta Müller, Paris, L'Harmattan, coll. « Études psychanalytiques », , 226 p. (ISBN 978-2-343-14532-7, lire en ligne)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]