« Boche » : différence entre les versions

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Contenu supprimé Contenu ajouté
Aucun résumé des modifications
Balises : Modification par mobile Modification par le web mobile
Arnaud.Serander (discuter | contributions)
mAucun résumé des modifications
 
(22 versions intermédiaires par 17 utilisateurs non affichées)
Ligne 1 : Ligne 1 :
[[Fichier:Lulustein Saarbruecken 1919b.jpg|thumb|Carte postale en franchise militaire de 1919 {{Citation|Un gros bonjour de Bochie}} (Allemagne).]]
[[Fichier:Lulustein Saarbruecken 1919b.jpg|thumb|Carte postale en franchise militaire de 1919 {{Citation|Un gros bonjour de Bochie}} (Allemagne).]]
'''Boche''' est un terme péjoratif pour désigner un soldat [[Allemagne|allemand]] ou une personne d'origine allemande, mot qui a été utilisé pendant la [[guerre franco-allemande de 1870]] puis plus largement par les [[France|Français]], les [[Belgique|Belges]] et les [[Luxembourg|Luxembourgeois]] de la [[Première Guerre mondiale]] jusque bien après la [[Seconde Guerre mondiale]]. Ce mot toujours encore employé et plutôt familier, peut être considéré comme injurieux, en dehors d'un texte [[Histoire|historique]].
'''Boche''' est un terme péjoratif pour désigner un soldat [[Allemagne|allemand]] ou une personne d'origine allemande, mot qui a été utilisé pendant la [[guerre franco-prussienne de 1870]] puis plus largement par les [[France|Français]], les [[Belgique|Belges]] et les [[Luxembourg|Luxembourgeois]] de la [[Première Guerre mondiale]] jusque bien après la [[Seconde Guerre mondiale]]. Son usage, devenu rare et plutôt familier, peut être considéré comme injurieux, en dehors d'un contexte [[Histoire|historique]].


== Origine ==
== Origine ==
Le mot « boche » est une [[Aphérèse (linguistique)|aphérèse]] de ''alboche'' qui serait formé de « al » pour ''allemand'' et de « -boche », une suffixation argotique venue peut-être de ''bosse'', « tête » (occitan ''caboça''<ref name="Alibert">Louis Alibert, ''Dictionnaire occitan-français'', Toulouse, IEO, 1966-1977.</ref>), que l’on retrouve dans ''caboche'' (''cap'', « tête »), ''[[Rigolboche]]'', ''Alboche'' (Allemand), ''Italboche'', et des expressions comme {{Citation|au truc, si l'Alboche est paquet}} ([[1860]])<ref>Mentionné dans un ouvrage de Hogier-Grison en 1860.</ref>, qui signifie {{Citation|Au jeu, si l'Allemand est grossier}}<ref>{{Lien web |url=http://www.cnrtl.fr/definition/alboche |titre=ALBOCHE, adj. et subst. |site=cnrtl.fr }}.</ref>, ou « têtes de boche », utilisée en [[Lorraine]] et en [[Alsace]] et citée dans le ''Dictionnaire de l'argot moderne'' de Rigaud ([[1881]]).
Le mot « Boches » est une [[Aphérèse (linguistique)|aphérèse]] de ''Alboche'' qui serait formé de « al » pour ''Allemand'' et de « -boche », une suffixation argotique venue peut-être de ''bosse'', « tête » (occitan ''caboça''<ref name="Alibert">Louis Alibert, ''Dictionnaire occitan-français'', Toulouse, IEO, 1966-1977.</ref>), que l’on retrouve dans ''caboche'' (''cap'', « tête »), ''[[Rigolboche]]'', ''Alboche'' (Allemand), ''Italboche'', et des expressions comme {{Citation|Au truc, si l'Alboche est paquet}} ([[1860]]))<ref>Mentionné dans un ouvrage de Hogier-Grison en 1860).</ref>, qui signifie {{Citation|Au jeu, si l'Allemand est grossier<ref>{{Lien web |url=http://www.cnrtl.fr/definition/alboche |titre=Alboche, adj. et subst. |site=cnrtl.fr }}.</ref>}}, ou « Têtes de Boche », utilisée en [[Lorraine]] et en [[Alsace]] et citée dans le ''Dictionnaire de l'argot moderne'' de Rigaud ([[1881]]).


« Tête de boche » signifiait autrefois « tête de bois »<ref>[[Gyp]],''Souvenirs d'une petite fille'', tome 1, 1927, {{p.}}128.</ref>. ''Bocho''<ref>Frédéric Mistral, ''Trésor du Félibrige''.</ref>, en provençal (occitan ''bòcha''<ref name="Alibert" />), désigne une boule en bois. Le ''Dictionnaire de l’argot des typographes'' d’Eugène Boutmy (1883) comporte l’entrée ''Boche (tête de)'' avec la définition suivante : {{citation|s. f. Tête de bois. Ce terme est spécialement appliqué aux Belges et aux Allemands parce qu’ils comprennent assez difficilement, dit-on, les explications des metteurs en pages, soit à cause d’un manque de vivacité intellectuelle, soit à cause de la connaissance imparfaite qu’ils ont de la langue française et de leur impardonnable ignorance de l’argot typographique<ref>[https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_de_l%27argot_des_typographes_1883 Wikisource].</ref>.}}
« Tête de boche » signifiait autrefois « tête de bois »<ref>[[Gyp]], ''Souvenirs d'une petite fille'', tome 1, 1927, {{p.}}128.</ref>. ''Bocho''<ref>Frédéric Mistral, ''Trésor du Félibrige''.</ref>, en provençal (occitan ''bòcha''<ref name="Alibert" />), désigne une boule en bois. Le ''Dictionnaire de l’argot des typographes'' d’Eugène Boutmy (1883) comporte l’entrée ''Boche (tête de)'' avec la définition suivante : {{citation|s. f. Tête de bois. Ce terme est spécialement appliqué aux Belges et aux Allemands parce qu’ils comprennent assez difficilement, dit-on, les explications des metteurs en pages, soit à cause d’un manque de vivacité intellectuelle, soit à cause de la connaissance imparfaite qu’ils ont de la langue française et de leur impardonnable ignorance de l’argot typographique<ref>[https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_de_l%27argot_des_typographes_1883 Wikisource].</ref>.}}


Ceci est à rapprocher de « bosch », bois en bas [[allemand]] et [[néerlandais]] : « [[Bois-le-Duc|'s-Hertogenbosch]] » aux [[Pays-Bas]], se traduit en français par « [[Bois-le-Duc]] ». Donc, tête de « bosch » = tête de bois, et l'expression vient peut-être des Allemands eux-mêmes qui l'auraient employée en [[1870]].
Le mot est à rapprocher de ''bosch'', « bois » en bas [[allemand]] et [[néerlandais]] : [[Bois-le-Duc|'s-Hertogenbosch]] (une ville des [[Pays-Bas]]) se traduit en français par [[Bois-le-Duc]]. Donc, tête de « bosch » = tête de bois, et l'expression vient peut-être des Allemands eux-mêmes qui l'auraient employée en [[1870]].
Dans les ''Pieds nickelés s’en vont en guerre'', [[Louis Forton]] les fait abondamment parler des « Alboches ». Le mot « Alboche » se trouve à deux reprises dans les poèmes en [[contrerime]]s de [[Paul-Jean Toulet]], publiés à titre posthume en [[1921 en littérature|1921]]{{sfn|Paul-Jean Toulet|1921|p=25}}{{,}}{{sfn|Paul-Jean Toulet|1921|p=31}}.
Dans les ''Pieds nickelés s’en vont en guerre'', [[Louis Forton]] les fait abondamment parler des « Alboches ». Le mot « Alboche » se trouve à deux reprises dans les poèmes en [[contrerime]]s de [[Paul-Jean Toulet]], publiés à titre posthume en [[1921 en littérature|1921]]{{sfn|Paul-Jean Toulet|1921|p=25}}{{,}}{{sfn|Paul-Jean Toulet|1921|p=31}}.


Pour Robert Christophe, écrivain<ref>{{Ouvrage|langue=français|auteur1=Marcelle et Robert Christophe|titre=Une famille dans la guerre (1940-1945)|passage=53-54|lieu=Paris|éditeur=[[L'Harmattan]]|date=1994|pages totales=375|isbn=2-7384-3209-3|consulté le=30 octobre 2021}}.</ref> et officier détenu dans un [[Oflag]] durant la Seconde Guerre mondiale, le sobriquet provient d'une contraction et allitération de l'expression ''Wir sind alle Burschen'' (« Nous sommes tous des camarades »), prononcée par les troupes allemandes lors de la relève, à la suite d'un accord entre Bismarck et Thiers en 1871 menant à leur retrait de 36 des 43 départements français occupés durant la guerre de 1870. L'expression ''Alle Burschen'' devient « Albourches », puis « Albouches », « Alboches » et enfin « Boches » dans le parler des soldats français, puis de la population en général, et acquiert une connotation négative.
En [[Suisse romande]], l'expression ''Suisse-Alboche'' n'est pas utilisée, les expressions suivantes sont communément utilisées mais n'ont pas de sens péjoratif mais plutôt distinctif (le fait de cibler une personne de langue allemande) : ''Staufifes'', ''Staubirnes'', ''Köbis'', ''Totos'', ''Bourbines''. Exemple : « les Staufifes » ou « les suisses-totos »


En [[Suisse romande]], l'expression ''Suisse-Alboche'' n'est pas utilisée, les expressions suivantes sont communément utilisées mais n'ont pas de sens péjoratif mais plutôt distinctif (le fait de cibler une personne de langue allemande) : ''Staufifes'', ''Staubirnes'', ''Köbis'', ''Totos'', ''Bourbines''. Exemple : « les Staufifes » ou « les Suisses-totos ».
==Usage==

Le mot ''boche'' commence à se répandre dans l'[[argot]] militaire à partir de la [[guerre franco-allemande de 1870]]. Il est surtout popularisé par les [[poilu]]s dans les tranchées de la [[Première Guerre mondiale|Grande Guerre]], sans être systématiquement empreint d'animosité<ref>{{Lien web |langue= |format= |auteur1=Collectif de recherche international et de débat sur la Guerre de 1914-1918 |url=http://crid1418.org/espace_pedagogique/lexique/lexique_ab.htm#30 |titre=Lexique des termes employés en 1914-1918 (A-B) |sous-titre=Boche, Bochie |site=crid1418.org |archive-url=http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://crid1418.org/espace_pedagogique/lexique/lexique_ab.htm#30 |archive-date=23/02/2011}}.</ref>, avant de passer dans le langage commun.
== Usage ==
Le mot « Boche » commence à se répandre dans l'[[argot]] militaire à partir de la [[guerre franco-allemande de 1870]]. Il est surtout popularisé par les [[poilu]]s dans les tranchées de la [[Première Guerre mondiale|Grande Guerre]], sans être systématiquement empreint d'animosité<ref>{{Lien web |auteur1=Collectif de recherche international et de débat sur la Guerre de 1914-1918 |url=http://crid1418.org/espace_pedagogique/lexique/lexique_ab.htm#30 |titre=Lexique des termes employés en 1914-1918 (A-B) |sous-titre=Boche, Bochie |site=crid1418.org |archive-url=http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://crid1418.org/espace_pedagogique/lexique/lexique_ab.htm#30 |archive-date=23/02/2011}}.</ref>, avant de passer dans le langage commun.

Le terme semble avoir été inconnu dans la bonne société jusqu’à la première guerre mondiale puisqu’un Alsacien cultivé et francophile comme [[Charles Spindler]] peut écrire dans son journal à la date du 6 décembre 1914 : « Court et gros, l’œil spirituel et malicieux, le notaire offre le type de l’habitué de la Taverne. Il est plein d’anecdotes contre les Boches, car c’est, parait-il, le surnom qu’on donne maintenant en France aux Allemands<ref>Charles Spindler, ''L'Alsace pendant la Guerre'', Librairie Treuttel et Würtz, Strasbourg, 1925, {{p.|135}}.</ref>. »


Les Boches (Allemands) habitent en Bochie (Allemagne) ou en sont originaires<ref>{{Lien web |url=http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |titre=Bochie |site=www.languefrancaise.net |archive-url=https://web.archive.org/web/20131224084103/http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |archive-date=24 Dec 2013 <!-- moins bon rendu : |archive-url=http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |archive-date=10/11/2012-->}}.</ref>.
Les Boches (Allemands) habitent en Bochie (Allemagne) ou en sont originaires<ref>{{Lien web |url=http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |titre=Bochie |site=www.languefrancaise.net |archive-url=https://web.archive.org/web/20131224084103/http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |archive-date=24 Dec 2013 <!-- moins bon rendu : |archive-url=http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://www.languefrancaise.net/bob/detail.php?id=4891 |archive-date=10/11/2012-->}}.</ref>.


Il reste en usage durant la [[Seconde Guerre mondiale]], mais il est alors concurrencé par d'autres expressions péjoratives à l'encontre des Allemands, comme « Fritz », « [[Chleu (argot)|Chleuhs]] », « Fridolins », « Frisés », « Vert-de-gris », « Doryphores » et « Teutons »<ref>{{Lien web |format=pdf |auteur1=François Cavanna |lien auteur1=François Cavanna |url=https://web.archive.org/web/20150415010412/http://www.yellobook.cm/admin/uploads/Les_Russkoffs_-_CavannaFrancois.pdf |titre=Les Russkoffs |date=1979 |page=488 |archive-url=https://web.archive.org/web/20150415010412/http://www.yellobook.cm/admin/uploads/Les_Russkoffs_-_CavannaFrancois.pdf |archive-date=15 Apr 2015}}.</ref>.
Il reste en usage durant la [[Seconde Guerre mondiale]], mais il est alors concurrencé par d'autres expressions péjoratives à l'encontre des [[Allemands]] et plus particulièrement des [[nazis]], comme « Fritz », « [[Chleu (argot)|Chleuhs]] », « Fridolins », « Frisés », « Vert-de-gris », « Doryphores » et « Teutons »<ref>{{Lien web |format=pdf |auteur1=François Cavanna |lien auteur1=François Cavanna |url=https://web.archive.org/web/20150415010412/http://www.yellobook.cm/admin/uploads/Les_Russkoffs_-_CavannaFrancois.pdf |titre=Les Russkoffs |date=1979 |page=488 |archive-url=https://web.archive.org/web/20150415010412/http://www.yellobook.cm/admin/uploads/Les_Russkoffs_-_CavannaFrancois.pdf |archive-date=15 Apr 2015}}.</ref>.


== Notes et références ==
== Notes et références ==
=== Sources ===
* [[Gaston Esnault]], ''Le Poilu tel qu'il se parle'', 1919
* [[Arte]], ''[[Karambolage]]'' : [http://www.arte.tv/fr/connaissance-decouverte/karambolage/Emission-05-Septembre-2004/568998,CmC=569004.html Le Mot, 5 septembre 2004]
* [http://www.languefrancaise.net/bob/liste.php?motsclef=allemand&submit=Gi!&moduless=siterech&exact=1 Sur ''languefrançaise.net'', argot du mot « allemand »]

=== Notes ===
{{Références|taille=30}}
{{Références|taille=30}}

== Sources ==
* [[Gaston Esnault]], ''Le Poilu tel qu'il se parle'', 1919
* [[Arte]], ''[[Karambolage]]'' : Les insultes, 19 octobre 2020 : https://www.arte.tv/fr/videos/091140-032-A/karambolage/
* [http://www.languefrancaise.net/bob/liste.php?motsclef=allemand&submit=Gi!&moduless=siterech&exact=1 Sur ''languefrançaise.net'', argot du mot « allemand »]


== Voir aussi ==
== Voir aussi ==
{{Autres projets| wiktionary = boche}}
{{Autres projets| wiktionary = boche}}

=== Articles connexes ===
* [[chleuh]], [[Rosbif (homonymie)|rosbif]], [[rital]] , [[moskal]], [[katsap]], [[khokhol]]

=== Bibliographie ===
=== Bibliographie ===
* {{Ouvrage|langue=fr|titre=Les mots des tranchées l'invention d'une langue de guerre, 1914-1919|prénom1=Odile|nom1=Roynette|lien auteur1=Odile Roynette|lieu=Paris|éditeur=A. Colin|collection=Le fait guerrier|année=2010|pages totales=286|isbn=978-2-200-35386-5|oclc=705709640}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Odile|nom1=Roynette|lien auteur1=Odile Roynette|titre=Les mots des tranchées l'invention d'une langue de guerre, 1914-1919|lieu=Paris|éditeur=[[Armand Colin|A. Colin]]|collection=Le fait guerrier|année=2010|pages totales=286|isbn=978-2-200-35386-5|oclc=705709640}}
* {{Ouvrage|langue=fr|titre=Argot, verlan et tchatches|prénom1=Pierre|nom1=Merle|lieu=Toulouse|éditeur=Milan|collection=Les essentiels|numéro dans collection=85|année=2006|pages totales=63|isbn=978-2-745-92084-3|oclc=420936395}}, {{p.|12}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Pierre|nom1=Merle|titre=Argot, verlan et tchatches|lieu=Toulouse|éditeur=Milan|collection=Les essentiels|numéro dans collection=85|année=2006|pages totales=63|isbn=978-2-7459-2084-3|oclc=420936395}}, {{p.|12}}
* {{Ouvrage|langue=fr|titre=Les [[Contrerime]]s|auteur1=[[Paul-Jean Toulet]]|lieu=Paris|éditeur=Gallimard|collection=Poésie|année=1921, réed. 1979|isbn=978-2-070-32183-4|id=Paul-Jean Toulet1921}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Paul-Jean Toulet]]|titre=Les [[Contrerime]]s|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Gallimard|Gallimard]]|collection=Poésie|année=1921, réed. 1979|isbn=978-2-07-032183-4|id=Paul-Jean Toulet1921}}


{{Portail|linguistique|Première Guerre mondiale|Allemagne|langue française et francophonie}}
{{Portail|linguistique|Première Guerre mondiale|Allemagne|langue française et francophonie}}

Dernière version du 14 avril 2024 à 10:53

Carte postale en franchise militaire de 1919 « Un gros bonjour de Bochie » (Allemagne).

Boche est un terme péjoratif pour désigner un soldat allemand ou une personne d'origine allemande, mot qui a été utilisé pendant la guerre franco-prussienne de 1870 puis plus largement par les Français, les Belges et les Luxembourgeois de la Première Guerre mondiale jusque bien après la Seconde Guerre mondiale. Son usage, devenu rare et plutôt familier, peut être considéré comme injurieux, en dehors d'un contexte historique.

Origine[modifier | modifier le code]

Le mot « Boches » est une aphérèse de Alboche qui serait formé de « al » pour Allemand et de « -boche », une suffixation argotique venue peut-être de bosse, « tête » (occitan caboça[1]), que l’on retrouve dans caboche (cap, « tête »), Rigolboche, Alboche (Allemand), Italboche, et des expressions comme « Au truc, si l'Alboche est paquet » (1860))[2], qui signifie « Au jeu, si l'Allemand est grossier[3] », ou « Têtes de Boche », utilisée en Lorraine et en Alsace et citée dans le Dictionnaire de l'argot moderne de Rigaud (1881).

« Tête de boche » signifiait autrefois « tête de bois »[4]. Bocho[5], en provençal (occitan bòcha[1]), désigne une boule en bois. Le Dictionnaire de l’argot des typographes d’Eugène Boutmy (1883) comporte l’entrée Boche (tête de) avec la définition suivante : « s. f. Tête de bois. Ce terme est spécialement appliqué aux Belges et aux Allemands parce qu’ils comprennent assez difficilement, dit-on, les explications des metteurs en pages, soit à cause d’un manque de vivacité intellectuelle, soit à cause de la connaissance imparfaite qu’ils ont de la langue française et de leur impardonnable ignorance de l’argot typographique[6]. »

Le mot est à rapprocher de bosch, « bois » en bas allemand et néerlandais : 's-Hertogenbosch (une ville des Pays-Bas) se traduit en français par Bois-le-Duc. Donc, tête de « bosch » = tête de bois, et l'expression vient peut-être des Allemands eux-mêmes qui l'auraient employée en 1870.

Dans les Pieds nickelés s’en vont en guerre, Louis Forton les fait abondamment parler des « Alboches ». Le mot « Alboche » se trouve à deux reprises dans les poèmes en contrerimes de Paul-Jean Toulet, publiés à titre posthume en 1921[7],[8].

Pour Robert Christophe, écrivain[9] et officier détenu dans un Oflag durant la Seconde Guerre mondiale, le sobriquet provient d'une contraction et allitération de l'expression Wir sind alle Burschen (« Nous sommes tous des camarades »), prononcée par les troupes allemandes lors de la relève, à la suite d'un accord entre Bismarck et Thiers en 1871 menant à leur retrait de 36 des 43 départements français occupés durant la guerre de 1870. L'expression Alle Burschen devient « Albourches », puis « Albouches », « Alboches » et enfin « Boches » dans le parler des soldats français, puis de la population en général, et acquiert une connotation négative.

En Suisse romande, l'expression Suisse-Alboche n'est pas utilisée, les expressions suivantes sont communément utilisées mais n'ont pas de sens péjoratif mais plutôt distinctif (le fait de cibler une personne de langue allemande) : Staufifes, Staubirnes, Köbis, Totos, Bourbines. Exemple : « les Staufifes » ou « les Suisses-totos ».

Usage[modifier | modifier le code]

Le mot « Boche » commence à se répandre dans l'argot militaire à partir de la guerre franco-allemande de 1870. Il est surtout popularisé par les poilus dans les tranchées de la Grande Guerre, sans être systématiquement empreint d'animosité[10], avant de passer dans le langage commun.

Le terme semble avoir été inconnu dans la bonne société jusqu’à la première guerre mondiale puisqu’un Alsacien cultivé et francophile comme Charles Spindler peut écrire dans son journal à la date du 6 décembre 1914 : « Court et gros, l’œil spirituel et malicieux, le notaire offre le type de l’habitué de la Taverne. Il est plein d’anecdotes contre les Boches, car c’est, parait-il, le surnom qu’on donne maintenant en France aux Allemands[11]. »

Les Boches (Allemands) habitent en Bochie (Allemagne) ou en sont originaires[12].

Il reste en usage durant la Seconde Guerre mondiale, mais il est alors concurrencé par d'autres expressions péjoratives à l'encontre des Allemands et plus particulièrement des nazis, comme « Fritz », « Chleuhs », « Fridolins », « Frisés », « Vert-de-gris », « Doryphores » et « Teutons »[13].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Louis Alibert, Dictionnaire occitan-français, Toulouse, IEO, 1966-1977.
  2. Mentionné dans un ouvrage de Hogier-Grison en 1860).
  3. « Alboche, adj. et subst. », sur cnrtl.fr.
  4. Gyp, Souvenirs d'une petite fille, tome 1, 1927, p. 128.
  5. Frédéric Mistral, Trésor du Félibrige.
  6. Wikisource.
  7. Paul-Jean Toulet 1921, p. 25.
  8. Paul-Jean Toulet 1921, p. 31.
  9. Marcelle et Robert Christophe, Une famille dans la guerre (1940-1945), Paris, L'Harmattan, , 375 p. (ISBN 2-7384-3209-3), p. 53-54.
  10. Collectif de recherche international et de débat sur la Guerre de 1914-1918, « Lexique des termes employés en 1914-1918 (A-B) : Boche, Bochie » [archive du ], sur crid1418.org.
  11. Charles Spindler, L'Alsace pendant la Guerre, Librairie Treuttel et Würtz, Strasbourg, 1925, p. 135.
  12. « Bochie » [archive du ], sur www.languefrancaise.net.
  13. François Cavanna, « Les Russkoffs » [archive du ] [PDF], , p. 488.

Sources[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]