« Chandernagor » : différence entre les versions

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Contenu supprimé Contenu ajouté
m Typographie
Baidax (discuter | contributions)
m →‎Patrimoine français : Typographie, lien
 
(32 versions intermédiaires par 24 utilisateurs non affichées)
Ligne 6 : Ligne 6 :
| nom colonial = Chandernagor
| nom colonial = Chandernagor
| image = Dourgachorone Roquitte Souvenir - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 - 2013-05-19 7887.JPG
| image = Dourgachorone Roquitte Souvenir - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 - 2013-05-19 7887.JPG
| légende = Kiosque sur Strand Road au bord du [[Hooghly]]
| légende = Kiosque sur Strand Road au bord du [[Hooghly]].
| blason =
| blason =
| drapeau =
| drapeau =
Ligne 28 : Ligne 28 :
| tel =
| tel =
| UNLC =
| UNLC =
| population = 150000
| population = 166867
| année_pop = 2001
| année_pop = 2011
| gentilé =
| gentilé =
| sites touristiques =
| sites touristiques =
}}
}}
'''Chandernagor''' ou '''Chandannagar'''<ref name=nom>La transcription officielle du nom a été [[Changements des noms de villes et d'États en Inde|changé]] en {{citation|Chandannagar}}.</ref> ({{lang-bn|চন্দননগর}}) est une [[ville]] du [[Bengale-Occidental]] située sur la rive droite du [[Hooghly]], à une trentaine de kilomètres au nord de [[Calcutta]]. La ville comptait {{unité|150000|habitants}} au recensement de [[2001]].
'''Chandernagor''' ou '''Chandannagar'''<ref name=nom>La transcription officielle du nom a été [[Changements des noms de villes et d'États en Inde|changée]] en {{citation|Chandannagar}}.</ref> ({{lang-bn|চন্দননগর}}) est une [[ville]] du [[Bengale-Occidental]] située sur la rive droite du [[Hooghly]], à une trentaine de kilomètres au nord de [[Calcutta]]. La ville comptait {{unité|150000|habitants}} au recensement de [[2001]].


Chandernagor était un des anciens [[Établissements français de l'Inde]] et le seul à être situé à l'intérieur des terres (dans le territoire du [[Bengale]]). Les quatre autres comptoirs, dont [[Pondichéry]], possédaient une façade maritime .
Chandernagor est un des anciens [[Établissements français de l'Inde]] et le seul à être situé à l'intérieur des terres (dans le territoire du [[Bengale]]). Les quatre autres comptoirs, dont [[Pondichéry]], possédaient une façade maritime<ref>Yanaon était situé sur le fleuve Godavéry, à peu de distance du golfe du Bengale. </ref>.


== Toponymie ==
== Toponymie ==
On donne deux étymologies à Chandernagor, le faisant venir de ''chandra'', « lune », car la ville se trouve sur une courbe du Gange ou de ''chandan'', « [[santal]] », car on en faisait le commerce dans la région, et ''nagar'', « ville ». Elle a été aussi appelée ''Farasdanga'', nom provenant de ''Farasi'' signifiant français et ''danga'' terre.
On donne deux étymologies à Chandernagor, le faisant venir de ''chandra'', « lune », car la ville se trouve sur une courbe du Gange ou de ''chandan'', « [[santal]] », car on en faisait le commerce dans la région, et ''nagar'', « ville ». Elle a été aussi appelée ''Farasdanga'', nom provenant de ''Farasi'' signifiant français et ''danga'' terre.


== Histoire ==
== Histoire ==
Ligne 45 : Ligne 45 :
=== Installation progressive des Français ===
=== Installation progressive des Français ===


En [[1674]], la CFIO envoie le gentilhomme Duplessis pour acheter un terrain {{incise|20 arpents pour 401 roupies, ajouter une roupie à une somme porte chance en Inde<ref>{{Article|langue=en|titre=List of superstitions in India|périodique=Wikipedia, the free encyclopedia|année=2016|lire en ligne=https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=List_of_superstitions_in_India&oldid=715199669|consulté le=2016-04-18}}</ref>}} sur le [[Hûghlî]] un bras du Gange. Il négocie avec Ibrahim Khan, le [[Nawab|nabab]] du [[Bengale]] et construit un bâtiment, au nord de la ville actuelle. Mais bientôt, les [[Hollandais]], installés à peu de distance, obtiennent, au moyen de cadeaux, les bonnes grâces du [[Nawab|nabab]] et les Français abandonnent la zone, en [[1677]], pour manque de profit. Le deuxième contact a lieu en [[1684]], lorsqu'un vaisseau chargé de marchandises parti de [[Pondichéry]] à destination de l'île de Joncelang {{incise|aujourd'hui l'île de [[Ko Phuket|Phuket]] en [[Thaïlande]]}} est pris dans une tempête, se déroute et atteint le Hûghlî. Le marchand Bertrand qui était sur le bateau rentre à Pondichéry en [[1685]] et se voit confier la mission de retourner au Bengale. Il atteint [[Balasore]], parcourt le pays et rend un rapport à la CFIO extrêmement favorable au commerce dans le Bengale.
En [[1674]], la CFIO envoie le gentilhomme Duplessis pour acheter un terrain {{incise|20 arpents pour 401 roupies, ajouter une roupie à une somme porte chance en Inde}} sur le [[Hûghlî]] un bras du Gange. Il négocie avec Ibrahim Khan, le [[Nawab|nabab]] du [[Bengale]] et construit un bâtiment, au nord de la ville actuelle. Mais bientôt, les [[Hollandais]], installés à peu de distance, obtiennent, au moyen de cadeaux, les bonnes grâces du [[Nawab|nabab]] et les Français abandonnent la zone, en [[1677]], pour manque de profit. Le deuxième contact a lieu en [[1684]], lorsqu'un vaisseau chargé de marchandises parti de [[Pondichéry]] à destination de l'île de Joncelang {{incise|aujourd'hui l'île de [[Ko Phuket|Phuket]] en [[Thaïlande]]}} est pris dans une tempête, se déroute et atteint le Hûghlî. Le marchand Bertrand qui était sur le bateau rentre à Pondichéry en [[1685]] et se voit confier la mission de retourner au Bengale. Il atteint [[Balasore]], parcourt le pays et rend un rapport à la CFIO extrêmement favorable au commerce dans le Bengale.


Le {{Date|30|août|1688}}, François Martin, le gouverneur de Pondichéry, missionne son gendre André Bourreau-Deslandes, sur ordre de la CFIO, pour fonder des comptoirs commerciaux au [[Bengale]]. Le nabab vient d'accorder à la France le droit de faire commerce au Bengale, au [[Bihar]] et en [[Orissa]] contre le paiement de 40 001 [[Roupie indienne|roupies]], sans frais annexes. La ville sera entourée d'un mur de [[clôture]] et d'un fossé, conçus par l'architecte [[Compagnie de Jésus|jésuite]] [[Jacques Duchatz]] (1652-1693). De [[1694]] à [[1699]], François Martin séjourne dans la ville lors de prise de Pondichéry par les Hollandais en [[1693]]. Elle sera restituée en [[1697]] par le [[traité de Ryswick]], mais le conflit met à mal le commerce français au [[Bengale]] car les Hollandais bloquent l'embouchure du Gange.
Le {{Date|30|août|1688}}, François Martin, le gouverneur de Pondichéry, missionne son gendre André Boureau-Deslandes, sur ordre de la CFIO, pour fonder des comptoirs commerciaux au [[Bengale]]. Le nabab vient d'accorder à la France le droit de faire commerce au Bengale, au [[Bihar]] et en [[Orissa]] contre le paiement de 40 001 [[Roupie indienne|roupies]], sans frais annexes. La ville sera entourée d'un mur de [[clôture]] et d'un fossé, conçus par l'architecte [[Compagnie de Jésus|jésuite]] [[Jacques Duchatz]] (1652-1693). De [[1694]] à [[1699]], François Martin séjourne dans la ville lors de la prise de Pondichéry par les Hollandais en [[1693]]. Elle sera restituée en [[1697]] par le [[traité de Ryswick]], mais le conflit met à mal le commerce français au [[Bengale]] car les Hollandais bloquent l'embouchure du Gange.


[[Fichier:Capture de Chandernagor en 1757 par la Royal Navy.jpg|thumb|left|La capture du poste de Chandernagor en 1757 par la ''Royal Navy''.]]
[[Fichier:Capture de Chandernagor en 1757 par la Royal Navy.jpg|thumb|left|La capture du poste de Chandernagor en 1757 par la ''Royal Navy''.]]
Ligne 55 : Ligne 55 :
[[Fichier:Fort d'Orléans, Chandernagor 1749.png|thumb|Croquis du fort d'Orléans en 1749.]]
[[Fichier:Fort d'Orléans, Chandernagor 1749.png|thumb|Croquis du fort d'Orléans en 1749.]]


Lorsque le {{Date|16|août|1731}}, [[Joseph François Dupleix]] s'installe à Pondichéry, il devient par la même occasion l'administrateur en chef de Chandernagor. Sous son administration, le réseau routier est amélioré, des hôtels particuliers sont construits. Mais la ville chute avec sa disparition et ne survit plus que par le travail des marchands locaux. Le plus fameux d'entre eux est Indranarayan Chowdhury. Appointé comme courtier de la CFIO en [[1730]], deux ans plus tard, il loue le territoire du comptoir pour 12 000 roupies par an. En [[1735]], il reçoit une médaille de [[Louis XV]]. Le colonel [[Robert Clive]] de la [[Compagnie anglaise des Indes orientales]] et l'amiral Watson de l'armée britannique prennent Chandernagor le {{Date|23|mars|1757}} lors de la [[guerre de Sept Ans]].
Lorsque le {{Date|16|août|1731}}, [[Joseph François Dupleix]] s'installe à Pondichéry, il devient par la même occasion l'administrateur en chef de Chandernagor. Sous son administration, le réseau routier est amélioré, des hôtels particuliers sont construits. Mais la ville chute avec sa disparition et ne survit plus que par le travail des marchands locaux. Le plus fameux d'entre eux est Indranarayan Chowdhury. Appointé comme courtier de la CFIO en [[1730]], deux ans plus tard, il loue le territoire du comptoir pour 12 000 roupies par an. En [[1735]], il reçoit une médaille de [[Louis XV]]. Le colonel [[Robert Clive]] de la [[Compagnie anglaise des Indes orientales]] et l'amiral Watson de l'armée britannique prennent Chandernagor le {{Date|23|mars|1757}} lors de la [[guerre de Sept Ans]].


[[Fichier:Fiebig Government House Chandernagore.jpg|thumb|Chandernagor au milieu du {{s-|XIX}} : le siège de l'administration.]]
[[Fichier:Fiebig Government House Chandernagore.jpg|thumb|Chandernagor au milieu du {{s-|XIX}} : le siège de l'administration.]]
[[File:Chandernagore, in 1878.jpg|thumb|Chandernagor, gravure de Bickers & Son, 1878.]]
[[File:Chandernagore, in 1878.jpg|thumb|Chandernagor, gravure de Bickers & Son, 1878.]]
Chandernagor sera occupée par les Britanniques de 1757 à 1764, et rendue aux Français par le traité de Paris de 1763, qui verra néanmoins la [[France]] perdre la majeure partie de ses possessions coloniales ([[Inde]] et [[Nouvelle-France]]).
Chandernagor sera occupée par les Britanniques de 1757 à 1764, et rendue aux Français par le traité de Paris de 1763<ref>{{Lien web |titre=ANOM images (FR_ANOM_27DFC9A) |url=http://anom.archivesnationales.culture.gouv.fr/ulysse/osd?id=FR_ANOM_27DFC9A&q=fosses%20chandernagor&mode=list&id=FR_ANOM_27DFC9A |site=anom.archivesnationales.culture.gouv.fr |consulté le=2022-04-09}}</ref>, qui verra néanmoins la [[France]] perdre la majeure partie de ses possessions coloniales ([[Inde]] et [[Nouvelle-France]]).


Chandernagor sera de nouveau occupée par les Britanniques, de 1778 à 1783, qui protestaient contre l'aide des Français aux indépendantistes américains ([[guerre d'indépendance américaine]]). Aux termes du traité de Versailles, signé en 1783, la France conserve en Inde les cinq comptoirs de Chandernagor, [[Pondichéry]], [[Yanaon]], [[Karikal]] et [[Mahé (Inde)|Mahé]].
Chandernagor sera de nouveau occupée par les Britanniques, de 1778 à 1783, qui protestaient contre l'aide des Français aux indépendantistes américains ([[guerre d'indépendance américaine]]). Aux termes du traité de Versailles, signé en 1783, la France conserve en Inde les cinq comptoirs de Chandernagor, [[Pondichéry]], [[Yanaon]], [[Karikal]] et [[Mahé (Inde)|Mahé]].


Le comptoir de Chandernagor sera de nouveau occupé par les Britanniques de 1785 à 1788.
Le comptoir de Chandernagor sera de nouveau occupé par les Britanniques de 1785 à 1788.


En 1790, à Chandernagor, le commandant Montigny est arrêté par les Anglais sur ordre de [[Lord Cornwallis]] alors qu'il tente de s'enfuir vers les îles de [[Île-de-France|France]] et [[île de Bourbon|Bourbon]]. La piètre administration dont [[François Emmanuel Dehaies|Dehaies de Montigny]] a fait preuve à Chandernagor contribua à la ruine du comptoir. Après une multitude de tergiversations de l'administration française et sur fond de [[Révolution française]], [[Benoît Mottet de La Fontaine]] sera nommé au nom de l'assemblée coloniale de Pondichéry en remplacement de Montigny, comme gouverneur de Chandernagor.
En 1790, à Chandernagor, le commandant Montigny est arrêté par les Anglais sur ordre de [[Lord Cornwallis]] alors qu'il tente de s'enfuir vers les îles de [[Île-de-France|France]] et [[île de Bourbon|Bourbon]]. La piètre administration dont [[François Emmanuel Dehaies|Dehaies de Montigny]] a fait preuve à Chandernagor contribua à la ruine du comptoir. Après une multitude de tergiversations de l'administration française et sur fond de [[Révolution française]], [[Benoît Mottet de La Fontaine]] sera nommé au nom de l'assemblée coloniale de Pondichéry en remplacement de Montigny, comme gouverneur de Chandernagor.


Chandernagor et les autres comptoirs français seront occupés par les Anglais de [[1793]] à [[1816]], lors des [[guerres révolutionnaires]] et [[guerres napoléoniennes|napoléoniennes]].
Chandernagor et les autres comptoirs français seront occupés par les Anglais de [[1793]] à [[1816]], lors des [[guerres révolutionnaires]] et [[guerres napoléoniennes|napoléoniennes]].


[[Fichier:Fiebig Chandernagore Admiralty.jpg|thumb|Chandernagor au milieu du {{s-|XIX}} : Le ''Strand'' et l'Amirauté.]]
[[Fichier:Fiebig Chandernagore Admiralty.jpg|thumb|Chandernagor au milieu du {{s-|XIX}} : Le ''Strand'' et l'Amirauté.]]
[[Fichier:Chandernagor. Le strand et l'amirauté. Années 1930..jpg|thumb|Le ''Strand'' et l'Amirauté, années 1930.]]
[[Fichier:Chandernagor. Le strand et l'amirauté. Années 1930..jpg|thumb|Le ''Strand'' et l'Amirauté, années 1930.]]
[[Fichier:Chandernagor. "Ville noire".jpg|thumb|Rue de la « ville noire », années 1920.]]
[[Fichier:Chandernagor. "Ville noire".jpg|thumb|Rue de la « ville noire », années 1920.]]


Le retour effectif de la France en ce territoire s'effectue en mars 1817. Le territoire est alors pauvre et exsangue, et n'a plus rien à voir avec sa grandeur d'autrefois.
Le retour effectif de la France en ce territoire s'effectue en {{date-|mars 1817}}. Le territoire est alors pauvre et exsangue, et n'a plus rien à voir avec sa grandeur d'autrefois.


En 1860, il y avait une centaine de Français, d'Européens et d'étrangers dans la colonie (dont des [[Cipayes]] de Pondichéry, des soldats Indochinois). Ce nombre va vite chuter avec la crise du textile et la période du libre échange avec la [[Grande-Bretagne]] (les filatures de l'Inde britannique étaient moins chères). Dans les faits, ce territoire, enclavé, était très cher à administrer, ainsi que les quatre autres comptoirs français de l'Inde. L'envoi, par l'administration coloniale française de fonctionnaires tamouls de Pondichéry, accentuait le sentiment anti-Français des Bengalis, qui constituaient la population du territoire.
En 1860, il y avait une centaine de Français, d'Européens et d'étrangers dans la colonie (dont des [[Cipayes]] de Pondichéry, des soldats indochinois). Ce nombre va vite chuter avec la crise du textile et la période du libre échange avec la [[Grande-Bretagne]] (les filatures de l'Inde britannique étaient moins chères). Dans les faits, ce territoire, enclavé, était très cher à administrer, ainsi que les quatre autres comptoirs français de l'Inde. L'envoi, par l'administration coloniale française de fonctionnaires tamouls de Pondichéry, accentuait le sentiment anti-Français des Bengalis, qui constituaient la population du territoire.


Après 1920, les Européens de Chandernagor étaient surtout des Britanniques aisés, qui fuyaient les taxes, et autres impôts pratiqués par les Britanniques en Inde, et profitaient du statut de « zone franche » (''duty free'' en [[anglais]]) du territoire. Ce statut sera également appliqué pour les quatre autres comptoirs français. Quelques habitants vont s'enrichir, surtout à Yanaon et Pondichéry. Chandernagor vendra ainsi beaucoup d'alcool, mais seuls quelques entrepreneurs locaux, souvent Britanniques, et Américains, vont s'enrichir, les Français se focalisant surtout vers l'[[Indochine]].
Après 1920, les Européens de Chandernagor étaient surtout des Britanniques aisés, qui fuyaient les taxes, et autres impôts pratiqués par les Britanniques en Inde, et profitaient du statut de « zone franche » (''duty free'' en [[anglais]]) du territoire. Ce statut sera également appliqué pour les quatre autres comptoirs français. Quelques habitants vont s'enrichir, surtout à Yanaon et Pondichéry. Chandernagor vendra ainsi beaucoup d'alcool, mais seuls quelques entrepreneurs locaux, souvent Britanniques, et Américains, vont s'enrichir, les Français se focalisant surtout vers l'[[Indochine]].
En 1945, alors que le peuple indien commence à réclamer l'indépendance envers le colonisateur britannique, les Français doivent faire face à la [[guerre d'Indochine|guerre de décolonisation en Indochine]] tout en conservant leurs cinq comptoirs indiens (un renoncement prématuré aurait pu accentuer le nationalisme vietnamien en Indochine).
En 1945, alors que le peuple indien commence à réclamer l'indépendance envers le colonisateur britannique, les Français doivent faire face à la [[guerre d'Indochine|guerre de décolonisation en Indochine]] tout en conservant leurs cinq comptoirs indiens (un renoncement prématuré aurait pu accentuer le nationalisme vietnamien en Indochine).
Ligne 84 : Ligne 84 :
En 1947, l'Inde Britannique devient indépendante, et quand des troubles surviennent dès la fin de 1947 à Chandernagor pour le rattachement à l'Inde, la France, débordée, demandera à l'Inde d'assurer l'ordre : dès lors, la question de la souveraineté de ce territoire semblait résolue.
En 1947, l'Inde Britannique devient indépendante, et quand des troubles surviennent dès la fin de 1947 à Chandernagor pour le rattachement à l'Inde, la France, débordée, demandera à l'Inde d'assurer l'ordre : dès lors, la question de la souveraineté de ce territoire semblait résolue.


À l'occasion d'un [[Référendum de 1949 à Chandernagor|référendum organisé le 19 juin 1949]], la population de Chandernagor se prononce en faveur du rattachement de la ville à l'Inde, qui prend en charge l'administration du territoire dès le 2 mai 1950. Cette situation ne sera officiellement entérinée que deux ans plus tard, en application du traité de cession signé à Paris le 2 février 1951 et entré en vigueur le 9 juin 1952. La superficie du territoire était de 17 km². Le territoire est directement intégré à l'État du [[Bengale-Occidental]], contrairement aux quatre autres anciens établissements français qui vont former un territoire distinct, le [[Territoire de Pondichéry]].
À l'occasion d'un [[Référendum de 1949 à Chandernagor|référendum organisé le 19 juin 1949]], la population de Chandernagor se prononce en faveur du rattachement de la ville à l'Inde, qui prend en charge l'administration du territoire dès le {{date-|2 mai 1950}}. Cette situation ne sera officiellement entérinée que deux ans plus tard, en application du traité de cession signé à Paris le {{date-|2 février 1951}} et entré en vigueur le {{date-|9 juin 1952}}. La superficie du territoire était de 17 km². Le territoire est directement intégré à l'État du [[Bengale-Occidental]], contrairement aux quatre autres anciens établissements français qui vont former un territoire distinct, le [[Territoire de Pondichéry]].


Il ne restait plus que trois Français issus de la France métropolitaine à Chandernagor en 1948 (l'administrateur Georges Tailleur, son épouse, et le chef de la police municipale, un Franco-Britannique) contre 22 Britanniques, 19 Irlandais, 18 Américains, 16 Portugais (dont le prêtre de l'église catholique et 5 religieuses) et 10 Australiens et Néo-Zélandais. Si les Français boudaient Chandernagor, en revanche, ils étaient 340 à Calcutta, en 1947 (860 en 1938), à une vingtaine de kilomètres plus au sud.
Il ne restait plus que trois Français issus de la France métropolitaine à Chandernagor en 1948 (l'administrateur Georges Tailleur, son épouse, et le chef de la police municipale, un Franco-Britannique) contre 22 Britanniques, 19 Irlandais, 18 Américains, 16 Portugais (dont le prêtre de l'église catholique et 5 religieuses) et 10 Australiens et Néo-Zélandais. Si les Français boudaient Chandernagor, en revanche, ils étaient 340 à Calcutta, en 1947 (860 en 1938), à une vingtaine de kilomètres plus au sud.


== Patrimoine français ==
== Patrimoine français ==
[[Fichier:French Cemetery.jpg|vignette|Cimetière français]]
[[Fichier:French Cemetery.jpg|vignette|Cimetière français.]]
[[Fichier:Sacred Heart Church - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7893-7894.JPG|vignette|L'église du Sacré Cœur]]
[[Fichier:Sacred Heart Church - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7893-7894.JPG|vignette|L'église du Sacré-Cœur.]]
[[Fichier:Chandannagar Gate.jpg|vignette|Inscription sur les portes de Chandernagor]]
[[Fichier:Chandannagar Gate.jpg|vignette|Inscription sur les portes de Chandernagor.]]
* Le musée et institut français (''Chandannagar Museum and Institute''), ancien palais du gouverneur, qui conserve des souvenirs de la présence française.
* Le musée et institut français (''Chandannagar Museum and Institute''), ancien palais du gouverneur, qui conserve des souvenirs de la présence française.
* Le cimetière catholique français dont certaines tombes datent de la seconde moitié du [[XVIIIe siècle]]. Il est situé sur Grand Trunk Road en face de Lal Dighi (un petit lac).
* Le cimetière catholique français dont certaines tombes datent de la seconde moitié du {{s-|XVIII}} est situé sur Grand Trunk Road en face de Lal Dighi (un petit lac).
* Le kiosque du débarcadère sur le ''Strand'' : offert par un fils de Durga Chorone Roquitte en souvenir de son père, descendant de Jean-Louis Roquet, négociant originaire de [[Bordeaux]]. La famille Roquitte est la seule famille d'origine purement française encore présente à Chandernagor.
* Le kiosque du débarcadère sur le ''Strand'' : offert par un fils de Durga Chorone Roquitte en souvenir de son père, descendant de Jean-Louis Roquet, négociant originaire de [[Bordeaux]]. La famille Roquitte est la seule famille d'origine purement française encore présente à Chandernagor.
* L'église du Sacré Cœur de Chandernagor est située près du Strand. Elle a été conçu par l'architecte français Jacques Duchatz et a été inauguré le 27 janvier 1884.
* L'église du Sacré-Cœur de Chandernagor est située près du Strand. Elle a été conçue par l'architecte français Jacques Duchatz et a été inaugurée le {{date-|27 janvier 1884}}.
* Quelques belles maisons à l'architecture coloniale XVIIIe, dissimulées derrière les palmiers.
* Quelques belles maisons à l'architecture coloniale du {{s-|XVIII}}, dissimulées derrière les palmiers.
* Le château de Goretty : construit vers 1766 par [[Jean-Baptiste Chevalier de Conan]], gouverneur de Chandernagor, sur un terrain offert par un [[Zamindars|Zamindar]] bengali à la [[Compagnie française des Indes orientales]], il était situé un peu au sud, à une petite lieue de la barrière de Chandernagor, et, de ce fait se trouvait enclavé dans les Indes anglaises. Très vite cette demeure, à l'origine simple maison de campagne, fut embellie, et dotée dans son vaste parc de jardins à la française et dépendances diverses. Son confort, outre l'importance et le luxe apporté à sa construction grâce à une grande hauteur sous plafond permettant une ventilation optimale, de vastes pièces, résidait pour l'essentiel sur le fait que ce château était édifié sur un promontoire. Il devient un lieu de réjouissances de la société coloniale européenne, fréquenté par [[Warren Hastings]] ou bien [[Philip Francis]]. Il devient la résidence permanente du Gouverneur des Indes Françaises au Bengale. Après la défaite française face à l’Angleterre lors de la [[guerre de Sept Ans]], le général [[Eyre Coote]] s’y installa et sollicita la concession pour son usage personnel auprès du Conseil supérieur du Nabab du Bengale. La paix revenue, la France fait valoir ses titres de propriété sur Goretty.
* Le château de Goretty : construit vers 1766 par [[Jean-Baptiste Chevalier de Conan]], gouverneur de Chandernagor, sur un terrain offert par un [[zamindar]] bengali à la [[Compagnie française des Indes orientales]], il était situé un peu au sud, à une petite lieue de la barrière de Chandernagor, et, de ce fait se trouvait enclavé dans les Indes anglaises. Très vite cette demeure, à l'origine simple maison de campagne, fut embellie, et dotée dans son vaste parc de jardins à la française et dépendances diverses. Son confort, outre l'importance et le luxe apporté à sa construction grâce à une grande hauteur sous plafond permettant une ventilation optimale, de vastes pièces, résidait pour l'essentiel sur le fait que ce château était édifié sur un promontoire. Il devient un lieu de réjouissances de la société coloniale européenne, fréquenté par [[Warren Hastings]] ou bien [[Philip Francis]]. Il devient la résidence permanente du Gouverneur des Indes françaises au Bengale. Après la défaite française face à l’Angleterre lors de la [[guerre de Sept Ans]], le général [[Eyre Coote]] s’y installa et sollicita la concession pour son usage personnel auprès du Conseil supérieur du Nabab du Bengale. La paix revenue, la France fait valoir ses titres de propriété sur Goretty.


== Galerie ==
== Galerie ==
<gallery>
<gallery>
File:Signage - Institut de Chandernagor - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7900.JPG|L'entrée de l'institut de Chandernagor
File:Signage - Institut de Chandernagor - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7900.JPG|L'entrée de l'institut de Chandernagor.
File:FRENCH GOVERNOR'S PALACE.JPG|L'ancien palais du gouverneur transformé en musée
File:FRENCH GOVERNOR'S PALACE.JPG|L'ancien palais du gouverneur transformé en musée.
File:The Statue of Liberty Leading the People in the Dupleix Palace or the Institut De Chandernagore, West Bengal, India.jpg|Statue de Marianne dans la cour de l'ancien palais du gouverneur
File:The Statue of Liberty Leading the People in the Dupleix Palace or the Institut De Chandernagore, West Bengal, India.jpg|Statue de Marianne dans la cour de l'ancien palais du gouverneur.
File:Chandannagar Strand.jpg|Kiosque sur le Strand
File:Chandannagar Strand.jpg|Kiosque sur le Strand.
File:Chandan Nagar Police Station - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7881.JPG|Commissariat de Police de Chandernagor
File:Chandan Nagar Police Station - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7881.JPG|Commissariat de police de Chandernagor.
File:Clock Tower - Chandernagore Subsidiary Jail - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7879.JPG|Tour de l'Horloge de Chandernagor
File:Clock Tower - Chandernagore Subsidiary Jail - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7879.JPG|Tour de l'Horloge de Chandernagor.
File:Grand Trunk Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7310.JPG|Grand Trunk Road sur le [[Hooghly]]
File:Grand Trunk Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7310.JPG|Grand Trunk Road sur le [[Hooghly]].
Image:Sri Aurovindo Vidyamandir, Chandannagar.jpg|École Sri Aurovindo Vidyamandir
Image:Sri Aurovindo Vidyamandir, Chandannagar.jpg|École Sri Aurovindo Vidyamandir.
File:Chandernagore Government College - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7884.JPG|Entrée de la faculté
File:Chandernagore Government College - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7884.JPG|Entrée de la faculté.
File:Chandernagore Sub-divisional Court - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7878.JPG|Tribunal du sous-district sur Strand Road
File:Chandernagore Sub-divisional Court - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7878.JPG|Tribunal du sous-district sur Strand Road.
File:Bhasa Shahid Minar - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7909.JPG|Monument sur Strand Road, au bord du Hooghly
File:Bhasa Shahid Minar - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7909.JPG|Monument sur Strand Road, au bord du Hooghly.
File:River Hooghly - Rani Ghat - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7873.JPG|Les berges du Hooghly
File:River Hooghly - Rani Ghat - Strand Road - Chandan Nagar - Hooghly - 2013-05-19 7873.JPG|Les berges du Hooghly.
</gallery>
</gallery>


== Personnalités ==
== Personnalités liées à Chandernagor ==
* [[Charles Alexandre Louis Roussel de Saint-Rémy]] (1746-1800), général des armées de la République française est né dans cette ville.
* [[Charles Alexandre Louis Roussel de Saint-Rémy]] (1746-1800), général des armées de la République française est né dans cette ville.
* [[Pierre Nicolas de Haraneder]], vicomte de Macaye, mort à Chandernagor en [[1827]].
* [[Pierre Nicolas de Haraneder]], vicomte de Macaye, mort à Chandernagor en [[1827]].
Ligne 122 : Ligne 122 :


== Dans la chanson française ==
== Dans la chanson française ==
* ''Chandernagor'' est le titre d'une chanson aux connotations érotiques du chanteur [[Guy Béart]], reprise par [[Juliette Gréco]], qui y évoque les cinq comptoirs français de l'Inde<ref>{{lien web|url=http://www.paroles-musique.com/paroles-Guy_Beart-Chandernagor-lyrics,p7348|titre=Paroles de la chanson ''Chandernagor''|site= www.paroles-musique.com}}</ref>.

* ''Chandernagor'' est le titre d'une chanson aux connotations érotiques du chanteur [[Guy Béart]] qui y évoque les cinq comptoirs français de l'Inde<ref>{{lien web|url=http://www.paroles-musique.com/paroles-Guy_Beart-Chandernagor-lyrics,p7348|titre=Paroles de la chanson ''Chandernagor''|site= www.paroles-musique.com}}</ref>.


== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{Références}}

== Liens externes ==
{{Autres projets|commons=Category:Chandannagar}}
{{Autres projets|commons=Category:Chandannagar}}
{{Liens}}
<references/>


{{Portail|monde colonial|Bengale-Occidental}}
{{Portail|monde colonial|Bengale-Occidental}}

Dernière version du 17 avril 2024 à 15:05

Chandannagar

Chandannagar
Chandernagor
Chandernagor
Kiosque sur Strand Road au bord du Hooghly.
Administration
Pays Drapeau de l'Inde Inde
État ou territoire Bengale-Occidental
District Hooghly
Fuseau horaire IST (UTC+05:30)
Démographie
Population 166 867 hab. (2011)
Densité 8 343 hab./km2
Géographie
Coordonnées 22° 51′ 21″ nord, 88° 22′ 48″ est
Superficie 2 000 ha = 20 km2
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Inde
Voir sur la carte topographique d'Inde
Chandannagar
Géolocalisation sur la carte : Inde
Voir sur la carte administrative d'Inde
Chandannagar
Géolocalisation sur la carte : Bengale-Occidental
Voir sur la carte topographique du Bengale-Occidental
Chandannagar
Géolocalisation sur la carte : Bengale-Occidental
Voir sur la carte administrative du Bengale-Occidental
Chandannagar

Chandernagor ou Chandannagar[1] (bengali : চন্দননগর) est une ville du Bengale-Occidental située sur la rive droite du Hooghly, à une trentaine de kilomètres au nord de Calcutta. La ville comptait 150 000 habitants au recensement de 2001.

Chandernagor est un des anciens Établissements français de l'Inde et le seul à être situé à l'intérieur des terres (dans le territoire du Bengale). Les quatre autres comptoirs, dont Pondichéry, possédaient une façade maritime[2].

Toponymie[modifier | modifier le code]

On donne deux étymologies à Chandernagor, le faisant venir de chandra, « lune », car la ville se trouve sur une courbe du Gange ou de chandan, « santal », car on en faisait le commerce dans la région, et nagar, « ville ». Elle a été aussi appelée Farasdanga, nom provenant de Farasi signifiant français et danga terre.

Histoire[modifier | modifier le code]

La ville ne semble pas avoir existé avant l'arrivée des Français, mais comme la ville de Calcutta, trouve son origine dans trois villages du bord du Gange, Borokishanpur, Khalisani et Gondalpara. La première référence y est faite dans une lettre datée du , signée François Martin, Deslandes et le marchand Pellé, adressée au directeur de la Compagnie française des Indes orientales [CFIO].

Installation progressive des Français[modifier | modifier le code]

En 1674, la CFIO envoie le gentilhomme Duplessis pour acheter un terrain — 20 arpents pour 401 roupies, ajouter une roupie à une somme porte chance en Inde — sur le Hûghlî un bras du Gange. Il négocie avec Ibrahim Khan, le nabab du Bengale et construit un bâtiment, au nord de la ville actuelle. Mais bientôt, les Hollandais, installés à peu de distance, obtiennent, au moyen de cadeaux, les bonnes grâces du nabab et les Français abandonnent la zone, en 1677, pour manque de profit. Le deuxième contact a lieu en 1684, lorsqu'un vaisseau chargé de marchandises parti de Pondichéry à destination de l'île de Joncelang — aujourd'hui l'île de Phuket en Thaïlande — est pris dans une tempête, se déroute et atteint le Hûghlî. Le marchand Bertrand qui était sur le bateau rentre à Pondichéry en 1685 et se voit confier la mission de retourner au Bengale. Il atteint Balasore, parcourt le pays et rend un rapport à la CFIO extrêmement favorable au commerce dans le Bengale.

Le , François Martin, le gouverneur de Pondichéry, missionne son gendre André Boureau-Deslandes, sur ordre de la CFIO, pour fonder des comptoirs commerciaux au Bengale. Le nabab vient d'accorder à la France le droit de faire commerce au Bengale, au Bihar et en Orissa contre le paiement de 40 001 roupies, sans frais annexes. La ville sera entourée d'un mur de clôture et d'un fossé, conçus par l'architecte jésuite Jacques Duchatz (1652-1693). De 1694 à 1699, François Martin séjourne dans la ville lors de la prise de Pondichéry par les Hollandais en 1693. Elle sera restituée en 1697 par le traité de Ryswick, mais le conflit met à mal le commerce français au Bengale car les Hollandais bloquent l'embouchure du Gange.

La capture du poste de Chandernagor en 1757 par la Royal Navy.

Un firman de l'empereur Aurangzeb confirme, en 1698, le droit de la CFIO à commercer au Bengale. Elle compte, en 1703, 29 employés à Chandernagor. À cette époque, Pondichéry est le principal centre administratif et Chandernagor le principal centre commercial et rapportera jusqu'à un million de roupies par an. La moitié du budget dévolu à l'Inde par la France est investi dans le développement de la ville, et la présence des autres puissances européennes se faisant plus manifeste, on y construit le fort d'Orléans entre 1696 et 1697.

Croquis du fort d'Orléans en 1749.

Lorsque le , Joseph François Dupleix s'installe à Pondichéry, il devient par la même occasion l'administrateur en chef de Chandernagor. Sous son administration, le réseau routier est amélioré, des hôtels particuliers sont construits. Mais la ville chute avec sa disparition et ne survit plus que par le travail des marchands locaux. Le plus fameux d'entre eux est Indranarayan Chowdhury. Appointé comme courtier de la CFIO en 1730, deux ans plus tard, il loue le territoire du comptoir pour 12 000 roupies par an. En 1735, il reçoit une médaille de Louis XV. Le colonel Robert Clive de la Compagnie anglaise des Indes orientales et l'amiral Watson de l'armée britannique prennent Chandernagor le lors de la guerre de Sept Ans.

Chandernagor au milieu du XIXe siècle : le siège de l'administration.
Chandernagor, gravure de Bickers & Son, 1878.

Chandernagor sera occupée par les Britanniques de 1757 à 1764, et rendue aux Français par le traité de Paris de 1763[3], qui verra néanmoins la France perdre la majeure partie de ses possessions coloniales (Inde et Nouvelle-France).

Chandernagor sera de nouveau occupée par les Britanniques, de 1778 à 1783, qui protestaient contre l'aide des Français aux indépendantistes américains (guerre d'indépendance américaine). Aux termes du traité de Versailles, signé en 1783, la France conserve en Inde les cinq comptoirs de Chandernagor, Pondichéry, Yanaon, Karikal et Mahé.

Le comptoir de Chandernagor sera de nouveau occupé par les Britanniques de 1785 à 1788.

En 1790, à Chandernagor, le commandant Montigny est arrêté par les Anglais sur ordre de Lord Cornwallis alors qu'il tente de s'enfuir vers les îles de France et Bourbon. La piètre administration dont Dehaies de Montigny a fait preuve à Chandernagor contribua à la ruine du comptoir. Après une multitude de tergiversations de l'administration française et sur fond de Révolution française, Benoît Mottet de La Fontaine sera nommé au nom de l'assemblée coloniale de Pondichéry en remplacement de Montigny, comme gouverneur de Chandernagor.

Chandernagor et les autres comptoirs français seront occupés par les Anglais de 1793 à 1816, lors des guerres révolutionnaires et napoléoniennes.

Chandernagor au milieu du XIXe siècle : Le Strand et l'Amirauté.
Le Strand et l'Amirauté, années 1930.
Rue de la « ville noire », années 1920.

Le retour effectif de la France en ce territoire s'effectue en . Le territoire est alors pauvre et exsangue, et n'a plus rien à voir avec sa grandeur d'autrefois.

En 1860, il y avait une centaine de Français, d'Européens et d'étrangers dans la colonie (dont des Cipayes de Pondichéry, des soldats indochinois). Ce nombre va vite chuter avec la crise du textile et la période du libre échange avec la Grande-Bretagne (les filatures de l'Inde britannique étaient moins chères). Dans les faits, ce territoire, enclavé, était très cher à administrer, ainsi que les quatre autres comptoirs français de l'Inde. L'envoi, par l'administration coloniale française de fonctionnaires tamouls de Pondichéry, accentuait le sentiment anti-Français des Bengalis, qui constituaient la population du territoire.

Après 1920, les Européens de Chandernagor étaient surtout des Britanniques aisés, qui fuyaient les taxes, et autres impôts pratiqués par les Britanniques en Inde, et profitaient du statut de « zone franche » (duty free en anglais) du territoire. Ce statut sera également appliqué pour les quatre autres comptoirs français. Quelques habitants vont s'enrichir, surtout à Yanaon et Pondichéry. Chandernagor vendra ainsi beaucoup d'alcool, mais seuls quelques entrepreneurs locaux, souvent Britanniques, et Américains, vont s'enrichir, les Français se focalisant surtout vers l'Indochine.

En 1945, alors que le peuple indien commence à réclamer l'indépendance envers le colonisateur britannique, les Français doivent faire face à la guerre de décolonisation en Indochine tout en conservant leurs cinq comptoirs indiens (un renoncement prématuré aurait pu accentuer le nationalisme vietnamien en Indochine).

Rattachement à l'Inde[modifier | modifier le code]

En 1947, l'Inde Britannique devient indépendante, et quand des troubles surviennent dès la fin de 1947 à Chandernagor pour le rattachement à l'Inde, la France, débordée, demandera à l'Inde d'assurer l'ordre : dès lors, la question de la souveraineté de ce territoire semblait résolue.

À l'occasion d'un référendum organisé le 19 juin 1949, la population de Chandernagor se prononce en faveur du rattachement de la ville à l'Inde, qui prend en charge l'administration du territoire dès le . Cette situation ne sera officiellement entérinée que deux ans plus tard, en application du traité de cession signé à Paris le et entré en vigueur le . La superficie du territoire était de 17 km². Le territoire est directement intégré à l'État du Bengale-Occidental, contrairement aux quatre autres anciens établissements français qui vont former un territoire distinct, le Territoire de Pondichéry.

Il ne restait plus que trois Français issus de la France métropolitaine à Chandernagor en 1948 (l'administrateur Georges Tailleur, son épouse, et le chef de la police municipale, un Franco-Britannique) contre 22 Britanniques, 19 Irlandais, 18 Américains, 16 Portugais (dont le prêtre de l'église catholique et 5 religieuses) et 10 Australiens et Néo-Zélandais. Si les Français boudaient Chandernagor, en revanche, ils étaient 340 à Calcutta, en 1947 (860 en 1938), à une vingtaine de kilomètres plus au sud.

Patrimoine français[modifier | modifier le code]

Cimetière français.
L'église du Sacré-Cœur.
Inscription sur les portes de Chandernagor.
  • Le musée et institut français (Chandannagar Museum and Institute), ancien palais du gouverneur, qui conserve des souvenirs de la présence française.
  • Le cimetière catholique français dont certaines tombes datent de la seconde moitié du XVIIIe siècle est situé sur Grand Trunk Road en face de Lal Dighi (un petit lac).
  • Le kiosque du débarcadère sur le Strand : offert par un fils de Durga Chorone Roquitte en souvenir de son père, descendant de Jean-Louis Roquet, négociant originaire de Bordeaux. La famille Roquitte est la seule famille d'origine purement française encore présente à Chandernagor.
  • L'église du Sacré-Cœur de Chandernagor est située près du Strand. Elle a été conçue par l'architecte français Jacques Duchatz et a été inaugurée le .
  • Quelques belles maisons à l'architecture coloniale du XVIIIe siècle, dissimulées derrière les palmiers.
  • Le château de Goretty : construit vers 1766 par Jean-Baptiste Chevalier de Conan, gouverneur de Chandernagor, sur un terrain offert par un zamindar bengali à la Compagnie française des Indes orientales, il était situé un peu au sud, à une petite lieue de la barrière de Chandernagor, et, de ce fait se trouvait enclavé dans les Indes anglaises. Très vite cette demeure, à l'origine simple maison de campagne, fut embellie, et dotée dans son vaste parc de jardins à la française et dépendances diverses. Son confort, outre l'importance et le luxe apporté à sa construction grâce à une grande hauteur sous plafond permettant une ventilation optimale, de vastes pièces, résidait pour l'essentiel sur le fait que ce château était édifié sur un promontoire. Il devient un lieu de réjouissances de la société coloniale européenne, fréquenté par Warren Hastings ou bien Philip Francis. Il devient la résidence permanente du Gouverneur des Indes françaises au Bengale. Après la défaite française face à l’Angleterre lors de la guerre de Sept Ans, le général Eyre Coote s’y installa et sollicita la concession pour son usage personnel auprès du Conseil supérieur du Nabab du Bengale. La paix revenue, la France fait valoir ses titres de propriété sur Goretty.

Galerie[modifier | modifier le code]

Personnalités liées à Chandernagor[modifier | modifier le code]

Dans la chanson française[modifier | modifier le code]

  • Chandernagor est le titre d'une chanson aux connotations érotiques du chanteur Guy Béart, reprise par Juliette Gréco, qui y évoque les cinq comptoirs français de l'Inde[4].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. La transcription officielle du nom a été changée en « Chandannagar ».
  2. Yanaon était situé sur le fleuve Godavéry, à peu de distance du golfe du Bengale.
  3. « ANOM images (FR_ANOM_27DFC9A) », sur anom.archivesnationales.culture.gouv.fr (consulté le )
  4. « Paroles de la chanson Chandernagor », sur www.paroles-musique.com

Liens externes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :