« Charles Ives » : différence entre les versions

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| œuvres = ''[[Concord Sonata]], ''[[The Unanswered Question]]''
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* ''[[Three Places in New England]]''
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'''Charles Edward Ives''', né le {{date|20|octobre|1874|en musique classique}} et mort le {{Date|19|mai|1954|en musique classique}}, est un [[compositeur]] [[États-Unis|américain]].
'''Charles Edward Ives''', né le {{date|20|octobre|1874|en musique classique}} et mort le {{Date|19|mai|1954|en musique classique}}, est un [[compositeur]] [[États-Unis|américain]].


Après avoir appris la composition à l'[[université Yale]], il abandonne le métier de compositeur au début du {{s|XX|e}} pour se lancer dans les [[assurance]]s et fonder une compagnie qui devient prospère. Il continue cependant à composer de la musique sans la faire publier ni jouer. À partir des années 1920 des problèmes de santé l'obligent à arrêter ses activités professionnelles et artistiques. À la même époque, il est découvert par l'avant-garde musicale de New York qui commence à faire jouer sa musique. La création dans les années 1930 de la ''[[Concord Sonata]]'', et en 1947 de sa troisième [[symphonie]] qui obtient le [[prix Pulitzer de musique]], révèlent Ives à la critique et au public américain. Certaines œuvres d'envergure comme sa quatrième symphonie ne sont pourtant jouées que bien après sa mort. La musique de Charles Ives est originale, à la fois par l'utilisation de techniques musicales avant-gardistes et par les emprunts à la musique populaire.
Après avoir appris la composition à l'[[université Yale]], il abandonne le métier de compositeur au début du {{s|XX|e}} pour se lancer dans les [[assurance]]s et fonder une compagnie qui devient prospère. Il continue cependant à composer de la musique sans la faire publier ni jouer. À partir des années 1920 des ennuis de santé l'obligent à arrêter ses activités professionnelles et artistiques. À la même époque, il est découvert par l'avant-garde musicale de New York qui commence à faire jouer sa musique. La création dans les années 1930 de la ''[[Concord Sonata]]'', et en 1947 de sa troisième [[symphonie]] qui obtient le [[prix Pulitzer de musique]], révèlent Ives à la critique et au public américain. Certaines œuvres d'envergure comme sa quatrième symphonie ne sont pourtant jouées que bien après sa mort. La musique de Charles Ives est originale, à la fois par l'utilisation de techniques musicales avant-gardistes et par les emprunts à la musique populaire.


== Biographie ==
== Biographie ==
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[[Image:Charles Ives pitcher.jpg|thumb|upright|Photographie de Charles Ives (à gauche) membre de l'équipe de baseball de la Hopkins School]]
[[Image:Charles Ives pitcher.jpg|thumb|upright|Photographie de Charles Ives (à gauche) membre de l'équipe de baseball de la Hopkins School]]


Charles Ives est né à [[Danbury (Connecticut)|Danbury]], dans l'État du [[Connecticut]]. Son père, George Ives, était chef de la musique de l'artillerie de l'union dans l'armée des États-Unis durant la [[guerre de Sécession]]. L'une des choses ayant pu l'avoir influencé fut d'avoir écouté dans la place de Danbury la [[fanfare]] de son père simultanément avec d'autres [[fanfare]]s venant des autres côtés de la place. Son père lui donna quelques cours de théorie musicale avec une grande ouverture d'esprit, encourageant son fils à expérimenter des harmonisations [[bitonalité|bitonales]] voire [[polytonalité|polytonales]]. Il s'entraîna ainsi à chanter des mélodies dans une [[tonalité]] tandis que son père l'accompagnait dans une autre tonalité. Il lui fit également découvrir la musique de [[Stephen Foster]], à savoir des [[chanson]]s populaires américaines. Ives devint [[organiste]] à l'âge de 14 ans, et écrivit différents hymnes religieux et chants pour sa paroisse, y compris ses ''Variations on « America »''.
Charles Ives est né à [[Danbury (Connecticut)|Danbury]], dans l'État du [[Connecticut]]. Son père, George Ives, était chef de la musique de l'artillerie de l'union dans l'armée des États-Unis durant la [[guerre de Sécession]]. L'une des choses ayant pu l'avoir influencé fut d'avoir écouté sur la place de Danbury la [[fanfare]] de son père simultanément avec d'autres [[fanfare]]s jouant sur d'autres côtés de la place. Son père lui donna quelques cours de théorie musicale avec une grande [[ouverture d'esprit]], encourageant son fils à expérimenter des harmonisations [[bitonalité|bitonales]] voire [[polytonalité|polytonales]]. Il s'entraîna ainsi à chanter des mélodies dans une [[tonalité]] tandis que son père l'accompagnait dans une autre tonalité. Il lui fit également découvrir la musique de [[Stephen Foster]], à savoir des [[chanson]]s populaires américaines. Ives devint [[organiste]] à l'âge de 14 ans, et écrivit différents hymnes religieux et chants pour sa paroisse, y compris ses ''Variations on « America »''.


Ives partit pour [[New Haven]] en [[1893]], et fut diplômé à l'[[Hopkins School]]. Puis en septembre [[1894]], il étudia à l'[[Université Yale]] les cours d'[[Horatio Parker]]. Il y composa plusieurs pièces dans le style [[choral]] d'une manière similaire à son mentor, écrivant des musiques d'église et même une musique de [[campagne électorale]] pour [[William McKinley]]. Pendant cette période plusieurs de ses pièces sont publiées, dont notamment une [[Marche (musique)|marche]], ''Intercollegiate'', qui sera jouée lors de l'inauguration de la présidence de McKinley<ref>{{Ouvrage |langue=en |titre=Charles Ives and His World |auteur=J. Peter Burkholder |éditeur=PUP|lieu=Princeton|isbn=9780691011639|passage=7|pages=464}}</ref>. Le père de Charles mourut le {{date|4|novembre|1894}}, et ce fut un choc pour le jeune compositeur qui l'avait idéalisé. Il continua par conséquent à mener les expérimentations musicales débutées avec lui, qu'il poussa assez loin. Ives termina ses études à Yale dans des domaines très différents, comprenant le grec, le latin, les mathématiques et la littérature. Il fut membre des [[société secrète|sociétés secrètes]] [[Delta Kappa Epsilon]] et [[Wolf's Head]], ainsi que président de l'[[Ivy League]]. Ses œuvres ''Calcium Light Night'' et ''Yale-Princeton Football Game'' démontrent l'influence de l'université sur ses compositions. Il écrivit sa ''[[Symphonie 1 de Charles Ives|Symphonie {{}}1]]'' en guise de [[Mémoire (écrit)|thèse]] de fin d'études sous le tutorat de Parker.
Ives partit pour [[New Haven]] en [[1893]], et fut diplômé à l'[[Hopkins School]]. Puis en septembre [[1894]], il étudia à l'[[Université Yale]] les cours d'[[Horatio Parker]]. Il y composa plusieurs pièces dans le style [[choral]] d'une manière similaire à son mentor, écrivant des musiques d'église et même une musique de [[campagne électorale]] pour [[William McKinley]]. Pendant cette période plusieurs de ses pièces sont publiées, dont notamment une [[Marche (genre musical)|marche]], ''Intercollegiate'', qui sera jouée lors de l'inauguration de la présidence de McKinley<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=J. Peter Burkholder |titre=Charles Ives and His World |éditeur=PUP |lieu=Princeton |année=1996 |pages totales=452 |pages=464 |passage=7 |isbn=978-0-691-01163-9 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=DRCnDwAAQBAJ&printsec=frontcover}}</ref>. Le père de Charles mourut le {{date|4|novembre|1894}}, et ce fut un choc pour le jeune compositeur qui l'avait idéalisé. Il continua par conséquent à mener les expérimentations musicales débutées avec lui, qu'il poussa assez loin. Ives termina ses études à Yale dans des domaines très différents, comprenant le grec, le latin, les mathématiques et la littérature. Il fut membre des [[société secrète|sociétés secrètes]] [[Delta Kappa Epsilon]] et [[Wolf's Head]], ainsi que président de l'[[Ivy League]]. Ses œuvres ''Calcium Light Night'' et ''Yale-Princeton Football Game'' démontrent l'influence de l'université sur ses compositions. Il écrivit sa ''[[Symphonie no 1 (Ives)|Symphonie {{numéro|1}}]]'' en guise de [[Mémoire (écrit)|thèse]] de fin d'études sous le tutorat de Parker.


En [[1898]], après l'obtention de son diplôme à Yale, il accepta un travail à {{unité|5|$}} par semaine de préposé dans une compagnie d'[[assurance]] de [[New York]] (Mutual Life Insurance Company), et déménagea dans une chambre d'appartement à New York qu'il partagea avec d'autres jeunes hommes. Il continuera d'être organiste à l'église jusqu'en [[1906]]. En [[1899]], il changea pour l'agence ''Charles H. Raymond & Co.'', où il resta jusqu'en 1906. En [[1907]], suite aux échecs de ''Raymond & Co.'', lui et son ami Julian W. Myrick créèrent leur propre compagnie d'assurance ''Ives & Co.'', qui devint plus tard ''Ives & Myrick'', dans laquelle il demeura jusqu'à sa retraite. Il composait pendant ses temps libres, et travailla jusqu'à son mariage comme organiste à Danbury, New Haven, Bloomfield (New Jersey) et New York. En 1907, Ives subit sa première attaque cardiaque qui fut suivie de plusieurs autres. Ces attaques ont probablement eu une origine plutôt psychologique que physique. Certains l'attribuent à sa carrière duale<ref>{{Ouvrage|titre=Charles Edward Ives and His Piano Sonata No. 2 |auteur=Alice S. Reed|éditeur=Trafford|pages=|isbn=9781412044745|passage=38}}</ref>. Mais après sa guérison, Ives connut sa période la plus créative en tant que compositeur.
En [[1898]], après l'obtention de son diplôme à Yale, il accepta un travail à {{unité|5|$}} par semaine de préposé dans une compagnie d'[[assurance]] de [[New York]] (Mutual Life Insurance Company), et déménagea dans une chambre d'appartement à New York qu'il partagea avec d'autres jeunes hommes. Il continuera d'être organiste à l'église jusqu'en [[1906]]. En [[1899]], il changea pour l'agence ''Charles H. Raymond & Co.'', où il resta jusqu'en 1906. En [[1907]], à la suite des échecs de ''Raymond & Co.'', lui et son ami Julian W. Myrick créèrent leur propre compagnie d'assurance ''Ives & Co.'', qui devint plus tard ''Ives & Myrick'', dans laquelle il demeura jusqu'à sa retraite. Il composait pendant ses temps libres, et travailla jusqu'à son mariage comme organiste à Danbury, New Haven, Bloomfield (New Jersey) et New York. En 1907, Ives subit sa première attaque cardiaque qui fut suivie de plusieurs autres. Ces attaques ont probablement eu une origine plutôt psychologique que physique. Certains l'attribuent à sa carrière duale<ref>{{Ouvrage|auteur1=Alice S. Reed|titre=Charles Edward Ives and His Piano Sonata No. 2|éditeur=Trafford|année=2005|pages totales=171|passage=38|isbn=978-1-4120-4474-5|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=Yf7MwQDXQVAC&printsec=frontcover}}</ref>. Mais après sa guérison, Ives connut sa période la plus créative en tant que compositeur.


Il épousa Harmony Twitchell en [[1908]], puis ils s'installèrent dans leur appartement à New York. Il eut une remarquable carrière dans les assurances, tout en continuant à être un compositeur prolifique jusqu'à une rechute de ses attaques cardiaques en [[1918]]. Après cela, il composa très peu : ce furent ses dernières œuvres. Parmi celles-ci, on trouve la chanson ''Sunrise'' en août [[1926]]. En [[1922]], Ives publia ses ''114 Songs'' qui représentent l'ampleur de son travail de compositeur. Celles-ci incluent des thèmes qu'il écrivit adolescent, et d'autres très [[dissonance|dissonants]] comme ''The Masses (Majority)''.
Il épousa Harmony Twitchell en [[1908]], puis ils s'installèrent dans leur appartement à New York. Il eut une remarquable carrière dans les assurances, tout en continuant à être un compositeur prolifique jusqu'à une rechute de ses attaques cardiaques en [[1918]]. Après cela, il composa très peu : ce furent ses dernières œuvres. Parmi celles-ci, on trouve la chanson ''Sunrise'' en août [[1926]]. En [[1922]], Ives publia ses ''114 Songs'' qui représentent l'ampleur de son travail de compositeur. Celles-ci incluent des thèmes qu'il écrivit adolescent, et d'autres très [[Dissonance (musique)|dissonants]] comme ''The Masses (Majority)''.


Son épouse raconte qu'un matin en [[1927]], il arriva en larmes disant qu'il ne pouvait plus rien composer : {{citation|nothing sounds right}} (rien ne sonne bien). De nombreuses thèses furent élaborées pour expliquer son silence durant ses dernières années, qui semblèrent aussi mystérieuses que celles de la vie de [[Jean Sibelius]], lui-même ayant arrêté brutalement de composer à peu près à la même période. Ives ayant de plus en plus de problèmes de santé, il continua cependant à réviser et retravailler ses premières œuvres. En [[1930]], il prit sa retraite du milieu des assurances, ce qui lui donna plus de temps pour se consacrer à la musique, mais il resta incapable d'écrire de nouvelles compositions. Dans les [[années 1940]], il révisa sa ''Concord Sonata'', qu'il publia accompagnée des ''Essais avant une sonate'' parus à compte d'auteur en [[1920]].
Son épouse raconte qu'un matin en [[1927]], il arriva en larmes disant qu'il ne pouvait plus rien composer : {{citation|nothing sounds right}} (rien ne sonne bien). De nombreuses thèses furent élaborées pour expliquer son silence durant ses dernières années, qui semblèrent aussi mystérieuses que celles de la vie de [[Jean Sibelius]], lui-même ayant arrêté brutalement de composer à peu près à la même période. Ives ayant de plus en plus d'ennuis de santé, il continua cependant à réviser et retravailler ses premières œuvres. En [[1930]], il prit sa retraite du milieu des assurances, ce qui lui donna plus de temps pour se consacrer à la musique, mais il resta incapable d'écrire de nouvelles compositions. Dans les [[années 1940]], il révisa sa ''Concord Sonata'', qu'il publia accompagnée des ''Essais avant une sonate'' parus à compte d'auteur en [[1920]].


Charles Ives mourut en [[1954]], à [[New York]], à l'âge de 79 ans. Son épouse est décédée en 1969 à 92 ans<ref>{{en}}[http://memory.loc.gov/diglib/ihas/loc.natlib.ihas.200035714/default.html memory.loc.gov]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://www.biography.com/people/charles-ives-36963 biography.com]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://global.britannica.com/biography/Charles-Edward-Ives global.britannica.com]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://www.classicalnotes.net/columns/ives.html classicalnotes.net]</ref>.
Charles Ives mourut en [[1954]], à [[New York]], à l'âge de 79 ans. Son épouse est décédée en 1969 à 92 ans<ref>{{en}}[http://memory.loc.gov/diglib/ihas/loc.natlib.ihas.200035714/default.html memory.loc.gov]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://www.biography.com/people/charles-ives-36963 biography.com]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://global.britannica.com/biography/Charles-Edward-Ives global.britannica.com]</ref>{{,}}<ref>{{en}}[http://www.classicalnotes.net/columns/ives.html classicalnotes.net]</ref>.


== Sa musique ==
== Sa musique ==
Ives a étudié à Yale, et sa première symphonie montre une maîtrise de l'écriture en [[forme sonate]] dans le contexte de la fin du {{s|XIX|e}}, mais également une {{refnec|tendance iconoclaste}}, avec le second thème qui sous-entend plusieurs directions harmoniques différentes. Son père était chef de fanfare, et tout comme [[Hector Berlioz]], Ives était fasciné pour les musiques d'extérieur et leur instrumentation. Ses tentatives de fusionner ces deux éléments, et son admiration pour [[Beethoven]] sont les lignes conductrices de sa vie musicale.
Ives a étudié à Yale, et sa première symphonie montre une maîtrise de l'écriture en [[forme sonate]] dans le contexte de la fin du {{s|XIX|e}}, mais également une {{refnec|tendance iconoclaste}}, avec le second thème qui sous-entend plusieurs directions harmoniques différentes. Son père était chef de fanfare, et tout comme [[Hector Berlioz]], Ives était fasciné pour les musiques d'extérieur et leur instrumentation. Ses tentatives de fusionner ces deux éléments, et son admiration pour [[Ludwig van Beethoven|Beethoven]] sont les lignes conductrices de sa vie musicale.


Ives publia une collection de ses nombreuses chansons, la plupart avec des parties pour [[piano]] qui faisant écho au [[Musique moderne|mouvement moderne]] qui commençait en [[Europe]], avec l'usage de bitonalité et pantonalité. Il fut un pianiste accompli, capable d'improviser dans différents styles, même ceux les plus récents et modernes. Il est aujourd'hui surtout connu pour sa [[Orchestre symphonique|musique orchestrale]], mais il composa également deux [[quatuors à cordes]] et d'autres pièces de [[musique de chambre]]. Son travail d'organiste l'amena à écrire ses ''Variations on « America »'' en [[1891]], dont la première eu lieu un [[4 juillet]], lors d'un récital célébrant la [[déclaration d'indépendance des États-Unis]]. Cette pièce reprend le thème (celui de l'hymne national du [[Royaume-Uni]]) à travers une série de variations relativement normales et plaisantes. L'une de ces variations est dans le style d'une [[Polonaise (musique)|polonaise]], une autre qui fut ajoutée quelques années après avoir été composée représente la première utilisation de bitonalité. [[William Schuman]] en fit un arrangement pour orchestre en [[1964]].
Ives publia une collection de ses nombreuses chansons, la plupart avec des parties pour [[piano]] qui faisant écho au [[Musique moderne|mouvement moderne]] qui commençait en [[Europe]], avec l'usage de bitonalité et pantonalité. Il fut un pianiste accompli, capable d'improviser dans différents styles, même ceux les plus récents et modernes. Il est aujourd'hui surtout connu pour sa [[Orchestre symphonique|musique orchestrale]], mais il composa également deux [[Quatuor à cordes|quatuors à cordes]] et d'autres pièces de [[musique de chambre]]. Son travail d'organiste l'amena à écrire ses ''Variations on « America »'' en [[1891]], dont la première eut lieu un [[4 juillet]], lors d'un récital célébrant la [[déclaration d'indépendance des États-Unis]]. Cette pièce reprend le thème (celui de l'hymne national du [[Royaume-Uni]]) à travers une série de variations relativement normales et plaisantes. L'une de ces variations est dans le style d'une [[Polonaise (musique)|polonaise]], une autre qui fut ajoutée quelques années après avoir été composée représente la première utilisation de bitonalité. [[William Schuman]] en fit un arrangement pour orchestre en [[1964]].


Ives composa quatre symphonies, mais c'est avec ''The Unanswered Question'' (1906 révisé en 1930-35), pièce écrite pour une formation très inhabituelle de [[trompette (instrument)|trompette]] soliste, quatre [[flûte]]s, et [[quatuor à cordes]], qu'il posa l'environnement musical et sonore qui restera comme son style. Les cordes, situées hors de la scène, jouent très lentement, tandis que la trompette, seule face au public, joue à différentes occasions des motifs très courts que Ives décrit comme « l'éternelle question de l'existence ». À chaque fois, les flûtes, sur scène, répondent à la trompette par une explosion stridente, excepté la toute dernière fois : c'est la question sans réponse (''the unanswered question''). La pièce est typique de Ives, car elle juxtapose des éléments variés et disparates, conduits par la trame d'une histoire dont nous n'avons jamais réellement conscience, ce qui rend la pièce formidablement mystérieuse.
Ives composa quatre symphonies, mais c'est avec ''The Unanswered Question'' (1906 révisé en 1930-35), pièce écrite pour une formation très inhabituelle de [[trompette (instrument)|trompette]] soliste, quatre [[flûte]]s, et [[quatuor à cordes]], qu'il posa l'environnement musical et sonore qui restera comme son style. Les cordes, situées hors de la scène, jouent très lentement, tandis que la trompette, seule face au public, joue à différentes occasions des motifs très courts que Ives décrit comme « l'éternelle question de l'existence ». À chaque fois, les flûtes, sur scène, répondent à la trompette par une explosion stridente, excepté la toute dernière fois : c'est la question sans réponse (''the unanswered question''). La pièce est typique de Ives, car elle juxtapose des éléments variés et disparates, conduits par la trame d'une histoire dont nous n'avons jamais réellement conscience, ce qui rend la pièce formidablement mystérieuse.


Sa ''[[Concord Sonata|Sonate pour piano {{|2}} : Concord, Mass., 1840–60]]'' (1909–15), est probablement sa pièce pour piano solo la plus célèbre (il existe des parties optionnelles pour [[alto (violon)|alto]] et [[flûte]]). Rythmiquement et harmoniquement, c'est une pièce que l'on peut qualifier d'aventureuse, et qui démontre son attachement à la [[5e symphonie de Beethoven]] dont il cite le thème à plusieurs reprises. Elle compose également l'un des exemples les plus frappants de son expérimentalisme : dans le second mouvement, il indique au pianiste d'utiliser une pièce en bois de {{unité|14¾|pouces}} ({{unité|37.5|cm}}) pour créer un ''cluster chord'', c’est-à-dire un accord de touches noires ou blanches consécutives sur la longueur de cette pièce.
Sa ''[[Concord Sonata|Sonate pour piano {{numéro|2}} : Concord, Mass., 1840–60]]'' (1909–15), est probablement sa pièce pour piano solo la plus célèbre (il existe des parties optionnelles pour [[Alto (instrument à cordes)|alto]] et [[flûte]]). Rythmiquement et harmoniquement, c'est une pièce que l'on peut qualifier d'aventureuse, et qui démontre son attachement à la [[Symphonie no 5 de Beethoven|cinquième symphonie de Beethoven]] dont il cite le thème à plusieurs reprises. Elle compose également l'un des exemples les plus frappants de son expérimentalisme : dans le second mouvement, il indique au pianiste d'utiliser une pièce en bois de {{unité|14¾|pouces}} ({{unité|37.5|cm}}) pour créer un ''cluster chord'', c’est-à-dire un accord de touches noires ou blanches consécutives sur la longueur de cette pièce.
La sonate Concord marque la profonde influence qu'ont eue sur sa musique les écrivains [[Transcendantalisme (États-Unis)|transcendantalistes]]. Chaque mouvement porte le nom d'un des quatre plus importants membre de ce groupe : [[Ralph Waldo Emerson]], [[Nathaniel Hawthorne]], [[Bronson Alcott]] et [[Henry David Thoreau]].
La sonate Concord marque la profonde influence qu'ont eue sur sa musique les écrivains [[Transcendantalisme (États-Unis)|transcendantalistes]]. Chaque mouvement porte le nom d'un des quatre plus importants membre de ce groupe : [[Ralph Waldo Emerson]], [[Nathaniel Hawthorne]], [[Bronson Alcott]] et [[Henry David Thoreau]].


La pièce la plus remarquable dans son répertoire orchestral est certainement son imposante ''Symphonie {{|4}}'' (1910–16). Celle-ci nécessite une grosse [[Instrument de percussion|section de percussions]], deux pianos (les deux accordés avec un [[quart de ton]] d'écart), un [[orgue]], un groupe supplémentaire de cordes éloignées, un grand [[Chœur (musique)|chœur]], trois [[saxophone]]s optionnels, et pour finir un « ether organ » (l'instrument auquel pensait Ives n'est pas évident, mais habituellement on utilise un [[thérémine]] ou un [[synthétiseur]]). L'œuvre fait penser à ''The Unanswered Question'', d'ailleurs Ives dit lui-même que la pièce était « une question ouverte du 'Quoi' et du 'Comment' que l'esprit de l'homme se pose à propos de la vie ». L'utilisation de citations musicales est là encore abondante, particulièrement dans le premier mouvement, et la musique ne manque pas de nouveautés en matière d'effets sonores. Par exemple, dans le second mouvement, un [[trémolo]] secoue l'orchestre entier. Dans le mouvement final, il y a une sorte de combat entre les sons discordants et une musique tonale plus traditionnelle. Finalement entre la partie de chœur sans paroles, l'ambiance s'apaise, et le morceau se termine avec juste les percussions qui jouent tranquillement.
La pièce la plus remarquable dans son répertoire orchestral est certainement son imposante ''Symphonie {{numéro|4}}'' (1910–16). Celle-ci nécessite une grosse [[Instrument de percussion|section de percussions]], deux pianos (les deux accordés avec un [[quart de ton]] d'écart), un [[orgue]], un groupe supplémentaire de cordes éloignées, un grand [[Chœur (instrument)|chœur]], trois [[saxophone]]s optionnels, et pour finir un « ether organ » (l'instrument auquel pensait Ives n'est pas évident, mais habituellement on utilise un [[thérémine]] ou un [[synthétiseur]]). L'œuvre fait penser à ''The Unanswered Question'', d'ailleurs Ives dit lui-même que la pièce était « une question ouverte du ''Quoi'' et du ''Comment'' que l'esprit de l'homme se pose à propos de la vie ». L'utilisation de citations musicales est là encore abondante, particulièrement dans le premier mouvement, et la musique ne manque pas de nouveautés en matière d'effets sonores. Par exemple, dans le second mouvement, un [[trémolo]] secoue l'orchestre entier. Dans le mouvement final, il y a une sorte de combat entre les sons discordants et une musique tonale plus traditionnelle. Finalement entre la partie de chœur sans paroles, l'ambiance s'apaise, et le morceau se termine avec juste les percussions qui jouent tranquillement.


Il faudra attendre [[1965]] pour que la symphonie ait droit à une représentation complète, c’est-à-dire environ 50 ans après les dernières retouches de la composition et 11 ans après la mort du compositeur<ref>''L'encyclopédie de toutes les musiques'', Hachette pratique, {{ISBN|978-2012-369603}} {{p.|271}}</ref>.
Il faudra attendre [[1965]] pour que la symphonie ait droit à une représentation complète, c’est-à-dire environ 50 ans après les dernières retouches de la composition et 11 ans après la mort du compositeur<ref>''L'encyclopédie de toutes les musiques'', Hachette pratique, {{ISBN|978-2012-369603}} {{p.|271}}</ref>.


Ives mourut avant de terminer sa ''Symphonie de l'Univers'', qu'il ne parvint pas à assembler durant sa vie malgré deux décennies de travail. Ceci à cause de ses problèmes de santé, aussi bien que de sa conception fluctuante de la composition. Celle-ci consiste en un découpage en trois parties temporelles : passé (genèse des océans et des montagnes), présent (terre, évolution de la nature et de l'humanité), futur (ciel, la montée vers le spirituel), ainsi qu'une décomposition spatiale en deux orchestres ou plus. Il y a eu plusieurs tentatives pour compléter ou jouer l'actuelle version. Cependant, personne n'arrive à cerner l'idée de l'interprétation générale. La symphonie reprend des idées de la ''Symphonie {{|4}}'' qui sont développées jusqu'à un niveau très poussé, avec des rythmes complexes croisés et des dissonances difficiles en couches, le tout au travers de combinaisons instrumentales et d'orchestrations inusitées et inventives.
Ives mourut avant de terminer sa ''Symphonie de l'Univers'', qu'il ne parvint pas à assembler durant sa vie malgré deux décennies de travail. Ceci à cause de ses ennuis de santé, aussi bien que de sa conception fluctuante de la composition. Celle-ci consiste en un découpage en trois parties temporelles : passé (genèse des océans et des montagnes), présent (terre, évolution de la nature et de l'humanité), futur (ciel, la montée vers le spirituel), ainsi qu'une décomposition spatiale en deux orchestres ou plus. Il y a eu plusieurs tentatives pour compléter ou jouer l'actuelle version. Cependant, personne n'arrive à cerner l'idée de l'interprétation générale. La symphonie reprend des idées de la ''Symphonie {{numéro|4}}'' qui sont développées jusqu'à un niveau très poussé, avec des rythmes complexes croisés et des dissonances difficiles en couches, le tout au travers de combinaisons instrumentales et d'orchestrations inusitées et inventives.


Les travaux de musique de chambre comptent le ''Quatuor à cordes {{|2}}'', dans lequel les voix atteignent des sommets en matière d'[[Contrepoint rigoureux|écriture contrapuntique]], s'échelonnant depuis des pointes dissonantes aiguës dans le mouvement nommé ''Arguments'' jusqu'à une lenteur transcendantale. Cette étendue sur des extrêmes est fréquente dans la musique de Ives, qui impose par ses résonances dissonantes contrastée avec des calmes lyriques. Le langage de Ives, tout comme celui de Mahler, utilise beaucoup de lignes mélodiques indépendantes. On le considère difficile à jouer car beaucoup d'indications d'interprétation sont absentes. Ce travail a eu une influence notable sur, entre autres, le premier quatuor d'[[Elliott Carter]].
Les travaux de musique de chambre comptent le ''Quatuor à cordes {{numéro|2}}'', dans lequel les voix atteignent des sommets en matière d'[[Contrepoint rigoureux|écriture contrapuntique]], s'échelonnant depuis des pointes dissonantes aiguës dans le mouvement nommé ''Arguments'' jusqu'à une lenteur transcendantale. Cette étendue sur des extrêmes est fréquente dans la musique de Ives, qui impose par ses résonances dissonantes contrastée avec des calmes lyriques. Le langage de Ives, tout comme celui de Mahler, utilise beaucoup de lignes mélodiques indépendantes. On le considère difficile à jouer car beaucoup d'indications d'interprétation sont absentes. Ce travail a eu une influence notable sur, entre autres, le premier quatuor d'[[Elliott Carter]].


== Accueil de sa musique ==
== Accueil de sa musique ==
La plupart de ses œuvres durent attendre plusieurs années avant d'être interprétées. Les difficultés d'interprétation dues à la complexité rythmique de ses pièces pour orchestre en firent des défis difficiles à relever<ref>{{en}} [http://www.bach-cantatas.com/Lib/Ives-Charles.htm bach-cantatas.com]</ref>.
La plupart de ses œuvres durent attendre plusieurs années avant d'être interprétées. Les difficultés d'interprétation dues à la complexité rythmique de ses pièces pour orchestre en firent des défis difficiles à relever<ref>{{en}} [http://www.bach-cantatas.com/Lib/Ives-Charles.htm bach-cantatas.com]</ref>.


[[Henry Cowell]] et [[Elliott Carter]] furent parmi les premiers défenseurs de sa musique. Invité par Cowell à participer dans son magazine périodique consacré aux musiques modernes ''New Music'', un bon nombre de ses partitions y furent publiées.
[[Henry Cowell]], [[Nicolas Slonimsky]] et [[Elliott Carter]] furent parmi les premiers défenseurs de sa musique. Invité par Cowell à participer dans son magazine périodique consacré aux musiques modernes ''New Music'', un bon nombre de ses partitions y furent publiées.


Dans les années 1940, il rencontra [[Lou Harrison]], un fan de sa musique qui en fit la promotion. Harrison dirigea la première de la ''Symphonie {{n°|3}}'' (1904) en 1946. L'année suivante, cette pièce remporta le [[Prix Pulitzer de la musique]]. Ives donna l'argent de ce prix (la moitié allant à Harrison), disant « les prix sont pour les jeunes garçons, et j'ai eu le temps de grandir ».
Dans les années 1940, il rencontra [[Lou Harrison]], un fan de sa musique qui en fit la promotion. Harrison dirigea la première de la ''Symphonie {{n°|3}}'' (1904) en 1946. L'année suivante, cette pièce remporta le [[Prix Pulitzer de la musique]]. Ives donna l'argent de ce prix (la moitié allant à Harrison), disant « les prix sont pour les jeunes garçons, et j'ai eu le temps de grandir ».
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=== Orchestre ===
=== Orchestre ===
* [[Symphonie 1 de Charles Ives|Symphonie {{|1}} en ré mineur]] (1896–98)
* [[Symphonie no 1 (Ives)|Symphonie {{numéro|1}} en ré mineur]] (1896–98)
* [[Symphonie nº 2 de Charles Ives|Symphonie {{|2}}]] (1897–1901)
* [[Symphonie nº 2 de Charles Ives|Symphonie {{numéro|2}}]] (1897–1901)
* [[Symphonie nº 3 de Charles Ives|Symphonie {{|3}}]], ''The [[Camp meeting|Camp Meeting]]'' (1901–04)
* [[Symphonie nº 3 de Charles Ives|Symphonie {{numéro|3}}]], ''The [[Camp meeting|Camp Meeting]]'' (1901–04)
* ''[[Central Park in the Dark]]'' pour orchestre de chambre (1898–1907)
* ''[[Central Park in the Dark]]'' pour orchestre de chambre (1898–1907)
* ''[[The Unanswered Question]]'' pour groupe de chambre (cordes et vents) (1908)
* ''[[The Unanswered Question]]'' pour groupe de chambre (cordes et vents) (1908)
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=== Piano ===
=== Piano ===
* Sonate pour piano {{n°|1}} (1902–09)
* Sonate pour piano {{n°|1}} (1902–09)
* ''Three-Page Sonata'' (septembre 1905) Création, 1949 par William Masselos.
* [[Concord Sonata|Sonate pour piano {{n°|2}}]], ''Concord, Mass., 1840–60'' (1909–15) (révisée plusieurs fois par Ives)
* [[Concord Sonata|Sonate pour piano {{n°|2}}]], ''Concord, Mass., 1840–60'' (1909–15) (révisée plusieurs fois par Ives)
* Three Quarter Tone Piano Pieces (1923–24) pour deux pianos.
* ''Three Quarter Tone Piano Pieces'' (1923–1924) pour deux pianos.


=== Mélodies ===
=== Mélodies ===
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=== Transcriptions d'après Ives ===
=== Transcriptions d'après Ives ===
* ''Old Home Days'' (pour [[Orchestre d'harmonie|ensemble à vent]], arrangé par Jonathan Elkus)
* ''Old Home Days'' (pour [[Orchestre d'harmonie|ensemble à vent]], arrangé par Jonathan Elkus)
* Variations sur ''America'' (pour orchestre) arrangé par William Shuman
* Variations sur ''America'' (pour orchestre) arrangé par [[William Schuman]]
* ''Concord Symphony'' orchestration par [[Henry Brant]] de la ''Concord Sonata''.


== Discographie ==
== Discographie ==
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* 1971 : ''Zwischen Orgel und Leier -Kasten'', Gerd Zacher, [[WERGO]] WER 60 058
* 1971 : ''Zwischen Orgel und Leier -Kasten'', Gerd Zacher, [[WERGO]] WER 60 058
* 1974 : ''The Entertainer Virgil Fox'', Virgil Fox, RCA Red Seal ARL1-0666
* 1974 : ''The Entertainer Virgil Fox'', Virgil Fox, RCA Red Seal ARL1-0666
* 1991 : ''Americanische Orgelmusik'', Gunther Kaunzinger, Christophorus SCGLX 73940
* 1991 : ''Americanische Orgelmusik'', Gunther Kaunzinger, [[Christophorus Records|Christophorus]] SCGLX 73940
* 2005 : ''Organa Americana'', Tom Trenney, Pro Organo CD-7196
* 2005 : ''Organa Americana'', Tom Trenney, Pro Organo CD-7196


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=== Chœur ===
=== Chœur ===
* 1963 : ''On Tour'' Robert Shaw ( direction), The Robert Shaw Chorale, RCA Red Seal LSC-2676
* 1963 : ''On Tour'' Robert Shaw (direction), The Robert Shaw Chorale, RCA Red Seal LSC-2676
* 1966 : '' Charles Ives: Music for Chorus'' Gregg Smith ( direction ), Gregg Smith singers, the Texas Boys Choir, Ithaca College Concert Choir, the Columbia chamber ensemble, Columbia ML 6321
* 1966 : '' Charles Ives: Music for Chorus'' Gregg Smith (direction), Gregg Smith singers, the Texas Boys Choir, Ithaca College Concert Choir, the Columbia chamber ensemble, Columbia ML 6321
* 1969 : '' New Music of Charles Ives '' Gregg Smith ( direction ), Gregg Smith singers, the Columbia chamber ensemble, Columbia MS 7321
* 1969 : '' New Music of Charles Ives '' Gregg Smith (direction), Gregg Smith singers, the Columbia chamber ensemble, Columbia MS 7321
* 1971 : ''Charles Ives: Vocal Music'' Alden Gilchrist ( direction ), Berkeley Chamber Singers, Musical Heritage Society MHS 1240
* 1971 : ''Charles Ives: Vocal Music'' Alden Gilchrist (direction), Berkeley Chamber Singers, Musical Heritage Society MHS 1240
* 1978 : ''American Music for Chorus'' John Oliver ( direction ) Tanglewood Festival Chorus, Deutsche Grammophon 2530 912
* 1978 : ''American Music for Chorus'' John Oliver (direction) Tanglewood Festival Chorus, Deutsche Grammophon 2530 912


=== Orchestre ===
=== Orchestre ===
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* 2000 : ''The Symphonies'' - [[Christoph von Dohnanyi]], [[Zubin Mehta]], [[Neville Marriner]]. Decca 466-745-2
* 2000 : ''The Symphonies'' - [[Christoph von Dohnanyi]], [[Zubin Mehta]], [[Neville Marriner]]. Decca 466-745-2
=== Chambre ===
=== Chambre ===
* 1974 : ''Complete chamber music'' artistes divers (direction Frank Glazer) Vox BoxSVBX 564
* 1974 : ''Complete chamber music'' artistes divers (direction [[Frank Glazer]]) Vox BoxSVBX 564
* 1993 : ''Music For String Quartet'' - Mondriaan String Quartet, Etcetera KTC1169
* 1993 : ''Music For String Quartet'' - Mondriaan String Quartet, Etcetera KTC1169

=== Mélodie ===
=== Mélodie ===
* 1954 : ''Songs of Charles Ives'' - [[Helen Boatwright]], soprano et [[John Kirkpatrick]] piano, Overtone Records réédition CRI CD 675
* 1954 : ''Songs of Charles Ives'' - [[Helen Boatwright]], soprano et [[John Kirkpatrick]] piano, Overtone Records réédition CRI CD 675
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* 1992 : ''The Complete songs of Charles Ives'' en quatre disques - Divers artistes, Albany TROY 077 à TROY 080
* 1992 : ''The Complete songs of Charles Ives'' en quatre disques - Divers artistes, Albany TROY 077 à TROY 080
* 2008 : ''Songs '' (intégrale des mélodies de Charles Ives en six disques) - Divers artistes, NAXOS 8.559269 à 8.559274
* 2008 : ''Songs '' (intégrale des mélodies de Charles Ives en six disques) - Divers artistes, NAXOS 8.559269 à 8.559274

== Hommages ==
Depuis 1979, un [[Cratère d'impact|cratère]] de la planète [[Mercure (planète)|Mercure]] est nommé [[Ives (cratère)|Ives]] en son honneur<ref>{{Lien web |titre=Planetary Names: Crater, craters: Ives on Mercury |url=https://planetarynames.wr.usgs.gov/Feature/2761 |site=planetarynames.wr.usgs.gov |consulté le=2020-06-30}}</ref>.


== Notes et références ==
== Notes et références ==
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* Charles Ives, ''Essays Before A Sonata'' New York, The Knickerbocker Press, 1920 {{commentaire biblio|traduction française ''Essais avant une sonate'', in revue Contrechamps {{n°|7}}, 1986 Ed. L'âge d'homme}}
* Charles Ives, ''Essays Before A Sonata'' New York, The Knickerbocker Press, 1920 {{commentaire biblio|traduction française ''Essais avant une sonate'', in revue Contrechamps {{n°|7}}, 1986 Ed. L'âge d'homme}}
* John Kirkpatrick (dir.), ''Charles E. Ives: Memos'' Calder & Boyars, 1973
* John Kirkpatrick (dir.), ''Charles E. Ives: Memos'' Calder & Boyars, 1973

=== Ouvrages généraux ===
* {{Ouvrage|langue=en|auteur=[[Nicolas Slonimsky]]|titre=Perfect Pitch|sous-titre=A Life Story|lieu=New York|éditeur=[[Oxford University Press]]|année=1988|pages totales=263|isbn=0-19-315155-3|id=Slonimsky1988}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur=Nicolas Slonimsky|titre=[[Slonimsky's Book of Musical Anecdotes]]|chapitre=Prophet of Music to come|lieu=New York|éditeur=[[Routledge]]|année=1948|réimpression=2002|pages totales=305|passage=207-210|isbn=0-415-93938-0|id=Slonimsky1948}}


=== Monographie ===
=== Monographie ===
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* {{en}} [[Jan Swafford]], ''{{lang|en|Charles Ives : a Life With Music}}'', éditions W.W. Norton, New York, 1996, {{nobr|xv + 525 p.}}, {{ISBN|0393038939}}, {{LCCN|95022549}}
* {{en}} [[Jan Swafford]], ''{{lang|en|Charles Ives : a Life With Music}}'', éditions W.W. Norton, New York, 1996, {{nobr|xv + 525 p.}}, {{ISBN|0393038939}}, {{LCCN|95022549}}
* J. Peter Burkholder (editor), ''Charles Ives and His World'' Princeton University Press, 1996
* J. Peter Burkholder (editor), ''Charles Ives and His World'' Princeton University Press, 1996
* Gianfranco Vinay, ''Charles Ives et l'utopie sonore américaine'' Paris édition Michel de Maule 2001
* [[Gianfranco Vinay]], ''Charles Ives et l'utopie sonore américaine'' Paris édition Michel de Maule 2001
* Laurent Denave, ''Un siècle de création musicale aux États-Unis. Histoire sociale des productions les plus originales du monde musical américain, de Charles Ives au minimalisme (1890-1990)'', Genève, Contrechamps, 2012
* Laurent Denave, ''Un siècle de création musicale aux États-Unis. Histoire sociale des productions les plus originales du monde musical américain, de Charles Ives au minimalisme (1890-1990)'', Genève, Contrechamps, 2012


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* {{en}} [http://www.charlesives.org/ ''Charles Ives Society''] (site officiel sur le compositeur)
* {{en}} [http://www.charlesives.org/ ''Charles Ives Society''] (site officiel sur le compositeur)
* {{en}} [http://webtext.library.yale.edu/xml2html/music.ives-sinclair.nav.html Catalogue de ses œuvres établi par James Sinclair]
* {{en}} [http://webtext.library.yale.edu/xml2html/music.ives-sinclair.nav.html Catalogue de ses œuvres établi par James Sinclair]
* {{Autorité}}


=== Écouter ===
=== Écouter ===
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* [http://www.ubu.com/sound/slonimsky.html ''Nicolas Slonimsky: History Making Performances''] (œuvres d'Ives dirigé par Nicolas Slonimsky)
* [http://www.ubu.com/sound/slonimsky.html ''Nicolas Slonimsky: History Making Performances''] (œuvres d'Ives dirigé par Nicolas Slonimsky)
* {{ContemporaryMusicOnline|Charles Ives}}
* {{ContemporaryMusicOnline|Charles Ives}}

=== Bases de données et dictionnaires ===
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{{Palette|Lauréats du prix Pulitzer de musique}}
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{{DEFAULTSORT:Ives, Charles}}
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[[Catégorie:Étudiant de l'université Yale]]
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[[Catégorie:Décès en mai 1954]]
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[[Catégorie:Décès à New York]]
[[Catégorie:Décès à New York]]

Version du 19 avril 2024 à 13:24

Charles Ives
Description de cette image, également commentée ci-après
Charles Ives en 1913
Nom de naissance Charles Edward Ives
Naissance
Danbury, Drapeau des États-Unis États-Unis
Décès (à 79 ans)
New York, Drapeau des États-Unis États-Unis
Activité principale Compositeur
Style Musique moderne
Activités annexes Assureur, entrepreneur
Années d'activité 18921926
Formation Université Yale
Maîtres Horatio Parker
Site internet www.charlesives.org

Œuvres principales

Charles Edward Ives, né le et mort le , est un compositeur américain.

Après avoir appris la composition à l'université Yale, il abandonne le métier de compositeur au début du XXe siècle pour se lancer dans les assurances et fonder une compagnie qui devient prospère. Il continue cependant à composer de la musique sans la faire publier ni jouer. À partir des années 1920 des ennuis de santé l'obligent à arrêter ses activités professionnelles et artistiques. À la même époque, il est découvert par l'avant-garde musicale de New York qui commence à faire jouer sa musique. La création dans les années 1930 de la Concord Sonata, et en 1947 de sa troisième symphonie qui obtient le prix Pulitzer de musique, révèlent Ives à la critique et au public américain. Certaines œuvres d'envergure comme sa quatrième symphonie ne sont pourtant jouées que bien après sa mort. La musique de Charles Ives est originale, à la fois par l'utilisation de techniques musicales avant-gardistes et par les emprunts à la musique populaire.

Biographie

Charles Ives en 1889
Photographie de Charles Ives (à gauche) membre de l'équipe de baseball de la Hopkins School

Charles Ives est né à Danbury, dans l'État du Connecticut. Son père, George Ives, était chef de la musique de l'artillerie de l'union dans l'armée des États-Unis durant la guerre de Sécession. L'une des choses ayant pu l'avoir influencé fut d'avoir écouté sur la place de Danbury la fanfare de son père simultanément avec d'autres fanfares jouant sur d'autres côtés de la place. Son père lui donna quelques cours de théorie musicale avec une grande ouverture d'esprit, encourageant son fils à expérimenter des harmonisations bitonales voire polytonales. Il s'entraîna ainsi à chanter des mélodies dans une tonalité tandis que son père l'accompagnait dans une autre tonalité. Il lui fit également découvrir la musique de Stephen Foster, à savoir des chansons populaires américaines. Ives devint organiste à l'âge de 14 ans, et écrivit différents hymnes religieux et chants pour sa paroisse, y compris ses Variations on « America ».

Ives partit pour New Haven en 1893, et fut diplômé à l'Hopkins School. Puis en septembre 1894, il étudia à l'Université Yale les cours d'Horatio Parker. Il y composa plusieurs pièces dans le style choral d'une manière similaire à son mentor, écrivant des musiques d'église et même une musique de campagne électorale pour William McKinley. Pendant cette période plusieurs de ses pièces sont publiées, dont notamment une marche, Intercollegiate, qui sera jouée lors de l'inauguration de la présidence de McKinley[1]. Le père de Charles mourut le , et ce fut un choc pour le jeune compositeur qui l'avait idéalisé. Il continua par conséquent à mener les expérimentations musicales débutées avec lui, qu'il poussa assez loin. Ives termina ses études à Yale dans des domaines très différents, comprenant le grec, le latin, les mathématiques et la littérature. Il fut membre des sociétés secrètes Delta Kappa Epsilon et Wolf's Head, ainsi que président de l'Ivy League. Ses œuvres Calcium Light Night et Yale-Princeton Football Game démontrent l'influence de l'université sur ses compositions. Il écrivit sa Symphonie no 1 en guise de thèse de fin d'études sous le tutorat de Parker.

En 1898, après l'obtention de son diplôme à Yale, il accepta un travail à 5 $ par semaine de préposé dans une compagnie d'assurance de New York (Mutual Life Insurance Company), et déménagea dans une chambre d'appartement à New York qu'il partagea avec d'autres jeunes hommes. Il continuera d'être organiste à l'église jusqu'en 1906. En 1899, il changea pour l'agence Charles H. Raymond & Co., où il resta jusqu'en 1906. En 1907, à la suite des échecs de Raymond & Co., lui et son ami Julian W. Myrick créèrent leur propre compagnie d'assurance Ives & Co., qui devint plus tard Ives & Myrick, dans laquelle il demeura jusqu'à sa retraite. Il composait pendant ses temps libres, et travailla jusqu'à son mariage comme organiste à Danbury, New Haven, Bloomfield (New Jersey) et New York. En 1907, Ives subit sa première attaque cardiaque qui fut suivie de plusieurs autres. Ces attaques ont probablement eu une origine plutôt psychologique que physique. Certains l'attribuent à sa carrière duale[2]. Mais après sa guérison, Ives connut sa période la plus créative en tant que compositeur.

Il épousa Harmony Twitchell en 1908, puis ils s'installèrent dans leur appartement à New York. Il eut une remarquable carrière dans les assurances, tout en continuant à être un compositeur prolifique jusqu'à une rechute de ses attaques cardiaques en 1918. Après cela, il composa très peu : ce furent ses dernières œuvres. Parmi celles-ci, on trouve la chanson Sunrise en août 1926. En 1922, Ives publia ses 114 Songs qui représentent l'ampleur de son travail de compositeur. Celles-ci incluent des thèmes qu'il écrivit adolescent, et d'autres très dissonants comme The Masses (Majority).

Son épouse raconte qu'un matin en 1927, il arriva en larmes disant qu'il ne pouvait plus rien composer : « nothing sounds right » (rien ne sonne bien). De nombreuses thèses furent élaborées pour expliquer son silence durant ses dernières années, qui semblèrent aussi mystérieuses que celles de la vie de Jean Sibelius, lui-même ayant arrêté brutalement de composer à peu près à la même période. Ives ayant de plus en plus d'ennuis de santé, il continua cependant à réviser et retravailler ses premières œuvres. En 1930, il prit sa retraite du milieu des assurances, ce qui lui donna plus de temps pour se consacrer à la musique, mais il resta incapable d'écrire de nouvelles compositions. Dans les années 1940, il révisa sa Concord Sonata, qu'il publia accompagnée des Essais avant une sonate parus à compte d'auteur en 1920.

Charles Ives mourut en 1954, à New York, à l'âge de 79 ans. Son épouse est décédée en 1969 à 92 ans[3],[4],[5],[6].

Sa musique

Ives a étudié à Yale, et sa première symphonie montre une maîtrise de l'écriture en forme sonate dans le contexte de la fin du XIXe siècle, mais également une tendance iconoclaste[réf. nécessaire], avec le second thème qui sous-entend plusieurs directions harmoniques différentes. Son père était chef de fanfare, et tout comme Hector Berlioz, Ives était fasciné pour les musiques d'extérieur et leur instrumentation. Ses tentatives de fusionner ces deux éléments, et son admiration pour Beethoven sont les lignes conductrices de sa vie musicale.

Ives publia une collection de ses nombreuses chansons, la plupart avec des parties pour piano qui faisant écho au mouvement moderne qui commençait en Europe, avec l'usage de bitonalité et pantonalité. Il fut un pianiste accompli, capable d'improviser dans différents styles, même ceux les plus récents et modernes. Il est aujourd'hui surtout connu pour sa musique orchestrale, mais il composa également deux quatuors à cordes et d'autres pièces de musique de chambre. Son travail d'organiste l'amena à écrire ses Variations on « America » en 1891, dont la première eut lieu un 4 juillet, lors d'un récital célébrant la déclaration d'indépendance des États-Unis. Cette pièce reprend le thème (celui de l'hymne national du Royaume-Uni) à travers une série de variations relativement normales et plaisantes. L'une de ces variations est dans le style d'une polonaise, une autre qui fut ajoutée quelques années après avoir été composée représente la première utilisation de bitonalité. William Schuman en fit un arrangement pour orchestre en 1964.

Ives composa quatre symphonies, mais c'est avec The Unanswered Question (1906 révisé en 1930-35), pièce écrite pour une formation très inhabituelle de trompette soliste, quatre flûtes, et quatuor à cordes, qu'il posa l'environnement musical et sonore qui restera comme son style. Les cordes, situées hors de la scène, jouent très lentement, tandis que la trompette, seule face au public, joue à différentes occasions des motifs très courts que Ives décrit comme « l'éternelle question de l'existence ». À chaque fois, les flûtes, sur scène, répondent à la trompette par une explosion stridente, excepté la toute dernière fois : c'est la question sans réponse (the unanswered question). La pièce est typique de Ives, car elle juxtapose des éléments variés et disparates, conduits par la trame d'une histoire dont nous n'avons jamais réellement conscience, ce qui rend la pièce formidablement mystérieuse.

Sa Sonate pour piano no 2 : Concord, Mass., 1840–60 (1909–15), est probablement sa pièce pour piano solo la plus célèbre (il existe des parties optionnelles pour alto et flûte). Rythmiquement et harmoniquement, c'est une pièce que l'on peut qualifier d'aventureuse, et qui démontre son attachement à la cinquième symphonie de Beethoven dont il cite le thème à plusieurs reprises. Elle compose également l'un des exemples les plus frappants de son expérimentalisme : dans le second mouvement, il indique au pianiste d'utiliser une pièce en bois de 14 ³⁄₄ pouces (37,5 cm) pour créer un cluster chord, c’est-à-dire un accord de touches noires ou blanches consécutives sur la longueur de cette pièce. La sonate Concord marque la profonde influence qu'ont eue sur sa musique les écrivains transcendantalistes. Chaque mouvement porte le nom d'un des quatre plus importants membre de ce groupe : Ralph Waldo Emerson, Nathaniel Hawthorne, Bronson Alcott et Henry David Thoreau.

La pièce la plus remarquable dans son répertoire orchestral est certainement son imposante Symphonie no 4 (1910–16). Celle-ci nécessite une grosse section de percussions, deux pianos (les deux accordés avec un quart de ton d'écart), un orgue, un groupe supplémentaire de cordes éloignées, un grand chœur, trois saxophones optionnels, et pour finir un « ether organ » (l'instrument auquel pensait Ives n'est pas évident, mais habituellement on utilise un thérémine ou un synthétiseur). L'œuvre fait penser à The Unanswered Question, d'ailleurs Ives dit lui-même que la pièce était « une question ouverte du Quoi et du Comment que l'esprit de l'homme se pose à propos de la vie ». L'utilisation de citations musicales est là encore abondante, particulièrement dans le premier mouvement, et la musique ne manque pas de nouveautés en matière d'effets sonores. Par exemple, dans le second mouvement, un trémolo secoue l'orchestre entier. Dans le mouvement final, il y a une sorte de combat entre les sons discordants et une musique tonale plus traditionnelle. Finalement entre la partie de chœur sans paroles, l'ambiance s'apaise, et le morceau se termine avec juste les percussions qui jouent tranquillement.

Il faudra attendre 1965 pour que la symphonie ait droit à une représentation complète, c’est-à-dire environ 50 ans après les dernières retouches de la composition et 11 ans après la mort du compositeur[7].

Ives mourut avant de terminer sa Symphonie de l'Univers, qu'il ne parvint pas à assembler durant sa vie malgré deux décennies de travail. Ceci à cause de ses ennuis de santé, aussi bien que de sa conception fluctuante de la composition. Celle-ci consiste en un découpage en trois parties temporelles : passé (genèse des océans et des montagnes), présent (terre, évolution de la nature et de l'humanité), futur (ciel, la montée vers le spirituel), ainsi qu'une décomposition spatiale en deux orchestres ou plus. Il y a eu plusieurs tentatives pour compléter ou jouer l'actuelle version. Cependant, personne n'arrive à cerner l'idée de l'interprétation générale. La symphonie reprend des idées de la Symphonie no 4 qui sont développées jusqu'à un niveau très poussé, avec des rythmes complexes croisés et des dissonances difficiles en couches, le tout au travers de combinaisons instrumentales et d'orchestrations inusitées et inventives.

Les travaux de musique de chambre comptent le Quatuor à cordes no 2, dans lequel les voix atteignent des sommets en matière d'écriture contrapuntique, s'échelonnant depuis des pointes dissonantes aiguës dans le mouvement nommé Arguments jusqu'à une lenteur transcendantale. Cette étendue sur des extrêmes est fréquente dans la musique de Ives, qui impose par ses résonances dissonantes contrastée avec des calmes lyriques. Le langage de Ives, tout comme celui de Mahler, utilise beaucoup de lignes mélodiques indépendantes. On le considère difficile à jouer car beaucoup d'indications d'interprétation sont absentes. Ce travail a eu une influence notable sur, entre autres, le premier quatuor d'Elliott Carter.

Accueil de sa musique

La plupart de ses œuvres durent attendre plusieurs années avant d'être interprétées. Les difficultés d'interprétation dues à la complexité rythmique de ses pièces pour orchestre en firent des défis difficiles à relever[8].

Henry Cowell, Nicolas Slonimsky et Elliott Carter furent parmi les premiers défenseurs de sa musique. Invité par Cowell à participer dans son magazine périodique consacré aux musiques modernes New Music, un bon nombre de ses partitions y furent publiées.

Dans les années 1940, il rencontra Lou Harrison, un fan de sa musique qui en fit la promotion. Harrison dirigea la première de la Symphonie no 3 (1904) en 1946. L'année suivante, cette pièce remporta le Prix Pulitzer de la musique. Ives donna l'argent de ce prix (la moitié allant à Harrison), disant « les prix sont pour les jeunes garçons, et j'ai eu le temps de grandir ».

Bernard Herrmann qui travailla comme chef d'orchestre à la CBS, et en 1940 devint même le directeur de l'orchestre symphonique CBS, fut aussi un champion de la musique de Charles Ives.

Leopold Stokowski dirigea la Symphonie no 4 en 1965, considérant l'œuvre comme « le cœur du problème de Ives ».

Ives fut considéré comme l'un des « American Originals » : un compositeur qui travaille dans un style unique et américain, avec des mélodies populaires américaines utilisées dans sa musique, et un sens étendu des possibilités de la musique. Il aurait reçu des louanges d'Arnold Schönberg (qui considérait Ives comme un monument d'intégrité artistique) mais également de la New York School de William Schuman. Actuellement, Michael Tilson Thomas est un champion enthousiaste des symphonies de Ives, tout comme le musicologue Jan Swafpourd. Des œuvres de Ives sont régulièrement programmées en Europe. Cependant, Ives n'est pas sans être critiqué : beaucoup trouvent sa musique grandiloquente, pompeuse, tandis que d'autres la trouvent bizarrement timide du fait que l'on rencontre souvent des aspects de la musique traditionnelle européenne dans ses compositions[9]. Elliott Carter, qui fut son partisan, déclara que son œuvre était incomplète. Charles Ives influença des compositeurs aussi variés que John Cage, Frank Zappa ou John Zorn.

Voir aussi

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Liste de ses œuvres

Ives ayant souvent fait plusieurs versions d'une même pièce, et du fait que ses travaux furent ignorés pendant sa vie, il est souvent difficile de dater avec exactitude ses compositions. Les dates données ici sont quelquefois supposées.

Orgue

  • Variations sur America (1891)
  • Canzonetta en Fa (1894)
  • Fugue en Do mineur (1898)
  • Fugue en Mi bémol (1898)
  • « Adeste Fideles » in an Organ Prelude (1898)

Œuvres chorales

  • Psaume 54 pour chœur (1894)
  • Psaume 67 pour chœur (1894 rev. 1898-1899)
  • Psaume 24 pour chœur (1894 rev. 1901-1913)
  • Psaume 90 pour chœur, orgue et cloches (1897-1921)
  • The Celestial Country pour chœur, orgue et ensemble de chambre (1898-1902)
  • Three Harvest Home Chorales pour chœur (1902-1915)
  • Psaume 14 pour chœur (1902-1912)
  • The Masses (Majority) pour chœur et orchestre (1916-1921)

Orchestre

Musiques de chambre

Piano

  • Sonate pour piano no 1 (1902–09)
  • Three-Page Sonata (septembre 1905) Création, 1949 par William Masselos.
  • Sonate pour piano no 2, Concord, Mass., 1840–60 (1909–15) (révisée plusieurs fois par Ives)
  • Three Quarter Tone Piano Pieces (1923–1924) pour deux pianos.

Mélodies

  • 114 Songs (composées sur plusieurs années 1887–1921, publiées en 1922)

Transcriptions d'après Ives

Discographie

Anthologie

  • 1974 : Charles Ives the 100th anniversary artistes divers CBS M4 32504
  • 2002 :Charles Ives an american journey Thomas Hampson, Michael Tilson Thomas (direction et piano) San Francisco Symphony Orchestra. RCA 09026 63703 2

Orgue

  • 1960 : The Organ in America, E. Power Biggs, Columbia ML-5496
  • 1968 : Yankee Organ Music, Richard Ellsasser, Nonesuch H-71200
  • 1969 : E Power Biggs’Greatest Hits, E. Power Biggs, Columbia MS 7269
  • 1971 : Zwischen Orgel und Leier -Kasten, Gerd Zacher, WERGO WER 60 058
  • 1974 : The Entertainer Virgil Fox, Virgil Fox, RCA Red Seal ARL1-0666
  • 1991 : Americanische Orgelmusik, Gunther Kaunzinger, Christophorus SCGLX 73940
  • 2005 : Organa Americana, Tom Trenney, Pro Organo CD-7196

Piano

  • 1933-1943 : Ives plays Ives Charles Ives (piano), CRI 810
  • 2004 : The Unknown Ives, Donald Berman, New World Recordings 80618-2

Chœur

  • 1963 : On Tour Robert Shaw (direction), The Robert Shaw Chorale, RCA Red Seal LSC-2676
  • 1966 : Charles Ives: Music for Chorus Gregg Smith (direction), Gregg Smith singers, the Texas Boys Choir, Ithaca College Concert Choir, the Columbia chamber ensemble, Columbia ML 6321
  • 1969 : New Music of Charles Ives Gregg Smith (direction), Gregg Smith singers, the Columbia chamber ensemble, Columbia MS 7321
  • 1971 : Charles Ives: Vocal Music Alden Gilchrist (direction), Berkeley Chamber Singers, Musical Heritage Society MHS 1240
  • 1978 : American Music for Chorus John Oliver (direction) Tanglewood Festival Chorus, Deutsche Grammophon 2530 912

Orchestre

  • 1990 : The Orchestral Music of Charles Ives - James Sinclair (direction), Orchestra New England, Koch 3-7025-2 H1
  • 1992 : Remembrance - H. Robert Reynolds (direction), Detroit Chamber Winds and Friends, Koch 3-7182-2 H1
  • 1992 : A Portrait of Charles Ives - Ingo Metzmacher (direction), Ensemble Modern, EMI Classics 0777 7545522 9
  • 1995 : When The Moon, songs & sets orchestra - Richard Bernas (direction), Music Projects, Susan Narucki (soprano), Sanford Sylvan (baryton), Alan Feinberg (piano), Decca 466 841-2
  • 2000 : The Symphonies - Christoph von Dohnanyi, Zubin Mehta, Neville Marriner. Decca 466-745-2

Chambre

  • 1974 : Complete chamber music artistes divers (direction Frank Glazer) Vox BoxSVBX 564
  • 1993 : Music For String Quartet - Mondriaan String Quartet, Etcetera KTC1169

Mélodie

  • 1954 : Songs of Charles Ives - Helen Boatwright, soprano et John Kirkpatrick piano, Overtone Records réédition CRI CD 675
  • 1976 : Charles Ives, Songs - Jan DeGaetani, mezzo-soprano, et Gilbert Kalish piano, Elektra/Nonesuch 9 71325-2.
  • 1992 : The Complete songs of Charles Ives en quatre disques - Divers artistes, Albany TROY 077 à TROY 080
  • 2008 : Songs (intégrale des mélodies de Charles Ives en six disques) - Divers artistes, NAXOS 8.559269 à 8.559274

Hommages

Depuis 1979, un cratère de la planète Mercure est nommé Ives en son honneur[10].

Notes et références

  1. (en) J. Peter Burkholder, Charles Ives and His World, Princeton, PUP, , 452 p. (ISBN 978-0-691-01163-9, lire en ligne), p. 7
  2. Alice S. Reed, Charles Edward Ives and His Piano Sonata No. 2, Trafford, , 171 p. (ISBN 978-1-4120-4474-5, lire en ligne), p. 38
  3. (en)memory.loc.gov
  4. (en)biography.com
  5. (en)global.britannica.com
  6. (en)classicalnotes.net
  7. L'encyclopédie de toutes les musiques, Hachette pratique, (ISBN 978-2012-369603) p. 271
  8. (en) bach-cantatas.com
  9. (en)allmusic.com
  10. « Planetary Names: Crater, craters: Ives on Mercury », sur planetarynames.wr.usgs.gov (consulté le )

Bibliographie

Références

  • Vivian Perlis, Charles Ives Remembered: an oral history Yale University, Da Capo Press, 1974
  • Geoffrey Block, Charles Ives: a bio-bibliography New York, Greenwood Press, 1988
  • James B. Sinclair, A Descriptive Catalogue of the Music of Charles Ives Yale University Press, 1999

Écrits

  • Charles Ives, Essays Before A Sonata New York, The Knickerbocker Press, 1920
    traduction française Essais avant une sonate, in revue Contrechamps no 7, 1986 Ed. L'âge d'homme
  • John Kirkpatrick (dir.), Charles E. Ives: Memos Calder & Boyars, 1973

Ouvrages généraux

Monographie

  • Henry Cowell & Sydney Cowell, Charles Ives and His Music Oxford University Press, 1969
  • David Wooldridge, From the steeples and mountains New York Alfred A. Knopf, 1974
  • Frank R. Rossiter, Charles Ives & His America London, Victor Gollancz, 1976
  • J. Peter Burkholder Charles Ives, the ideas behind the music New Haven, Yale University Press, 1985
  • (en) Jan Swafford, Charles Ives : a Life With Music, éditions W.W. Norton, New York, 1996, xv + 525 p., (ISBN 0393038939), (LCCN 95022549)
  • J. Peter Burkholder (editor), Charles Ives and His World Princeton University Press, 1996
  • Gianfranco Vinay, Charles Ives et l'utopie sonore américaine Paris édition Michel de Maule 2001
  • Laurent Denave, Un siècle de création musicale aux États-Unis. Histoire sociale des productions les plus originales du monde musical américain, de Charles Ives au minimalisme (1890-1990), Genève, Contrechamps, 2012

Études

  • J. Peter Burkholder, All Made of Tunes: Charles Ives and the Uses of Musical Borrowing New Haven, Yale University Press, 1995

Articles connexes

Liens externes

Écouter

Bases de données et dictionnaires