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Le '''terbium''' est un [[élément chimique]], de symbole '''Tb''' et de [[numéro atomique]] 65. C'est un métal gris argenté de la série des [[lanthanide]]s appartenant au groupe des [[Terre rare|terres rares]].
Le '''terbium''' est un [[élément chimique]], de symbole '''Tb''' et de [[numéro atomique]] 65. C'est un [[métal]] gris argenté de la [[Famille d'éléments chimiques|famille]] des [[lanthanide]]s appartenant au groupe des [[Terre rare|terres rares]].


[[Image:Terbium (65 Tb).jpg|vignette|gauche|upright=0.7|Terbium métallique.]]
L'appellation terbium, provient de l'endroit, [[Ytterby]] près de [[Stockholm]] en [[Suède]], où l'on a découvert le minerai dans lequel ont également été identifiées plusieurs autres terres rares. Les éléments chimiques [[yttrium]], [[erbium]] et [[ytterbium]] partagent la même étymologie.
L'appellation terbium, provient de l'endroit, [[Ytterby]] près de [[Stockholm]] en [[Suède]], où l'on a découvert le minerai dans lequel ont également été identifiées plusieurs autres terres rares. Les éléments chimiques [[yttrium]], [[erbium]] et [[ytterbium]] partagent la même étymologie.


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=== Première découverte ===
=== Première découverte ===
[[Fichier:Mosander Carl Gustav bw.jpg|vignette|gauche|upright=0.9|[[Carl Gustaf Mosander|Carl Gustav Mosander]]<br />(1797-1858).]]
[[Fichier:Mosander Carl Gustav bw.jpg|vignette|gauche|upright=0.9|[[Carl Gustaf Mosander|Carl Gustav Mosander]]<br />(1797-1858).]]
{{Découvertes des terres rares}}
En 1789, le chimiste finlandais [[Johan Gadolin]] identifie un nouvel [[oxyde]] (ou « terre ») dans un échantillon d'ytterbite (rebaptisée plus tard « [[gadolinite]] » en son honneur). Cette nouvelle roche avait été découverte deux ans auparavant par le lieutenant [[Carl Axel Arrhenius]] près du village d'[[Ytterby]] en [[Suède]]. Ces travaux sont confirmés en 1797 par [[Anders Gustaf Ekeberg]] qui baptise le nouvel oxyde ''yttria''<ref name="emsley2001">{{Ouvrage | langue=en | prénom=John | nom=Emsley | titre=Nature's building blocks | sous-titre=an A-Z guide to the elements | éditeur=Oxford University Press | année=2001 | pages=240–242 | isbn=0198503415 | url=https://books.google.fr/books?id=Yhi5X7OwuGkC}}.</ref>.
En 1789, le chimiste finlandais [[Johan Gadolin]] identifie un nouvel [[oxyde]] (ou « terre ») dans un échantillon d'ytterbite (rebaptisée plus tard « [[gadolinite]] » en son honneur). Cette nouvelle roche avait été découverte deux ans auparavant par le lieutenant [[Carl Axel Arrhenius]] près du village d'[[Ytterby]] en [[Suède]]. Ces travaux sont confirmés en 1797 par [[Anders Gustaf Ekeberg]] qui baptise le nouvel oxyde ''yttria''<ref name="emsley2001">{{Ouvrage | langue=en | prénom1=John | nom1=Emsley | titre=Nature's building blocks | sous-titre=an A-Z guide to the elements | lieu=Oxford | éditeur=[[Oxford University Press]] | année=2001 | pages totales=240–242 | isbn=0-19-850341-5 | lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=Yhi5X7OwuGkC}}.</ref>.


Près d'un demi-siècle plus tard, le Suédois [[Carl Gustaf Mosander|Carl Gustav Mosander]] parvient à isoler plusieurs [[Terre rare|terres rares]] ([[cérium]], [[lanthane]] et [[Didyme (chimie)|didyme]]) grâce à de nouveaux procédés de [[Cristallisation fractionnée (chimie)|cristallisation fractionnée]]<ref name="thyssenbinnemans2010">{{Chapitre | langue=en | prénom1=Pieter | nom1=Thyssen | prénom2=Koen | nom2=Binnemans | titre ouvrage=Handbook on the Physics and Chemistry of Rare Earths | volume=41 | éditeur=Elsevier | année=2010 | pages=560 | titre chapitre=Accommodation of the Rare Earths in the Periodic Table | url=https://books.google.fr/books?id=8SstnPFSzb0C&dq}}.</ref>. Convaincu que l'''yttria'' extraite de la gadolinite est également un mélange, il décide d'y chercher certains de ces nouveaux composés. À l'automne 1842, il parvient à isoler deux oxydes, l'un blanc (donnant des sels incolores), qu'il considère comme le véritable yttrium, et l'autre jaune (donnant des sels roses), qu'il décide de nommer « odinium » en l'honneur du dieu [[Odin]] de la [[mythologie nordique]]. Avant de publier les résultats de ces recherches en 1843, Mosander achève une étape supplémentaire de fractionnement des [[oxalate]]s de ces composés et découvre un troisième oxyde. Il décide de conserver le terme ''yttria'' pour la fraction incolore (oxyde d'[[yttrium]] pur) et nomme la fraction jaune « erbine » et la fraction rose « terbine », toujours en rappel du village d'[[Ytterby]]<ref name="eote2008">{{Ouvrage | langue=en | nom=Enghag | prénom=Per | titre=Encyclopedia of the Elements | sous titre=Technical Data - History - Processing - Applications | éditeur=John Wiley & Sons | année=2008 | pages=1309 | url=https://books.google.fr/books?id=fUmTX8yKU4gC&hl}}.</ref>.
Près d'un demi-siècle plus tard, le Suédois [[Carl Gustaf Mosander|Carl Gustav Mosander]] parvient à isoler plusieurs [[Terre rare|terres rares]] ([[cérium]], [[lanthane]] et [[Didyme (chimie)|didyme]]) grâce à de nouveaux procédés de [[Cristallisation fractionnée (chimie)|cristallisation fractionnée]]<ref name="thyssenbinnemans2010">{{Chapitre | langue=en | prénom1=Pieter | nom1=Thyssen | prénom2=Koen | nom2=Binnemans | titre ouvrage=Handbook on the Physics and Chemistry of Rare Earths | volume=41 | éditeur=Elsevier | année=2010 | pages=560 | titre chapitre=Accommodation of the Rare Earths in the Periodic Table | url=https://books.google.fr/books?id=8SstnPFSzb0C&dq}}.</ref>. Convaincu que l'''yttria'' extraite de la gadolinite est également un mélange, il décide d'y chercher certains de ces nouveaux composés. À l'automne 1842, il parvient à isoler deux oxydes, l'un blanc (donnant des sels incolores), qu'il considère comme le véritable yttrium, et l'autre jaune (donnant des sels roses), qu'il décide de nommer « odinium » en l'honneur du dieu [[Odin]] de la [[mythologie nordique]]. Avant de publier les résultats de ces recherches en 1843, Mosander achève une étape supplémentaire de fractionnement des [[oxalate]]s de ces composés et découvre un troisième oxyde. Il décide de conserver le terme ''yttria'' pour la fraction incolore (oxyde d'[[yttrium]] pur) et nomme la fraction jaune « erbine » et la fraction rose « terbine », toujours en rappel du village d'[[Ytterby]]<ref name="eote2008">{{Ouvrage | langue=en | prénom1=Per | nom1=Enghag | titre=Encyclopedia of the Elements | sous-titre=Technical Data - History - Processing - Applications | éditeur=[[John Wiley & Sons]] | année=2008 | pages totales=1309 | isbn= | lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=fUmTX8yKU4gC}}.</ref>.


=== Controverses et confusions ===
=== Controverses et confusions ===
Durant les décennies qui suivent, les découvertes de Mosander sont remises en question. En 1860, son compatriote {{Lien|langue=en|trad=Nils Johan Berlin|fr=Nils Johan Berlin}} reprend l'étude de l'''yttria'' brute et parvient à en isoler deux oxydes. Il en considère un comme étant de l'oxyde d'[[yttrium]] pur et identifie l'autre comme l'erbine de Mosander, malgré le fait qu'il donne des sels colorés en rose. Il ne trouve par contre aucune trace de la terbine<ref>{{Article | langue=sv | prénom=Nils Johan | nom=Berlin | titre=Om de i den blandade ytterjorden befintliga oxider | périodique=Forhandlinger ved de skandinaviske Naturforskeres, ottende Møde | lieu=Copenhague | année=1860 | pages=448-454 | url=http://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=coo.31924070978030}}.</ref>. Ces expériences sont répétées en 1864 à [[Göttingen]] par Friedrich Otto Popp et à [[Genève]] par [[Marc Delafontaine]], avec des conclusions opposées : le premier ne trouve aucun autre élément que l'yttrium et prétend que les autres composés sont des oxydes déjà connus (du [[cérium]] et du [[Didyme (chimie)|didyme]])<ref>{{Article | langue=de | prénom=Friedrich Otto | nom=Popp | titre=Untersuchung über die Yttererde | pages=179-201 | périodique=Annalen der Chemie und Pharmacie | année=1864 | volume=55 | éditeur=Justus Freiherr von Liebig | url=https://books.google.ca/books?id=dwQ3AAAAYAAJ}}.</ref>, alors que le second soutient l'existence à la fois de l'erbine et de la terbine<ref>{{Article | nom=Delafontaine | prénom=Marc | titre=Sur les métaux de la gadolinite | pages=415-418 | périodique=Bulletin de la Société chimique de Paris | tome=3 | année=1865}}, {{Gallica | id=bpt6k281952v}}.</ref>. Puis en 1866, c'est au tour de [[Robert Wilhelm Bunsen|Robert Bunsen]] et de son assistant [[Johan Bahr]] de l'[[Université de Heidelberg|Université d’Heidelberg]] de réitérer le processus de séparation. Ils reconnaissent que les sels d'[[yttrium]] sont incolores et que leurs solutions ne présentent pas de bandes d'absorption, alors que les sels d'[[erbium]] ont une belle coloration rose et que leurs solutions donnent un spectre d'absorption tout à fait différent de celui du [[Didyme (chimie)|didyme]]. Mais ils ne trouvent aucun autre composé<ref>{{Article | langue=de | nom1=Bahr | prénom1=Johan | prénom2=Robert | nom2=Bunsen | titre=Ueber Erbinerde Und Yttererde | périodique=Annalen der Chemie und Pharmacie | volume=61 | année=1866 | pages=1-34 | url=https://books.google.fr/books?id=n7A9AQAAMAAJ}}.</ref>.
Durant les décennies qui suivent, les découvertes de Mosander sont remises en question. En 1860, son compatriote [[Nils Johan Berlin]] reprend l'étude de l'''yttria'' brute et parvient à en isoler deux oxydes. Il en considère un comme étant de l'oxyde d'[[yttrium]] pur et identifie l'autre comme l'erbine de Mosander, malgré le fait qu'il donne des sels colorés en rose. Il ne trouve par contre aucune trace de la terbine<ref>{{Article | langue=sv | prénom=Nils Johan | nom=Berlin | titre=Om de i den blandade ytterjorden befintliga oxider | périodique=Forhandlinger ved de skandinaviske Naturforskeres, ottende Møde | lieu=Copenhague | année=1860 | pages=448-454 | url=http://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=coo.31924070978030}}.</ref>. Ces expériences sont répétées en 1864 à [[Göttingen]] par Friedrich Otto Popp et à [[Genève]] par [[Marc Delafontaine]], avec des conclusions opposées : le premier ne trouve aucun autre élément que l'yttrium et prétend que les autres composés sont des oxydes déjà connus (du [[cérium]] et du [[Didyme (chimie)|didyme]])<ref>{{Article | langue=de | prénom=Friedrich Otto | nom=Popp | titre=Untersuchung über die Yttererde | pages=179-201 | périodique=Annalen der Chemie und Pharmacie | année=1864 | volume=55 | éditeur=Justus Freiherr von Liebig | url=https://books.google.ca/books?id=dwQ3AAAAYAAJ}}.</ref>, alors que le second soutient l'existence à la fois de l'erbine et de la terbine<ref>{{Article | nom=Delafontaine | prénom=Marc | titre=Sur les métaux de la gadolinite | pages=415-418 | périodique=Bulletin de la Société chimique de Paris | tome=3 | année=1865}}, {{Gallica | id=bpt6k281952v}}.</ref>. Puis en 1866, c'est au tour de [[Robert Wilhelm Bunsen|Robert Bunsen]] et de son assistant [[Johan Bahr]] de l'[[Université de Heidelberg|Université d’Heidelberg]] de réitérer le processus de séparation. Ils reconnaissent que les sels d'[[yttrium]] sont incolores et que leurs solutions ne présentent pas de bandes d'absorption, alors que les sels d'[[erbium]] ont une belle coloration rose et que leurs solutions donnent un spectre d'absorption tout à fait différent de celui du [[Didyme (chimie)|didyme]]. Mais ils ne trouvent aucun autre composé<ref>{{Article | langue=de | nom1=Bahr | prénom1=Johan | prénom2=Robert | nom2=Bunsen | titre=Ueber Erbinerde Und Yttererde | périodique=Annalen der Chemie und Pharmacie | volume=61 | année=1866 | pages=1-34 | url=https://books.google.fr/books?id=n7A9AQAAMAAJ}}.</ref>.


Ainsi, la confusion s'installe et les noms choisis par Mosander sont intervertis. Delafontaine a beau rétorquer que l'erbine de Berlin et de Bahr et Bunsen n'est autre que la terbine de Mosander, et qu'il détient les preuves de l'existence de la vraie erbine (celle de Mosander), il n'est pas entendu. Pendant plusieurs années, le terbium disparaît de la liste des éléments connus et se trouve ainsi absent de la première version du [[tableau périodique des éléments]] de [[Dmitri Mendeleïev]] en 1869<ref name="thyssenbinnemans2010"/>. Les Suédois [[Per Teodor Cleve]] et {{Lien|lang=de|fr=Otto Magnus Höglund|trad=Otto Magnus Höglund}} tentent de vérifier en 1872 l'hypothèse de Delafontaine, mais échouent une fois de plus à isoler autre chose que l'erbium (au sens de Bahr et Bunsen)<ref>{{Article | nom1=Cleve | prénom1=Per Teodor | nom2=Höglund | prénom2=Otto Magnus | titre=Sur les combinaisons de l'yttrium et de l'erbium | périodique=Bulletin de la Société chimique de Paris | année=1872 | tome=18 | pages=193-201 | url=https://books.google.fr/books?id=BZE_AQAAMAAJ}}.</ref>. L'existence de ce dernier fait bientôt l'unanimité au sein de la communauté scientifique, grâce à sa détection dans le [[spectre solaire]] par l'astronome américain [[Charles Augustus Young]] la même année<ref name="evans2012"/>.
Ainsi, la confusion s'installe et les noms choisis par Mosander sont intervertis. Delafontaine a beau rétorquer que l'erbine de Berlin et de Bahr et Bunsen n'est autre que la terbine de Mosander, et qu'il détient les preuves de l'existence de la vraie erbine (celle de Mosander), il n'est pas entendu. Pendant plusieurs années, le terbium disparaît de la liste des éléments connus et se trouve ainsi absent de la première version du [[tableau périodique des éléments]] de [[Dmitri Mendeleïev]] en 1869<ref name="thyssenbinnemans2010"/>. Les Suédois [[Per Teodor Cleve]] et {{Lien|lang=de|fr=Otto Magnus Höglund|trad=Otto Magnus Höglund}} tentent de vérifier en 1872 l'hypothèse de Delafontaine, mais échouent une fois de plus à isoler autre chose que l'erbium (au sens de Bahr et Bunsen)<ref>{{Article | nom1=Cleve | prénom1=Per Teodor | nom2=Höglund | prénom2=Otto Magnus | titre=Sur les combinaisons de l'yttrium et de l'erbium | périodique=Bulletin de la Société chimique de Paris | année=1872 | tome=18 | pages=193-201 | url=https://books.google.fr/books?id=BZE_AQAAMAAJ}}.</ref>. L'existence de ce dernier fait bientôt l'unanimité au sein de la [[communauté scientifique]], grâce à sa détection dans le [[spectre solaire]] par l'astronome américain [[Charles Augustus Young]] la même année<ref name="evans2012"/>.


=== Confirmations ===
=== Confirmations ===
C'est finalement dans un autre minerai, la [[samarskite]], que Delafontaine finit par retrouver la trace de l'erbine jaune de Mosander. Il pense un temps la renommer « mosandrium » en l'honneur du chimiste suédois, puis s'accorde avec son compatriote [[Jean Charles Galissard de Marignac]] pour conserver le nom de terbine :
C'est finalement dans un autre minerai, la [[samarskite]], que Delafontaine finit par retrouver la trace de l'erbine jaune de Mosander. Il pense un temps la renommer « mosandrium » en l'honneur du chimiste suédois, puis s'accorde avec son compatriote [[Jean Charles Galissard de Marignac]] pour conserver le nom de terbine :


{{Début citation}}Dans une note antérieure, j'ai proposé d'appliquer au radical de cette terre jaune, le nom de Mosandrium, quoique ce soit le vrai erbium de Mosander; ce changement me semblait justifié par la notoriété qu'ont les travaux de M. Bunsen et de M. Cléve et qui rend impossible d'enlever à leur terre rose son nom impropre d'erbine, sans créer une confusion regrettable. M. Marignac pense qu'il serait préférable de ne pas créer un nouveau nom et qu'il vaut mieux compléter l'interversion des noms en appelant terbine la terre jaune (erbine Mosander non Bunsen), et erbine la terre rose (terbine de Mosander). Je me rangerai volontiers à cet avis [...]{{Fin citation|Marc Delafontaine<ref>{{Ouvrage | nom=Delafontaine | prénom=Marc | titre=Archives des sciences physiques et naturelles | année=1877 | mois=juin | page=184 | résumé=https://books.google.fr/books?hl=fr&id=FQYaAQAAIAAJ}}.</ref>}}
{{Début citation}}Dans une note antérieure, j'ai proposé d'appliquer au radical de cette terre jaune, le nom de Mosandrium, quoique ce soit le vrai erbium de Mosander ; ce changement me semblait justifié par la notoriété qu'ont les travaux de M. Bunsen et de M. Cléve et qui rend impossible d'enlever à leur terre rose son nom impropre d'erbine, sans créer une confusion regrettable. M. Marignac pense qu'il serait préférable de ne pas créer un nouveau nom et qu'il vaut mieux compléter l'interversion des noms en appelant terbine la terre jaune (erbine Mosander non Bunsen), et erbine la terre rose (terbine de Mosander). Je me rangerai volontiers à cet avis [...]{{Fin citation|Marc Delafontaine<ref>{{Ouvrage | prénom1=Marc | nom1=Delafontaine | titre=Archives des sciences physiques et naturelles | éditeur= | année=1877 | mois=juin | passage=184 | présentation en ligne=https://books.google.fr/books?id=FQYaAQAAIAAJ}}.</ref>}}


En 1878, ses travaux sont confirmés par Marignac, qui isole lui-même le terbium de la [[gadolinite]]. Parallèlement, l'Américain [[John Lawrence Smith]] publie la découverte d'une nouvelle terre jaune dans la samarskite, à laquelle il choisit de donner le nom de « mosandrum »<ref>{{Article | nom=Smith | prénom=John Lawrence | titre=Le Mosandrum, un nouvel élément | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=148-151}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>. Marignac l'analyse et déclare qu'elle n'est rien d'autre que la terbine dont Delafontaine et lui-même viennent de prouver l'existence<ref>{{Article | nom=Marignac | prénom=Jean Charles | titre=Observation sur la découverte, annoncée par M. L. Smith, d'une nouvelle terre appartenant au groupe du cérium | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=281-283}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>, ce qui donne lieu à une vive dispute entre les trois scientifiques<ref>{{Article | nom=Delafontaine | prénom=Marc | titre=Sur le Mosandrum, de M. Lawrence Smith | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=600-602}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>. Ces découvertes sont définitivement ratifiées par la publication en 1882 des 194 lignes du spectre du terbium par le chimiste britannique [[Henry Enfield Roscoe]]<ref name="evans2012">{{Ouvrage | langue=en | nom=Evans | prénom=C.H. | titre=Episodes from the History of the Rare Earth Elements | éditeur=Springer Science & Business Media | année=2012 | pages=268 | url=https://books.google.be/books?id=EFzuCAAAQBAJ}}.</ref>.
En 1878, ses travaux sont confirmés par Marignac, qui isole lui-même le terbium de la [[gadolinite]]. Parallèlement, l'Américain [[John Lawrence Smith]] publie la découverte d'une nouvelle terre jaune dans la samarskite, à laquelle il choisit de donner le nom de « mosandrum »<ref>{{Article | nom=Smith | prénom=John Lawrence | titre=Le Mosandrum, un nouvel élément | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=148-151}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>. Marignac l'analyse et déclare qu'elle n'est rien d'autre que la terbine dont Delafontaine et lui-même viennent de prouver l'existence<ref>{{Article | nom=Marignac | prénom=Jean Charles | titre=Observation sur la découverte, annoncée par M. L. Smith, d'une nouvelle terre appartenant au groupe du cérium | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=281-283}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>, ce qui donne lieu à une vive dispute entre les trois scientifiques<ref>{{Article | nom=Delafontaine | prénom=Marc | titre=Sur le Mosandrum, de M. Lawrence Smith | périodique=Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences | année=1878 | tome=87 | pages=600-602}}, {{Gallica|id=bpt6k3044x}}</ref>. Ces découvertes sont définitivement ratifiées par la publication en 1882 des 194 lignes du spectre du terbium par le chimiste britannique [[Henry Enfield Roscoe]]<ref name="evans2012">{{Ouvrage | langue=en | prénom1=C.H. | nom1=Evans | titre=Episodes from the History of the Rare Earth Elements | éditeur=Springer Science & Business Media | année=2012 | pages totales=268 | isbn= | lire en ligne=https://books.google.be/books?id=EFzuCAAAQBAJ}}.</ref>.


== Caractéristiques ==
== Caractéristiques ==
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Le terbium est un [[métal]] d'aspect gris argenté. Comme les autres membres de la famille des [[lanthanide]]s, il est malléable, ductile et assez mou pour être coupé avec un couteau. Il est assez stable dans l'air, et existe sous deux formes [[allotropique]]s, avec un changement de [[Phase (matière)|phase]] à {{tmp|1289|°C}}<ref name="hbcp6">{{HBChemPhys|96}}</ref>.
Le terbium est un [[métal]] d'aspect gris argenté. Comme les autres membres de la famille des [[lanthanide]]s, il est malléable, ductile et assez mou pour être coupé avec un couteau. Il est assez stable dans l'air, et existe sous deux formes [[allotropique]]s, avec un changement de [[Phase (matière)|phase]] à {{tmp|1289|°C}}<ref name="hbcp6">{{HBChemPhys|96}}</ref>.
[[Fichier:Hexagonal close packed.svg|vignette|upright=0.6|Structure cristalline du terbium.]]
[[Fichier:Hexagonal close packed.svg|vignette|upright=0.6|Structure cristalline du terbium.]]
Comme toutes les [[Terre rare|terres rares]] lourdes, le terbium présente une [[structure cristalline]] en [[empilement compact]] hexagonal. En dessous de son [[Température de Curie|point de Curie]] ({{Tmp|219|K}}), il montre un agencement [[ferromagnétique]] simple avec les [[Moment magnétique|moments]] alignés selon l'axe b du plan basal. Au-dessus de T<sub>c</sub>, l'élément ne devient pas immédiatement [[paramagnétique]], mais atteint plutôt un état [[antiferromagnétique]] particulier qui persiste jusqu'à sa [[température de Néel]] ({{Tmp|230|K}}). Cet agencement, connu sous le nom d'antiferromagnétisme hélicoïdal, est caractérisé par le fait que tous les moments magnétiques d'une même couche sont parallèles et orientés selon un angle fixe par rapport aux moments des couches adjacentes. Ils tournent ainsi autour de l'axe c à la manière d'une vis ou d'une hélice. Le [[dysprosium]] partage ces caractéristiques particulières pour d'autres températures<ref name="jackson2000">{{Article | langue=en | prénom=Mike | nom=Jackson | année=2000 | titre=Magnetism of Rare Earth | périodique=The IRM quarterly | volume=10 | numéro=3 | pages=1-8 | url=http://www.irm.umn.edu/quarterly/irmq10-3.pdf | format=pdf}}.</ref>. Ces deux éléments présentent de plus une [[magnétostriction]] élevée<ref name="eote2008"/>.
Comme toutes les [[Terre rare|terres rares]] lourdes, le terbium présente une [[structure cristalline]] en [[empilement compact]] hexagonal. En dessous de son [[Température de Curie|point de Curie]] ({{Tmp|219|K}}), il montre un agencement [[Ferromagnétisme|ferromagnétique]] simple avec les [[Moment magnétique|moments]] alignés selon l'axe b du plan basal. Au-dessus de T<sub>c</sub>, l'élément ne devient pas immédiatement [[Paramagnétisme|paramagnétique]], mais atteint plutôt un état [[Antiferromagnétisme|antiferromagnétique]] particulier qui persiste jusqu'à sa [[température de Néel]] ({{Tmp|230|K}}). Cet agencement, connu sous le nom d'antiferromagnétisme hélicoïdal, est caractérisé par le fait que tous les moments magnétiques d'une même couche sont parallèles et orientés selon un angle fixe par rapport aux moments des couches adjacentes. Ils tournent ainsi autour de l'axe c à la manière d'une vis ou d'une hélice. Le [[dysprosium]] partage ces caractéristiques particulières pour d'autres températures<ref name="jackson2000">{{Article | langue=en | prénom=Mike | nom=Jackson | année=2000 | titre=Magnetism of Rare Earth | périodique=The IRM quarterly | volume=10 | numéro=3 | pages=1-8 | url=http://www.irm.umn.edu/quarterly/irmq10-3.pdf | format=pdf}}.</ref>. Ces deux éléments présentent de plus une [[magnétostriction]] élevée<ref name="eote2008"/>.


Le [[cation]] terbium(III) exhibe une importante [[fluorescence]] de couleur verte. Elle implique une transition <sup>5</sup>D<sub>4</sub> → <sup>7</sup>F<sub>5</sub> dont la [[Spectre d'émission|bande d'émission]] principale est située à {{Unité|545|nm}}, avec un temps de vie de 0,1 à {{Unité|2|ms}}<ref name="hanninen2011">{{Ouvrage | langue=en | titre=Lanthanide Luminescence | sous-titre=Photophysical, Analytical and Biological Aspects | prénom1=Pekka | nom1=Hänninen | prénom2=Harri | nom2=Härmä | éditeur=Springer Science & Business Media | année=2011 | pages=388 | url=https://books.google.fr/books?id=SWxwcXO94M8C}}.</ref>.
Le [[cation]] terbium(III) exhibe une importante [[fluorescence]] de couleur verte. Elle implique une transition <sup>5</sup>D<sub>4</sub> → <sup>7</sup>F<sub>5</sub> dont la [[Spectre d'émission|bande d'émission]] principale est située à {{Unité|545|nm}}, avec un temps de vie de 0,1 à {{Unité|2|ms}}<ref name="hanninen2011">{{Ouvrage | langue=en | prénom1=Pekka | nom1=Hänninen | prénom2=Harri | nom2=Härmä | titre=Lanthanide Luminescence | sous-titre=Photophysical, Analytical and Biological Aspects | éditeur=Springer Science & Business Media | année=2011 | pages totales=388 | isbn= | lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=SWxwcXO94M8C}}.</ref>.


=== Propriétés chimiques et composés ===
=== Propriétés chimiques et composés ===
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Le terbium forme un certain nombre de composés binaires avec des éléments comme l'[[oxygène]] (TbO<sub>2</sub>, Tb<sub>2</sub>O<sub>3</sub>, Tb<sub>7</sub>O<sub>12</sub>, Tb<sub>11</sub>O<sub>20</sub>), l'[[hydrogène]] (TbH<sub>2</sub>, TbH<sub>3</sub>), les [[halogène]]s (TBF<sub>3</sub>, TbF<sub>4</sub>, TbI<sub>3</sub>), l'[[azote]] (TbN), le [[phosphore]] (TbP), le [[soufre]] (TbS), le [[sélénium]] (TbSe) et le [[tellure]] (TbTe), ainsi qu'avec le [[carbone]], le [[silicium]], le [[bore]], l'[[arsenic]] et l'[[antimoine]]<ref name="patnaik2003">{{Ouvrage | langue=en | titre=Handbook of Inorganic Chemicals | prénom=Pradyot | nom=Patnaik | éditeur=McGraw-Hill | année=2003 | pages=1086 | résumé=https://books.google.fr/books?id=Xqj-TTzkvTEC&pg|isbn=9780070494398}}.</ref>.
Le terbium forme un certain nombre de [[composé binaire|composés binaires]] avec des éléments comme l'[[oxygène]] (TbO<sub>2</sub>, Tb<sub>2</sub>O<sub>3</sub>, Tb<sub>7</sub>O<sub>12</sub>, Tb<sub>11</sub>O<sub>20</sub>), l'[[hydrogène]] (TbH<sub>2</sub>, TbH<sub>3</sub>), les [[halogène]]s (TbF<sub>3</sub>, TbF<sub>4</sub>, TbI<sub>3</sub>), l'[[azote]] (TbN), le [[phosphore]] (TbP), le [[soufre]] (TbS), le [[sélénium]] (TbSe) et le [[tellure]] (TbTe), ainsi qu'avec le [[carbone]], le [[silicium]], le [[bore]], l'[[arsenic]] et l'[[antimoine]]<ref name="patnaik2003">{{Ouvrage | langue=en | prénom1=Pradyot | nom1=Patnaik | titre=Handbook of Inorganic Chemicals | éditeur=McGraw-Hill | année=2003 | pages totales=1086 | isbn=978-0-07-049439-8 | présentation en ligne=https://books.google.fr/books?id=Xqj-TTzkvTEC&pg=}}.</ref>.


== Isotopes ==
== Isotopes ==
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== Abondance naturelle et production ==
== Abondance naturelle et production ==
[[Fichier:Xenotim mineralogisches museum bonn.jpg|vignette|[[Xénotime]] de [[Norvège]].]]
[[Fichier:Xenotim mineralogisches museum bonn.jpg|vignette|[[Xénotime]] de [[Norvège]].]]

Le terbium est présent en combinaisons avec d'autres [[Terre rare|terres rares]] dans plusieurs [[Minéral|minéraux]], comme le [[xénotime]] (1 % d'oxyde de terbium), l'[[euxénite]] (1,3 %), ou encore la [[cérite]], la [[monazite]] et la [[gadolinite]]. L'élément a également été détecté dans la matière stellaire. Son abondance dans la [[croûte terrestre]] est estimée à {{Unité|1.2|mg/kg}}<ref name="patnaik2003"/>, il est donc deux fois plus commun que l'[[argent]]<ref name="emsley2001"/>.
Le terbium est présent en combinaisons avec d'autres [[Terre rare|terres rares]] dans plusieurs [[Minéral|minéraux]], comme le [[xénotime]] (1 % d'oxyde de terbium), l'[[euxénite]] (1,3 %), ou encore la [[cérite]], la [[monazite]] et la [[gadolinite]]. L'élément a également été détecté dans la matière stellaire. Son abondance dans la [[croûte terrestre]] est estimée à {{Unité|1.2|mg/kg}}<ref name="patnaik2003"/>, il est donc deux fois plus commun que l'[[argent]]<ref name="emsley2001"/>.


En [[2018]], les principales ressources minières sont situées en [[Chine]], aux [[États-Unis]], au [[Brésil]], en [[Inde]], au [[Sri Lanka]] et en [[Australie]]. Les réserves en terbium étaient estimées à {{Unité|300000|tonnes}} et la production mondiale est d'environ {{Unité|10|tonnes}} par an (donnée [[2001]])<ref name="emsley2001"/>, mais en avril dans la revue [[Nature]] des chercheurs japonais estiment que les gisements nouveaux détectés et explorés à l'Est du Japon depuis quelques années représentent sur {{unité|2500|km|2}} environ {{unité|16|millions}} de tonnes de [[terres rares]], situées dans le [[sédiment marin]], à plus de {{unité|5000|mètres}} de profondeur ; sur {{unité|2499|km|2}}, le fond contiendrait là plus de 16 millions de tonnes d'oxydes de terres rares, soit 420 ans d'approvisionnement mondial de terbium (et aussi 620 ans d'approvisionnement mondial d'Europium, 780 ans de réserve d'[[yttrium]], 730 ans pour [[dysprosium]], selon une publication d'avril 2018 dans [[Scientific Reports]]<ref name=Nat2018>{{en}}[https://www.nature.com/articles/s41598-018-23948-5 ''The tremendous potential of deep-sea mud as a source of rare-earth elements''], [[Nature]], 10 avril 2018.</ref> ; cette ressource ne pourrait toutefois pas être exploitée avant 2023 étant donné les coûts et difficultés d'accès<ref>Science (2018), [http://www.sciencemag.org/news/2018/04/global-trove-rare-earth-metals-found-japans-deep-sea-mud ''Global trove of rare earth metals found in Japan’s deep-sea mud''] par Roni Dengler | 13 avril 2018 </ref>.
Les principales ressources minières sont situées en [[Chine]], aux [[États-Unis]], au [[Brésil]], en [[Inde]], au [[Sri Lanka]] et en [[Australie]]. Les réserves en terbium sont estimées à {{Unité|300000|tonnes}} et la production mondiale est d'environ {{Unité|10|tonnes}} par an<ref name="emsley2001"/>.

== Terbium dans l'univers ==
Si rare sur la terre, le terbium est un élément qui se trouve dans les objets célestes.

Du terbium a été détecté dans le Soleil par [[spectroscopie]]<ref name=wilson>[[Observatoire du Mont Wilson]], ''Contribution from the Mount Wilson Observatory'', p. 372, Carnegie Institution
of Washington, 1929 {{lire en ligne|lien=https://books.google.fr/books?id=K6znAAAAMAAJ&pg=PA372}}</ref>, depuis [[Charles Augustus Young]] (au-dessus).

En 2023, du terbium une fois ionisé ({{nobr|Tb {{II}}}} en notation spectroscopique, Tb<sup>+</sup> en notation chimique) a été détecté, sous forme gazeuse, dans l'[[atmosphère planétaire|atmosphère]] de [[KELT-9 b]], une [[exoplanète]] de type [[Jupiter ultra-chaud]] dont la température atteint {{unité|4000|°C}}. Il semble que l'analyse de cette existence puisse contribuer à déterminer l'âge et l'origine de cette planète particulière<ref>{{article|langue=fr|année=2023|mois=5|jour=1|auteur1=Morgane Gillard|périodique=Futura Sciences|titre=Des pluies d'un métal très rare découvertes sur la planète la plus chaude de la Galaxie|lire en ligne=https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/espace-pluies-metal-tres-rare-decouvertes-planete-plus-chaude-galaxie-105043/}}</ref>.


== Extraction ==
Les procédés d'extraction du terbium sont similaires à ceux des autres lanthanides. L'élément est séparé des autres terres rares par des méthodes basées sur l'[[échange d'ions]], qui sont relativement faciles et plus rapides que les techniques de [[Cristallisation fractionnée (chimie)|cristallisation fractionnée]]. Le métal est obtenu à partir de son trifluorure (TbF<sub>3</sub>) ou de son trichlorure (TbCl<sub>3</sub>) anhydres par réduction thermique avec le [[calcium]] métallique dans un creuset en [[Tantale (chimie)|tantale]]. Il peut ensuite être purifié par refusion sous vide<ref name="patnaik2003"/>.
[[Image:Terbium (65 Tb).jpg|vignette|Terbium métallique.|alt=Échantillon de terbium métallique.]]
Les procédés d'extraction du terbium sont similaires à ceux des autres lanthanides. L'élément est séparé des autres terres rares par des méthodes basées sur l'[[échange d'ions]], qui sont relativement faciles et plus rapides que les techniques de [[Cristallisation fractionnée (chimie)|cristallisation fractionnée]]. Le métal est obtenu à partir de son trifluorure (TbF<sub>3</sub>) ou de son trichlorure (TbCl<sub>3</sub>) anhydres par réduction thermique avec le [[calcium]] métallique dans un [[creuset]] en [[Tantale (chimie)|tantale]]. Il peut ensuite être purifié par refusion sous vide<ref name="patnaik2003"/>.


Le prix d'un gramme de terbium pur à 99,9 % était d'environ 40 [[dollar américain|dollars américains]] en 2015<ref name="hbcp6"/>.
Le prix d'un gramme de terbium pur à 99,9 % était d'environ 40 [[dollar américain|dollars américains]] en 2015<ref name="hbcp6"/>.
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== Utilisations ==
== Utilisations ==
=== Propriétés optiques ===
=== Propriétés optiques ===
Les composés des [[ion]]s [[trivalent]]s de plusieurs [[lanthanide]]s fluorescent après stimulation par des [[Ultraviolet|rayons UV]] ou une décharge électrique. Cette particularité en font des composants de choix pour la conception des [[luminophore]]s. Ainsi, la fluorescence verte du terbium connaît trois principale applications industrielles : [[Tube cathodique|tubes cathodiques]] des [[téléviseur]]s et des écrans d'ordinateurs, [[tube fluorescent|tubes fluorescents]] [[trichromatique]]s pour l'éclairage et [[radiographie|radiographie médicale]] (transformation des [[rayon X|rayons X]] en lumière visible)<ref name="">{{Ouvrage | langue=en | titre=Handbook on Rare Earth Metals and Alloys | sous-titre=Properties, Extraction, Preparation and Applications | auteur=NPCS Board of Consultants & Engineers | éditeur=Asia Pacific Business Press Inc. | année=2009 | pages=688 | url=https://books.google.fr/books?id=QS8CAgAAQBAJ|isbn=9788178331201}}.</ref>.
Les composés des [[ion]]s [[trivalent]]s de plusieurs [[lanthanide]]s fluorescent après stimulation par des [[Ultraviolet|rayons UV]] ou une décharge électrique. Cette particularité en fait des composants de choix pour la conception des [[luminophore]]s. Ainsi, la fluorescence verte du terbium connaît trois principales applications industrielles : [[Tube cathodique|tubes cathodiques]] des [[téléviseur]]s et des écrans d'ordinateurs, [[tube fluorescent|tubes fluorescents]] [[trichromatique]]s pour l'éclairage et [[radiographie|radiographie médicale]] (transformation des [[rayon X|rayons X]] en lumière visible)<ref>{{Ouvrage | langue=en | auteur1=NPCS Board of Consultants & Engineers | titre=Handbook on Rare Earth Metals and Alloys | sous-titre=Properties, Extraction, Preparation and Applications | éditeur=Asia Pacific Business Press Inc. | année=2009 | pages totales=688 | isbn=978-81-7833-120-1 | lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=QS8CAgAAQBAJ}}.</ref>.


[[Fichier:Tb-sulfate-luminescence.jpg|vignette|gauche|upright=1|Fluorescence du sulfate de terbium.]]
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À plus petite échelle, les propriétés optiques du terbium sont également utilisés en [[biochimie]]. Ainsi, une méthode [[Spectrophotométrie|spectrophotométrique]] de détection des [[spore]]s [[bactérie]]nnes a été proposée. Elle repose sur l'addition de [[chlorure de terbium]] à un [[lysat]] d'[[endospore]]s. L'{{Lien|langue=en|trad=Dipicolinic acid|fr=acide dipicolinique}}, qui est un marqueur chimique unique des spores, [[Chélation|chélate]] l'ion terbium(III) et forme un complexe qui montre une fluorescence intense dans le [[spectre visible]]<ref>{{Article | langue=en | nom1=Rosen | prénom1=D.L. | nom2=Sharpless | prénom2=C. | nom3=McGown | prénom3=L.B. | année=1997 | titre=Bacterial spore detection and determination by use of terbium dipicolinate photoluminescence | périodique=Analytical Chemistry | numéro=69 | pages=1082–1085}}.</ref>.
À plus petite échelle, les propriétés optiques du terbium sont également utilisés en [[biochimie]]. Ainsi, une méthode [[Spectrophotométrie|spectrophotométrique]] de détection des [[spore]]s [[bactérie]]nnes a été proposée. Elle repose sur l'addition de [[Chlorure de terbium(III)|chlorure de terbium]] à un [[lysat]] d'[[endospore]]s. L'[[acide dipicolinique]], qui est un marqueur chimique unique des spores, [[Chélation|chélate]] l'ion terbium(III) et forme un complexe qui montre une fluorescence intense dans le [[spectre visible]]<ref>{{Article | langue=en | nom1=Rosen | prénom1=D.L. | nom2=Sharpless | prénom2=C. | nom3=McGown | prénom3=L.B. | année=1997 | titre=Bacterial spore detection and determination by use of terbium dipicolinate photoluminescence | périodique=Analytical Chemistry | numéro=69 | pages=1082–1085}}.</ref>.


Enfin, de manière plus anecdotique, la fluorescence verte du terbium est utilisée comme moyen de protection contre la [[contrefaçon]] des billets de la [[Euro|monnaie européenne]]<ref>{{Chapitre | langue=en | titre chapitre=Lanthanide luminescence | titre ouvrage=Principles and Applications of Photochemistry | prénom=Brian | nom=Wardle | éditeur=John Wiley & Sons | année=2009 | pages=264 | passage=74-76}}.</ref>.
Enfin, de manière plus anecdotique, la fluorescence verte du terbium est utilisée comme moyen de protection contre la [[contrefaçon]] des billets de la [[Euro|monnaie européenne]]<ref>{{Chapitre | langue=en | titre chapitre=Lanthanide luminescence | titre ouvrage=Principles and Applications of Photochemistry | prénom=Brian | nom=Wardle | éditeur=John Wiley & Sons | année=2009 | pages=264 | passage=74-76}}.</ref>.


=== Propriétés magnétiques ===
=== Propriétés magnétiques ===
Le [[Terfenol-D]] est un [[alliage]] de [[fer]] et de [[lanthanide|terres rares]] de formule {{Fchim|Tb|0,3|Dy|0,7|Fe|1,9}} très fortement [[magnétostriction|magnétostrictif]].
{{Vide}}


=== Autres ===
=== Autres ===

* [[Pile à combustible]] : stabilisateur des cristaux de ZrO<sub>2</sub> dans des cellules.
* [[Pile à combustible]] : stabilisateur des cristaux de ZrO<sub>2</sub> dans des cellules.


== Notes et références ==
== Notes et références ==

{{Références|colonnes=2}}
{{Références nombreuses|taille=24}}


== Voir aussi ==
== Voir aussi ==

{{Autres projets| commons=Category:Terbium| wiktionary=terbium}}
{{Autres projets| commons=Category:Terbium| wiktionary=terbium}}


=== Liens externes ===
=== Liens externes ===

* {{lien web|langue=en|url=http://www.periodictable.com/Elements/065/data.html|titre=Technical data for Terbium|consulté le=11 août 2016}}, avec en sous-pages les données connues pour chaque isotope
* {{lien web|langue=en|url=http://www.periodictable.com/Elements/065/data.html|titre=Technical data for Terbium|consulté le=11 août 2016}}, avec en sous-pages les données connues pour chaque isotope


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Terbium
Image illustrative de l’article Terbium
Échantillon de terbium.
GadoliniumTerbiumDysprosium
  Structure cristalline hexagonale compacte
 
65
Tb
 
               
               
                                   
                                   
                                                               
                                                               
   
                                           
Tb
Bk
Tableau completTableau étendu
Position dans le tableau périodique
Symbole Tb
Nom Terbium
Numéro atomique 65
Groupe
Période 6e période
Bloc Bloc f
Famille d'éléments Lanthanide
Configuration électronique [Xe] 4f9 6s2
Électrons par niveau d’énergie 2, 8, 18, 27, 8, 2
Propriétés atomiques de l'élément
Masse atomique 158,925 34 ± 0,000 02 u[1]
Rayon atomique (calc) 175 pm (225 pm)
Rayon de covalence 194 ± 5 pm[2]
État d’oxydation 3
Électronégativité (Pauling) 1,20
Oxyde base
Énergies d’ionisation[3]
1re : 5,863 8 eV 2e : 11,52 eV
3e : 21,91 eV 4e : 39,79 eV
Isotopes les plus stables
Iso AN Période MD Ed PD
MeV
157Tb{syn.}71 ansε0.060157Gd
158Tb{syn.}180 ansε
β-
1,220
0,937
158Gd
158Dy
159Tb100 %stable avec 94 neutrons
Propriétés physiques du corps simple
État ordinaire solide
Masse volumique 8,230 g·cm-3[1]
Système cristallin Hexagonal compact
Couleur blanc argenté
Point de fusion 1 356 °C[1]
Point d’ébullition 3 230 °C[1]
Énergie de fusion 10,8 kJ·mol-1
Énergie de vaporisation 330,9 kJ·mol-1
Volume molaire 19,3×10-6 m3·mol-1
Chaleur massique 180 J·kg-1·K-1
Conductivité électrique 0,889×106 S·m-1
Conductivité thermique 11,1 W·m-1·K-1
Divers
No CAS 7440-27-9[4]
No ECHA 100.028.306
Précautions
SGH[5]
SGH02 : Inflammable
Danger
H228 et P210

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

Le terbium est un élément chimique, de symbole Tb et de numéro atomique 65. C'est un métal gris argenté de la famille des lanthanides appartenant au groupe des terres rares.

L'appellation terbium, provient de l'endroit, Ytterby près de Stockholm en Suède, où l'on a découvert le minerai dans lequel ont également été identifiées plusieurs autres terres rares. Les éléments chimiques yttrium, erbium et ytterbium partagent la même étymologie.

On extrait aujourd'hui le terbium du sable de monazite (teneur d'environ 0,03 %) comme beaucoup d'autres lanthanides.

Le terbium est une ressource non renouvelable. Une publication du Centre national de la recherche scientifique français avait même prévu son épuisement pour 2012[6].

Histoire[modifier | modifier le code]

Première découverte[modifier | modifier le code]

Carl Gustav Mosander
(1797-1858).
Découvertes des terres rares.
Yttrium (1794)

Yttrium



Terbium (1843)



Erbium (1843)
Erbium

Erbium



Thulium (1879)



Holmium (1879)

Holmium



Dysprosium (1886)






Ytterbium (1878)

Ytterbium

Ytterbium



Lutécium (1907)




Scandium (1879)








Cérium (1803)

Cérium


Lanthane (1839)

Lanthane


Didyme (1839)
Didyme

Néodyme (1885)



Praséodyme (1885)



Samarium (1879)

Samarium

Samarium



Europium (1901)





Gadolinium (1880)







Prométhium (1947)


Diagrammes des découvertes des terres rares. Les dates entre parenthèses sont les dates d'annonces des découvertes[7]. Les branches représentent les séparations des éléments à partir d'un ancien (l'un des nouveaux éléments conservant le nom de l'ancien, sauf pour le didyme).

En 1789, le chimiste finlandais Johan Gadolin identifie un nouvel oxyde (ou « terre ») dans un échantillon d'ytterbite (rebaptisée plus tard « gadolinite » en son honneur). Cette nouvelle roche avait été découverte deux ans auparavant par le lieutenant Carl Axel Arrhenius près du village d'Ytterby en Suède. Ces travaux sont confirmés en 1797 par Anders Gustaf Ekeberg qui baptise le nouvel oxyde yttria[8].

Près d'un demi-siècle plus tard, le Suédois Carl Gustav Mosander parvient à isoler plusieurs terres rares (cérium, lanthane et didyme) grâce à de nouveaux procédés de cristallisation fractionnée[9]. Convaincu que l'yttria extraite de la gadolinite est également un mélange, il décide d'y chercher certains de ces nouveaux composés. À l'automne 1842, il parvient à isoler deux oxydes, l'un blanc (donnant des sels incolores), qu'il considère comme le véritable yttrium, et l'autre jaune (donnant des sels roses), qu'il décide de nommer « odinium » en l'honneur du dieu Odin de la mythologie nordique. Avant de publier les résultats de ces recherches en 1843, Mosander achève une étape supplémentaire de fractionnement des oxalates de ces composés et découvre un troisième oxyde. Il décide de conserver le terme yttria pour la fraction incolore (oxyde d'yttrium pur) et nomme la fraction jaune « erbine » et la fraction rose « terbine », toujours en rappel du village d'Ytterby[10].

Controverses et confusions[modifier | modifier le code]

Durant les décennies qui suivent, les découvertes de Mosander sont remises en question. En 1860, son compatriote Nils Johan Berlin reprend l'étude de l'yttria brute et parvient à en isoler deux oxydes. Il en considère un comme étant de l'oxyde d'yttrium pur et identifie l'autre comme l'erbine de Mosander, malgré le fait qu'il donne des sels colorés en rose. Il ne trouve par contre aucune trace de la terbine[11]. Ces expériences sont répétées en 1864 à Göttingen par Friedrich Otto Popp et à Genève par Marc Delafontaine, avec des conclusions opposées : le premier ne trouve aucun autre élément que l'yttrium et prétend que les autres composés sont des oxydes déjà connus (du cérium et du didyme)[12], alors que le second soutient l'existence à la fois de l'erbine et de la terbine[13]. Puis en 1866, c'est au tour de Robert Bunsen et de son assistant Johan Bahr de l'Université d’Heidelberg de réitérer le processus de séparation. Ils reconnaissent que les sels d'yttrium sont incolores et que leurs solutions ne présentent pas de bandes d'absorption, alors que les sels d'erbium ont une belle coloration rose et que leurs solutions donnent un spectre d'absorption tout à fait différent de celui du didyme. Mais ils ne trouvent aucun autre composé[14].

Ainsi, la confusion s'installe et les noms choisis par Mosander sont intervertis. Delafontaine a beau rétorquer que l'erbine de Berlin et de Bahr et Bunsen n'est autre que la terbine de Mosander, et qu'il détient les preuves de l'existence de la vraie erbine (celle de Mosander), il n'est pas entendu. Pendant plusieurs années, le terbium disparaît de la liste des éléments connus et se trouve ainsi absent de la première version du tableau périodique des éléments de Dmitri Mendeleïev en 1869[9]. Les Suédois Per Teodor Cleve et Otto Magnus Höglund (de) tentent de vérifier en 1872 l'hypothèse de Delafontaine, mais échouent une fois de plus à isoler autre chose que l'erbium (au sens de Bahr et Bunsen)[15]. L'existence de ce dernier fait bientôt l'unanimité au sein de la communauté scientifique, grâce à sa détection dans le spectre solaire par l'astronome américain Charles Augustus Young la même année[16].

Confirmations[modifier | modifier le code]

C'est finalement dans un autre minerai, la samarskite, que Delafontaine finit par retrouver la trace de l'erbine jaune de Mosander. Il pense un temps la renommer « mosandrium » en l'honneur du chimiste suédois, puis s'accorde avec son compatriote Jean Charles Galissard de Marignac pour conserver le nom de terbine :

« Dans une note antérieure, j'ai proposé d'appliquer au radical de cette terre jaune, le nom de Mosandrium, quoique ce soit le vrai erbium de Mosander ; ce changement me semblait justifié par la notoriété qu'ont les travaux de M. Bunsen et de M. Cléve et qui rend impossible d'enlever à leur terre rose son nom impropre d'erbine, sans créer une confusion regrettable. M. Marignac pense qu'il serait préférable de ne pas créer un nouveau nom et qu'il vaut mieux compléter l'interversion des noms en appelant terbine la terre jaune (erbine Mosander non Bunsen), et erbine la terre rose (terbine de Mosander). Je me rangerai volontiers à cet avis [...] »

— Marc Delafontaine[17]

En 1878, ses travaux sont confirmés par Marignac, qui isole lui-même le terbium de la gadolinite. Parallèlement, l'Américain John Lawrence Smith publie la découverte d'une nouvelle terre jaune dans la samarskite, à laquelle il choisit de donner le nom de « mosandrum »[18]. Marignac l'analyse et déclare qu'elle n'est rien d'autre que la terbine dont Delafontaine et lui-même viennent de prouver l'existence[19], ce qui donne lieu à une vive dispute entre les trois scientifiques[20]. Ces découvertes sont définitivement ratifiées par la publication en 1882 des 194 lignes du spectre du terbium par le chimiste britannique Henry Enfield Roscoe[16].

Caractéristiques[modifier | modifier le code]

Propriétés physiques[modifier | modifier le code]

Le terbium est un métal d'aspect gris argenté. Comme les autres membres de la famille des lanthanides, il est malléable, ductile et assez mou pour être coupé avec un couteau. Il est assez stable dans l'air, et existe sous deux formes allotropiques, avec un changement de phase à 1 289 °C[21].

Structure cristalline du terbium.

Comme toutes les terres rares lourdes, le terbium présente une structure cristalline en empilement compact hexagonal. En dessous de son point de Curie (−54,15 °C), il montre un agencement ferromagnétique simple avec les moments alignés selon l'axe b du plan basal. Au-dessus de Tc, l'élément ne devient pas immédiatement paramagnétique, mais atteint plutôt un état antiferromagnétique particulier qui persiste jusqu'à sa température de Néel (−43,15 °C). Cet agencement, connu sous le nom d'antiferromagnétisme hélicoïdal, est caractérisé par le fait que tous les moments magnétiques d'une même couche sont parallèles et orientés selon un angle fixe par rapport aux moments des couches adjacentes. Ils tournent ainsi autour de l'axe c à la manière d'une vis ou d'une hélice. Le dysprosium partage ces caractéristiques particulières pour d'autres températures[22]. Ces deux éléments présentent de plus une magnétostriction élevée[10].

Le cation terbium(III) exhibe une importante fluorescence de couleur verte. Elle implique une transition 5D47F5 dont la bande d'émission principale est située à 545 nm, avec un temps de vie de 0,1 à 2 ms[23].

Propriétés chimiques et composés[modifier | modifier le code]

La valence la plus commune dans les composés solides est de III. Un valence de IV est connue pour le métal dans son dioxyde (TbO2) et son tétrafluorure (TbF4). Le terbium forme également plusieurs oxydes non stœchiométriques de composition approximative Tb4O7. En solution, le métal existe seulement à l'état trivalent : [Tb(H2O)n]3+ .

Le terbium forme un certain nombre de composés binaires avec des éléments comme l'oxygène (TbO2, Tb2O3, Tb7O12, Tb11O20), l'hydrogène (TbH2, TbH3), les halogènes (TbF3, TbF4, TbI3), l'azote (TbN), le phosphore (TbP), le soufre (TbS), le sélénium (TbSe) et le tellure (TbTe), ainsi qu'avec le carbone, le silicium, le bore, l'arsenic et l'antimoine[24].

Isotopes[modifier | modifier le code]

À l'état naturel, le terbium ne possède qu'un seul isotope stable : 159Tb. C'est donc un élément mononucléidique et monoisotopique.

Trente-six radioisotopes synthétiques ont été caractérisés, du terbium 135 au terbium 171. Les plus stables sont le terbium 158, avec une demi-vie de 180 ans, et le terbium 157, avec une demi-vie de 71 ans. Les deux modes de désintégration principaux sont la capture électronique, qui se traduit par la production d'isotopes du gadolinium, et la désintégration bêta moins, résultant en isotopes du dysprosium[25].

L'élément possède également 27 isomères nucléaires, dont le plus stable, 156mTb, a une demi-vie de 24,4 heures[25].

Abondance naturelle et production[modifier | modifier le code]

Xénotime de Norvège.

Le terbium est présent en combinaisons avec d'autres terres rares dans plusieurs minéraux, comme le xénotime (1 % d'oxyde de terbium), l'euxénite (1,3 %), ou encore la cérite, la monazite et la gadolinite. L'élément a également été détecté dans la matière stellaire. Son abondance dans la croûte terrestre est estimée à 1,2 mg/kg[24], il est donc deux fois plus commun que l'argent[8].

En 2018, les principales ressources minières sont situées en Chine, aux États-Unis, au Brésil, en Inde, au Sri Lanka et en Australie. Les réserves en terbium étaient estimées à 300 000 tonnes et la production mondiale est d'environ 10 tonnes par an (donnée 2001)[8], mais en avril dans la revue Nature des chercheurs japonais estiment que les gisements nouveaux détectés et explorés à l'Est du Japon depuis quelques années représentent sur 2 500 km2 environ 16 millions de tonnes de terres rares, situées dans le sédiment marin, à plus de 5 000 mètres de profondeur ; sur 2 499 km2, le fond contiendrait là plus de 16 millions de tonnes d'oxydes de terres rares, soit 420 ans d'approvisionnement mondial de terbium (et aussi 620 ans d'approvisionnement mondial d'Europium, 780 ans de réserve d'yttrium, 730 ans pour dysprosium, selon une publication d'avril 2018 dans Scientific Reports[26] ; cette ressource ne pourrait toutefois pas être exploitée avant 2023 étant donné les coûts et difficultés d'accès[27].

Terbium dans l'univers[modifier | modifier le code]

Si rare sur la terre, le terbium est un élément qui se trouve dans les objets célestes.

Du terbium a été détecté dans le Soleil par spectroscopie[28], depuis Charles Augustus Young (au-dessus).

En 2023, du terbium une fois ionisé (Tb II en notation spectroscopique, Tb+ en notation chimique) a été détecté, sous forme gazeuse, dans l'atmosphère de KELT-9 b, une exoplanète de type Jupiter ultra-chaud dont la température atteint 4 000 °C. Il semble que l'analyse de cette existence puisse contribuer à déterminer l'âge et l'origine de cette planète particulière[29].

Extraction[modifier | modifier le code]

Échantillon de terbium métallique.
Terbium métallique.

Les procédés d'extraction du terbium sont similaires à ceux des autres lanthanides. L'élément est séparé des autres terres rares par des méthodes basées sur l'échange d'ions, qui sont relativement faciles et plus rapides que les techniques de cristallisation fractionnée. Le métal est obtenu à partir de son trifluorure (TbF3) ou de son trichlorure (TbCl3) anhydres par réduction thermique avec le calcium métallique dans un creuset en tantale. Il peut ensuite être purifié par refusion sous vide[24].

Le prix d'un gramme de terbium pur à 99,9 % était d'environ 40 dollars américains en 2015[21].

Utilisations[modifier | modifier le code]

Propriétés optiques[modifier | modifier le code]

Les composés des ions trivalents de plusieurs lanthanides fluorescent après stimulation par des rayons UV ou une décharge électrique. Cette particularité en fait des composants de choix pour la conception des luminophores. Ainsi, la fluorescence verte du terbium connaît trois principales applications industrielles : tubes cathodiques des téléviseurs et des écrans d'ordinateurs, tubes fluorescents trichromatiques pour l'éclairage et radiographie médicale (transformation des rayons X en lumière visible)[30].

Fluorescence du sulfate de terbium.
Exemples de matériaux optiques dopés au terbium
Luminophore Excitation Application
Gd2O2S:Tb3+ Rayons X Écrans renforçateurs de rayons X
Rayon cathodique Tubes cathodiques (vert)
ZnS:Tb3+ Électrons Panneaux électroluminescents
LaPO4:Ce,Tb Rayons UV Composante verte des tubes fluorescents trichromatiques
(Ce,Tb)MgAl11O19
(Gd,Ce,Tb)MgB5O10

À plus petite échelle, les propriétés optiques du terbium sont également utilisés en biochimie. Ainsi, une méthode spectrophotométrique de détection des spores bactériennes a été proposée. Elle repose sur l'addition de chlorure de terbium à un lysat d'endospores. L'acide dipicolinique, qui est un marqueur chimique unique des spores, chélate l'ion terbium(III) et forme un complexe qui montre une fluorescence intense dans le spectre visible[31].

Enfin, de manière plus anecdotique, la fluorescence verte du terbium est utilisée comme moyen de protection contre la contrefaçon des billets de la monnaie européenne[32].

Propriétés magnétiques[modifier | modifier le code]

Le Terfenol-D est un alliage de fer et de terres rares de formule Tb0,3Dy0,7Fe1,9 très fortement magnétostrictif.

Autres[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c et d (en) David R. Lide, CRC Handbook of Chemistry and Physics, CRC Press Inc, , 90e éd., 2804 p., Relié (ISBN 978-1-420-09084-0)
  2. (en) Beatriz Cordero, Verónica Gómez, Ana E. Platero-Prats, Marc Revés, Jorge Echeverría, Eduard Cremades, Flavia Barragán et Santiago Alvarez, « Covalent radii revisited », Dalton Transactions,‎ , p. 2832 - 2838 (DOI 10.1039/b801115j)
  3. (en) David R. Lide, CRC Handbook of Chemistry and Physics, CRC, , 89e éd., p. 10-203
  4. Base de données Chemical Abstracts interrogée via SciFinder Web le 15 décembre 2009 (résultats de la recherche)
  5. SIGMA-ALDRICH
  6. Épuisement des ressources naturelles sur eco-info.org et références en fin d'article.
  7. (en) Episodes from the History of the Rare Earth Elements, Springer Netherlands, coll. « Chemists and Chemistry », (ISBN 9789401066143 et 9789400902879, DOI 10.1007/978-94-009-0287-9), xxi.
  8. a b et c (en) John Emsley, Nature's building blocks : an A-Z guide to the elements, Oxford, Oxford University Press, , 240–242 p. (ISBN 0-19-850341-5, lire en ligne).
  9. a et b (en) Pieter Thyssen et Koen Binnemans, « Accommodation of the Rare Earths in the Periodic Table », dans Handbook on the Physics and Chemistry of Rare Earths, vol. 41, Elsevier, , 560 p. (lire en ligne).
  10. a et b (en) Per Enghag, Encyclopedia of the Elements : Technical Data - History - Processing - Applications, John Wiley & Sons, , 1309 p. (lire en ligne).
  11. (sv) Nils Johan Berlin, « Om de i den blandade ytterjorden befintliga oxider », Forhandlinger ved de skandinaviske Naturforskeres, ottende Møde, Copenhague,‎ , p. 448-454 (lire en ligne).
  12. (de) Friedrich Otto Popp, « Untersuchung über die Yttererde », Annalen der Chemie und Pharmacie, Justus Freiherr von Liebig, vol. 55,‎ , p. 179-201 (lire en ligne).
  13. Marc Delafontaine, « Sur les métaux de la gadolinite », Bulletin de la Société chimique de Paris, t. 3,‎ , p. 415-418, lire en ligne sur Gallica.
  14. (de) Johan Bahr et Robert Bunsen, « Ueber Erbinerde Und Yttererde », Annalen der Chemie und Pharmacie, vol. 61,‎ , p. 1-34 (lire en ligne).
  15. Per Teodor Cleve et Otto Magnus Höglund, « Sur les combinaisons de l'yttrium et de l'erbium », Bulletin de la Société chimique de Paris, t. 18,‎ , p. 193-201 (lire en ligne).
  16. a et b (en) C.H. Evans, Episodes from the History of the Rare Earth Elements, Springer Science & Business Media, , 268 p. (lire en ligne).
  17. Marc Delafontaine, Archives des sciences physiques et naturelles, (présentation en ligne), p. 184.
  18. John Lawrence Smith, « Le Mosandrum, un nouvel élément », Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, t. 87,‎ , p. 148-151, lire en ligne sur Gallica
  19. Jean Charles Marignac, « Observation sur la découverte, annoncée par M. L. Smith, d'une nouvelle terre appartenant au groupe du cérium », Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, t. 87,‎ , p. 281-283, lire en ligne sur Gallica
  20. Marc Delafontaine, « Sur le Mosandrum, de M. Lawrence Smith », Comptes rendus hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, t. 87,‎ , p. 600-602, lire en ligne sur Gallica
  21. a et b (en) William M. Haynes, CRC Handbook of Chemistry and Physics, Boca Raton, CRC Press/Taylor & Francis, , 96e éd., 2677 p. (ISBN 9781482260960)
  22. (en) Mike Jackson, « Magnetism of Rare Earth », The IRM quarterly, vol. 10, no 3,‎ , p. 1-8 (lire en ligne [PDF]).
  23. (en) Pekka Hänninen et Harri Härmä, Lanthanide Luminescence : Photophysical, Analytical and Biological Aspects, Springer Science & Business Media, , 388 p. (lire en ligne).
  24. a b et c (en) Pradyot Patnaik, Handbook of Inorganic Chemicals, McGraw-Hill, , 1086 p. (ISBN 978-0-07-049439-8, présentation en ligne).
  25. a et b (en) Georges Audi, O. Bersillon, J. Blachot et A.H. Wapstra, « The NUBASE Evaluation of Nuclear and Decay Properties », Nuclear Physics A, vol. 729, no 3,‎ , p. 3–128 (lire en ligne [PDF]).
  26. (en)The tremendous potential of deep-sea mud as a source of rare-earth elements, Nature, 10 avril 2018.
  27. Science (2018), Global trove of rare earth metals found in Japan’s deep-sea mud par Roni Dengler | 13 avril 2018
  28. Observatoire du Mont Wilson, Contribution from the Mount Wilson Observatory, p. 372, Carnegie Institution of Washington, 1929 [lire en ligne]
  29. Morgane Gillard, « Des pluies d'un métal très rare découvertes sur la planète la plus chaude de la Galaxie », Futura Sciences,‎ (lire en ligne)
  30. (en) NPCS Board of Consultants & Engineers, Handbook on Rare Earth Metals and Alloys : Properties, Extraction, Preparation and Applications, Asia Pacific Business Press Inc., , 688 p. (ISBN 978-81-7833-120-1, lire en ligne).
  31. (en) D.L. Rosen, C. Sharpless et L.B. McGown, « Bacterial spore detection and determination by use of terbium dipicolinate photoluminescence », Analytical Chemistry, no 69,‎ , p. 1082–1085.
  32. (en) Brian Wardle, « Lanthanide luminescence », dans Principles and Applications of Photochemistry, John Wiley & Sons, , 264 p., p. 74-76.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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