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La '''poétique''' désigne l'étude et la théorisation de la création artistique (du grec ''poiesis'', « créer »).
La '''poétique''' désigne l'étude et la théorisation de la création artistique (du grec ''poiesis'', « créer »).


Discipline instaurée par [[Aristote]] dans ''[[La Poétique]]'' (vers -335), elle désigne plus particulièrement de nos jours l'étude des formes littéraires et notamment de la [[stylistique]], de la [[narratologie]], des [[figure de style|figures de style]]. Elle est « l'étude de l'art littéraire en tant que création verbale »<ref>''Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage'', article « Poétique », {{p.|193}}, Paris, 1995</ref> ou encore : « l'étude des procédés internes du texte<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Vincent Jouve|titre=Poétique du roman|passage=|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref> ».
Discipline instaurée par [[Aristote]] dans ''[[La Poétique]]'' (vers 335 av. J.-C.), elle désigne plus particulièrement de nos jours l'étude des formes littéraires et notamment de la [[stylistique]], de la [[narratologie]], des [[figure de style|figures de style]]. Elle est « l'étude de l'art littéraire en tant que création verbale »<ref>''Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage'', article « Poétique », {{p.|193}}, Paris, 1995.</ref> ou encore : « l'étude des procédés internes du texte<ref>{{Ouvrage|auteur1=Vincent Jouve|titre=Poétique du roman}}.</ref> ».


[[Tzvetan Todorov]] REFERENCES ??? distingue, par exemple, trois grandes familles de théories de la poésie dans la tradition occidentale : le premier courant développe une conception rhétorique qui considère la poésie comme un ''ornement'' du discours, un plaisir ajouté au langage ordinaire; un deuxième courant démontre que la poésie ''inverse les propriétés rationnelles'' du langage en communiquant ce qu'il ne saurait traduire; le troisième met l'accent sur le ''jeu du langage poétique'' qui attire l'attention sur lui-même, plus que sur le sens qu'il porte.
{{Réfnec|[[Tzvetan Todorov]] distingue, par exemple, trois grandes familles de théories de la poésie}} dans la tradition occidentale : le premier courant développe une conception rhétorique qui considère la poésie comme un ''ornement'' du discours, un plaisir ajouté au langage ordinaire; un deuxième courant démontre que la poésie ''inverse les propriétés rationnelles'' du langage en communiquant ce qu'il ne saurait traduire; le troisième met l'accent sur le ''jeu du langage poétique'' qui attire l'attention sur lui-même, plus que sur le sens qu'il porte.


Cette dernière théorie de l'autonomie du langage poétique a été exposée par [[Roman Jakobson]] au début du {{XXe siècle}}, dans un chapitre de ses ''Essais de linguistique générale''. Étudiant les ''fonctions de la communication'', Jakobson montre que la ''fonction poétique'', contrairement aux autres, se centre sur le signe lui-même, et plus précisément sur le signifiant (il s'agit, pour une large part, d'un travestissement de Jakobson par les structuralistes, qui lui-même travestit Saussure pour survaloriser la poésie futuriste Russe<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Antoine Compagnon|titre=Le Démon de la théorie|passage=|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref>. D'après Jakobson, si la fonction poétique se centre d'abord sur le message, elle n'oblitère absolument pas les autres fonctions, il s'agit seulement d'une différence de quantité. Du reste, cette définition met '"sur le même plan le slogan, le mot d'esprit et le poème"<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Henry Meschonnic|titre=Politique du rythme|passage=p. 147|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref>.). Cette approche linguistique a malgré tout le mérite de proposer une définition qui évite la confusion entre la poésie comme ''art du langage'' (valeur de la forme) et la poésie comme ''catégorie esthétique'' (valeur du contenu). Cette juxtaposition des deux valeurs du terme a longtemps figuré dans les dictionnaires et traités littéraires. Au {{XIXe siècle}}, par exemple, dans un ouvrage intitulé ''Poétique'' (''Cours complet de littérature à l'usage des séminaires et des collèges rédigé d'après les meilleurs critiques anciens et modernes''), l'abbé Piron répond à la question « En quoi consiste la poésie du [[vers (poésie)|vers]] ? » : « Pour donner une définition précise de la poésie du vers, nous dirons qu'un vers est poétique ou véritablement vers quand son expression a une élévation, une force, un ''agrément'' dans les mots et les tours, qu'on ne trouve point dans le même genre traité en prose ; en un mot, quand il montre le langage ennobli, enrichi, ''paré'', élevé au-dessus de ce qu'il est quand il n'est que de la prose. »
Cette dernière théorie de l'autonomie du langage poétique a été exposée par [[Roman Jakobson]] au début du {{XXe siècle}}, dans un chapitre de ses ''Essais de linguistique générale''. Étudiant les ''fonctions de la communication'', Jakobson montre que la ''fonction poétique'', contrairement aux autres, se centre sur le signe lui-même, et plus précisément sur le signifiant (il s'agit, pour une large part, d'un travestissement de Jakobson par les structuralistes, qui lui-même travestit Saussure pour survaloriser la poésie futuriste russe<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Antoine Compagnon|titre=Le Démon de la théorie}}.</ref>. D'après Jakobson, si la fonction poétique se centre d'abord sur le message, elle n'oblitère absolument pas les autres fonctions, il s'agit seulement d'une différence de quantité. Du reste, cette définition met '"sur le même plan le slogan, le mot d'esprit et le poème"<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Henry Meschonnic|titre=Politique du rythme|passage=147}}.</ref>.). Cette approche linguistique a malgré tout le mérite de proposer une définition qui évite la confusion entre la poésie comme ''art du langage'' (valeur de la forme) et la poésie comme ''catégorie esthétique'' (valeur du contenu). Cette juxtaposition des deux valeurs du terme a longtemps figuré dans les dictionnaires et traités littéraires. Au {{XIXe siècle}}, par exemple, dans un ouvrage intitulé ''Poétique'' (''Cours complet de littérature à l'usage des séminaires et des collèges rédigé d'après les meilleurs critiques anciens et modernes''), l'abbé Piron répond à la question « En quoi consiste la poésie du [[vers (poésie)|vers]] ? » : « Pour donner une définition précise de la poésie du vers, nous dirons qu'un vers est poétique ou véritablement vers quand son expression a une élévation, une force, un ''agrément'' dans les mots et les tours, qu'on ne trouve point dans le même genre traité en prose ; en un mot, quand il montre le langage ennobli, enrichi, ''paré'', élevé au-dessus de ce qu'il est quand il n'est que de la prose. »


Meschonnic propose une définition synthétique, en opposition à la philosophie, la linguistique, la rhétorique, la stylistique, la critique littéraire, la philologie et la sémiotique - la poétique aurait été, d'après lui, "avalée, et occultée" par ces approches. Il propose donc : "le travail de la poétique est dans telle ou telle œuvre, la reconnaissance de son mode de signifier, de son historicité, et l'examen de ses propres concepts à l’œuvre dans la lecture d'une œuvre"<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Henry Meschonnic|titre=Politique du rythme|passage=p. 148|lieu=|éditeur=|date=|pages totales=|isbn=|lire en ligne=}}</ref>.
Meschonnic propose une définition synthétique, en opposition à la philosophie, la linguistique, la rhétorique, la stylistique, la critique littéraire, la philologie et la sémiotique la poétique aurait été, d'après lui, "avalée, et occultée" par ces approches. Il propose donc la définition suivante : {{citation|Le travail de la poétique est dans telle ou telle œuvre, la reconnaissance de son mode de signifier, de son historicité, et l'examen de ses propres concepts à l’œuvre dans la lecture d'une œuvre}}<ref>{{Ouvrage|langue=|auteur1=Henry Meschonnic|titre=Politique du rythme|passage=148}}.</ref>.
{{Article détaillé|Art poétique}}
{{Article détaillé|Art poétique}}


== Notes et références ==
== Notes et références ==

Version du 18 août 2019 à 12:25

La poétique désigne l'étude et la théorisation de la création artistique (du grec poiesis, « créer »).

Discipline instaurée par Aristote dans La Poétique (vers 335 av. J.-C.), elle désigne plus particulièrement de nos jours l'étude des formes littéraires et notamment de la stylistique, de la narratologie, des figures de style. Elle est « l'étude de l'art littéraire en tant que création verbale »[1] ou encore : « l'étude des procédés internes du texte[2] ».

Tzvetan Todorov distingue, par exemple, trois grandes familles de théories de la poésie[réf. nécessaire] dans la tradition occidentale : le premier courant développe une conception rhétorique qui considère la poésie comme un ornement du discours, un plaisir ajouté au langage ordinaire; un deuxième courant démontre que la poésie inverse les propriétés rationnelles du langage en communiquant ce qu'il ne saurait traduire; le troisième met l'accent sur le jeu du langage poétique qui attire l'attention sur lui-même, plus que sur le sens qu'il porte.

Cette dernière théorie de l'autonomie du langage poétique a été exposée par Roman Jakobson au début du XXe siècle, dans un chapitre de ses Essais de linguistique générale. Étudiant les fonctions de la communication, Jakobson montre que la fonction poétique, contrairement aux autres, se centre sur le signe lui-même, et plus précisément sur le signifiant (il s'agit, pour une large part, d'un travestissement de Jakobson par les structuralistes, qui lui-même travestit Saussure pour survaloriser la poésie futuriste russe[3]. D'après Jakobson, si la fonction poétique se centre d'abord sur le message, elle n'oblitère absolument pas les autres fonctions, il s'agit seulement d'une différence de quantité. Du reste, cette définition met '"sur le même plan le slogan, le mot d'esprit et le poème"[4].). Cette approche linguistique a malgré tout le mérite de proposer une définition qui évite la confusion entre la poésie comme art du langage (valeur de la forme) et la poésie comme catégorie esthétique (valeur du contenu). Cette juxtaposition des deux valeurs du terme a longtemps figuré dans les dictionnaires et traités littéraires. Au XIXe siècle, par exemple, dans un ouvrage intitulé Poétique (Cours complet de littérature à l'usage des séminaires et des collèges rédigé d'après les meilleurs critiques anciens et modernes), l'abbé Piron répond à la question « En quoi consiste la poésie du vers ? » : « Pour donner une définition précise de la poésie du vers, nous dirons qu'un vers est poétique ou véritablement vers quand son expression a une élévation, une force, un agrément dans les mots et les tours, qu'on ne trouve point dans le même genre traité en prose ; en un mot, quand il montre le langage ennobli, enrichi, paré, élevé au-dessus de ce qu'il est quand il n'est que de la prose. »

Meschonnic propose une définition synthétique, en opposition à la philosophie, la linguistique, la rhétorique, la stylistique, la critique littéraire, la philologie et la sémiotique — la poétique aurait été, d'après lui, "avalée, et occultée" par ces approches. Il propose donc la définition suivante : « Le travail de la poétique est dans telle ou telle œuvre, la reconnaissance de son mode de signifier, de son historicité, et l'examen de ses propres concepts à l’œuvre dans la lecture d'une œuvre »[5].

Notes et références

  1. Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage, article « Poétique », p. 193, Paris, 1995.
  2. Vincent Jouve, Poétique du roman.
  3. Antoine Compagnon, Le Démon de la théorie.
  4. Henry Meschonnic, Politique du rythme, p. 147.
  5. Henry Meschonnic, Politique du rythme, p. 148.

Articles connexes