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Boat-people

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Bateau vietnamien de boat-people dont les passagers ont été recueillis fin avril 1984 au sud de la mer de Chine par le cargo Cap Anamur, spécialement affrété par Rupert Neudeck, dans le cadre de l'opération « Un bateau pour le Viêt Nam » ; celui-ci contenait 52 personnes quand il a été secouru. Il est exposé actuellement comme monument à la mémoire des boat-people à Troisdorf en Allemagne.

Le terme boat-people ou boat people[1] (composé par juxtaposition des mots anglais « bateau » et « gens ») désigne et qualifie chaque individu ayant pris part à une importante vague de migration venue essentiellement du Vietnam jusqu'en Europe et en Amérique du Nord par la mer de Chine.

Ce phénomène, qui a inspiré la chanson du groupe Gold Plus près des étoiles, en 1984, s'est étendu sur plus de quinze ans: après la chute de Saïgon et l'invasion du Sud Viêt Nam par le Nord Viêt Nam communiste, "une première vague était partie du Vietnam en 1975, suivie d'une deuxième vague vers la fin des années 1970"[2], avant une troisième vague, plus modeste, vers la fin des années 1980"[2].

Il a été provoqué par des conflits armés, le plus grave étant la guerre entre le Cambodge et le Viêt Nam, qui voie le second envahir le premier de décembre 1978 à janvier 1979, après une série d'accrochages aux frontières, pouvant impliquer des formations de la taille d'une division, lancée dès mai 1975 par une attaque des Khmers Rouges contre le Viêt Nam à l'île de Phú Quốc car ils craignent un expansionnisme vietnamien. Les vives tensions politiques et économiques, qui ont débuté avec la guerre d'Indochine, se poursuivant ensuite sur fond de guerre froide entre l'URSS et les États-Unis.

Cette migration a lieu à bord d'embarcations souvent inadaptées, sélectionnées seulement en fonction de leur valeur moindre, de leur disponibilité et sans autre considération que le profit immédiatement généré. Souvent en surcharge et en mauvais état, ces nefs provoquent de très nombreuses tragédies, dont les victimes périssent par noyade, maladie, famine et froid. Des ressortissants du Viêt Nam, du Laos et du Cambodge ont choisi de quitter ces dictatures communistes sur fond d'idéologie politique omniprésente, d'absence de liberté d'opinion et d'économie dirigée.

Ultérieurement, le terme reste utilisé dans la presse francophone au sens figuré pour désigner les vagues de migrants en provenance d'Afrique du Nord et d'Orient traversant la mer Méditerranée à destination de l'Europe. En revanche, les pays de culture anglo-saxonne appliquent le terme au sens propre, désignant tout individu qui emprunte une embarcation quelle qu'elle soit pour quitter un contexte donné indépendamment des raisons politiques ou économiques susceptibles de le motiver.

Les boat people du Viêt Nam

Contexte

Le phénomène des boat people est une conséquence de la décolonisation de l'Indochine française (1947-1954), de la guerre du Vietnam dans les années 1960-1975, de la défaite subie par l'armée américaine en 1975 et de la guerre sino-vietnamienne de 1979.

La fin de la guerre d'Indochine en 1954 aboutit (accords de Genève) à l'indépendance de trois pays : le Cambodge, le Laos et le Viêt Nam, partagé en deux zones : le nord-Vietnam (sous le contrôle du Việt Minh) et le sud-Vietnam (sous le contrôle des Vietnamiens pro-occidentaux). Ces deux zones deviennent très vite deux États : la république démocratique du Viêt Nam et la république du Viêt Nam.

L'apparition au sud d'une guérilla communiste (Front national de libération du Sud Viêt Nam) vers 1960 entraîne l'intervention américaine dans la guerre du Viêt Nam. En 1969, l'armée américaine prend le contrôle du Cambodge.

En 1975, la défaite américaine est totale, tant au Cambodge, où le pouvoir passe aux Khmers rouges (Kampuchéa démocratique), qu'au sud-Vietnam, qui intègre la république démocratique du Vietnam.

En 1979, le Viet Nam met fin au régime (génocidaire) des Khmers rouges en occupant le Cambodge et subit une contre-attaque de la Chine, qui ne réussit pas à restituer le Cambodge à ses alliés Khmers rouges.

Historique

Première vague en 1975: crise des réfugiés d'Indochine

À l'effondrement de la république du Viêt Nam en avril 1975, une première vague quitte précipitamment le pays avec les Américains, fuyant devant le régime communiste. Ceux de 1975, avant ou après le 30 avril, ne sont pas encore très nombreux[3], ressortent de catégories malheureusement cohérentes avec cette fin de guerre, à forte tonalité révolutionnaire :

Parmi eux, des officiers et leurs familles, quand elles avaient pas évacuées plus tôt[3], mai aussi plusieurs milliers d’hommes du dispositif militaire déployé par les Américains[3] ou encore quelques riches familles pour qui la fuite est moins compliquée[3]. En 1975, "il n'y a pas de tradition maritime chez les populations vietnamiennes. Embarquer sur des petites embarcations de fortune ne faisait pas partie d'une logique pour ces populations très terriennes, très rurales et ancrées sur leurs terres", a rappelé l'historien Benoît de Tréglodé[4] mais elles y sont obligées car plusieurs millions de mines antipersonnelles sont placées sur les 700 kilomètres de frontière[4].

Après la réunification du Viêt Nam en 1976, des réseaux clandestins d'émigration se mettent en place. L’accroissement du nombre de réfugiés est vite spectaculaire : 11306 en 1976, 24662 fin avril 1977, soit deux ans après la chute du régime[3] puis 45437 fin 1977, dont 34 % de « boat people »[3]. Le Laos est aussi concerné, 23 000 réfugiés franchissent en 1977 la frontière du Mékong en direction de la Thaïlande[3]. La gauche française se désolidarise en deux temps du Kampuchéa démocratique, les socialistes en 1976, les communistes en 1977[3].

Seconde vague en 1979: guerre entre le Cambodge et le Viêt Nam

La crise humanitaire culmine en 1979, comme la crise politico-militaire, sommet d'un conflit armé triangulaire « dans lequel s’entrechoquent Cambodge, Vietnam et Chine »[3]. A partir de 1978, le Viêt Nam communiste soutenu par l'Union soviétique envahit le Kampuchéa démocratique en vue de chasser les Khmers Rouges, soutenus par la Chine. La Chine riposte à partir de 1979 en attaquant à son tour le Viêt Nam. C'est la guerre entre le Cambodge et le Viêt Nam, qui voie le second envahir le premier de décembre 1978 à janvier 1979, après une série d'accrochages aux frontières, pouvant impliquer des formations de la taille d'une division, lancée dès mai 1975 par une attaque des Khmers Rouges contre le Viêt Nam à l'île de Phú Quốc.

Ces tensions et surtout les affrontements armés consécutifs inquiètent les populations du sud du pays, notamment celles ayant évolué dans un contexte pro occidental, parmi lesquelles la minorité ethnique sino-vietnamienne, exerçant principalement des activités commerciales, d'autant que les khmers rouges ont « vidé les villes et institué une sorte de communisme agrarien qui va se révéler tragiquement couteux en vies humaines »[3].

Le nombre de réfugiés atteint 118492 en 1978, dont 75 % de « boat people », puis enregistre un presque triplement l'année suivante, à 393562 en 1979 dont 52 % par la mer, avant de redescendre à 168151 en 1980, dont 45 % par bateaux[3].

François Ponchaud, qui a quitté le Cambodge le 6 mai 1975 après la victoire des communistes, recueille des témoignages alarmants de réfugiés cambodgiens, dans deux articles parus dans Le Monde en février 1976, mais les télévisions découvrent réellement les boat-people avec le cargo « Hai Hong », qui a fait la une des journaux le 10 novembre 1978[5]. Onze jours après, des dizaines d'artistes et intellectuels français lancent un appel dans Le Monde pour « Un bateau pour le Vietnam »[6],[7], afin d'apporter une aide médicale aux réfugiés. Parmi eux, Jean-Paul Sartre, Raymond Aron, Brigitte Bardot, Simone de Beauvoir, Vladimir Boukovski, Irwing Brown, Maurice Clavel, ou encore Pierre Daix[6]. Sept mois plus tard, le président français Valery Gisard d'Estaing recevra deux philosophes, Jean-Paul Sartre et Raymond Aron à l'Elysée pour parler des boat-people.

Au fil de ces tensions idéologiques mais fratricides, et ceci jusqu'à la fin des années 1980[8], une forme particulière de départ maritime voit le jour, qualifiée de départ semi-officiel. Moyennant le versement d'une somme d'argent aux autorités locales et aux organisateurs, les candidats à l'exil volontaire ne sont pas radicalement empêchés d'embarquer, fréquemment en surnombre, sur des embarcations souvent inadéquates au périple. Une fois en mer, les nefs sont victimes des exactions non seulement de pirates mais également de garde-côtes, outre les avaries et les naufrages[9]. La quantité des faits et des victimes est telle que les régimes communistes impliqués ne parviennent pas à les minimiser ou dissimuler. Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés estime qu'entre 200 000 et 250 000 personnes ont péri[9]. Ces tragédies deviennent un fait marquant de la fin de la guerre froide.

Les exilés qui parviennent bien à destination de Hong Kong sont dirigés vers des camps dans lesquels ils sont retenus. Les médias de masse de l'époque se font l'écho tant des drames survenus en mer que de l'accueil rudimentaire des réfugiés dans ces camps. Les images de milliers de visages parqués derrière des barbelés ou des barreaux dans des conditions déplorables soulèvent l'indignation en Occident.

Boat-people vietnamiens en 1984.

Raymond Aron, en allant plaider la cause des boat-people à l'Élysée devant Valéry Giscard d'Estaing en , demande aux hommes politiques de résoudre le dramatique problème de l'accueil des réfugiés, repoussés par de nombreux pays (en particulier par Hong Kong, l'Indonésie et l'Australie). Jean-Paul Sartre, déjà âgé, se rallie à cette cause. Avec d'autres intellectuels et des personnalités telles que André Glucksmann, Yves Montand ou Simone Signoret, Bernard Kouchner lance l'opération Un bateau pour le Vietnam et affrète un cargo, l'Île de lumière[10]. Cette mission humanitaire en mer de Chine, qui donne ensuite naissance à l'association Médecins du monde, est suivie de nombreuses autres. La France accueille donc un quota officiel de réfugiés des camps. C'est la première grande vague d'immigration d'origine asiatique en France.

La dernière mission d'assistance en mer a eu lieu au printemps 1989, à bord du Mary, petit cargo financé par André Gille (un donateur particulier), à bord duquel se relaient des équipes soutenues par l'association française Partage. Le quotidien Libération a consacré plusieurs articles à cette opération sous la signature de Pierre Joffrey entre les 7 et 13 août 1989.

Les vagues de boat-people cessent dans les années 1990, lorsque le Viêt Nam, à l'instar de la Chine, commence à libéraliser le commerce et à mettre en place un socialisme ouvert à l'économie de marché.

À Genève (février 2006) et à Liège (juin 2006), les premières stèles sont érigées à la mémoire des victimes, et pour marquer la reconnaissance des survivants à l'égard des pays d'accueil. Le gouvernement de Hanoï, toujours à parti unique (Parti communiste vietnamien), est parvenu à faire détruire deux autres stèles, l'une en Malaisie, l'autre en Indonésie, par pressions diplomatiques sur ses voisins.

L'aide humanitaire aux boat people vietnamiens

L'opération « Un bateau pour le Vietnam » lancée par Bernard Kouchner est décrite comme « la première campagne de promotion des urgences humanitaires »[11].

À un moment où les espérances révolutionnaires, notamment communistes, perdent leurs derniers attraits, ce type de campagne ne s’inscrit plus dans une grille de lecture explicitement idéologique, comme celle engendrée par l’adhésion au marxisme et s'éloigne des dénonciations qui fonctionnaient encore au début de la décennie soixante-dix, tout particulièrement dans les milieux gauchistes.[pas clair]

Elle ne retient plus que les mots d'ordre de la morale et est marquée par un style (« spectacularisation et sollicitude envers les victimes, pratique de l’exorcisme verbal contre ces grande entités que sont la faim et le terrorisme ») qui est amplement repris la suite[11].

Ces grands mots cachent cependant une réalité politique toute autre. À un moment où la France vient de suspendre l'immigration de travail, les quelque 128 500 ressortissants de l'ancienne Indochine légalement accueillis en France bénéficient d'emblée d'un régime d'exception à plus d'un titre, dans la foulée d'une campagne de mobilisation nationale qui suit la découverte des charniers cambodgiens et des camps de fortune thaïlandais. Ce genre d'intervention est généralement du ressort de la gauche politique ; mais en l'occurrence les réactions de celle-ci sont notablement effacées : c'est que les instigateurs des atrocités sont communistes, et il ne sied pas de parler contre eux. Le champ reste donc libre. Et la droite l'investit — ce qu'elle aurait pu ne pas faire — car, comme le dit Karine Meslin, « la mobilisation du gouvernement français [présidence Giscard d'Estaing] permet d'abord de réaffirmer l'adhésion française au bloc de l'Ouest et de redéfinir ainsi les alliances et les mésalliances françaises au sein du jeu politique et économique international. » Sans compter que cela redore le blason de la France « pays de droits de l'homme », bien terni avec les guerres de décolonisation. Un autre élément socio-politique joue aussi : la suspicion des temps présents envers les demandeurs d'asile est à cette époque nettement moins forte[12].

Le régime d'exception de ces réfugiés en France

Les quotas

Selon la Convention de Genève, le statut juridique de réfugié est délivré au cas par cas. Mais à partir de 1975, le gouvernement français met en place une politique de quotas pour réglementer l'entrée des ressortissants de l'Asie du Sud-Est. Un nombre déterminé de personnes est escorté jusqu'en France par la Croix-Rouge ; puis chaque réfugié doit bien déposer une demande de reconnaissance individuelle auprès de l'Ofpra, mais comme leur venue a été organisée par l'État la délivrance du statut de réfugié est quasiment systématique : personne n'a à apporter les preuves de persécution et le bien-fondé de leurs demandes n’est pas mis en doute — ou ne l'est que tardivement[12].

Conditions d'obtention de la carte de travail

En règle générale, les demandeurs d’asile ne reçoivent de carte de travail qu'après avoir été accordé le statut de réfugié politique. Pour les réfugiés du Sud-Est de l'Asie faisant partie des quotas mentionnés, non seulement le droit de travail est immédiat, mais le contrat de travail nécessaire pour obtenir une carte de travail non provisoire est réduit de un an à trois mois et inclut même les contrats à temps partiel[12].

Autres mesures

Des cellules ANPE sont réservées aux réfugiés de l'Asie du Sud-Est. Et les employeurs bénéficient de mesures incitatives, notamment financières, pour favoriser leur embauche[12].

Hommages

En 1984, le groupe de rock français Gold sort l'album Le Train de mes souvenirs dans lequel figure la chanson Plus près des étoiles, qui rend hommage aux boat-people vietnamiens. C'est le plus grand succès du groupe avec Capitaine abandonné en 1985[réf. souhaitée].

Voici un extrait des paroles de la chanson :

« Ils ont quitté leurs terres,
Leurs champs de fleurs
Et leurs livres sacrés ;
Traversé les rizières
Jusqu'au grand fleuve salé... »

Accueil en France

Quand Bernard Kouchner mobilise en 1978, en collaboration avec le monde associatif, des comités d'accueil voient le jour un peu partout en France[13]. De 1975 à 1991, la France a accueilli plus de 120 000 personnes venues du Cambodge, du Laos et du Vietnam, au titre officiel de « réfugiés », selon des experts, dont 47 356 Cambodgiens, selon la professeure Karine Meslin, et beaucoup de Vietnamiens sont entrés sans le statut de réfugié[14]. Certaines fuyaient les régimes communistes, d'autres parfois juste la misère[13]. Le 10 novembre 1978 voit la création par Bernard Kouchner d’un vaste comité de soutien aux réfugiés politiques du Vietnam, qui meurent chaque jour en Mer de Chine[15], au surlendemain d'un reportage au journal télévisé de 20 heures sur TF1, sur le « Haï-Hong », emblématique rafiot chargé de 2564 réfugiés faméliques et loqueteux[16]. On découvre alors l'afflux des réfugiés fin 1978 en Malaisie, qui en accueillera 60 000 pour la seule année, dont 40 000 sur le seul ÏLOT de Poulo Bidong, selon Libération du 16/06/1979, qui observera qu'elle est avec la Thaïlande l'une des deux principales terres de refuge pour les boat people.

Un article de Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos dans le magazine Le Point de ce même 10 novembre 1978 dénonce le “trafic de chair humaine” orchestré par le Vietam avec ses propres citoyens candidats à l’exil[15] , un éditorial de Robert Hersant dans Le Figaro condamne l'initiative de Bernard Kouchner, par ailleurs présentée avec sarcasme comme « un bateau pour Saint-Germain-des-Prés » [17] mais le maire de Paris, Jacques Chirac, soutiendra ensuite l'appel et recueillera lui-même une petite vietnamienne qu'il élèvera comme sa fille[14]. Kouchner rassemble artistes et intellectuels de tout bord. Il confie à Claudie Broyelle, ancienne maoïste, la présidence du comité[18] et c'est elle qui se charge de les rallier. Parmi eux, lors d'une réunion chez le dissident soviétique Maximov, Bernard-Henri Lévy proposa d'attaquer l'ambassade du Viêt-Nam à Paris, mais l'idée de Bernard Kouchner de repêcher les réfugiés à l'aide d'un bateau l'a emporté. En mai 68, à l'époque de la guerre américano-vietnamienne, les étudiants de l'Association médicale franco-vietnamienne et du Comité Viêt-Nam national avaient déjà proposé l'envoi d'un bateau avec pour slogan « de la quinine et une trousse de secours dans chaque village »[16]. Michel Cordier, armateur de la Compagnie des Chargeurs Calédoniens, mobilise un des navires de sa flotte[16].

Le journal de 20 heures observe 4 jours après, le 14 novembre 1978, que « la pression internationale a permis de débloquer une aide humanitaire de base : leur distribuer de l’eau et des vivres »[15]. Le 22 novembre 1978 y est diffusée une interview de Bernard Kouchner, qui explique le but du comité qu'il a fondé le 10 novemnre, complété par une autre, de la principale figure du comité, l'acteur Yves Montand, suivi d’autres intellectuels, dont les deux principaux sont Jean-Paul Sartre et Raymond Aron[15]. Le 22 novembre, c'est un reportage sur les réfugiés viêtnamiens en Malaisie, sur une plage, qui racontent leur exode et leur condition de vie dans les bateaux[15] puis sur l'arrivée en France des réfugiés à l’aéroport de Roissy devant une nuée des journalistes[15] et leur arrivée dans leur cité d’accueil, mais aussi sur le transbordement des réfugiés du Haï-Hong dans 2 vedettes[15]. Le "Cap Anamur", bateau ouest-allemand, sera à son tour armé pour le secours des boat people en mer de Chine par le journaliste Rupert Neudeck[19].

Au cours de la conférence internationale de Genève de juillet 1979, qui fait la "Une" de "Libération" du 20 juillet[17], il est décidé que tout exilé du Cambodge, du Laos ou du Vietnam était de facto considéré comme un réfugié, mais aussi de répartir dans les « pays riches » une partie de ces réfugiés venus de la Thaïlande ou secourus en mer de Chine[13]. Parmi eux aussi, beaucoup de khmers cambodgiens, réfugiés dans un premier temps au Vietnam mais ne pouvant s'y installer[13].

Jean-Paul Sartre et Raymond Aron se serrent la main à l'hôtel Lutétia pour les "boat-people" le 20 juin 1979 à l'hôtel Lutétia puis le 26 juin devant l’Élysée, mais ce cliché, « en fait, apparaît en trompe l’œil » et signifie « publiquement le déclin des intellectuels, déjà submergsé par les sonorités et les images de la culture de masse », estimera l'historien Jean-François Sirinelli en 2017 [20]


Mais dès le 15 septembre 1979, Libération s'inquiète en première page que la mobilisation des médias en faveur des boat people décline[17], "L'île lumière", ayant terminé sa campagne humanitaire de 5 mois[17].

Dettes

Plusieurs décennies après d'anciens boat people qui ont voulu “rembourser leur dette”, c'est à dire l'argent qui leur avait à lépoque été prêté pour financer leur voyage depuis le Vietnam, ou depuis des camps de réfugiés en Thaïlande, en Malaisie, aux Philippines, par le Comité intergouvernemental pour les migrations européennes (Cime), via plusieurs parmi lesquelles le Secours catholique. selon une de ce dernier à Paris[13].

Autres utilisations du terme

132 boat-people haïtiens entassés sur une petite embarcation et interceptés par un navire américain.

Par extension ce terme de boat-people est utilisé dans d'autres circonstances : ainsi notamment à Cuba, l'exode de Mariel en 1980, puis de nouveau en 1994, ou bien en Italie lors du naufrage à Lampedusa en 2013.

En avril 2008, l'historien Alain Le Doaré nomme l'exposition dont il est le commissaire : Voyages au bout de la mer - Boat people, hier, aujourd'hui. L'exposition relate l'histoire des centaines de milliers de Vietnamiens qui ont tenté de quitter leur pays par la mer à partir de 1975. Photos, films, sons, écrits, racontent cette histoire via les témoignages des réfugiés, des marins, des journalistes, des médecins. L'exposition a été reprise aux Champs Libres à Rennes en 2009, sous le titre Boat-people, bateaux de l'exil[21],[22].

Notes et références

  1. Graphie admise par le Larousse, Le Robert et la Commission d’enrichissement de la langue française.
  2. a et b "Birth of a party-state", par Christopher E. Goscha, Benoît de Tréglodé aux éditions Les Indes savantes en 2004
  3. a b c d e f g h i j et k "La Cimade et l’accueil des réfugiés. Identités, répertoires d’actions et politique de l’asile, 1939-1994", par Dzovinar Kévonian, aux Presses universitaires de Paris Ouest en 2014 [1]
  4. a et b "Épisode 3/4 : Boat people, fuir par la mer au péril de sa vie", France Inter 5 octobre 2022[2]
  5. "10 novembre 1978. Le jour où le cargo « Hai Hong », rempli de boat-people, fait la une des journaux" par Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos [3]
  6. a et b UN APPEL DU COMITÉ " UN BATEAU POUR LE VIETNAM", dans Le Monde du 22 novembre 1978 [4]
  7. « Un bateau pour le Vietnam : quand la France découvrait les boat-peoples du 24 septembre 2015 - France Inter », sur franceinter.fr (consulté le )
  8. [5] Les Femmes dans l'immigration vietnamienne en France : De 1950 à nos jours, Chloé Szulzinger, p. 18.
  9. a et b (en) « Vietnam, post-war Communist regime (1975 et seq.): 365,000 », Secondary Wars and Atrocities of the Twentieth Century, (consulté le )
  10. « Grâce à l'Ile de Lumière, des milliers de Vietnamiens ont reconstruit leur vie », La Croix,‎ (lire en ligne).
  11. a et b [Hourmant 1997] François Hourmant, chap. 5 « Sous le signe des droits de l’homme et de la démocratie », dans Le désenchantement des clercs. Figures de l'intellectuel dans l'après-Mai 68, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Res publica », , 264 p. (lire en ligne [sur books.openedition.org]), p. 169-199 (§ 8).
  12. a b c et d Meslin 2006.
  13. a b c d et e "Ces anciens boat people qui ont voulu “rembourser leur dette”, dans La Vie, par Benjamin Sèze le 29/01/2020[6]
  14. a et b AFP, Réfugiés: en 1979, l'élan humanitaire pour les boat-people d'Asie, nouvelobs.com, 11 septembre 2015
  15. a b c d e f et g "10 NOVEMBRE 1978. QUI VEUT DES 2 500 BOAT PEOPLE VIETNAMIENS À BORD DU CARGO HAI HONG ? KOUCHNER !" le 12/11/2012 sur INDOMEMOIRES [7]
  16. a b et c "Pour les 40 ans de l’Ile de Lumière, un bateau pour le Vietnam, une exposition au musée maritime est prévue" le 17 août 2019 [8]
  17. a b c et d "LE VIETNAM ET LES DAMNÉS DE LA MER". Article de Brigitte MARTINEZ, France Terre d'Asile le 8 juillet 2011 [9]
  18. "«Aron lui lance: Bonjour, mon petit camarade» par Michel-Antoine Burnier, dans Libération le 11 mars 2005 [10]
  19. "La coopération Marine-Médecins du Monde et l'assistance aux boat people du golfe de Siam (1982-1988)" par Laurent Suteau, dans la revue Matériaux pour l’histoire de notre temps en 2009 [11]
  20. "Chapitre 13. 1979 : Sartre, Aron et les cimetières marins" par l'historien Jean-François Sirinelli dans la revue Les Révolutions françaises en 2017 [12]
  21. « Site de l'exposition »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur boat-people.fr (consulté en ).
  22. « Exposition aux Champs Libres (Rennes) : Boat people, bateaux de l'exil », sur bretagne-tours.com, (consulté en ).

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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Kim Thúy, Ru, Libre Expression, .
  • Karine Meslin, « Accueil des boat people : une mobilisation politique atypique », Plein droit, no 70,‎ (lire en ligne [sur gisti.org], consulté en ). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.

Liens externes