Oba du Bénin

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Tête d'Oba en laiton (XVIIIe siècle), musée ethnologique de Berlin.

L'oba du Bénin est le dirigeant de l'ancien royaume du Bénin. Il n’a plus de réel pouvoir depuis l'annexion du royaume par les Britanniques en 1897. Il garde cependant un rôle consultatif au sein du gouvernement. Il garde aussi une forte influence sur la population edo pour laquelle il a une nature semi-divine. Son palais se trouve dans la ville actuelle de Benin City (État d'Edo, Nigeria).

Histoire[modifier | modifier le code]

L'oba jouissait autrefois d'un très grand pouvoir et son titre revêtait un caractère sacré.

L'oba du Bénin au XVIe siècle, gravure éditée en 1815-1827.

Au XVIe siècle apparaissent ce que l'on appelle les « rois guerriers » et le royaume est significativement agrandi. L'importance soudaine de la guerre se traduit alors dans l'art par une représentation massive de chefs de guerre, les nombreuses têtes de bronze faisant office de trophées (voir ci-dessous). Les représentations figuratives associées à des éléments symboliques sont mises au service du pouvoir.

Dès 1486, des liens s'établissent entre le Portugal et le Bénin. La présence portugaise devient d'ailleurs un autre thème central au XVIe siècle dans l'art du Bénin, qui subit ainsi fortement l'influence du contact avec la culture européenne. Par exemple, des tabourets sont créés suivant le modèle européen et on trouve des gravures et bronzes mettant en scène des Européens.

Les XVIIe et XIXe siècles sont, en revanche, marqués de conflits internes et de mutations. L'expansion fulgurante du XVIe siècle fut, en effet, suivie par un siècle de décentralisation. La puissance des riches dignitaires et des seigneurs de guerre augmente sensiblement tandis que l'oba se voit peu à peu cantonné dans un rôle uniquement spirituel et non plus politique.

La culture edo a été très marquée par une expédition punitive organisée par les Britanniques le , qui a mené à la destitution d'Ovonramwen et le pillage et la destruction du palais royal. Près de 2 400 objets provenant du trésor royal de Bénin sont rapportés en Angleterre et vendus aux enchères.

Vie[modifier | modifier le code]

Plaque en laiton du XVIe siècle représentant l'entrée du palais de l'oba du Bénin. Photo prise au British Museum de Londres.

Dans sa jeunesse, l'oba est élevé par la reine mère dans un palais à quelques kilomètres de la capitale, loin des fracas de la cour.

Le statut de reine mère (iyoba) a été créé au tout début du XVIe siècle par Oba Esigie (en) pour sa mère Idia. Elle avait l'une des charges politiques les plus importantes du royaume. Comme tous les dignitaires de la cour, l'iyoba portait des perles de corail. Comme le prince héritier, l'iyoba jouissait d'un palais personnel, se trouvant à l'écart de celui de l'oba.

Parvenu à la tête de l'État, la vie de l'oba est surtout rythmée par les innombrables cérémonies et sacrifices rituels. Le reste de son temps est consacré à sa centaine d'épouses, alors que l'exercice quotidien du pouvoir dans les domaines militaire, économique ou agricole est délégué à des conseillers. Le pouvoir est organisé par un système complexe de titres transmissibles par succession et de titres acquis.

L'oba vit dans un immense palais en bois situé au centre de la ville. Les murs sont décorés de plaques de laiton sculptées.

La tradition raconte qu'au Bénin la coutume était de décapiter les rois vaincus. Leur tête était offerte à l'oba vainqueur qui la confiait aux artisans bronziers. Ceux-ci forgeaient alors deux répliques de la tête du roi vaincu : l'une conservée par l'oba et l'autre envoyée à la tribu du roi vaincu pour rappeler et asseoir la supériorité de l'oba.

Cour[modifier | modifier le code]

Statue d'Akenzua II.

Le palais était le centre géographique, mais aussi politique et spirituel du royaume edo. Ce palais abritait essentiellement le lieu de résidence de l'oba, des lieux de réception. On y trouvait également des autels dédiés aux ancêtres, des objets de rituels, précieux.

Seuls l'oba et l'iyoba pouvaient déposer des objets de bronze sur les autels ancestraux.

Liste des obas du Bénin[modifier | modifier le code]

La chronologie présentée suit la tradition orale. Celle-ci est cependant fortement remise en question par les historiens lors des réévaluations chronologiques, en particulier pour les règnes antérieurs au XIVe siècle[1].

Ovonramwen, l'Oba du Bénin, photographié par Green à bord du bateau du Protectorat de la côte du Niger SY Ivy, alors que l'Oba était en route pour l'exil en 1897.

Règnes antérieurs au XVe siècle[modifier | modifier le code]

Eweka I règne entre 1200 et 1235 depuis Ile Ibinu. Il est notable pour avoir fondé la dynastie des Obas du Bénin. Son fils cadet Uwuakhuahen lui succède et règne entre 1235 et 1243. Sa succession provoque un conflit interne avec son frère aîné et aboutit à la création du royaume d'Ugu (en). À sa mort, son frère cadet, Henmihen, lui succède puisque son frère aîné règne déjà sur Ugu. Il règne entre 1243 et 1255, mais les historiens ne relèvent rien de notable tandis que la tradition orale évoque un conflit matrimonial donnant naissance à un fils avec peu de légitimité. Jusqu'à la fin du règne d'Henmihen, les Obas sont particulièrement soumis aux actions et décisions de l'Uzama (faiseur de rois du Bénin)[1].

Au décès d'Henmihen, son fils faiblement légitime est le seul héritier et l'Uzama le choisit pour régner. Il prend le nom d'Ewedo et règne de 1255 à 1280. Dès le début de son règne, il fait déplacer le palais de l'Oba et provoque un conflit interne qu'il remporte lors de la bataille d'Ekiokpagha (en). Le statut de l'Oba gagne en légitimité et il opère de nombreuses réformes internes relatives aux fonctions administratives. À sa mort, son fils aîné Obuobu est engagé dans une guerre dans l'Igboland et l'Uzama désigne son fils cadet, Oguola pour lui succéder. Il règne entre 1280 et 1295 et concentre ses actions sur des améliorations militaires. Il ordonne la construction des premiers murs d'Edo, participe et remporte la bataille d'Urhezen contre le royaume d'Udo et contribue à l'expansion militaire du royaume du Bénin. Il établit un nouveau quartier au sein d'Edo et réinstaure une guilde consacrée à la fonte du laiton, contribuant à la production des premiers bronzes du Bénin[1].

Edoni lui succède et règne entre 1295 et 1299. Il est le fils aîné d'Oguola. Son règne ne laisse pratiquement aucune trace dans la tradition orale au point que son existence soit parfois omise. Les historiens remettent en doute l'ordre de succession et les liens généalogiques à cause de contradictions chronologiques importantes[1]. Il est réputé pour avoir profité de la gloire du titre et des plaisirs de la chair plutôt que des affaires royales[2].

Règnes précoloniaux depuis le XVe siècle[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c et d R. E. Bradbury, « Chronological Problems in the Study of Benin History », Journal of the Historical Society of Nigeria, vol. 1, no 4,‎ , p. 263–287 (ISSN 0018-2540, lire en ligne, consulté le )
  2. (en) Francis Ishola Ogunmodede, African Philosophy Down the Ages: 10,000 BC to the Present, Hope Publications, (ISBN 978-978-8080-11-4, lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (fr) Basil Davidson, Les royaumes africains, Time-Life, 1974.
  • (fr) Jean-Luc Martineau, Oba et constructions identitaires dans l'espace yoruba nigérian (début XXe siècle - 1962/66), Université Paris 7, 2004, 4 vol., 1 120 p. (thèse de doctorat en Lettres, Sciences sociales et humaines).
  • (en) Wole Ajose, « Oba Ovonramwen of Benin: a tragic casuality of European imperialism, », dans Essays in history (Lagos), no 4, , p. 90-94.
  • (en) Uku Akpolokpolo, « Omo N'Oba N'Edo, the Oba of Benin », dans Benin Series, Benin City, 1982, p. 1-13.
  • (en) Barbara Winston Blackmun, « Oba's portraits in Benin », dans African arts (Los Angeles), vol. 23 no 3, , p. 61-69 ; 102-104.
  • (en) Mary Cable, « Lord of the leopards : the Oba of Benin », dans African kings, Stonehenge Press, Chicago, 1983, p. 110-137.
  • (en) Coronation of Oba Erediauwa of Benin, Bendel Newspapers Corp., Benin City, 1979, 26 p.
  • (en) Ọsẹmwegie Ẹbọhọn, « The Oba's palace in Benin (Eguae Oba N'Edo) », dans Ivie : Nigerian journal of arts and culture, vol. 1 no 1, 1979, p. 44-48.
  • (en) Cathy Midwinter, « Kingdom of Benin timeline », dans Benin: an African kingdom, World Wide Fund for Nature, Godalming, Surrey, 1994 (frises chronologiques).
  • (en) L. Natalie Sandomirsky, « Benin, Empire : Oba Ewuare, trade with the Portuguese », dans Kevin Shillington (dir.), Encyclopedia of African history, vol. 1, Fitzroy Dearborn, New York, 2005, p. 133-135.

Liens externes[modifier | modifier le code]