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LES ACCORDS DE PAIX D’ADDIS ABABA (1972)

Les accords d’Addis Ababa ont été signé le 27 février 1972 entre la délégation du gouvernement soudanais du général Jaafar Nimeiry et celle du Mouvement de libération du Sud Soudan (MLSS). Ce traité de paix met fin à la première guerre civile soudanaise qui durait depuis 1955, ayant causé la mort d’un demi million de personnes, dont une majorité de civils, ainsi que l’exil de plusieurs centaines de milliers de Soudanais habitant les régions du Sud où les combats se concentraient. Cet accord emblématique ne suffit néanmoins pas à assurer une paix durable au Soudan qui replonge dans une guerre civile (seconde guerre civile soudanaise) en 1983.

  1. Chronologie de la première guerre civile soudanaise (1955-1972)
  2. Les échecs des négociations précédentes et les participants au traité de paix
  3. Les principales clauses du traité
  4. Réception et conséquences du traité
  • Mutinerie de Torit qui déclenche la première guerre civile soudanaise (1955)

A la veille de l’indépendance du Soudan sous colonisation anglo-égyptienne, les tensions entre le Nord du pays majoritairement arabe et musulman et le Sud nettement chrétien et animiste atteignent leur paroxysme et déclenchent une véritable guerre civile entre l’armée soudanaise et des groupes de rebelles armés luttant pout la sécession du Sud, ou du moins pour son autonomie. La marginalisation économique du Sud ainsi que sa marginalisation politique (peu de Soudanais des régions Sud dans l’administration) ont poussé des fractions armées à se rebeller contre le gouvernement central aux mains de l’intelligentsia du Nord qui a été progressivement intégré à l’administration du territoire par les colons dès le début des années 50. Pour préparer l’indépendance du pays et le départ des troupes britanniques et égyptiennes, le Premier ministre soudanais Ismail al Azhari, élu en 1953, organise une cérémonie à Khartoum en présence de l’armée soudanaise. Les troupes qui composent l’armée doivent alors se réunir à la capitale en août 1955, mais des rumeurs sur un soit-disant télégramme orchestrant le massacre de tous les soldats originaires du Sud du pays lors de leur arrivée à Khartoum (rumeurs probablement orchestrées par les Egyptiens qui cherchaient alors un soutien du Sud du Soudan contre le Nord qui refusait l’unité de la vallée du Nil), qui aurait émané du Premier ministre déclenchent les rébellions dans la région d’Équatoria (Sud-Est du pays). En effet, l’Equatoria Corps, une troupe composée de Soudanais des régions Sud créée par les Britanniques, refuse alors de participer à la cérémonie. Le régiment basé à Torit se rebelle le 18 août 1955, entrainant le soulèvement des troupes stationnées à Nzara et à Yambio (province d’Équatoria) également. Les mutins s’attaquent aux soldats originaires du Nord et stationnés dans le Sud, mais également aux fonctionnaires et aux marchands causant la mort de plus de deux cents civils. L’appel du retour au calme du dernier gouverneur général du Soudan du Sud, l’écossais Sir Knox Helm, est entendu par les mutins qui déposent les armes. Néanmoins, certains refusent et se cachent dans les forêts menant dans un premier temps une guérilla jusqu’en 1969, dans des mouvements sécessionnistes très souvent antagonistes ce qui a contribué à affaiblir les forces rebelles face à l’armée soudanaise.

  • De la guérilla à la guerre civile

Avec l’unification des mouvements de libération du Sud du Soudan grâce au général Joseph Lagu dans le mouvement Anyanya dont les membres étaient principalement des vétérans de la mutinerie de Torit, la guérilla se transforme en véritable guerre armée et structurée, impliquant même de nouveaux acteurs extérieurs. En effet, si d’un côté l’URSS et l’Egypte aident le gouvernement du général Ibrahim Abboud (prend le pouvoir par un coup d’état le 17 novembre 1958) en procurant des armes et tout le savoir faire soviétique, de l’autre côté Israel et son armée ont nettement participé à la consolidation du mouvement Anyanya en envoyant des armes de point également qui ont transité par l’Ouganda et l’Ethiopie principalement. Les exactions se poursuivent et s’intensifient dans les années 1960, des centaines de villages sont pillés et détruits par les deux protagonistes et le gouvernement de Abboud, marginalisé, est finalement renversé en 1964 à la suite de manifestations dans la capitale qui réunissaient des étudiants, des professeurs mais également des officiers subalternes dont Jaafar Nimeiry, et qui réclamaient la démission du gouvernement et le retour à la paix. En octobre 1964, la démission du général Abboud sonne la victoire du peuple soudanais et les espoirs de réconciliation entre le Nord et le Sud du pays. Le Front national uni, créé en 1961 par les partis du Nord qui s’opposaient au gouvernement en place, assure alors un régime de transition en vue d’organiser des élections. Néanmoins, malgré le calme apparent, des tueries ont lieu à Khartoum le 7 décembre 1964, déclenchés par des Méridionaux à la suite de nouvelles rumeurs sur l’assassinat du ministre de l’Intérieur, Clément Mboro, qui était originaire de la région de Bahr al Ghazal. Le gouvernement de transition a néanmoins apporté une période de relative paix malgré certains incidents, et a permis d’ouvrir les débats sur la forme que devrait adopter l’Etat soudanais. Les échecs des négociations ont toutefois mené à de nouveaux massacres dont un épisode marquant à Juba le 8 juillet 1965 ayant causé la mort d’environ deux mille personnes. Puis, le 15 mai 1969, le coup d’état du général Jaafar Nimeiry marque un véritable tournant dans la guerre civile. Pour résoudre le problème récurrent d’instabilité gouvernementale, le gouvernement de Nimeiry a décidé d’accorder la mise en place d’un gouvernement régional au Sud, avec pour but d’amener la paix en promettant aux combattants l’amnistie générale. Pour préparer le terrain de la réconciliation, le gouvernement décide également de créer un ministère des Affaires du Sud qui est géré par Abel Alier, vice-président originaire de la province du Nil supérieur qui fait partie de la délégation représentant le gouvernement soudanais lors de la signature des accords de 1972 à Addis Ababa.

En 1971, le mouvement Anyanya (qui devient le Mouvement de libération du Sud Soudan) qui a pris en charge l’administration des régions du Sud en nommant des civils à la tache, peaufine son organisation et prend de l’ampleur réunissant toujours plus de membres. Les nouvelles victoires des rebelles, tout comme les restrictions de l’aide militaire envoyée par Israel au Mouvement de libération du Sud Soudan transitant par l’Ouganda, du fait des nouveaux accords entre le nouveau gouvernement ougandais mené par le général Idi Amin Dada et le gouvernement de Nimeiry (le gouvernement soudanais a accueilli les exilés ougandais opposants au gouvernement d’Idi Amin dans un camp tenu par l’armée soudanaise donc contre un renvoie de ces exilés les Ougandais acceptaient de limiter les armes israéliennes transitant par leur pays), forcent le gouvernement et le MLSS a entamé rapidement les négociations de paix qui sont d’abord secrètes car il existait des réticences dans les deux camps.

Les échecs des négociations précédentes et les participants au traité de paix

Les échecs des négociations précédentes

Face à l’épuisement financier et humain des deux partis, les représentants du gouvernement soudanais ainsi que ceux du MLSS ont entrepris des discussions pour conclure la paix à Londres dès l’été 1970, en présence de médiateurs extérieurs tel que des représentants de l’organisation britannique Movement for Colonial Freedom. Ces négociations préliminaires, tenues secrètes, se heurtent aux attentes antagonistes des deux camps, avec d’une part la volonté de conserver l’unité du Soudan et de son administration chez les représentants du gouvernement soudanais, et d’autre part la volonté d’établir un Etat fédéral voire d’obtenir l’indépendance du Sud chez les représentants du MLSS. Malgré leur échec, ces discussions ont néanmoins permis d’établir un premier contact pacifié entre les figures principales des deux partis. Puis, dès l’année suivante à la suite de la visite de Khartoum par une délégation composée de représentants de la Conférence des Églises pour l'Afrique et du Conseil soudanais des Églises, de nouvelles négociations s’entament. Des rencontres préliminaires ont lieu en novembre 1971 entre les deux parties à Addis Ababa, mais les dispositions prises ne concernaient en réalité que les questions humanitaires, évacuant alors le fond politique à l’essence même de la guerre. L’évitement du problème réel peut s’expliquer par l’attachement des médiateurs au principe de non ingérence prôné par l’Organisation de l’Unité Africaine. C’est finalement en février 1972 que s’ouvrent les débats officiels qui mènent à la signature du traité de paix le 27 février après quatorze jours de négociations, et la paix est proclamée le 3 mars par le président Nimeiry à Khartoum. Le traité est ensuite ratifié par les deux partis à la fin du mois de mars, le 27 plus exactement, par le chef du MLSS Joseph Lagu ainsi que par le représentant du gouvernement soudanais et ministre des Affaires étrangères Mansour Khalid.

  • Les participants aux négociations et leur rôle

La délégation du gouvernement soudanais : Abel Alier le Vice président et ministre d’Etat des Affaires du Sud, Mansour Khalid le ministre des Affaires étrangères, Jaafar Mohammed Ali Bakheit le ministre du Gouvernement local, le général Mohammed al Baghir Ahmed ministre de l’Intérieur, Abel Rahman Abdallah le ministre du Service public et de la Réforme administrative, et enfin le brigadier Mirghani Suleiman ainsi que le colonel Kamal Abashar.

La délégation du MLSS et du gouvernement régional du Sud : Ezboni Mondiri Gwonza le chef de la Délégation, Lawrence Wol Wol le Secrétaire de la Délégation, Mading Garang le porte-parole de la Délégation, le colonel Frederick Brian Maggot le représentant militaire exceptionnel, ainsi que Oliver Batali Albino, Anelo Voga Morjan, et le révérend Paul Puot qui sont tous trois simples membres de la Délégation.

Tiers partis : Représentant du Conseil soudanais des Eglises : Samuel Athi Bwogo Représentants du Conseil mondial des Eglises : Leopolda J. Niilus et Kodwo E. Akrah Représentant de la Conférence des Eglises pour l’Afrique : le Secrétaire général Burgess Carr qui a présidé la rencontre. Représentant de l’empereur Haile Selassie : Nabiyelul Kifle, l’empereur éthiopien ayant refusé de présidé les négociations a décidé de se poser comme modérateur.

Le rôle de ces tiers partis est essentiel dans la résolution d’un tel conflit étant donné qu’il implique deux camps étant eux-mêmes sous-divisés, ce qui freine considérablement les possibilités de discussions et de négociations entre de potentiels représentants des deux camps impliqués dans la guerre civile. Le problème qui s’est néanmoins posé est celui de l’acceptation de médiateurs par d’une part le gouvernement soudanais du général Nimeiry et d’autre part les forces armées du MLSS menées par le général Lagu. En effet, le Conseil mondial des Eglises ainsi que la Conférence des Eglises pour l’Afrique pourraient s’avérer être des médiateurs partiaux et illégitimes aux yeux des négociants représentants le gouvernement soudanais si l’on s’en tient à l’épisode de l’expulsion des missionnaires du Sud en 1962 par le Missionary Societies Act, qui étaient accusés d’ingérence dans les affaires politiques intérieures du Soudan. Toutefois, les deux médiateurs ayant saisis les enjeux du conflit et leur rapprochement avec le président Nimeiry a permis de légitimer leur position.

# Les principales clauses du traité * Clauses politiques et militaires Les Accords de 1972 sont en fait une série de compromis pour aboutir à la paix. Le MLSS réclamait non pas l’indépendance mais la mise en place d’un système fédéral au Soudan, mais le gouvernement finira par accorder l’autonomie au Sud du pays. Le gouvernement du Sud dont la capitale est fixée à Juba, est désormais géré par une Assemblée régionale élue au suffrage universel ainsi que par un Haut Conseil exécutif dont le président gère les trois provinces du Sud que sont l’Equatoria, Bahr al Ghazal et le Nil supérieur (ces provinces conservent les frontières établies depuis 1956). Le président régional est néanmoins désigné et peut-être relevé de ses fonctions par le Président du Soudan, devant qui lui et tous les membres du HCE sont responsables (article 19), ce qui pose encore le problème d’ingérence du Nord dans les affaires du Sud. Le gouvernement autonome du Sud ne peut néanmoins pas légiférer dans les domaines d’importance capitale dont celui de la Défense, des Affaires étrangères, du Développement économique et social ainsi que celui de l’Immigration. L’Assemblée régionale ainsi que le Haut Conseil exécutif doivent donc se contenter d’exécuter et de mettre en place les mesures prises par le gouvernement central de Khartoum dans ces domaines là. Sur la question régalienne du prélèvement des impôts, l’Assemblée régionale peut prélever de nouvelles taxes sur la région du Sud, tout en assurant le prélèvement des impôts instaurés par le gouvernement soudanais sur l’ensemble du territoire. Le chapitre VIII des Accords d’Addis Ababa prévoient en matière militaire et ce après un arrêt des combats et un désarmement des rebelles armés, l’intégration de six mille soldats originaires des forces armées du Sud (du mouvement Anyanya) dans l’armée nationale.

  • Clauses économiques

Les accords prévoyaient aussi une aide financière du gouvernement au Sud pour la reconstruction des villes et villages qui ont été ravagé par la guerre, mais cette aide n’a pas vraiment été chiffré ce qui a plus tard posé des problèmes (M. Lavergne évoque un budget de sept millions de livres soudanaises pour un projet de développement entre 1973 et 1974). Une aide financière internationale à hauteur de 21 millions de dollars est également prévue : pour les réfugiés : afin de faciliter leur retour au Soudan dans le cadre du projet de rapatriement des exilés pour le gouvernement régional du Sud : afin de construire des infrastructures dans les zones dévastées par la guerre ou il reste très peu d’hôpitaux, peu d’écoles (taux d’analphabétisme qui atteint les 90%), peu ou pas d’usine de grande ampleur ou permettant de développer ces régions. Cette aide qui a pour but de développer économiquement le Sud a aussi pour objectif de permettre au gouvernement autonome du Sud de réintégrer les réfugiés de retour. Les aides accordées devaient pouvoir arriver directement dans les grandes villes du Sud donc notamment par Juba la capitale du gouvernement autonome sudiste, or on constate qu’il y avait des réticences concernant un acheminement direct qui ne transiterait pas par Khartoum de la part des Ansar et des Frères musulmans essentiellement.

  • Clauses socio-culturelles

L’article 6 du traité permet le rétablissement de l’anglais comme langue principale dans la région méridionale même si l’arabe reste la langue officielle nationale. Le traité octroie de plus la liberté de conscience, la liberté d’opinion religieuse ainsi que le droit d’exercer tout culte dans l’espace public tout comme dans l’espace privé.

# Réception et conséquences du traité * Mise en route et conséquences immédiates du traité Les Accords d’Addis Ababa de 1972, entérinés par la cérémonie organisée au siège de l’OUA qui donne un crédit et un poids aux négociations à l’échelle régionale et internationale, ont amené une courte période de paix et de transformations des relations Nord/Sud. Peu après la ratification du traité, le vice président originaire du Sud du Soudan Abel Alier a été nommé président du Haut Conseil exécutif, et le général Joseph Lagu, leader du MLSS a lui été promu au rang de général de la Division du Sud de l’armée nationale. En l’espace de quelques mois, les fonctionnaires septentrionaux ont laissé la place aux fonctionnaires méridionaux dans l’administration du gouvernement régional du Sud, et l’Ordonnance fixant un Gouvernement autonome dans le Sud a été intégré à la Constitution du Soudan. Malgré ces progrès significatifs, les principales clauses du traité et notamment en matière économique n’ont pas été appliqué. En effet, le budget que devait allouer le gouvernement soudanais au projet de développement économique du Sud n’a pas été respecté car sur les sept millions de livres soudanaises prévues par le traité de 1972 seuls 400 000 livres soudanaises ont réellement été versé à la Commission de développement régional de Juba, avec comme motif officiel du gouvernement central un manque de cadres et d’institutions économiques stables dans le Sud pour absorber les capitaux. De plus, la promesse de création d’emplois dans le Sud n’a pas été tenu, ce qui tend à expliquer qu’un grand nombre de maquisards de la guerre civile qui n’ont pas été réhabilité dans l’armée nationale et dans la société ont continué à s’organiser en milices. D’autres revendications surgissent notamment autour du projet de construction de l’Etat d’un canal à Jonglei pour drainer la région marécageuse afin d’alimenter le Nil, or les populations de la région de Jonglei souhaitaient d’abord que les secteurs agricoles et industriels soient développés en priorité (ex : projet d’ouvrir une usine de sucrerie à Melut abandonné). Dans ces conditions de stagnation économique et sociale, le projet de rapatriement des quelques 300 000 réfugiés soudanais ayant fuis la guerre n’a pas pu aboutir sur des situations stables et concrètes laissant alors des milliers de familles dans des positions extrêmement précaires (pas d’habitat, pas de soins, pas d’école, pas de travail). La fragilité du traité de 1972 se trouve également dans sa réception qui n’a pas fait l’unanimité parmi les Soudanais. En effet, ce sont d’abord des officiers de l’armée soudanaise qui ont manifesté leurs réticences car il s’avère que la guerre leur permettait de s’enrichir d’une part grâce aux avantages salariaux dont ils bénéficiaient et d’autre part car certains d’entre eux avaient profité de l’instabilité dans le Sud pour établir des réseaux de trafics très lucratifs (drogues, défenses d’éléphants, armes). Outre les Soudanais, le gouvernement égyptien allié du gouvernement de Khartoum craignait néanmoins dans ces accords une trop forte délocalisation du pouvoir qui ouvrirait la voie à l’indépendance du Soudan du Sud ce qui remettrait en cause les intérêts égyptiens dans le pays (économique avec l’eau du Nil et politique avec l’influence du panarabisme). Mais le véritable point de contentieux reste autour de la question de la gestion des puits de pétrole découverts dans la seconde moitié des années 70 dans les régions du Sud du Soudan. Le pétrole découvert par le gouvernement a été exploité par les Septentrionaux avec l’aide de multinationales étrangères dont Chevron et Total, lésant totalement les populations qui vivaient sur ces puits. Le gouvernement envisage alors de construire un oléoduc qui irait jusque la Mer Rouge pour exporter le pétrole plus facilement, et créer pour se faire la Compagnie Pétrolière du Nil Blanc (on voit d’après l’appellation que les Méridionaux seront exclus de la gestion car bien que les réserves se trouvent dans la province du Nil supérieur la compagnie porte le nom d’une autre province appartenant au Nord donc contrôlée par Khartoum). De plus, le gouvernement redécoupe le territoire en plusieurs provinces et ne respecte ainsi pas les clauses du traité de 1972 qui prévoyaient de revenir au découpage administratif de 1956. Or, la nouvelle carte du Soudan annexait dans la partie Nord une partie du Sud du pays qui se situe au Nord du Nil supérieur et du Bahr al Ghazal car ces zones sont riches en ressources minières (découverte du pétrole en 1978 dans cette zone). En réponse à ces manœuvres, le MLSS demande aux compagnies Chevron et Total de cesser leurs activités de prospection et d'extraction en décembre 1983, mais il aura fallu attendre l’attaque meurtrière menée par l’Armée Populaire de Libération du Soudan visant des installations appartenant aux compagnies Chevron et Total en 1984 pour que l’exploitation pétrolière ne cesse vraiment. On constate donc, dans le domaine du développement économique, que beaucoup de projets discutés lors des accords d’Addis Ababa sont restés sur le papier et la plus grande partie des fonds prévus n'est pas parvenue à la région autonome.

  • L’échec des accords d’Addis Ababa et les prémices de la seconde guerre civile

Pas plus que dans les domaines économique et politique, les engagements de 1972 n'ont été respecté dans les affaires militaires. Peu de Méridionaux ont été recruté dans l'armée soudanaise entre 1972 et 1982. Le nombre d'officiers venant de l'ex-rébellion a diminué par suite de départs en retraite et démissions mais également du fait des réticences de certains maquisards de rejoindre l’armée soudanaise. Les tensions étaient encore vives et ont mené à plusieurs mutineries dont une à Akobo où des ex-membres d’Anyanya ont tué des soldats de l’armée soudanaise. La politique secrète de réconciliation nationale menée par le président Jaafar al Nimeiry à partir de 1977 a également contribué à raviver les tensions. Nimeiry, marginalisé au sein du champ politique soudanais et qui a du faire face à une tentative de coup d’Etat des communistes en 1971, décide de se rapprocher des partis islamistes dont ceux des Frères musulmans et des Ansar. Pour sceller cette réconciliation, il nomme à des postes clés les dirigeants de ces partis politiques dont Hassan al Tourabi qui devient ministre de la Justice. De plus, en 1982 le gouvernement de Nimeiry signe une charte d’intégration économique, politique et militaire avec l’Egypte qui est en fait un pacte de défense car le retour à la guerre semble inévitable. Les tensions sont exacerbées lorsque le 5 juin 1983, le président Nimeiry décrète la création de trois régions distinctes dans le Sud (contre la volonté générale d’une union), ce qui, selon lui, ne constitue pas une négation des accords d'Addis Ababa mais, au contraire, une décision conforme à l'esprit de ces textes signés dans le seul but de ramener la paix, la sécurité et la stabilité du Sud. En réalité, la décision visait moins à améliorer la démocratie et à faciliter le développement du Sud qu'à l'affaiblir en brisant son unité. Cette division en plusieurs provinces a exacerbé les tensions entre les différents groupes socio-culturels : des milliers de personnes qui vivaient dans une région culturellement différente ont été expulsé contre leur gré.

Les tensions entre le gouvernement central et le Sud du Soudan atteignent alors leur paroxysme lorsque le président Nimeiry, encouragé par Hassan al Tourabi, bafoue la liberté de religion et de culte garantie par les Accords d’Addis Ababa en proclamant en septembre 1983 la loi islamique (chari’a) sur tout le territoire soudanais. Cette réforme marque un changement dans le statut des chrétiens et des animistes majoritaires du Sud qui se voient alors considérés comme des citoyens de seconde classe. Le point de non retour est alors atteint et l’échec des négociations de 1972 est flagrant. La seconde guerre civile éclate au Soudan la même année et ne se conclut qu’en 2005 par un nouvel accord de paix (Comprehensive Peace Agreement).